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EAN : 9782246227427
274 pages
Grasset (20/03/1996)
3.61/5   23 notes
Résumé :
Orphelin de mère, Jacques est un enfant malingre, un rêveur solitaire pétri de catholicisme. Sa cousine Camille, délurée, d'un an sa cadette, le fascine et l'effraie. Bientôt, il l'aimera... Il la désire, il la divinise, mais qu'aime-t-on, à 15 ans, si ce n'est l'amour même? La femme que je cherche existe et m'attend", dira-t-il dans sa quête d'une autre Camille..."
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Deuxième roman publié par Mauriac, La robe prétexte eut une genèse complexe, entre 1911 et 1914. A son origine se trouve une nouvelle, le cousin de Paris, publiée en 1911 dans La revue hebdomadaire. L'année suivante, une sorte de suite, intitulée Camille, paraîtra dans La revue de Paris. Trois autres textes, toujours parus dans des revues, vont compléter l'ensemble. Mauriac réécrira en partie les textes des nouvelles, pour donner de la cohérence à l'ensemble, qui paraîtra en 1914 chez Grasset. Il semble bien que l'auteur n'ait pas d'abord envisagé un roman, et qu'à partir de la nouvelle originelle il ait progressivement conçu un texte plus large. Néanmoins, à la lecture, les cinq parties du roman sont nettement coupées les unes des autres, chacune d'entre elle constitue un moment fort, centré sur époque, sur un événement, et même s'il y a une évolution, en particulier dans les sentiments de Jacques, il y a un côté un peu heurté dans la narration.

Au début du récit, Jacques, le personnage principal, qui par bien des aspects ressemble à François Mauriac, a onze ans. Cette première partie du roman résume en quelque sorte son enfance, chez sa grand-mère. Il y vit avec sa tante et épisodiquement son oncle, et aussi leur fille, sa cousine Camille, forte personnalité qui le rudoie quelque peu. Enfant rêveur, aimant qu'on lui raconte des histoires, surtout celles qu'il connaît déjà, imaginant, créant des douces images, il s'attache aux lieux, aux objets. le deuxième épisode décrit l'arrivée dans la maison des Landes d'un cousin de Paris, Philippe. du même âge que Jacques (qui a maintenant 15 ans), il est censé être plus brillant dans ses études, et auréolé du prestige parisien, il attire l'intérêt de Camille. Dont Jacques devient amoureux, essentiellement par jalousie. Les parties suivantes racontent en partie le destin de cet amour, et aussi quelques événements de l'adolescence de Jacques, jusqu'à la mort de sa grand-mère, qui d'une certaine façon le fait basculer dans l'âge adulte.

Il y a un grand charme dans la description de cette enfance et cette adolescence, quelque chose de très authentique, dans les descriptions de lieux, des ambiances, des gens. Une douce nostalgie s'en échappe, de celui qui n'est plus cet enfant et cet adolescent, et qui goûte le plaisir du souvenir, de retour en arrière : se souvenir est presque plus délectable que de vivre les choses. C'est d'ailleurs le seul texte, avant le Baiser au lépreux à trouver grâce aux yeux de Mauriac, qui note « j'y ai en partie réussi le portrait de l'adolescent que je fus ». C'est le portrait de cet adolescent, et aussi les descriptions de son environnement qui est le grand intérêt du livre. L'intrigue, les amours avec Camille n'étant sans doute pas complètement convaincants, mais toute une partie des éléments des livres futurs est en germe dans ce texte.
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Pour le petit Jacques, héros de ce roman, le second de François Mauriac, paru en 1913, parodions le grand Jacques Brel :
"Faut vous dire, Monsieur, Que chez ces gens-là, On ne pense pas, Monsieur, On ne pense pas, on prie ".
Et c'est exactement ce qui se passe pour ce petit garçon, élevé par sa grand-mère, après la disparition de ses parents. Ces gens-là, c'est la pieuse grand-mère, passant son temps en bondieuseries, accompagnée de soeur Marie-Henriette, toujours un chapelet en main et l'oeil vigilant, pour que rien de répréhensible (à ses yeux) ne puisse advenir, sans oublier la parente pauvre qui tricote pour plus pauvre qu'elle et la tante, soupirante et malheureuse créature qui se désespère des frasques de son mari, vil bellâtre, qui, non content de tromper sa femme, passe sa vie au casino et dilapide l'héritage de son épouse et de son neveu.

