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Commissaire Maigret - Romans et ... tome 101 sur 103
EAN : 9782253133834
224 pages
Le Livre de Poche (20/01/2010)
3.86/5   49 notes
Résumé :
Il n'était que neuf heures du matin et il faisait déjà chaud.
Maigret, qui avait tombé la veste, dépouillait paresseusement son courrier en jetant parfois un coup d'oeil par la fenêtre, et le feuillage des arbres du quai des Orfèvres n'avait pas un frémissement, la Seine était plate et lisse comme de la soie. On était en août. Lucas, Lapointe et une bonne moitié des inspecteurs étaient en vacances. Janvier et Torrence avaient pris les leurs en juillet et Maig... >Voir plus
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Tout le monde connait Maigret, tout le monde sait à quoi s'attendre, et l'on est jamais déçu(e).
Du coup, plutôt qu'une n-ième critique, il m'est venu l'idée sotte et grenue de systématiser la méthode initiée par ibon, inventeur de la critique de Maigret éclairée par ses consommations alcoolisées. (Si ses critiques vous ont échappé, cherchez-les, c'est à mourir de rire). Et ainsi de réaliser une recension complète des boissons ingérées par le commissaire le plus doucement imbibé de la littérature policière en langue française. L'homme de la constance : de 1931 à 1972, plus de quarante ans de p'tits ballons et grosses chopines, assortis de quelques alcools plus costauds.
Maigret et l'homme tout seul est un premier essai facile : quelques jours d'enquête parisienne (du côté de Montmartre cette fois-ci), un aller-retour à La Baule, et l'affaire est dans le sac. Sous le signe de la modération, d'ailleurs : Simenon situe l'enquête en 1965, Maigret affiche 55 ans et s'efforce de suivre la recommandation de sobriété émise par son médecin et ami, le Dr. Pardon.

Premier jour : rien ! Il faudra se demander si c'est une constante, si Simenon concentré sur l'exposition de l'affaire laisse souvent son commissaire s'assécher durant la première journée.

Deuxième jour : une seule bière ! Pourtant, l'enquête se déroule au mois d'août, il fait chaud et soif à arpenter le pavé pour retrouver les témoins. Mais on découvre la raison de cette sobriété : « Maigret buvait sa bière. La première de la journée. Il les comptait. Quand il reverrait Pardon, il lui citerait les chiffres, non sans fierté. Il est vrai que, sur la question du tabac, c'était moins brillant et qu'il fumait toujours autant de pipes par jour. On ne pouvait pas lui supprimer tous les plaisirs sous prétexte qu'il approchait de ses cinquante-cinq ans. »

Troisième jour : un apéritif (non précisé) à la brasserie à côté de son bureau avant de rentrer déjeuner chez lui. Et une bière l'après-midi dans une brasserie de la place Pigalle où il se rend pour les besoins de l'enquête. « Maigret buvait sa bière lentement en se promettant qu'il n'y en aurait pas d'autre de la journée. » Promesse tenue, malgré les tentations de l'enquête :
« - Vous voulez boire quelque chose ?
- Je n'ai pas soif, mais j'aimerais vous poser quelques question. »

Quatrième jour : une bière, en fin de journée, à cause de l'inspecteur.
« Et, à Torrence :
- Nous retournons au Quai.
- Sans même boire un demi ?
Ils en burent chacun un dans un bar de la rue Notre-Dame-de-Lorette. »
Tous les alcooliques repentis vous diront qu'il est particulièrement difficile de résister aux sollicitations amicales de l'entourage.
Côté substantiel, on commence à s'intéresser : le midi, un coq-au-vin de Mme Maigret mais il reste préoccupé : « C'était un de ses plats favoris mais il mangea distraitement, sans faire aucun compliment. » Et le soir, viandes froides, fromage et salade.

Cinquième jour : une bouteille de muscadet à La Baule, le midi, « car il n'y avait pas de demi-bouteilles » avec les fruits de mer commandés pour attendre la pizza. L'histoire ne dit pas s'il la boit en entier, mais plus tard à la PJ de Nantes :
« - D'accord, monsieur le commissaire. Vous ne venez pas boire un coup de muscadet ?
- Je sors d'en prendre. Mon médecin me recommande la sobriété… »

Sixième jour : rien !

