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Yorkshire, décembre 1974. L'autoradio diffuse un bulletin d'information de la BBC Radio 2. Le prix de l'essence augmente, l'IRA annonce une trêve pour les fêtes, l'équipe de Leeds United a été tenue en échec par les Magpies, Clare Kemplay, âgée de dix ans, a disparu. Edward Dunford, journaliste au Yorkshire Post, un quotidien régional, est chargé de couvrir l'affaire pour son journal. Il espère que ce fait divers sera assez glauque et retentissant pour obtenir une audience nationale. Cela lui permettrait de gagner en notoriété et de supplanter son rival au sein de la rédaction. Pour ce faire, il cherche un lien entre les disparitions d'enfants survenues ces dernières années dans le Comté. Les résultats de son enquête vont dépasser ses espérances. De l'aveu même du superintendant en chef de Leeds, "C'est une putain d'époque violente." Ce roman très sombre emprunte largement au registre du thriller puisque la base de l'intrigue est une affaire d'enfants torturés, violés et assassinés. Toute la perversité de ces crimes vous sera rendue à la lecture du rapport d'autopsie. Mais outre ces passages sanguinolents, David Peace dépeint un tableau critique de la société anglaise. Les policiers sont racistes et brutaux, les responsables politiques lubriques et corrompus, les chefs d'entreprises prêts à tout pour gagner un maximum "de cette saloperie d'argent", les journalistes avides de sensationnalisme et bonimenteurs... En résumé : "tous pourris" et "on nous ment". Même Edward Dunford, notre narrateur en quête de vérité et de justice, ne parvient pas à gagner notre sympathie. Doté d'une personnalité complexe et d'une morale ambigüe, il va plonger dans un paroxysme de violence et de folie. Comme souvent chez les romanciers anglais, la musique est omniprésente dans le roman : chansons fredonnées, tubes diffusés à la radio , poster de vedettes. Il y a aussi de nombreuses références aux émissions de télévision et au football. Outre cet univers très sombre, David Peace se distingue par son style dépouillé qui donne un rythme tendu et nerveux au récit. Nous suivons les flux de conscience d'un esprit en pleine tourmente. Les souvenirs, angoisses, fantasmes ou réflexions s'entremêlent dans le texte. Les descriptions sont rares, les personnages sont désignés par leurs surnoms et les dialogues incisifs sont servis de manière abrupte. Le flux est si rapide qu'il en devient haletant et - avouons-le - parfois confus. Cela exige de la concentration et des retours en arrière. Je reconnais les qualités du roman et le talent de l'auteur, néanmoins, je n'ai pas été totalement convaincu par cette lecture. Mais cette intrigue t nébuleuse doit peut-être être considérée comme secondaire. Le vrai coeur du roman ne serait autre que la transe qui saisit le narrateur et le lecteur ad nauseam. + Lire la suite |