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EAN : 9782070747900
320 pages
Gallimard (23/01/1997)
4.2/5   5 notes
Résumé :
Résumé
« Sur les chemins croisés de la curiosité, des rencontres et du hasard, voici le sixième de mes "livres de bord". Moisson capricieuse, portraits-souvenirs, voyages, mémoires, lectures et recherches, minimes moins arrogantes que les maximes, enfin l'école buissonnière de la prose et des vers. Dans ma machine à remonter le temps, je retrouve les amis disparus et les compagnons de Saint-Germain-des-Prés, les villageois de mon village et les déportés de Be... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Tout à la pointe du style.
Entrer dans un des Livres de bord de Claude Roy (28 août 1915-13 décembre 1997) c'est rendre visite à un ami de toujours. On sait qu'il va nous toucher au coeur parce qu'il est avant tout poète, fraternel et que ses mots coulent d'une source limpide. On avance avec confiance dans la lecture bien que Chemins croisés : 1994-1995 soit hélas son ultime journal publié aux éditions Gallimard, commencé avec Permis de séjour, en 1977, continué avec La fleur du temps, puis L'étonnement du voyageur, le rivage des jours, Les rencontres des jours et enfin ces Chemins croisés, en 1995. Parallèlement à la mémoire vive exposée dans ses livres de bord, Claude Roy faisait paraître Poèmes à pas de loup avec la nécessité de toujours s'émerveiller du monde sans éveiller les soupçons du gardien des portes de la mort : « Je ne sais pas qui a frappé à ma porte. J'ai seulement dit : « Déjà ? ». Dans son journal intime, l'auteur dresse des portraits touchants d'écrivains ou d'artistes comme ceux de Kostas Papaioannou, de Georges Szekeres ou ceux d'Hector Bianciotti ou de Zoran Music, bouleversants. Il rend compte admirablement dans ses biographies, d'auteurs essentiels tels Segalen, Chalamov ou Orwell. Il entrecoupe ses récits de voyage et ses réflexions sur la marche du monde de minimes qui sont des aphorismes parfois remarquables : « Mourir, d'accord : il faut bien. Mais arrêter de vivre, non. » ; « Temps perdu : contredire les imbéciles, raisonner les tyrans, croire un instant les flatteurs ». S'insèrent quelques poèmes précieux et mélancoliques, seuls capables de ressusciter un bref instant le passé enterré dans le caveau de la mémoire. On peut être surpris de voir ce voyageur attentif rencontrer autant de personnalités dans sa traversée du siècle. Son talent n'a toutefois d'égal que sa modestie. Pourtant, le samedi 1er janvier 1994 démarre plutôt mal avec une première phrase un peu fade : « La campagne a posé un doigt sur sa bouche et elle a dit : « Chut ! » le silence a obéi. » Très vite, l'écrivain reprend le dessus avec : « Les fleurs de givre sont les empreintes digitales du temps. » S'ensuit une très belle citation de Shakespeare : « Il y a des voix qui parlent dans les arbres, des livres à lire dans les ruisseaux qui coulent, des leçons à apprendre dans les pierres. » le ton est donné et tout est déjà dans la première page. Claude Roy est bien cet ami qui vient de loin et qui sait être proche des autres avec des mots de tous les jours tissés habilement à la vie, aux émotions et aux sentiments. Il prend même la peine de répondre aimablement à un journaliste anglais du Times Literary Supplement, John Weightman qui lui susurre ainsi : « Ne pas garder en tête que la nature est imperméable, qu'on ne peut pas l'anthropologiser, c'est faire verser une authentique tension poétique dans une sentimentalité insidieuse ». Claude Roy répond. John Weightman écrit à partir de la réponse. Claude Roy renchérit. Son journal est réactif et vivant. Les minimes s'ensuivent puis « Orwell est là » s'épanouit sur neuf pages et c'est un enchantement. Quand le permis de séjour de Claude Roy a fini par expirer, le 13 décembre 1997 et qu'il a dû passer la frontière sans espoir de retour, ses lecteurs restés ici-bas ont pu se senti un peu plus lourd que d'habitude.
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Citations et extraits (31) Voir plus Ajouter une citation
UN SOUVENIR
DES LANDES


                      Automne

           Il y a tellement d'années
           Le temps était un autre temps
           Je fumai du tabac de Virginie
           dans une pipe de Maïs
           qui avait goût de miel
           de résine et d'épices
           et la jeune fille me demandait
           une bouffée de la pipe
           qui la fait tousser
           Nous dormions nus et gais
           dans un grand sac de couchage orange
           et la petite chouette de Carmel
           chassait entre les pins
           ses ailes de silence
           furtives dans le noir
           
           C'est tellement loin tout ça
           et pourtant la flamme rit encore
           dans mes yeux mémorieux
           La chienne s'appelait Lady
           Le sac de couchage
           était en soie orange
           Sens-tu encore l'odeur
           du tabac et du bois brûlé ?
           
