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Les Récits d'Adrien Zograffi tome 2 sur 4

Joseph Kessel (Préfacier, etc.)
EAN : 9782070728329
224 pages
Gallimard (13/01/1993)
3.8/5   33 notes
Résumé :
"Par cette nuit tombante du début d'avril le hameau de Baldovinesti, situé à environ cinq kilomètres de Braïla, fêtait le premier jour de la résurrection du Christ. Dans toutes leurs cours, les paysans allumaient des moyettes de roseau sec ; partout les joyeux coups de fusil retentissaient, hommages rustiques orthodoxes rendus à la mémoire de celui qui fut le meilleur des hommes.
Dans la chaumière de l'oncle Dimi - le cadet de la famille - , la mère Zoïtza - ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Appréhension d'Adrien, rentré en Roumanie après un voyage de deux années en Asie Mineure, de revoir Oncle Anghel, mourant sur lequel le destin s'est tellement acharné et qui pourtant reste serein, détaché de son corps pourri au profit de l'esprit.
Arrive Jérémie élevé par Cosma au sein de sa bande de brigands, du grand burlesque à la Kusturika et derrière tout ça un questionnement sur le sens de la vie:

» Mais je pardonne à Cosma ce que je me pardonne moins à moi, pas du tout à toi. Cosma n'avait pas de cerveau ; moi, j'ai eu la moitié d'un ; toi, tu savais à vingt ans ce que nous ne savions pas à cinquante : tu savais que les plaisirs nous font croire qu'ils sont toute la vie, qu'en dehors d'eux il n'y a rien, et c'est le contraire qui est vrai. Ce contraire je l'ai su trop tard… Cosma, lui, ne l'a jamais su.
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« Oncle Anghel » est, semble-t-il, le deuxième livre d'une série de quatre, publiés sous le titre « Les Récits d'Adrien Zograffi ». Je voulais lire le premier, « Kyra Kyralina », que l'on m'avait vanté, l'étal du bouquiniste du vendredi m'a proposé « Oncle Anghel ». Allons-y pour « Oncle Anghel » !

Ne serait-ce que pour la préface de Georges Kessel, qui a été très proche d'Istrati, et qui le raconte avec sa verve et son panache habituels, l'arrêt devant l'étal du bouquiniste était une bonne idée.

L'oncle Anghel qui était un homme honnête, généreux, travailleur, aimant sa femme et ses enfants, mais aussi bon vivant et d'un heureux caractère, a été poursuivi par un destin cruel qui lui a tout fait perdre, y compris ses trois enfants. Il se suicide à petit feu, verre d'alcool après verre d'alcool. Mais il garde des idées très claires sur le non-sens de sa vie, sur le non-sens de ce que le prêtre lui raconte. A cette époque-là (entre 19ème et 20ème), en ce lieu-là, (village rural de Roumanie), il scandalise par ses déclarations iconoclastes, au cours d'un repas de Noël.

Quelques années plus tard, mourant, il convoque son neveu – le narrateur du livre - à son chevet. Par l'exemple de sa déchéance physique, mais aussi de sa lucidité intacte, il veut convaincre son neveu de l'importance à accorder à l'essentiel, à la réflexion, à l'étude, à la sagesse. Mais le neveu peine à accepter les dires d'Oncle Anghel, et c'est Jérémie, le fils de Cosma, qui va prendre la relève, quand Oncle Anghel aura expiré. Jérémie va conter son histoire, celle de Cosma et du frère de Cosma, Elie. Vie d'aventures, de brigandages, de bagarres, de vaches maigres et d'excès de toutes sortes. Picaresque. Cosma, à lui tout seul, est un personnage énorme, sans mesure, sans pitié. Il n'a qu'une faiblesse : les femmes, et quand il tombe amoureux, c'est énorme et sans mesure. Eternel. Mais des éternités d'une semaine…

Ce livre est une sorte de conte, mais pas seulement. L'histoire, les histoires se déroulent dans une Roumanie féodale où il existe encore des seigneurs – les archontes, mot étrange – avec petites armées à leur service exclusif, courtisans, serfs… Une Roumanie rurale pleine de traditions religieuses, superstitieuses, culinaires (et alcooliques) que l'auteur situe très précisément dans la région de la confluence du Siret avec le Danube. Roumanie de la mémoire de Panaït Istrati qui donne un véritable document sur la société qu'il a connue, avec une écriture colorée, sensuelle, parfois violente, souvent élégiaque. A l'évidence, Istrati aimait son pays, et il m'a fait aimer ce qu'il en montre.

