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EAN : 9782265115705
352 pages
Fleuve Editions (24/08/2017)
4.5/5   27 notes
Résumé :
Paris-Alger-Ravensbrück. Trois lieux pour retracer l'existence d'Yvonne Bellot, née Yvonne Brunel-Neuville, dite " Yo Laur ", fille d'artiste, artiste elle-même et arrière-grand-tante auréolée de mystère de l'auteure et narratrice de ce livre. Enfant douée dans l'ombre de son père, élève talentueuse en quête de modernité, observatrice singulière dans la casbah d'Alger, Yo Laur fut tout cela, et aussi une épouse toquée de son homme, une frondeuse, une aventurière... ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (15) Voir plus Ajouter une critique
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Certains livres arrivent par hasard et par chance.

J'allais partir de cette soirée d'anniversaire. Il se faisait tard. Un mec jouait de la guitare dans le petit café où j'avais été convié. J'avais fini mon mojito et la nuit était rythmée par les premiers départs. Je n'avais pas parlé à tous ceux que je voulais, comme c'est le regret qui conclut parfois ce genre de réunion. En sortant, je croise une amie qui me tance gentiment de m'avoir encore manqué. Alors je reste encore un peu. En face d'elle, il y a Marie Eugène, éditrice de chez Fleuve, que je ne connais pas. Elle me parle de ce roman de Marie Charrel. Je lui oppose paresseusement l'amas de livres qui attendent ma lecture et dont je commence à comprendre au fond que je n'en viendrai jamais à bout et que c'est toute la beauté de la chose. Mais ici, elle me plait. Sa flamme et sa passion me touchent. Quelque chose de profond s'écoule dans ce livre, je le devine déjà. Je sais que lorsqu'il arrivera, je le lirai, sourd à toutes mes autres obligations. Parce qu'il y avait dans son regard quelque chose d'impérieux, le reflet d'une émotion sincère. Parce que je sais d'ores et déjà que je ne résisterai pas à son titre mystérieux et très beau.

« Je suis ici pour vaincre la nuit ». Et ce nom étrange en sous-titre : « Yo Laur (1879-1944) »




Les romans sont des secrets qu'on arrache à l'obscurité. A l'indifférence du temps qui passe et qui, inexorablement, charrie l'oubli. Il arrive que l'on n'écoute plus les voix des disparus dans le silence, dans les non-dits qui hantent les familles, dans les trous de mémoires. Mais parfois, on s'arrête, le présent s'estompe et on entend la rumeur de ceux qui nous ont précédés. Lire ce livre c'est accorder cette attention-là. le sentiment que leur tragédie et leur passage sur terre aura besoin de nous pour s'incarner, pour qu'on se souvienne de leur nom et de leur importance. Rien n'est plus triste que ces noms que l'on a oubliés et qu'on balaie d'un oeil distrait quand on les croise dans les cimetières ou sur les monuments aux morts.

Les artistes qu'on oublie… Et leurs vies fulgurantes balayées par une postérité arbitraire.

Ce livre est un passé qu'on recompose. Un tableau croisé au hasard d'un repas de famille. Une lumière particulière. Un regard singulier qui transperce la toile. Quelle en est l'histoire ? Qui s'en souvient encore ?

Dans ce livre, on traquera les mots des vivants avant qu'ils se perdent dans la mort ou dans l'extrême vieillesse. Quand une histoire s'éteint avec ses derniers témoins, quand elle perd le souvenir des visages qui la rendaient vibrante. C'est ainsi que l'auteure va raconter son aïeule, Yo Laur, à partir d'un tableau de famille qui a retenu son attention. Elle va tout faire pour évoquer le parcours de cette femme mystérieuse. Recomposer sa vie pour comprendre son passé. Celui qu'elle n'a pas connu et qui pèse sur elle comme une ombre et une fascination.

Marie Charrel met d'abord en scène sa recherche. La biographe devient le sujet, la structure encadrante du récit, et sa quête est aussi passionnante que le personnage dont elle suit les traces. Peu à peu le voile se lève, de témoignages en archives, en écumant les bibliothèques. Elle fait la lumière sur ce nom qui peu à peu s'effaçait.

