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EAN : 9782823611168
192 pages
Editions de l'Olivier (02/03/2017)
3.61/5   9 notes
Résumé :
" ... alors que pardon, ironise-t-elle, mais vivre en autogestion et en dissidence, je n'ai pas l'impression que c'est ce qu'ils viennent chercher chez nous, les réfugiés. Ils ne comprennent pas pourquoi c'est si mal organisé ici mais en attendant mieux ils supportent, ils ne sont plus obligés de dormir dans la rue, ils ont moins faim... Et personne, ni les bénévoles naïfs qui débarquent dans ce bazar, ni les premiers intéressés, personne n'y comprend rien. "
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Sous couvert du pseudonyme Hannah, en hommage à Hannah Arendt, Juliette Kahane, raconte une saison au lycée Jean-Quarré, transformé en refuge pour des centaines d'exilés à l'été 2015.
Un livre qui se lit comme le journal de bord d'une bénévole curieuse, observatrice, participante qui décrit la réalité de cette maison de réfugiés, de ce bordel férocement joyeux et brutal, organisé autour de Mino, la despote des cuisines.
Les exilés Afghans, Soudanais, Erythréens, Tunisiens ..., comme les bénévoles, les membres des associations de solidarité doivent composer avec la nature mouvante de cette microsociété sans drapeau, aux langues mélangées, qui héberge les rancoeurs et le mépris des ethnies majoritaires envers les minoritaires, et devient le lieu de violences verbales, physiques.

« Au lycée on côtoyait la peur, la colère, l'idéalisme, la générosité, l'humour, la truanderie, la tristesse, l'espoir - mais jamais l'indifférence qui est l'ordinaire de la vie parisienne. »

C'est toute une vie qui se réinvente ... dans le chaos. Un chaos qui pousse les bénévoles à vérifier continuellement leurs raisons d'être là. « le bateau ivre s'enfonce dans l'obscurité. »

C'est franc, c'est précis, net, sans ambages, sans histoires édulcorées, c'est brut, c'est la réalité éprouvée, éprouvante. Pas de parti pris.
Au bout, peut-être, l'espoir d'une politique bienveillante.
Sujet brûlant, sujet intéressant. Et une belle réflexion sur ce qu'est l'engagement et les différentes formes qu'il peut prendre.

« Nous avons perdu notre foyer, c'est-à-dire la familiarité de notre vie quotidienne. Nous avons perdu notre profession, c'est-à-dire l'assurance d'être de quelque utilité en ce monde. Nous avons perdu notre langue maternelle, c'est-à-dire nos réactions naturelles, la simplicité des gestes et l'expression spontanée de nos sentiments. » Hannah Arendt, Nous autres réfugiés - citée en exergue

Lien : https://seriallectrice.blogs..
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Hannah (en réalité Juliette Kahane elle-même) habite à quelques pas d'un lycée désaffecté du 19ème arrondissement où sont rassemblés des centaines de réfugiés.
Sous l'instigation d'une amie, elle s'y rend, et finalement va les côtoyer pendant plusieurs semaines en tentant de se rendre utile.
Roman autobiographique donc, où l'auteur ne porte pas de jugement de valeur. Elle aide, constate, décrit les migrants, les aidants.
D'un regard parfaitement lucide, elle dépeint les hommes et les femmes et nous fait partager son expérience.
Aucun parti pris, pas de misérabilisme, des faits réels. Elle sait être attentive mais ne ménage personne
Elle nous met au coeur de nombreux débats actuels sur le sujet, n'apporte pas de réponses, mais illustre parfaitement toutes les questions qui continuent de se poser.
Un ouvrage intéressant.
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Je viens de fermer ce livre dans mon appartement douillet.
Hannah va chaque jour apporter son soutien, aide dans un lieu parisien d'accueil de migrants.
Qui de nous ne se pose pas la question de la bonne posture devant celles et ceux qui échouent sous nos yeux, sur nos trottoirs, réfugiés des terres en feu ?