Septième et dernier jour : un demi avant d'aller aux archives du Parisien libéré. Sur place, il repousse une première sollicitation puis fini par accepter un autre demi. Comme il a enfin trouvé ce qu'il cherchait, le midi, après les entrées servies par sa femme, « il mangea de bon appétit. Il y avait un gigot d'agneau d'un joli rose, avec juste une goutte de sang qui perlait près de l'os.
- C'est magnifique, soupira-t-il en en reprenant une tranche. »
Mme Maigret cuit le gigot à la perfection, et ce n'est pas tout :
« - Tu veux une pêche ? Elles sont bien mûres et juteuses…
- Va pour une pêche…
Il était en paix avec le monde et avec lui-même. »
Au bureau, il a le temps d'une pause pour sortir se faire un troisième demi de la journée, avant l'interrogatoire ultime. Et en fin de cette journée bien chargée, après les aveux :
« - Qu'est-ce que ce sera commissaire ? questionna le patron.
- Un grand demi. le plus grand que vous ayez…
Torrence commanda la même chose. Maigret but la bière presque d'un trait et tendit son verre au patron pour qu'il le remplisse.
- Cela fait soif, aujourd'hui…
Et Maigret, comme s'il répétait machinalement des mots dont le sens ne le frappait pas :
- Cela fait soif, oui. »
Enfin, pour finir cette rude journée, dîner sobre de viandes froides et salades russes au bercail :
« - Je n'ai pas faim…
- La table est mise et tu mangeras quand même… »
Quelle santé !

J'envisage désormais d'ouvrir un challenge Babelio pour que chacun participe. À l'heure du bilan, on pourra classer les enquêtes par le taux d'alcoolémie cumulé ou moyen, comptabiliser le top des petits plats de Mme Maigret… Bref, une étude scientifique sérieuse, extensive, contributive, de l'oeuvre phare de Simenon. Ne me reste qu'à réfléchir au format d'un fichier excel et voir comment le mettre en ligne à disposition des inscrits.
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Paris, le Paris étouffant du mois d'août où les odeurs qui remontent à cette époque du Métro marquent à jamais ceux qui les ont humées ne fût-ce qu'une seule et unique fois ... Neuf heures du matin et Maigret reçoit son premier coup de fil "qui devrait l'intéresser" : au plus solitaire de l'un des logis situés dans une vieille impasse qui ne survivra sans doute pas au départ des Halles à Rungis, on vient de découvrir un clochard, paisiblement allongé sur un vieux lit dépareillé. Nous sommes en 1965 mais, ce qui compte surtout, c'est que notre clochard, par ailleurs habillé très correctement, très propre sur lui selon l'expression consacrée, les doigts manucurés (eh ! oui ! ) et doté avec cela d'une chevelure argentée et magnifique, visiblement elle aussi très bien entretenue, en dépit de son expression plutôt sereine (ou surprise ? ) est mort d'une ou deux balles dans le buffet, là encore pour reprendre une expression qui conviendrait mieux au quartier et à la situation.

Police, Parquet, médecin local, puis médecin-légiste n'en reviennent pas : en tant ou tant d'années de carrière, ils n'avaient jamais vu ça. Comme quoi, l'on apprend à tout âge.

Bien entendu, aucun portefeuille, aucun papier d'identité, aucun bibelot, aucune paperasserie, si discrète fût-elle, indiquant quoi que ce soit sur l'identité du défunt. Un défunt dont la mort, en gros titres dans les journaux, vaut à Maigret deux appels, tous deux féminins, se préoccupant pareillement d'une cicatrice que le cadavre serait susceptible d'arborer au haut du crâne. Vérification faite, elle est bien là mais les correspondantes du commissaire divisionnaire ont raccroché sans attendre la réponse.