Yo Laur était la fille d'un peintre. Talentueux et assez reconnu, peignant de manière classique, bien souvent des chats. Sa fille va lui emboiter le pas et creuser le même sillon, jusqu'à égaler et surpasser son père. Elle va étudier l'art. Observer la révolution des fauves, subir un choc esthétique devant l'oeuvre de Matisse. Elle va surtout faire de sa vie une aventure. Elle est insaisissable et libre. Elle est une artiste ambitieuse en quête de son identité. Elle va épouser un aviateur et voyager, connaître en particulier la lumière d'Algérie et sortir des clichés coloniaux pour peindre des portraits sublimes de femmes arabes, sans les breloques et le folklore qu'on leur apposait alors. Elle ne cessera de dessiner. de traverser son époque et d'y apposer son trait. Jusqu'à sa déportation à Ravensbruck.

C'est le lieu du premier chapitre, une sorte de prologue. On découvre la mémoire de cette femme, son ressenti écrit en italique. On sait que c'est ici que ça finira, dans ce terrible camp. Et comme toujours quand on se projette dans les mots de ceux qui ont subi cette horreur, le regard se fait autre, grave, comme pris à témoin et l'émotion devient puissante et douloureuse. Et puis il y a le présent de la narratrice qui va déterrer ce passé sous les silences, dans les bibliothèques et dans les correspondances, dans les réponses inattendues que ses bouteilles à la mer provoquent. Dans son effort de mémoire qui ranime les fantômes, leurs joies et leurs souffrances qui sommeillaient dans les greniers et les malles entassées, oubliées dans un coin.

Je me suis dit qu'on oubliait les gens de la même façon, quand on arrête de rabâcher leurs anecdotes. Je me suis dit qu'il fallait prendre garde au radotage des anciens. Je me suis dit qu'il fallait attentivement regarder les photos, les tableaux, les mots tracés d'une plume désuète, car sommeillent là nos épopées.

Car plutôt qu'une biographie classique, on est entrainé dans le souffle d'un destin, dans du romanesque pur. Dans un portrait de femme absolument fascinant. Puisque cette Yolande Bellot, nom anodin dormant sur les registres a l'allure d'une héroïne de roman. En fouillant dans le passé familial, en interrogeant sans trop d'espoir ceux qui s'en souviennent encore un peu, de fausses pistes en fausses pistes, la narratrice arrache cette figure à la nuit qui la menaçait. Ce beau titre évoque autant sa tâche que le destin de son héroïne.

En faisant cela, elle ravive son monde. J'ai songé aux premières scènes du Titanic de James Cameron, quand le passé retrouve ses couleurs et ses protagonistes à la grâce d'un dessin, miraculeusement retrouvé. J'ai songé au souffle que j'ai tant aimé dans le Patient anglais, à ces vies passionnées, emportées, émancipées, envoyant les usages du monde au diable. J'ai songé à ce pan de l'histoire de l'art que Yannick Grannec a décrit dans le Bal mécanique, cette correspondance du présent au passé.

J'aime ce qui nous enracine. J'aime ce qui nous rappelle que l'on fait partie de cette époque, de cette histoire, et qu'on n'est pas en paix avec ce passé-là, qu'il faut inlassablement lui rendre sa dimension humaine. Pour autant, il ne s'agit pas d'un livre de pur témoignage, ou seulement d'une oeuvre de mémoire. Très vite, on se moque de savoir ce qui est réel et ce qui est inventé. On est simplement emportés par l'audace de cette femme qui très jeune a brisé les conventions et les carcans pour vivre une vie à sa hauteur, librement, farouchement, avec un anticonformisme qui n'est pas sans rappeler Alexandra David Neel. On traverse les temps qu'elle a vécu avec son audace et son courage comme seuls flambeaux. Et ce bel amour qu'elle nourrit toute sa vie pour cet époux de qui elle est si souvent séparée. L'état d'esprit de Yo Laur finit par irradier le roman. Par inspirer. Elle est une exploratrice, une aventurière de la lumière, une triomphatrice de la nuit, dans son art et dans sa vie.

Au bout du livre, ressentant l'opiniâtreté des recherches de l'auteure, partageant les souvenirs de Yo Laur, ressentant sa sensibilité très fortement, dans ces chapitres en italique, j'ai eu le sentiment de me souvenir. de l'écriture du livre et de la trajectoire de cette femme extraordinaire. de connaître sa voix. de connaître son nom pour ne plus l'oublier.