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J'éprouve une grande tendresse pour Istrati pour son empathie pour les marginaux, les paysans, les errants, pour son amitié avec deux écrivains que je vénère : Romain Rolland et Kazantzaki.
Oncle Anghel, c'est un peu Job dans la Roumanie du début du 20ème siècle, un homme arrivé à la richesse (relative c'est un aubergiste) et à la considération de tous, qui perd tout . Sauf que Job gardait une foi indestructible, et pas Anghel qui se révolte, enterre ses icônes et boit son fond de commerce.
L'histoire d'Anghel est suivie de l'histoire de Cosma, le bandit dans le delta du Danube. j'ai beaucoup aimé les aventures de ces hommes libres vivant dans la nature. irréductibles.
Mais mon préféré sera toujours les chardon du Baragan
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Istrati fait un portrait très vivant de ces hors-la-loi à la Robin des Bois, hommes qui passent très (trop) facilement de la violence aux sentiments, et associent à leurs activités de contrebande une prédilection pour se débarrasser des puissants étrangers qui exercent leur pouvoir du confort de leurs villas. La langue aussi est très vivante, que ce soit pour décrire la vie des cours d'eau au clair de la lune ou pour dépeindre la vie des paysans, bergers, nobles et contrebandiers qui peuplent la campagne roumaine. C'est peut-être parce que, dans Oncle Anghel, Istrati fait moins voyager ses héros et s'attache plus à détailler leur environnement que j'ai préféré celui-ci à Kyra Kyralina.
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Cet oncle Anghel est fâché à peu près avec tout le monde depuis qu'il estime avoir gâché sa vie. Mauvais mariage avec une très belle femme, morte depuis, qui lui a donné deux beaux enfants, morts depuis. Il s'est retiré du monde des vivants, vit en ermite, patibulaire et aigri.

Sa demeure, sorte de maison du bonheur, a brûlé. Mais Anghel fut aussi victime de bandits, de voleurs, de malfaisants, fut physiquement attaqué. Il sait qu'il va bientôt mourir, mais avant de passer l'arme à gauche, il veut s'entretenir avec son neveu Adrien afin de lui conter sa vie, celle d'Anghel, mais aussi celle du propre neveu, celui qui lui sert son alcool, son poison, au moindre coup de sifflet. Anghel a souffert, a connu la déchéance : « Ce qu'on aurait pu considérer comme la délivrance pour lui, la mort, ne vint point, et personne n'a su pourquoi cet homme ne s'était pas tué. Il ne se tua point. Mais il mourut tous les jours, en absorbant sans cesse de petits verres de son eau-de-vie la plus forte. Il devint son meilleur client ». Au dernier souffle de vie arrive Jérémie, fils plus ou moins naturel de Cosma. Lui aussi en a gros sur la patate et a besoin de se délester, de se raconter…

Un monde de vagabonds, de sans grades, de petites gens, d'errants aux costumes miteux, tel est celui d'ISTRATI, il prend forme en Roumanie, le récit oscillant entre roman et conte savoureux aux nombreuses péripéties. Deux des thèmes principaux en sont la croyance (les croyances plutôt) et le reniement absolu de la famille, ce qui en fait un roman à la fois picaresque mais sérieux sur le fond.