Eh ! bien, puisque la Montagne ne veut pas venir à Maigret, ce sera un Maigret bougon mais solidement déterminé à avoir le fin mot de l'affaire qui se fera conduire à elle . Evidemment, il ne sait pas pour l'instant où elle se trouve exactement mais ce n'est pas la première fois que la chose lui arrive. Il en a vu d'autres et, après avoir choisi Torrence, le seul des inspecteurs de la P. J. qu'il voussoie, comme son chauffeur permanent, il y va.

De concierge en barman, de commérage en ragot, les deux policiers finissent par trouver l'adresse de l'ancienne épouse et de la fille, désormais mariée, du clochard. Et, du coup, le nom de celui-ci : Marcel Vivien.

Quand il était jeune, Marcel Vivien exerçait le métier de menuisier-ébéniste et s'était spécialisé dans la marqueterie - on venait même de loin pour le consulter. Il avait une excellente clientèle, formait avec sa femme un ménage modèle, adorait sa petite fille de huit ans ... et puis, un jour, comme ça, après avoir vidé le compte en banque commun et n'avoir dit adieu à personne (pas même à son enfant), il s'est comme dissous dans la nature. On pourrait songer à une sorte de crise de la quarantaine inspirée par une certaine Nina Lassave, jolie fille de dix-huit ans environ dont Maigret, après avoir suivi la trace quelque temps, finit là encore par ne plus rien humer.

"Maigret et l'Homme Tout Seul" est l'un des meilleurs du cycle. Car cet homme "Tout-seul", sur lequel on s'attendrirait à plaisir dès le début, n'aimait en fait que ça, la solitude. Pire : pour un peu, au bout des huit chapitres d'usage, on en viendrait presque à trouver à son assassin - un assassin qui ne rêvait plus depuis vingt ans que de cela : le faire passer de vie à trépas - des circonstances atténuantes.

C'est un peu comme si Simenon, à l'instar de son "Maigret" précédent, retournait ses méthodes du tout au tout. Mais ici, contrairement à ce qu'il se passe dans "La Folle de Maigret", l'auteur belge retrouve cette patte, qu'écris-je ? cette "griffe" nerveuse, passionnée qui lui permet de transfuser toute l'encre de son roman dans les veines du lecteur avide, et ceci au plus grand bénéfice de la bibliothèque (mentale, en trois dimensions, virtuelle, tout ce que vous voulez ...) de ce dernier.

L'émotion est là : dans le dernier regard qu'une Mme Veuve Vivien vieillie et aigrie, qui s'est consacrée seule à l'éducation de l'enfant que son père assurait pourtant tant aimer, jette au corps autopsié qu'elle abandonne sur le bloc de la morgue, et qu'elle abandonne avec regret car ce regard, le lecteur le perçoit bien, c'est celui de la toute jeune fille qu'elle a été et qui a aimé à la folie cet homme qui les a fait tant souffrir, elle et sa fille et qui, de plus, lui a, en quleque sorte, laissé "le mauvais rôle", et pour toujours ; dans le petit sourire tremblant de sa fille, trente-deux ans maintenant, à qui son père adoré rapportait toujours de merveilleux cadeaux de Noël et qui a "disparu" pendant près d'un quart de siècle afin de reparaître là, impeccable, muet, sinistrement naturel pourrait-on ajouter, sur la table de l'Institut médico-légal, mort et bien mort, sans lui avoir jamais fait signe - une lettre, une carte, une ... n'importe quel petit brimborion disant : "Je suis parti mais je t'aime toujours" - durant ce si long laps de temps où elle s'est posée tant de questions ("Est-ce à cause de moi que Papa est parti ? ... Pourquoi ? ...) ; dans les commentaires, mi-attendris, mi-étonnés, des barmen des petits bistrots qui avaient appris à connaître la silhouette à la chevelure léonine ; sur les trottoirs poisseux qui ne se rafraîchissent qu'avec l'orage qui, depuis un mois, tombe à heure presque pile sur les Parisiens et les touristes ; dans la "vision" enfin que Maigret se fait peu à peu de ce parfait inconnu qui, jusque dans la Mort semble-t-il, veut demeurer une énigme ...