Baudelaire, parfois a tort.
Aux yeux du souvenir, le monde peut être immense.
Et parfois, il arrive à la nuit d'être bel et bien vaincue,
Puisqu'à présent je n'oublierai pas le nom de Yo Laur.
Lien : http://www.nicolashouguet.co..
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Lu dans le cadre de la Rentrée Littéraire Cultura
L'auteur, journaliste au monde, fait le pari d'extraire des ténèbres « Yo Laur » pseudonyme de son arrière grand-tante en reconstituant son histoire s'étendant de Paris à Alger pour se finir à Ravensbrück, alors qu'elle n'était pas d'origine juive.
Dans le cadre des lectures de la rentrée, je lis pour Cultura, les épreuves non corrigées. Il faut en tenir compte dans le ressenti que je peux avoir.
Pour moi la première partie, devrait être recentrée sur le pourquoi Marie Charrel veut « ressusciter » Yo Laur, plus de ressenti aurait été bienvenu. L'aspect très positif a été de mettre l'accent sur les difficultés de recherche. A l'ère du tout informatique, on pourrait croire que c'est facile mais pas du tout. J'ai aimé les méandres par lesquels l'auteur doit passer.
Le lecteur peut penser que ces premières pages sont touffues, mais il doit vraiment continuer, car Yo Laur va nous apprendre beaucoup de choses sur la place des femmes et des artistes femmes à l'époque.
Dans la deuxième partie Yo Laur s'affranchit de la routine parisienne et cherche la vraie Yo Laur, pas la peintre qui est la succession de son artiste de père.
Une femme en devenir et une artiste à réinventer…
A Alger, la bataille est rude pour arriver peindre la vérité et ne pas continuer à représenter les fantasmes des hommes occidentaux :
« - Si toutes les Algériennes réagissent comme vous, je ne peindrai jamais de vraies femmes du pays.
- Parce que tu imagines en trouver à Alger ? Elles ne sont pas ici.
- Alors où sont-elles ?
- Loin. Là où les Français ne vont jamais.
- Emmène-moi.
- Pourquoi ?
- Parce que je ne veux plus peindre de babioles imaginaires aux oreilles des filles. »
En filigrane, souffle l'esprit d'Assia Djebar même si cette dernière est née plus de cinquante années après Yo, qui mieux que cet écrivain pourrait nous éclairer sur l'Algérie et nous faire comprendre que Yo Laur fut une pionnière.
A côté de son époux aviateur, elle sait allier sa vie d'artiste peintre, d'épouse et de femme toujours dans le mouvement de la vie.
Ce n'est pas une contemplative.
Et puis le lecteur arrive à la dernière partie : Ravensbrück. Mais qu'est-ce qui a pu la conduire là ?
Un mystère que l'auteur nous fait partager lorsque le hasard lui permet de se plonger dans les dessins de Yo Laur qui n'a de cesse de montrer ce quotidien monstrueux.
Il n'y a pas de mots pour décrire le quotidien de ces femmes et de celles que l'on nommait « les vieilles ».
Par quel miracle le témoignage dessiné de Yo Laur a-t-il survécu, difficile à dire de façon claire.
Une chose est certaine c'est que Marie Charrel est immergé dans tout cela, et qu'elle n'en a pas terminé avec cette histoire. Elle doit être hantée par ce destin hors du commun et en même temps le destin collectif de cette femme qui n'aurait pas dû se trouver là. Cette partie de l'histoire est une traversée dans ce que chacune de ces femmes a essayé de laisser, des traces de leur passage, elles ont tenu avec pour seule énergie celle de revoir un mari, un fils…
« On achève bien les femmes, ici. Sous un ciel crayeux, indifférent, on les tue. »
J'ai envie de terminer ma recension en laissant la parole à Yo Laure. J'ai une pensée émue pour l'auteur qui a accompli une mission extraordinaire.
Chantal Lafon-Litteratum Amor 23 août 2017
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Telle une détective, Marie CHARREL livre ses multiples explorations dans l'objectif d' exhumer les secrets de la vie d'une arrière-grand-tante, Yvonne Bellot artiste peintre, secrets qui planent comme un voile sur l'identité même de l'auteur.
Ce roman pourrait donc se résumer à une quête identitaire à travers le temps. Pourtant, si cela constitue la toile de fond, Marie Charrel emporte le lecteur dans ses travaux approfondis en décrivant avec précision, à travers les années, le contexte social, historique et environnemental dans lequel une femme artiste s'est démenée pour franchir les barrières du conformisme de la fin du XIXème siècle.
C'est à ce titre que l'histoire prend un caractère documentaire, en retraçant notamment l'évolution de la peinture, l'arrivée de l'impressionnisme et de ses futurs grands hommes, le sexisme, la pudeur excessive et tous les tabous contre lesquels Yvonne Bellot dite “Yo Laur” s'est érigée en frondeuse pour assouvir sa passion de la peinture, passion qui lui servira à plusieurs occasions comme une arme pour défendre les valeurs qu'elle a revendiquées tout au long de sa vie jusqu'à sa fin tragique.
L'auteur construit ainsi ce roman, alternant les notes laissées par Yo Laur jusqu'alors ignorées et son récit fait à partir de témoignages recueillis sur la base de ces précieux messages. le tout constitue une oeuvre très riche où se succèdent chapitres émouvants et passages plus descriptifs, dans une écriture très soignée. S'il m'est parfois arrivé de trouver un peu trop d'informations au détriment du romantisme, j'ai beaucoup apprécié la manière dont les recherches ont été conduites, avec courage et acharnement.
La sincérité qui se dégage du roman m'a aussi amenée à m'interroger sur la part de vérité et d'imaginaire. N'est-ce pas là aussi une preuve du talent de Marie CHARREL?
Enfin, cette lecture n'a pas été sans me rappeler l'histoire de Charlotte, heroïne de l'excellent roman de David Foenkinos, qui présente quelques similitudes de parcours de deux artistes peintres restées dans l'ombre. Dans les deux cas l'émotion est bien présente et invite à découvrir l'oeuvre de ces femmes.
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La narratrice, alors âgée de 8 ans, remarque lors d'un dîner chez un oncle un petit tableau, « un petit tableau de rien du tout » représentant une jeune mauresque. Ce portrait l'attire, comme s'il avait quelque chose à lui révéler.