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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
C’était en 1924, vers la fin de l’année… Entre la place Blanche et la place Pigalle… Deux hommes allaient de l’une à l’autre sans en avoir véritablement conscience. Ils parlaient en même temps et avec une ardeur telle qu’ils étaient comme aveugles et sourds au mouvement des flâneurs, clochards, fêtards, truands et filles de Montmartre, marée de l’heure indécise où l’ombre balance et la clarté hésite.
Ils s’arrêtèrent brusquement entre l’enseigne d’un cabaret tenu par un homosexuel célèbre et d’énormes bocaux rouges qui, à la devanture d’une pharmacie, rutilaient sous les feux électriques. Et le plus âgé qui avait la face longue et creuse d’un loup affamé, cria :
- Nous sommes du même chemin !
- De la même étoile ! cria le plus jeune.
- Alors… dit le premier.
Il sortit un couteau de sa veste, en fit surgir la lame, entailla son poignet gauche, saisit la main de son compagnon, l’incisa au même endroit et l’appliqua sur la sienne de manière à joindre les lèvres des deux coupures. Et d’une voix qu’un accent étranger faisait vive et chantante, il dit :
- Chez nous, quand deux vagabonds se reconnaissent pour frères, ils le signent de leur sang.
Personne, aux alentours, ne s’émut, ne s’étonna. Dans les aubes de Montmartre on était habitué à des saignées plus dangereuses.
L’homme au couteau était Panaït Israti. Il replia la lame, noua un mouchoir autour de son estafilade, mit cette main sur mon épaule et nous reprîmes notre promenade bienheureuse.
Il y avait une semaine, au plus, que nous nous connaissions.

(Préface de Georges Kessel)
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« - Vous savez, nous disait-elle, que Dieu ne fut pas seul le jour de la création de l’homme, et que l’Impur y était présent… Il se mêlait à tout, voulait être partout, et agaçait constamment, dans son œuvre, le Tout-Puissant, qui se défendait de son mieux. Regardant la blancheur éblouissante de la pâte divine que le Seigneur était en train de pétrir pour y créer l’être humain – l’œuvre qu’il voulait parfaite entre toutes – l’Impur eut une envie irrésistible de la salir. Mais le Créateur y faisait grande attention. Alors, trompant la bonne foi du Maître, le Méchant lui posa rapidement cette question, en même temps qu’il lui montrait le soleil se cachant derrière un nuage : « Pourquoi, ô toi, qui es si intelligent, as-tu rendu ce faible nuage capable de supprimer l’éclat d’un astre si puissant, et d’obscurcir la terre, en la plongeant dans la tristesse ?
- C’est, répliqua le Créateur, pour que toutes les choses terrestres soient vues dans les lumières différentes ; que l’homme n’ait aucune certitude et qu’il doute de tout, sauf de ma présence. » Le Démon écouta et fit semblant de rester confus, mais pendant ce temps il réussit à toucher de sa queue la pâte divine qui devint aussitôt grise. Le Seigneur le remarqua et en fut étonné. « Pourquoi t’étonnes-tu, ricana le Malin ; la pâte est grise parce que la lumière a changé ! » Dieu se sentit attrapé et, par orgueil, voulut être logique. Il mit la pâte dans le moule, lui donna la forme de l’homme, souffla dessus et mit Adam debout… Mais, hélas, l’impureté y était aussi ! Elle fait partie de nous, et voilà… »
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En dehors de ce petit bois esclave, et lui donnant le tour, l’épouvantable mur, haut de quinze pieds, promenait sa masse infranchissable comme un défi de brute. Pas un oiseau autre que des corbeaux et des moineaux. Le vent – ce vertigineux voyageur parlant aux hommes libres en toutes les langues de la terre – ne daignait pas descendre dans cette fosse de malheur ; il s’entretenait avec les seuls faîtes des peupliers, et encore pour les plaindre.
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Mais Elie est mon ange-gardien que je n’écoute jamais. Et il me suit toujours, malgré lui. Cela doit venir du fait que notre père le bouc s’était mis en tête, le jour de notre conception, de féconder son harem rien qu’avec le germe de la folie, de toutes les folies, et c’est ainsi qu’il eut : moi, Cosma, ou la folie érotique ; Elie, ou la folie raisonnable ; notre sœur, Kyra, ou la folie coquette ; et, enfin, notre frère cadet, qui eut la folie pure et se pendit, ne sachant probablement quoi faire de sa vie.
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Parfois Adrien s’étonnait de cette manière de vivre :
- Tu couches dans le grenier, et ta femme avec les enfants : c’est pas une vie !...
- Faut bien, mon brave ; autrement, deh, comment te le dire ? Les enfants viennent trop vite…
- En voilà une explication ! Et quand tu descends du grenier ?
- Alors je vais au marais, couper du roseau…
- Et quand tu viens du marais ?
- Alors je monte au grenier…
- Et tes enfants, d’où viennent-ils ?
- C’est Dieu qui les envoie…
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