"On ne meurt pas de chagrin, puisque je vis encore, avait coutume de dire Melle Dumoliers. Ma tante, qui, sur tout autre sujet, n'aimait point approuver sa cousine, lui donnait raison, levant au ciel ses yeux malades comme pour offrir à la terre et au ciel l'exemple de son martyre. Il est vrai que si l'abandon où la laissait son mari, les dettes dont il se glorifiait, avait jauni le visage de la triste femme, si tant de souffrance, renouvelée chaque jour, avait affaibli sa vue, plissé sa bouche, vidé son corsage, mêlé à sa religion du vinaigre et du fiel, elle ne parlait point de mourir".

Seul rayon de soleil pour le jeune Jacques dans cette triste ambiance, sa cousine Camille, sur qui il reporte non seulement ses rêves et ses élans de tendresse, mais aussi les trésors d'amour dont déborde son coeur et que personne ne peut satisfaire. Entre la maison familiale de Bordeaux, et la propriété d'Ousillane qui accueille en été les jeux et les ris des deux enfants, la vie s'écoule, calme et tranquille jusqu'à l'adolescence, la fin des illusions et le changement irrémédiable intervenant dans la vie de celui qui n'est plus un petit garçon, ni même un adolescent, mais un jeune homme prenant conscience qu'une page de sa vie vient définitivement de se tourner. Ainsi, écrit-il à son ami : "comme un jeune romain, ayant atteint l'âge d'homme, abandonnait la robe prétexte, la robe blanche aux bordures pourpres, qui était l'insigne de l'adolescence - ainsi, ô mon ami, je dis adieu à la seizième année, dont je sens se calmer en moi la fièvre...".

L'oeuvre de Mauriac tout entière baigne dans la myrrhe et l'encens et propose une analyse virulente de cette bourgeoisie affichant la morgue des nantis de la vigne et du bois. Mais cette oeuvre de jeunesse exprime principalement les tourments et errements de l'adolescence et ici, priment la douceur et la nostalgie des choses disparues.
L'analyse de l'adolescence, il y revient dans "un adolescent d'autrefois" son dernier ouvrage, celui d'un homme en pleine maturité qui, lui, évoque avec violence et âpreté la jeunesse de l'auteur et ses rapports conflictuels avec son environnement.
Dans l'un et l'autre cas on retrouve la patte inimitable de ce très grand écrivain, un des fleurons des lettres françaises, déployant son talent dans une langue riche et somptueuse.
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C'est le deuxième roman de François Mauriac, publié en 1914, juste après le mariage de l'auteur. Il traite de l'abandon de l'enfance chez un jeune intellectuel pétri d'humanités comme de ce moment où le jeune romain quittait l'habit qui symbolisait l'enfance pour entrer dans l'âge adulte*.

C'est ce qui arrive à Jacques, jeune orphelin qui vit entouré de bigots chez son oncle et sa tante, en compagnie de sa grand-mère adorée, de sa cousine Camille, d'une vieille bonne soeur et d'une dame de compagnie nécessiteuse et tricoteuse. La famille, comme déjà et toujours chez Mauriac, est confite en dévotions … sauf l'oncle aux meurs plus que dissolues et qui gère le patrimoine de son neveu en le confondant avec le sien.

