Maupassant reprend le flambeau de la nouvelle au XIXème siècle, en digne successeur
De Balzac (eh ! oui,
Balzac est aussi un grand nouvelliste, voir par exemple le livre de nouvelles publié chez GF, où je vous conseille notamment "
La Messe de L'Athée ", bien que cette partie de son oeuvre soit souvent mésestimée).
À l'image de ce qu'il a été pour
Zola, l'influence
De Balzac semble indéniable également chez
Guy de Maupassant, du moins pour le côté corrosif et désabusé, et n'oublions pas qu'il utilisait très fréquemment le surnom de " Maufrigneuse ", l'un des personnages créés par l'auteur de la comédie humaine, clin d'oeil à peine masqué donc au grand génie de la première moitié du XIXème siècle.
Néanmoins,
Guy de Maupassant va y apporter une dimension supplémentaire et y imprimer sa patte de façon irréversible. À l'exception notable de
Mérimée, l'art de la nouvelle est encore considéré au XIXème comme un sous produit du roman, un format pratique pour les auteurs momentanément désargentés et qui convient bien aux journaux et revues.
Maupassant, sans réellement s'ériger contre ce système rentable et à rotation rapide, va créer une sorte de nouveau canon pour le genre.
Premièrement de par le style, en fervent élève de la Bruyère, celui-ci est limpide, enlevé, tout en étant accessible et populaire.
Ensuite par la forme, la structure très construite et ne laissant pas grand chose au hasard.
Et enfin, par le nombre impressionnant (plus de trois cents) de ses contributions au patrimoine littéraire français.
Après lui, on ne pourra jamais plus écrire des nouvelles comme si de rien n'était. On en fait un "spécialiste", alors qu'il semble que
Maupassant se percevait surtout comme un écrivain romancier.
L'édition de la Pléiade, concernant les
contes et nouvellesDe Maupassant, présente de nombreuses qualités que certains pourraient considérer comme son inconvénient: énorme, exhaustive, monumentale.
Outre les recueils en eux-mêmes, vous aurez donc accès à toutes les nouvelles qui ne figurent pas dans les recueils (mais qui ne sont pas forcément les meilleures, à l'exception de quelques unes dont " Alexandre " ou " L'Endormeuse " par exemple).
N'espérez pas vous en sortir en achetant un seul des 2 volumes Pléiade "
contes et nouvelles " car vu qu'elles sont classées par ordre chronologique de première parution, vous risquez fort de n'avoir qu'un bout de tel ou tel recueil, la suite étant dans l'autre tome (ainsi les recueils "
La maison Tellier ", "
Clair de lune ", "
Miss Harriet ", " Les soeurs Rondoli ", "
Contes du jour et de la nuit ", "
Toine ", " Monsieur Parent " et " le rosier de Madame Husson " sont à cheval sur les 2 tomes).
Pour le reste, rien à redire, belle édition, commentaires de
Louis Forestier ni trop ni trop peu présents et les textes
De Maupassant sont eux aussi, évidemment à la hauteur.
L'ensemble peut constituer un beau cadeau pour les amateurs, néanmoins, ayant tendance à trouver les contes normands légèrement au-dessus des autres (jugement tout personnel, à mon avis,
Maupassant est le
Pagnol normand, et en sa qualité de régionaliste, lorsqu'il parle de sa région s'est toujours un ton plus savoureux que quand il se fait l'interprète d'autres réalités régionales), je me permets de vous conseiller une très belle collection chez La Pochothèque, et bien évidemment le volume intitulé " Contes normands ".
Pour le contenu lui-même, j'ai apporté des commentaires plus spécifiques pour l'essentiel des recueils auxquels vous pouvez vous reporter. J'en terminerai simplement en vous livrant recueil par recueil (hormis la lumineuse et hors catégorie "Boule de suif") celles qui m'ont particulièrement séduites :
Dans
La Maison Tellier :
Histoire d'une fille de ferme, En famille, le papa de Simon, Une partie de campagne & bien sûr,
La maison Tellier.
Dans
Mademoiselle Fifi : Madame Baptiste, A cheval, Deux amis &
Mademoiselle Fifi.
Dans
Contes de la bécasse : Pierrot, La rempailleuse, En mer, Un Normand, Aux champs & Saint-An
toine.
Dans
Clair de lune : L'enfant, La reine Hortense, le pardon, Les bijoux & Moiron.
Dans
Miss Harriet : L'âne, La ficelle, Mon oncle Jules, La mère sauvage &
Miss Harriet.
Dans Les soeurs Rondoli : le petit fût, Mon oncle Sosthène & le parapluie.
Dans
Yvette : le retour, Mohammed-fripouille &
Yvette.
Dans
Contes du jour et de la nuit : le père,
La parure, le vieux, L'ivrogne & le gueux.
Dans
Toine : La dot, le lit 29, Bombard, le père Mongilet, Nos anglais, La confession & bien sûr
Toine.
Dans Monsieur Parent : La bête à Maît' Belhomme, le baptême, Tribunaux rustique & Petit soldat.
Dans
La petite Roque : Mademoiselle Perle, le père Amable &
La petite Roque.
Dans
le Horla : Amour, le Diable, le Vagabond &
le Horla.
Dans le rosier de Madame Husson : Une vente, L'assassin & La Martine.
Dans
La main gauche : Hautot père et fils, Boitelle, le lapin, Duchoux & La morte.
Dans
L'inutile beauté : le noyé.
Dans le père Milon : La veillée, le père Milon & L'orphelin.
Dans le colporteur : Jadis, La serre, Fini & Après.