Mais rien n'est parfait en ce monde. Et au milieu de ce concert de louanges - car l'amertume de Mme Vivien n'est-elle pas la preuve qu'elle a aimé son mari comme on n'aime qu'une fois ? - une voix ou deux s'élèvent et cacophonisent à plaisir : indifférentes, moqueuses, se renvoyant les paradoxes ... L'une surtout ... Rageuse, haineuse même, obsessionnelle mais pour autant, appartient-elle à l'assassin ?

Maigret fume ses petites bouffées de tabac, fait rouler Torrence à travers tout Paris, les Halles passent et repassent en boucle, avec tous leurs souvenirs qui vont bientôt aller s'enterrer à Rungis, Maigret rêve et rassemble patiemment ce nouveau puzzle ... Oh ! il trouvera la solution mais est-il bien sûr soudain de vouloir la découvrir ? L'Homme Tout Seul qu'il s'était construit n'était-il pas plus riche, plus intéressant, émotionnellement parlant ? le véritable Homme-Tout-Seul n'était-il pas né en fait pour être toujours seul et pour y trouver tout son confort ? Bien qu'il aime et recherche lui-même ces moments de solitude qui le ressourcent et l'apaisent (n'est-ce pas notre cas à tous ? ), Maigret ne se sent plus, tout à coup, de la même race que ce Vivien dignement enterré aux frais de son épouse et de sa fille dont il n'a jamais assuré les besoins que huit ans durant alors qu'il avait promis que ce serait pour la vie ...

En refermant l'ouvrage, le lecteur s'incline une fois de plus devant le génie de Simenon tout en se demandant pourquoi il s'est refusé à nous donner la clef des vraies questions qui nous intéressent en fait bien au-delà de l'identité du criminel et son mobile : pourquoi Vivien a-t-il agi ainsi avec sa femme et sa toute petite fille ? Pourquoi tant d'égoïsme ? tant de je-m'en-foutisme ? a-t-il jamais aimé quelqu'un d'autre que lui-même ? ne s'est-il jamais soucié que de lui et de sa solitude bien-aimée ?

Marcel Vivien serait-il, par hasard, le double d'encre et de papier d'un Simenon qui serait resté bloqué sur la Voie Royale de l'Ecriture et à qui le Génie de la Création n'aurait donc pas permis de s'élever, haut, bien plus haut, à dix-mille lieues du lit où un clochard narcissique au possible a achevé, dans la misère et dans le sang, ses jours dans le fond inutiles et durant lesquels il a fait souffrir tant (trop) d'innocents ?

A vous de juger ... C'est une idée qui peut se discuter, après tout . Etait-ce bien celle de Simenon par contre ? Nous ne le saurons jamais ... En tous cas, lisez "Maigret & l'Homme Tout Seul" : c'est du vrai, de l'authentique, du pur - de l'enivrant. :o)
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En cet été 1967, Maigret est sorti de sa torpeur estivale par un appel de son collègue du 1er arrondissement : le cadavre d'un homme a été découvert dans un taudis situé dans l'impasse du Vieux Four, qui part de la rue de la Grande Truanderie. Il s'agit d'un clochard qui vivait dans une solitude si totale que personne ne connaissait son nom, seulement un surnom : l'aristocrate. Très vite, l'homme fascine notre commissaire qui tente de reconstituer le passé, la vie de cet homme inconnu. Grâce à sa persévérance, un portrait va se dessiner petit à petit sous ses yeux et ce n'est pas une affaire mais deux, dont une remonte à plus de vingt ans, qu'il va s'efforcer de résoudre.

Voilà un roman de Simenon comme j'aime, tout en subtilité et en finesse, humanité évidemment. le thème de la solitude n'est pas nouveau chez l'auteur, mais il l'aborde là sous un angle nouveau. Il raconte une solitude volontaire et choisie, et profite de ce récit pour proposer une enquête psychologique comme il en a le secret.
Au-delà, Jules Maigret se dévoile davantage, sur sa vie, son passé. Quelques bribes intimes affleurent au fil des pages lui offrant encore plus de consistance et de présence. C'est qu'il a des failles notre commissaire, des petits défauts, et je l'en aime que davantage...