Juliette Kahane nous livre son expérience à travers l'héroïne. Elle nous parle aussi des bribes de réflexions sur les motivations, ou démotivations de chacun. Personne n'est jugé, toutes et tous sont dépeints brièvement et avec lumière. La beauté intérieure de l'héroïne vient de là. Pourtant le sujet est complexe... On croise les gauchos utopistes, les paranoïaques de droite qui ont peur de l'invasion, les islamistes intégristes opportunistes, les femmes résignées ou pas, les hommes prisonniers de leur culture ou pas... La vérité ? le bon point de vue ? Une aiguille dans une botte de paille...Je veux bien croire que le chemin le plus doux du vivre ensemble est celui de Hannah : lucidité, capacité à tenter de comprendre l'autre, ego en retrait mais solide, capacité à comprendre la réalité nécessaire du changement perpétuel, amour... Bravo Mme Kahane, et merci.
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Je ne sais pas si on peut dire de "Jours d'exil" que c'est un beau ou un bon livre, comme on parle généralement des livres que l'on a aimés. Il me semble que le terme qui convienne soit plutôt juste dans le sens "exact, pertinent". Sans emphase et sans faux semblant, il décrit les interrogations de l'auteure face à son désir d'intervenir pour aider à rendre le quotidien des réfugiés entassés au lycée Jean Quarré plus humain ; il n'édulcore pas non plus une réalité parfois violente, sale, belliqueuse. Et l'auteure conclut par cette phrase : "Au lycée, on côtoyait la peur, la colère, l'idéalisme, la générosité, l'humour, la truanderie, la tristesse, l'espoir - mais jamais l'indifférence qui est l'ordinaire de la vie parisienne". Je ne vis pas à Paris, mais la réalité est la même.
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Voici un livre qui me laisse une impression un peu mitigée. le sujet m'a beaucoup intéressée et je l'ai trouvé très bien traité. En effet, ce roman est juste et sincère. Il n'omet rien des sentiments contradictoires qui habitent Hannah, le personnage principal. Hannah venue apporter son aide aux personnes réfugiées dans un lycée, tout d'abord poussée par une amie puis finissant par réellement s'engager. Sentiments contradictoires car Hannah est d'une objectivité sans faille, nous livrant le forces et les faiblesses des bénévoles venant en aide aux réfugiés mais également aux réfugiés eux-mêmes. Par le biais du personnage d'Hannah, l'auteur nous parle des contradictions de l'engagement, des différentes manières de s'engager. Elle nous parle de ces personnes, si nombreuses, entassées dans un lycée après avoir quitté leur "chez eux", d'une cohabitation forcée et parfois difficile, du changement de l'opinion française sur le sujet après les attentats. Il y a beaucoup de justesse et de vérité dans ce livre. C'est un livre fort, un livre sur l'engagement, qui n'épargne rien ni personne. Un livre franc et sincère et par cela même, important. Un livre qui interpelle et donne à réfléchir.

Malheureusement, j'ai eu un peu de mal avec l'écriture. Si cela n'enlève rien à la qualité du livre et à l'importance d'écrire sur le sujet, j'avoue avoir un peu peiné à le lire, butant sur la manière dont il a été écrit. Je le recommande néanmoins jugeant sa lecture nécessaire.
Lien : http://tantquilyauradeslivre..
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critiques presse (2)
LeMonde
21 avril 2017
La narratrice de « Jours d’exil » apporte son soutien aux réfugiés installés dans un lieu d’accueil parisien. Entre compassion et distanciation, un livre d’une grande justesse.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Telerama
05 avril 2017
A l'été 2015, des centaines d'exilés trouvaient refuge dans un lycée parisien. Avec une rare humanité, Juliette Kahane raconte ces vies en suspens.
Lire la critique sur le site : Telerama
Citations et extraits (20) Voir plus Ajouter une citation
le 13 novembre 2015, trois commandos de la guerre djihadiste tuèrent cent trente fois et firent plus de quatre cents blessés dans les rues de Paris. On comprit très vite que cette fois, état d'urgence obligeant, il n'y aurait pas de grande marche contre la barbarie comme après les attentats de janvier. Et on sut très vite aussi que cette nuit sanglante modifierait en profondeur le regard porté sur les réfugiés. Ce que la photo d'un petit garçon noyé avait suscité d'élan en leur faveur fut en partie détruit par deux faux passeports syriens appartenant aux terroristes, laissant supposer qu'ils s'étaient faufilés dans le flot de réfugiés pour entrer en Europe. Dans les semaines qui suivirent, les migrants récemment arrivés, qui avaient commencé à reformer des campements sauvages place de la République ou à Barbès, devinrent presque invisibles. Nous avons continué, Félix et moi, à héberger de temps à autre un ou deux jeunes isolés. Puis Louise est rentrée avec un nouveau fiancé, et s'est réinstallée avec lui dans sa chambre.