A son grand étonnement, les convives réunis autour de la table ne veulent pas répondre à sa question : qui a peint ce tableau ? Bien au contraire, un grand sentiment de malaise semble se déployer.

Ce n'est qu'arrivée à la trentaine, que la jeune femme va découvrir que c'est une de ses grands-tantes, Yo Laur, qui est l'auteure de ce portrait. Elle va alors partir sur les traces de cette ancêtre dont personne ne parle.

Elle va ainsi découvrir que Yo Laur était une artiste connue à son époque, notamment pour ses scènes de chats et dans sa maturité ses portraits de femmes peints à Alger.

Dans le même temps, la jeune femme mène une recherche sur l'identité de son père biologique.

L'auteure donne la parole à tour de rôle dans de courts chapitres successifs à la narratrice et à Yo Laur. On découvre que cette artiste était une femme éprise de liberté, qui a dû batailler ferme contre son milieu bourgeois pour mener sa vie comme elle l'entendait. Elle était persuadée que la Vie n'attend pas : » Telle est la leçon du moment : il ne faut jamais attendre. Il convient de se précipiter sur tout, de cueillir les rencontres sans délai, d'aimer à n'en plus finir, dans la démesure, de ne jamais avoir peur de l'excès, mais au contraire de l'aimer jusqu'à l'ivresse. Il est la vie. La vie n'est pas l'attente ni la pudeur. Elle n'est pas douce. Avec les dents, il faut tout lui arracher ; avec les crocs, il faut tout dévorer, tout salir, semer le bazar partout jusqu'à s'abîmer la peau, se bousiller les os, sinon à quoi bon ? »

Yo Laur est le pseudonyme que s'est choisi Laure, Alice, Yvonne Brunel pour bien se différencier des tableaux de son père, artiste reconnu à la fin du 19ème siècle. On peut trouver des photos de ses toiles, notamment sur des sites d'enchères américains car elle est très côtée aux Etats-Unis alors que complètement oubliée en France.

» Je suis ici pour vaincre la nuit » est un remarquable portrait d'une femme qui est restée fidèle à ses convictions jusqu'au bout. Elle a été déportée à Ravensbrück en Août 1944 alors qu'elle est âgée de 66 ans et s'y éteindra le 10 Novembre 1944.