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Maigret et l'homme tout seul est intéressant à double titre. D'abord, l'antépénultième roman de la série est une fois de plus l'occasion pour Maigret de chercher l'identité puis de reconstruire l'existence d'un homme retrouvé assassiné dans un immeuble du quartier des Halles (qui n'avaient pas encore été transférées à Rungis). Une entreprise menée déjà de main de maître pour Louise dans Maigret et la jeune morte et Omer Calas dans Maigret et le corps sans tête. Ensuite, Simenon revient sur un des thèmes qui l'a fasciné depuis son entrée en écriture, celui de la clochardisation assumée, déjà présent dans Maigret et le clochard et, dans une certaine mesure, le charretier de la providence. Un thème à rapprocher de celui de la double vie – qui, pour Marcel Vivien, précède son installation dans le quartier des Halles – abordé dans Monsieur Gallet décédé ou Maigret et l'homme du banc et que l'on retrouve dans Maigret et Monsieur Charles qui clôt la saga.
Comme dans Maigret et la jeune morte, le commissaire ne dispose pas de grand-chose comme point de départ. Des lieux anonymes, la rue pour Louise, un immeuble voué à la démolition de l'impasse du Vieux-Four pour l'inconnu. Des vêtements de location pour la jeune femme, des hardes pour le clochard. Pourtant, par petites touches, à partir d'observations (les cheveux bien coupés de l'homme), de rapports d'expertise et, surtout, ce que Maigret affectionne par-dessus tout, d'enquêtes de voisinage dans les bars, les restaurants et auprès des concierges… un profil s'ébauche et la chair recouvre progressivement le squelette : Maigret façonne Vivien comme il a « construit » Louise.
L'existence de l'homme que Maigret va reconstituer l'amène à plonger vingt ans en arrière, et, finalement, à résoudre deux affaires criminelles. La double enquête alterne les investigations du présent (identification du corps, contacts avec la famille…) et les retours en arrière pour tenter de comprendre ce qui s'est passé au cours de cette longue période. Cela implique relire de vieux rapports d'enquêtes, de consulter les archives du Parisien libéré et de mobiliser les souvenirs de quelques rares témoins. Un travail fastidieux qui ne mène finalement pas loin, jusqu'à ce qu'un coup de téléphone anonyme (on n'en saura pas plus) agisse comme un deus ex machina en mettant Maigret sur la bonne voie. Pour les amateurs de romans policiers, disons que la ficelle est un peu grosse…
Ce patient travail accompli fait apparaître la personnalité d'un homme apparemment bien ordinaire, artisan, époux et père modèle, qu'un coup de folie amoureuse (on ne peut expliquer autrement son attitude et sa décision) conduit au meurtre, à la déchéance et à la solitude. Celle-ci est ici vue comme une punition volontaire motivée par la double honte d'avoir abandonné sa famille et d'avoir tué : Vivien ne sombre pas comme d'autres dans la clochardisation : il reste propre, ne mendie pas, ne boit pas. Il ne fréquente pas non plus les femmes et les hommes à la dérive qui hantent le quartier des Halles. Pendant de longues années, il n'est qu'un homme seul qui vit ainsi une sorte d'expiation. Cette histoire navrante devient ainsi celle de deux vies ratées et de deux solitudes avec un Mahossier, lui aussi meurtrier, arrêté, abandonné par sa femme, se retrouvant dans la situation qu'a connue Vivien vingt ans plus tôt. Une enquête qui laisser Maigret abattu, comme s'il n'avait pas pu raccommoder ces deux destins…

Lien : https://maigret-paris.fr/202..
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Après avoir lu l'un des premiers titres de Maigret (années 30), grand écart avec celui-ci, l'un des derniers (paru en 1971). Et pourtant, on retrouve toujours notre personnage bougon, calme, porté sur la boisson dans les bistrots de quartier, ému par ses enquêtes.
Ici, une enquête sur un personnage étrange, un clochard qui n'en a pas l'air. Maigret va essayer de reconstituer son itinéraire depuis vingt ans... Paris comme cadre, et plus spécialement Montmartre, dans un mois d'août où les inspecteurs ont déserté la PJ, donc focus sur Torrence, un inspecteur inhabituel...
Encore un excellent épisode, à la fois sombre et humain.
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Citations et extraits (14) Voir plus Ajouter une citation
[...] ... - "Ainsi, c'est vous Maigret ?" disait-il en tendant une main d'une propreté douteuse.