Jacques tombe amoureux de Camille, ou du moins le croit-il. Cependant, la mort de sa grand-mère viendra tout bouleverser. Il faudra vendre la maison de famille – encore et toujours le même décor, celui de Malagar que l'on retrouve sous un autre nom dans le noeud de vipères – et Jacques rentrera en possession de la fortune de son père mort aux antipodes, devenu peintre de renom qui a quitté sa mère alors qu'il n'était qu'un tout petit bébé pour la lumière des tropiques. Camille, investie de l'autorité de la maison en raison de la cécité croissante de sa mère, ne répond pas à son inclination : elle déclare vouloir épouser un homme plus âgé, plus « terre-à-terre ».

Tiraillé entre sa foi profonde et ses pulsions naturelles, le jeune adolescent est ainsi propulsé dans la vie d'homme avec toute sa timidité et ses doutes métaphysiques. Un thème qui sera repris, avec le talent de l'auteur reconnu mondialement, dans le dernier roman de l'auteur « Un adolescent d'autrefois », la boucle étant ainsi bouclée, comme si l'auteur avait encore des souvenirs personnels - pourtant constamment présents dans ses oeuvres, à nous livrer une dernière fois. Ainsi François Mauriac se sera-t-il attaché, durant toute sa carrière, à revivre ses douleurs d'enfance et les sentiments contradictoires d'un homme pieux, parfois cynique et effroyablement torturé.
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La robe prétexte/François Mauriac
Deuxième roman de Mauriac, ce récit fut publié en 1914.
Le titre d'abord : sous l'empire romain, un jeune ayant atteint l'âge d'homme abandonnait la robe prétexte blanche à bordures pourpres qui était l'insigne de l'adolescence.
Jacques le narrateur, se remémore son enfance et son adolescence à Bordeaux.
Orphelin, il vit alors chez sa tante et son oncle entouré de sa grand-mère adorée, d'une bonne soeur et d'une dame de compagnie nécessiteuse, des femmes pieuses dépourvues de tout lyrisme, et taquiné par sa cousine Camille déjà la cible des élans de son coeur.
L'oncle, noceur, joueur, adepte d'un hédonisme sans retenue, délaisse sa femme pour s'adonner à des virées mystérieuses et « son indifférence à l'endroit de sa femme autorise celle-ci à revendiquer les privilèges du veuvage ! » de plus il gère le patrimoine de son neveu en se servant. Jacques est quelque peu ébloui par les récits que son oncle fait de sa vie facile de casinos en casinos.
Jacques devine que le passé de ses parents est obscur. Sa mère est morte six mois plus tôt et son père, artiste peintre à ses heures « ayant besoin de lumière exotique » parti en Polynésie, est lui aussi disparu.
« J'éprouvais l'ennui de ne pas savoir le tout du drame entrevu, de ne pouvoir organiser sur des données précises mon passé. »
Jacques, rêveur, aime lire :
« …J'avais vite fait de gagner ma chambre, de tourner la clef, de m'abandonner à l'indicible volupté de la lecture. J'entreprenais une lecture comme on commence un grand voyage. le monde s'anéantissait… La comtesse De Ségur, née Rostopchine, détruisait autour de moi la vie, me transportait tout éveillé à l'ombre des vergers de la campagne normande, où déjà les petites filles modèles avaient des coeurs troublés de puériles amitiés et de douces querelles. »
Le style merveilleux de Mauriac séduit dès les premiers chapitres. Ses descriptions sont d ‘une précision et d'une finesse remarquables et l'on sent les personnages vivre à chaque ligne.
Le temps passe qui va voir naître un amour très platonique entre Camille et Jacques conseillé par son ami et confident José Ximenez.
Parti à Paris pour ses études, Jacques va côtoyer des jeunes femmes, mais sa timidité, son éducation qui fait que le dégoût lui vient des plaisirs de la chair hormis le rêve avec Camille, ses scrupules religieux et familiaux font qu'une loi austère pèse sur lui tel un dogme, une discipline.
Rêveur, idéaliste, romantique, connaitra-t-il à son retour de Paris vers le domaine familial d'Ousilanne pour la mort de sa chère grand-mère, l'épanouissement de ses sentiments envers Camille et réciproquement ?