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Plus tard, frissonnant sous le pâle soleil, pianotais quelques notes sur mon téléphone quand un jeune homme coiffé de courtes dreadlocks est venu s'asseoir à côté de moi. Il s'est pesamment appuyé au dossier du banc rouge, bras croisés sur la poitrine, mains serrées sous les aisselles. Je le connaissais de vue sans plus - d'ailleurs il ne me semblait pas l'avoir jamais aperçu au petit déjeuner. Il faisait une tête si lugubre qu'au bout d'un moment je me suis décidée à lui parler.
Are you OK? demandai-je.
Ça va. J'attends des mecs pour les aider à remplir leur dossier Ofpra.
À peine une trace d'accent dans sa voix réservée, relevant certains mots - mecs, Ofpra.
Au temps pour moi, souris-je. Je vous avais pris pour un réfugié.
Oh mais je suis un réfugié, me rétorque-t-il avec un soupçon d'ironie.
Devant nous passait dans sa poussette un bébé majestueux, à triple menton et front gigantesque, qui contemplait avec un tel dédain le spectacle de la cour que nous nous mettons à rire au même instant. Ayant ainsi fait connaissance, nous échangeons quelques pronostics sur la date de l'évacuation, ardemment souhaitée par tous maintenant, à part peut-être quelques illuminés parlant encore de s'y opposer, mais dans des termes si vagues qu'ils ne paraissent pas y croire eux-mêmes et quand on leur demande comment ils comptent s'y prendre pour résister, ils vous regardent d'un œil hostile sans répondre. Puis le jeune homme m'explique qu'il est à Paris depuis deux ans et demi. Étudiant en informatique à Khartoum, arrêté pour cyberactivisme et accusé d'apostasie, il avait réussi à s'enfuir avant le procès. Depuis qu'il est à Paris, il suit des cours de philosophie à la Sorbonne.
Du coin de l'œil je regarde son visage sombre tourné vers le préau, la bouche aux commissures tombantes. De la poche de son blouson dépasse Une saison en enfer.
Je commence à comprendre comment c'est, la France, dit-il. Parfois j'arrive même à comprendre les blagues, on dit que c'est un signe - mais franchement je m'habitue pas. Un ballon gifle ses tibias, provenant d'un petit groupe de footballeurs.
Je ne suis pas courageux, ajoute-t-il en le réexpédiant machinalement. J'ai peur de la prison. J'ai peur des coups. Quand le bateau a chaviré, j'ai cru que je mourais de peur. Et maintenant ce sera encore plus dur.
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Les vrais gens déters
Et puis cette fascination pour le malheur des autres, ça me fait vomir. Parce que les autres c'est toi, comme te l'a appris Jésus. Un toi qui n'a pas eu de chance alors que toi t'en as, de la chance.
Je regarde Ray, ses bottines de cuir fauve calées sur la table basse à côté des restes, de la théière en forme de pivoine. Je me repais l'œil de la laine beige très souple de son pantalon, du bleu de Chine délavé de sa veste archi-rapiécée.
Le vrai truc c'est que ça les fait jouir, les volunteers. Le malheur des exilés, quoi de mieux pour sentir son cœur saigner d'amour et de pitié? Je l'écoute. Elle a raison. Moi aussi j'ai du mal à les supporter, les compassionnels, les charitables.
Juste, dis-je. On ne prend pas les réfugiés pour des irresponsables. Du coup on leur demande aussi s'ils sont d'accord avec certaines choses, non? Une femme égale un homme. On a le droit de croire à ce qu'on veut, ou à rien du tout.
Attention piège, clignotent les yeux de Ray. Elle se hérisse. Est-ce qu'on nous la demande, à nous, cette profession de foi ? Elle s'énerve, mais je sens qu'elle est comme moi, elle est comme tout le monde, elle tâtonne. De temps en temps elle agite un vieux drapeau noir, de manière aléatoire, ou un vieux fanal rouge qui n'éclaire plus rien.