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C'est un tableau de son enfance qui lui a fait croiser la route d'Yvonne Bellot pour la première fois, et c'est ce tableau qui déclenche chez notre narratrice et auteure une soif de vérité. Yvonne Bellot, dit Yo Laur, a eu une vie riche ! Enfant douée pour la peinture dès son plus jeune âge, c'est dans cet art qu'elle s'épanouira toute sa vie, cette vie qui la mena à Paris, Alger, mais aussi Ravensbruck. Marie Charrel fait alors toute la lumière sur Yo Laur et sur ce mystère qui l'a toujours entouré.

C'est un livre que j'avais vu passer à quelques reprises sur les réseaux sociaux, ne retenant que le titre Je suis ici pour vaincre la nuit. L'occasion m'a été donnée de le lire et je me suis enfin donc intéressée à son contenu. Pour être tout à fait honnête en lisant sa quatrième de couverture, j'ai laissé échapper un petit "ah...", ce petit "ah..." qui ne laissait pas présager que finalement Marie Charrel me bouleverserait totalement à travers son livre qui est au final, je l'avoue de suite, un coup de coeur surprise pour moi !

C'est dans une véritable enquête que se lance Marie Charrel pour connaître enfin qui se cache derrière Yo Laur. Durant toute son enfance, ses questions ont été éludées, et le mystère planait autour de cette femme. Bien décidée à tout découvrir, l'auteure ne s'attendait pas à faire la connaissance d'une femme qui a profité de la vie autant qu'elle pouvait, qui a défendu ses idées et son art à travers les décennies, qui a aimé plus qu'elle ne le pensait possible son grand amour et qui a terminé sa vie dans les baraques de Ravensbruck.

Les chapitres alternent entre la vie de Yo Laur qui nous est retracée et l'avancement dans cette quête que mène notre auteure. Je suis ici pour vaincre la nuit est un témoignage sur Yo Laur, mais pas que. C'est l'histoire d'une femme, d'une époque, d'un contexte social et artistique, c'est une quête de soi aussi pour Marie Charrel, celle d'en savoir plus sur ses origines et cette aïeule.

Il m'a été impossible de reposer ce livre une fois commencé. L'écriture de Marie Charrel est tellement prenante, passionnée même qu'elle nous happe littéralement. On ressent toute l'énergie que l'auteure a mise dans cette quête, toute la passion qui l'a animé pour mener celle-ci. Yo Laur a véritablement hanté la vie de Marie Charrel, certainement qu'elle la hante encore d'ailleurs comme elle nous hante maintenant un peu. On ne peut qu'être bouleversé par la troisième partie du livre, celle où notre peintre est emmenée à Ravensbruck. Comment rester insensible ? Comment ne pas être encore et toujours horrifiée par ces conditions de vie dans ce camp ? On ne peut pas, on frissonne, on s'émeut et on s'anime d'une colère sourde...

Comme dit plus haut, Je suis ici pour vaincre la nuit a été un vrai coup de coeur ! J'ai littéralement dévoré ce roman, me laissant entraîner par la plume de Marie Charrel par son histoire et surtout par l'histoire de Yo Laur. J'ai trouvé cette femme tout simplement incroyable, et même fascinante, par la vie qu'elle a mené, par son talent de peintre et que j'ai pleuré en lisant la fin de sa vie.

Ce roman je ne peux que vous conseiller de le lire sans une seule hésitation ! Laissez vous transporter par cette enquête que mène Marie Charrel sur la vie d'Yvonne Bellot, vous découvrirez deux femmes, oui deux, qui ont soif de liberté...

Merci à Babelio pour cette si belle découverte !