- On me dit que vous étiez déjà ici en 1946 ...

- J'y étais bien avant ça ...

- Vous avez retrouvé le nom de Marcel Vivien dans vos registres.

- Je ne garde pas les registres pendant vingt ans.

- Mais vous vous souvenez de lui ?

- Je m'en souviens très bien. C'était un bel homme, aimable.

- Combien de temps est-il resté chez vous ?

- De janvier à juin ...

- Vous êtes sûr qu'il n'est pas resté jusqu'en août ?

- J'en suis certain, parce qu'il a été remplacé tout de suite par une chichiteuse que j'ai dû mettre à la porte.

- Vivien n'était pas seul ... Connaissez-vous le nom de sa compagne ? ... Vous avez sans doute rempli une fiche pour elle aussi ...

- Il n'y avait pas besoin de fiche puisqu'elle ne couchait pas ici ...

- Vous voulez dire qu'ils ne vivaient pas ensemble ?

- Oui."

Maigret était stupéfait. C'était la chose à laquelle il s'attendait le moins. ... [...]
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[...] ... Ce qui attirait surtout le regard c'était, sur un lit de fer couvert d'une veille paillasse, un homme tout habillé qui était évidemment mort. Sa poitrine était couverte de sang caillé mais son visage était resté serein.

Les vêtements étaient ceux d'un clochard et contrastaient avec le visage du mort et ses mains. Il était assez vieux et il avait de longs cheveux argentés, avec des reflets bleutés. Ses yeux étaient bleus aussi mais leur fixité mettait Maigret mal à l'aise et le commissaire les lui ferma.

Il portait des moustaches blanches légèrement retroussées et une barbiche, blanche aussi, à la Richelieu.

A part cela, il était rasé de près et Maigret eut une nouvelle surprise en découvrant que les mains du mort étaient soigneusement manucurées.

- "On dirait un vieil acteur jouant le rôle de clochard," murmura-t-il. "Il avait des papiers sur lui ?

- Rien. Pas de carte d'identité. Pas de vieilles lettres. Mes inspecteurs qui font le quartier sont venus jeter un coup d'oeil et aucun ne l'a reconnu. Un seul croit bien l'avoir aperçu alors qu'il fouillait les poubelles ..."

L'homme était très grand et d'une carrure exceptionnelle. Son pantalon était trop court, avec un trou au genou gauche, et un vieux veston, une véritable guenille, se trouvait dans la poussière. ... [...]

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Il faisait un peu plus frais, malgré l’absence d’orage. C’était une légère brise qui commençait à souffler, poussant de petits nuages roses dans le ciel comme dans un décor d’opéra.
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C’est une femme qui n’a plus d’âge, comme plus de raison de vivre. Elle a les yeux un peu fixes, les prunelles délavées de celles qui ont beaucoup souffert…
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. La pluie de la veille n’avait pas rafraîchi l’air. Au contraire, il faisait plus chaud que les jours précédents et beaucoup d’hommes portaient leur veston sur le bras.
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Vidéo de Georges Simenon
"L'Homme de Londres", Georges Simenon, aux éditions le libre de poche
Mila Boursier, libraire à La Grande Ourse à Dieppe, nous parle du roman "L'homme de Londres" de Georges Simenon. Dans ce polar, l'auteur ne nous parle pas de Maigret, mais d'un homme qui prend une mauvaise décision un soir à Dieppe. de fil en aiguille, le lecteur parcourt les rues de la ville dans une haletante chasse à l'homme.
Un entretien mené à Dieppe, à la librairie La Grande Ourse.
Vidéo réalisée par Paris Normandie.
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