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Cependant, hasard ou intuition pas complètement invraisemblable - de loin en loin émerge, du trouble marigot stagnant tout au fond de Félix, un être étrange et instinctif, une créature hybride qui malmène quelque peu son personnage d'universitaire pondéré -, hasard ou intuition donc, pendant que nous préparions le dîner il a mis un disque de Woody Guthrie, celui des ballades du dust bowl inspirées aux hoboes par la misère et la faim. Comme Félix sifflotait en remuant la sauce des spaghettis, hochant en rythme sa tête de faune grisonnant, je lui fis remarquer que les vagabonds, il les aimait beaucoup dans les vieilles complaintes folk - In the Big Rock Candy Mountains the cops have wooden legs, nasillait Woody - mais quand ils sont là, à ta porte, c'est une autre histoire - Oh the buzzing of the bees in the cigarette trees... Sachant que Félix a tout abandonné de sa jeunesse révolutionnaire à part la conviction de détenir la vérité et de devoir en faire bénéficier les autres, j'aurais mieux fait de me mordre la langue, ou d'avaler de travers mon verre de graves. Une âpre discussion s'ensuivit, de plus en plus hargneuse et alcoolisée. On n'est plus au temps des boat people, disait Félix qui, avec d'autres gauchistes repentis, s'était démené pour les Vietnamiens fuyant le régime communiste, dans les années qui avaient suivi la chute de Saigon. Comment ? m'étonnais-je. Ceux qui traversent la Méditerranée ne sont pas des people qui s'enfuient sur des boats ? [...] lorsque je l'inter- rompis pour remarquer que si les Vietnamiens avaient été musulmans ou noirs, ou les deux, ils n'auraient peut-être pas été accueillis de la même façon, cela déclencha une de ces éruptions de fureur que je n'arrive jamais à prévoir, d'autant plus violentes sans doute qu'elles sont extrêmement rares.
Comment tu fais pour te croire toujours plus maligne que tout le monde, fulmina-t-il à un moment, alors que tu ne comprends rien aux enjeux géopolitiques ? Ce que je sais, lui rétorquai-je, c'est que si tu étais sûr de toi ça ne te gênerait pas autant qu'on ait un avis différent du tien.
Nous finîmes, divagants et tordus d'amertume, par nous replier chacun à un bout de la maison, le plus loin possible de l'autre.
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Le lycée est un grand marché de troc où l'on cherche tous quelque chose. Les exilés un toit, un matelas ou un morceau de matelas pour dormir, quelques jours de répit, un endroit où, parce qu'on est regroupés, on cesse d'être invisibles. Les militants un terrain de lutte, les flics des renseignements, les soutiens, activistes et autres bénévoles une occasion d'agir, de se montrer amicaux, d'« aider », avec l'infinie variété de nuances correspondant au tempérament et aux convictions de chacun à un moment donné. Sans compter le flot des donateurs qui ne tarit pas, les truands, les proxénètes et pédophiles à la recherche d'un nouveau terrain de chasse, les ravis qui viennent proposer aux migrants une initiation à la méditation tantrique, les associations caritatives religieuses ou non, les fanfares, la compagnie lyrique venue chanter Purcell, Didon et Énée, dans la cour... Chacun entre et sort, à la recherche d'autres humains.
Everybody's looking for Something, c'était aussi ce que rugis- sait la fantastique voix d'Annie Lennox pendant l'interminable et minable nuit des années 80 - Some of them want to use you ! Some of them want to get used by you - on dansait sur ce genre de paroles jusqu'au matin avec l'énergie d'un désespoir pas complètement factice, entrecoupé de sommes sur des canapés aspergés de bière et troués de brûlures de cigarette - Sweet dreams are made of this ! Who am I to disagree -, en s'empiffant n'importe quelle came pour amortir la retombée dans la vie ordinaire, après le crash de Wonderland-of- sixty-eight.
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Videos de Juliette Kahane (3) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Juliette Kahane
Juliette Kahane - Une fille .Juliette Kahane vous présente son ouvrage "Une fille" aux éditions de l'Olivier. Rentrée littéraire janvier 2015. http://www.mollat.com/livres/kahane-juliette-une-fille-9782823605327.html Notes de Musique : ?The Father, The Son, and The Harold Rubin? (by Ehran Elisha, Harold Rubin and Haim Elisha). Free Music Archive.
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