Je suis ici pour vaincre la nuit de Marie Charrel est disponible chez Fleuve Éditions.
Lien : http://ladoryquilit.blogspot..
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Citations et extraits (21) Voir plus Ajouter une citation
Prodige, prodige, ils répètent tous ce mot comme si cela faisait de moi quelqu’un d’exceptionnel. Il est vrai que j’ai su lire et écrire avant tous mes camarades il est vrai que je sais peindre aussi bien qu’un adulte alors que les autres enfants ne savent pas dessiner un cheval, un chien ou même un oiseau : leurs animaux ressemblent à des patates, ils dessinent ce qu’ils sont dans leur tête avec leurs doigts indécis au lieu de dessiner ce qu’ils voient en oubliant leurs mains. Ce n’est pourtant pas compliqué, il a suffi que papa me l’explique une fois pour que je le comprenne : peindre, c’est d’abord regarder. Ceux qui ne savent pas voir ne seront jamais des artistes, ils seront juste des hommes, quel ennui.
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Et puis il y a les autres, ceux qui comme José et moi savent, sentent dans leur chair le malheur sur le point d’advenir. Ceux qui ne nient pas l’évidence et cette certitude-là est terrifiante, car il est certain qu’Hitler ne s’arrêtera pas à la Pologne. Ce n’est pas seulement une intuition, il suffit de se renseigner un peu, de parler aux Juifs qui ont émigré d’Allemagne depuis le début des années 1930 pour se réfugier à Paris, Londres, ou plus loin encore. Cette guerre n’est pas seulement un conflit de territoire. C’est une guerre des mondes.
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Je me souviens d’une discussion que ma mère avait eue avec oncle Albert, lorsque j’étais enfant. Maintenant que tous les continents avaient été conquis, disait-elle, qu’il ne restait plus aucune terre ou presque inconnue de l’homme et que le commerce tissait des liens entre toutes les villes du monde, puisque les frontières ne seraient bientôt plus que théoriques, les différences entre les peuples et les races ne tarderaient pas à s’effacer. C’était la suite logique. Le sens de l’histoire.
Elle avait tort. Plus les lignes entre les Etats s’estompent, plus les frontières que les hommes portent dans le cœur se creusent. Plus les utopistes clament que la nouvelle citoyenneté est mondiale, plus ceux qui se lèvent pour défendre une identité locale sont nombreux.
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Il y a les livres qui sauvent et il y a ceux qui cognent. Ceux dont les mots rentrent au-dedans pour renverser l'ordre établi et modifier les configurations par défaut. Ceux qui vous poussent hors de la caverne. Grâce auxquels vous comprenez que vous n'avez rien vu. Que vos certitudes les plus ancrées reposent sur du sable. Qu'il convient de tout reprendre de zéro. C'est une joie et un vertige à la fois.
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Puis soudain, dans l’après-midi : la côte africaine. Que j’aime ce mot, l’Afrique ! Très vite, la première cité arabe se dessine : quelques formes blanches posées sur une montagne, comme par accident. Le rêve prend naissance ici et une certitude m’emplit désormais le cœur : c’est à cela que servent les voyages. Ils agrandissent l’espace qui nous entoure. Ils font de nous des nains insoumis cernés de terres à conquérir, nous qui jusque-là étions des géants malhabiles au milieu de minuscules maisons de poupées.
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Videos de Marie Charrel (12) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Marie Charrel
Les Éclaireurs de Dialogues, le podcast de la librairie Dialogues, à Brest.
Dans cet épisode, nos libraires du rayon littérature, Julien, Rozenn, Laure et Nolwenn, vous livrent leurs premiers coups de coeurs de la rentrée de janvier 2024.
Voici les romans conseillés dans cet épisode :
La Fille de Lake Placid, de Marie Charrel (éd. Les Pérégrines) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/23109440-la-fille-de-lake-placid-marie-charrel-les-peregrines ;
Ceux qui appartiennent au jour, d'Emma Doude van Troostwijk (éd. Minuit): https://www.librairiedialogues.fr/livre/23012111-ceux-qui-appartiennent-au-jour-emma-doude-van-troostwijk-les-editions-de-minuit ; 
Du même bois, de Marion Fayolle (éd. Gallimard) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/22871516-du-meme-bois-marion-fayolle-gallimard ;
Mon nom dans le noir, de Jocelyn Nicole Johnson (éd. Albin Michel) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/23047285-mon-nom-dans-le-noir-jocelyn-nicole-johnson-albin-michel ; 
Une simple intervention, de Yael Inokai (éd. Zoé) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/23113442-une-simple-intervention-yael-inokai-zoe ; 
La Langue des choses cachées, de Cécile Coulon (éd. L'Iconoclaste) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/23140391-la-langue-des-choses-cachees-cecile-coulon-l-iconoclaste ; 
Arctique solaire, de Sophie van der Linden (éd. Denoël) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/22914881-arctique-solaire-sophie-van-der-linden-denoel ; 
Kintsugi, d'Isabelle Gutierrez (éd. La Fosse aux ours) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/23109315-kintsugi-isabel-gutierrez-fosse-aux-ours.
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