« Je souhaitais passionnément qu'elle fût la vierge chrétienne qui dit simplement la prière du soir au seuil des voluptés calmes et sanctifiées… Tout mon coeur se soulevait vers la Camille idéale que, pour mes délices, avaient créée mon coeur et ma pensée. »
Les dernières lignes de ce roman sont d'une grande beauté stylistique, émouvantes et généreuses, mais je ne les cite pas afin de ne pas dévoiler la fin.
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Sortie de l'enfance, entrée dans une adolescence tourmentée par les premiers émois amoureux, le héros de Mauriac va peu à peu découvrir, au fil de ce roman, les différences entre aimer et idéaliser. L'amour est-il une création de l'esprit ou un sentiment partagé au point de créer une unité humaine insoluble? Mauriac explore les sentiments de son héros tout laissant les pulsions s'exprimer, les doutes surgir et les tortures de l'esprit régner.
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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
Une implacable protection planait sur ma destinée. Je n'avais pas comme les autres hommes la liberté de pécher. Contre le péché, Dieu m'avait d'abord armé de timidité, de dégoût, de scrupules religieux et familiaux. À l'instant de la chute, tous les dogmes, tous les commandements de Dieu étaient soudain promulgués au fond de mon être par une voix intérieure. Un conseil de famille, comprenant les morts et les vivants de ma race, automatiquement se réunissait pour me juger. Enfin, si je passais outre, un de mes parents, le plus aimé, se décidait à mourir et creusait sa tombe entre la volupté et mon désir.
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Grand-mère avait fait à Paris son voyage de noces et sœur Marie-Henriette son noviciat. Elles m'enseignèrent que la capitale ne l'emporte sur les autres villes et singulièrement sur Bordeaux que par la hauteur des maisons, la foule des promeneurs et des voitures. La Seine, si on la compare à la Garonne, est un méprisable ruisseau, un « égout » disait grand-mère. « Au mois de juillet, avait-elle ajouté, le monde se répand sur les plages à la mode. Tu ne verras pas l'avenue de l'Impératrice, ni le tour du lac dan leur beau moment. »
Éditions de la Pléiade, tome 1, chapitre XXVII, page 170.
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Grand'mère posa sur mes cheveux le baiser de chaque soir, elle prit la lampe. Un cercle lumineux dessiné au plafond la suivit et disparut. Il me sembla que les murs de ma chambre s'écartaient. Mon petit lit vogua sur un océan de ténèbres. J'eusse voulu accrocher mes mains aux barreaux, mais Grand'mère les avait croisées sur ma poitrine : j'étais accoutumé à ne m'endormir qu'avec cette croix volontaire et vivante. Le sommeil me fuyait parce que, cette nuit-là, un ange devait me visiter, comme dans l'image de mon histoire sainte il visita le jeune Tobie : il laisserait sur ma table, en signe de son passage, l’œuf de Pâques d'un rose merveilleux.
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A l'instant de l'adolescence, telle est la richesse de notre coeur qu'il néglige de s'arrêter longtemps sur les mêmes tristesses, les mêmes joies. Ce n'est pas qu'il oublie : il s'approvisionne d'émotions pour ses futurs hivers. Plus tard, il retrouve au fond de soi le vestige d'amitiés et d'amours qu'il avait crues mortes.
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Le jour de ma naissance, on avait coutume de chanter les vêpres des morts parce que c'était le 1er novembre. Toujours cela me troubla qu'il fallût célébrer mon anniversaire avec les glas sanglotants sur une ville où tous les magasins étaient fermés pour laisser au moindre employé le loisir de songer à ses fins dernières. Au repas du soir, un gâteau s'illuminait vainement d'autant de bougies roses que je comptais d'années, j’éteignais les courtes flammes d'un petit souffle triste. Nous avions fait dans l'après-midi un exténuant pèlerinage à la Chartreuse, qui est le cimetière de Bordeaux. La fade odeur me poursuivait des chrysanthèmes abandonnés sur les pierres tombales, comme de belles têtes échevelées et souillées de boue.
(Éditions de la Pléiade, tome 1, page 109)
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