           Et les très petits seins
           de la jeune fille doré
           sont toujours là
           
           Alors que moi
           lieu silencieux du souvenir
           je ne suis plus
           tout à fait sûr

           d'être là.

p.135
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UN SOUVENIR
DES LANDES

     Cette année-là, j'étais si jeune encore que
 je ne m'en rendais pas compte, nous descendîmes
dans les jours entre été et automne les courants des
                    Landes
        dans l'odeur de résine et d'eaux vives


           Un feu de branches mortes
           éclat de rire dans l'air froid
           L'odeur légère du bois brûlé
           La gaité de la chienne irlandaise
           qui danse et joue avec la flamme
           puis court sur le rivage
           en dépassant le canoë

           Quand la nuit tombera
           la lune sera nue
           comme un ventre de truite

p.134
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MINIMES                              Mai 1994


 Je ne sais pas qui a frappé à ma porte. J'ai seulement dit :
« Déjà ? »

 Le rire rouge du cerisier.

 Cette étincelle d'oiseau, qu'on appelle hirondelle.

 La gaieté un peu dure de la grêle, que nous n'attendions
pas.

 Couleur de soleil apaisé, le champ de seigle dans une
clarté lisse.

 Quand nous avons pénétré dans la maison, le feu nous a
adressé la parole.

 Venu le jour, l'aube nous prit dans ses bras.

 La tourterelle turque se souvient toujours du Bosphore.

 Il fit si beau ce matin-là, que déjà la journée avait les
larmes aux yeux.

 Nous avons ri ensemble, dans un clapotis de gaieté.

p.81-82
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Chalamov est mort le dernier. A la fin de sa vie, il était couvert de crasse, de nourriture renversée. Il était répugnant. Il empestait. Le 14 janvier 1982 deux infirmiers viennent l’emmener dans un asile psychiatrique où on l’enferme dans une salle commune. Il croit qu’une fois de plus on est venu l’arrêter. Il meurt sourd, aveugle et fou parmi les fous, six jours plus tard. Il aura vécu près du tiers de sa vie au camp. […] C’est cette volonté farouche de survivre pour pouvoir raconter un jour, qui fait que, justement, les Récits de la Kolyma sont un grand livre. Chaque phrase ici est vraie, sèche, ineffaçable : l’écriture d’un regard implacable. Mais dans les photographies successives de Chalamov on voit ses yeux peu à peu s’égarer et s’éteindre. Au retour du camp, il a ce regard inoubliable qui nous fixe et défie, dans un visage durement sculpté par la volonté, par le désespoir, un espoir au-delà de l’espérance. Un visage beau comme la dure et froide parole des récits. Dans les cent ou cent vingt épisodes de ces mille pages, ce regard vit à chaque ligne, à chaque mot.
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Printemps

MINIMES                              Mai 1994


 L'ennui nous dit-il la vérité, en nous mettant à nu ? Ou
nous reproche-t-il seulement notre paresse ?

 Il affiche son ennui, en l'exagérant d'ailleurs, parce qu'il
croit que c'est élégant.

 Où en serais-je si je n'avais pas laissé sortir par une
oreille ce qui entrait par l'autre ?

 J'admire la force qui ne se voit pas : celle de l'araignée,
de l'hirondelle, de la fourmi.

 J'ai une idée, mais je n'en suis pas propriétaire, heureuse-
ment.

