Nous sommes en 1920, à Budapest. Après la première guerre mondiale, la Hongrie est devenue un pays à l'agonie, qui s'apprête à être démantelé par le traité du Trianon.
La famille Károly est une famille de saltimbanques dans la misère, qui porte un petit cirque à bout de bras.
Le père, Vilmos, dompteur de lions de son état et sa fille, Berill, qui danse à merveille dans la cage aux fauves ont pourtant un numéro magistral qui fait sensation tous les soirs sous les projecteurs.
À vingt-et-un ans, Berril est d'une beauté à couper le souffle.
Mais il faut se résigner, vendre le cirque, fuir, tandis que le pays s'enfonce encore plus chaque jour dans son destin inexorable.
Berill se sent plus apatride qu'Hongroise, puisque ce cirque familial sillonne toute l'Europe de l'Est depuis qu'elle s'en souvient, de la Roumanie à la Bulgarie, de la Yougoslavie à l'Autriche. Maintenant Berill rêve de l'Amérique, mais c'est en Espagne tout d'abord, puis à Paris au cirque Bouglione que la famille pose ses amarres. La gloire continue malgré tout sous les projecteurs... le clan familial ici est sacré.
Une passion fauve est ma première incursion dans l'oeuvre de
Françoise Bourdin. Les premières pages de ce roman m'ont captivé dans cette histoire des gens du cirque, la magie des paillettes, l'odeur âcre de la sciure et l'envers du décor aussi.
L'Europe commence à se gangréner de convulsions qui annoncent des lendemains sombres. Malgré cela, les gens continuent d'aller au cirque et peut-être en ont-ils besoin plus que jamais. Besoin de rire, d'applaudir, de s'émerveiller.
Mais un soir derrière la cage, malgré un numéro rodé à la perfection, une lionne plus rétive qu'à l'accoutumée se jette sur la jeune femme, déchirant son visage qui sera défiguré à jamais...
Le récit est prenant dès les premières pages au travers de l'histoire d'une femme dont le destin va basculer vers un autre versant que celui qui est promis. Mais esquisser une histoire n'est pas dessiner un portrait. Et c'est sans doute à partir de là que je suis resté sur ma faim. Pourtant, tout était posée là aux premières pages pour me plaire : le monde du cirque, un personnage flamboyant à la trajectoire de vie foudroyée en plein vol, l'Europe à feu et à sang pour toile de fond...
Ce roman qui balaie une saga de quarante ans en seulement trois-cent vingt pages trouve peut-être ses limites dans cet exercice où le texte est bousculé par tant d'ellipses. Au final, ce sont des personnages à peine esquissés qui défilent au gré des décennies et des capitales, manquant totalement d'aspérités. Mais il faut un souffle et des pages pour construire une fresque.
Certes, c'est une histoire divertissante, mais que je risque vite d'oublier. J'ai pensé à ces personnages en quête de profondeur et de vertige qui attendaient peut-être eux aussi autre chose... En fait, c'étaient des personnages en quête d'auteur. C'est dommage.