 Au IIIè siècle avant J.-C., Anyte de Tégée éleva une
tombe à la sauterelle des champs et à la cigale des chênes….

p.81
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Videos de Claude Roy (25) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Claude Roy
CHAPITRES : 0:00 - Titre
M : 0:06 - MÉCHANCETÉ - Henry Becque 0:16 - MÉDECINE - Jean de Villemessant 0:28 - MÉDISANCE - Gabriel Hanotaux 0:39 - MÉNAGE - Claude Roy 0:51 - MODESTIE - Laurent de la Beaumelle 1:01 - MONDE - Comte de Oxenstiern 1:11 - MOQUERIE - Léon Brunschvicg 1:21 - MORT - Alphonse Rabbe 1:31 - MOT - Michel Balfour
N : 1:42 - NAISSANCE ET MORT - Alexandre Dumas 1:55 - NÉANT - Villiers de L'Isle-Adam
O : 2:07 - OISIVETÉ - Noctuel 2:21 - OPINION DES FEMMES - Suzanne Necker 2:41 - OPTIMISME - André Siegfried
P : 2:52 - PARAÎTRE - André Gide 3:02 - PARLER - Maurice Donnay 3:14 - PARLER SANS BUT - Oscar Comettant 3:26 - PAROLE - Pierre Dac 3:38 - PASSION - Comte de Saint-Simon 3:49 - PÈRE - Francis de Croisset 4:00 - PERFECTION DE LA FEMME - Alfred Daniel-Brunet 4:12 - PESSIMISME - Ernest Legouvé 4:24 - PEUPLE - Gustave le Bon 4:35 - PHILOSOPHIE - Georges Delaforest 4:49 - PLEURER - Malcolm de Chazal 4:57 - POSE - Jean Commerson
R : 5:16 - RAISON - Albert Samain 5:28 - RÉCEPTION - Fernand Vandérem 5:45 - RÉFLÉCHIR - Julien Benda
5:56 - Générique
RÉFÉRENCE BIBLIOGRAPHIQUE : Jean Delacour, Tout l'esprit français, Paris, Albin Michel, 1974.
IMAGES D'ILLUSTRATION : Henry Becque : https://libretheatre.fr/wp-content/uploads/2017/02/Becque_Atelier_Nadar_btv1b53123929d.jpg Jean de Villemessant : https://www.abebooks.fr/photographies/Disdéri-Hippolyte-Villemessant-journaliste-patron-Figaro/30636144148/bd#&gid=1&pid=1 Gabriel Hanotaux : https://books.openedition.org/cths/1178 Claude Roy : https://www.gettyimages.ca/detail/news-photo/french-journalist-and-writer-claude-roy-in-1949-news-photo/121508521?language=fr Laurent Angliviel de la Beaumelle : https://snl.no/Laurent_Angliviel_de_La_Beaumelle Léon Brunschvicg : https://www.imec-archives.com/archives/collection/AU/FR_145875401_P117BRN Alexandre Dumas : https://de.wikipedia.org/wiki/Alexandre_Dumas_der_Ältere#/media/Datei:Nadar_-_Alexander_Dumas_père_(1802-1870)_-_Google_Art_Project_2.jpg Villiers de L'Isle-Adam : https://lesmemorables.fr/wp-content/uploads/2020/01/2-Villiers-jeune.jpg Noctuel : https://prixnathankatz.com/2018/12/08/2008-benjamin-subac-dit-noctuel/ Suzanne Necker : https://www.artcurial.com/en/lot-etienne-aubry-versailles-1745-1781-portrait-de-suzanne-necker-nee-curchod-1737-1794-huile-sur#popin-active André Siegfried : https://www.lefigaro.fr/vox/politique/2016/02/09/31001-20160209ARTFIG00272-andre-siegfried-figure-tutelaire-de-la-geographie-electorale-contemporaine.php André Gide : https://www.ledevoir.com/lire/361780/gide-et-le-moi-ferment-du-monde Maurice Donnay : https://www.agefotostock.com/age/en/details-photo/portrait-of-charles-maurice-donnay-1859-1945-french-playwright-drawing-by-louis-remy-sabattier-from-l-illustration-no-3382-december-21-1907/DAE-BA056553 Oscar Comettant : https://fr.wikipedia.org/wiki/Oscar_Comettant#/media/Fichier:Oscar_Comettant-1900.jpg Pierre Dac : https://www.humanite.fr/politique/pierre-dac/presidentielle-1965-pierre-dac-une-candidature-moelle-732525 Saint-Simon : https://www.britannica.com/biography/Henri-de-Saint-Simon Francis Wiener de
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