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ICM Partners (Autre)
EAN : 9782823619713
256 pages
Editions de l'Olivier (28/04/2023)
3.62/5   144 notes
Résumé :
Stella maris est l’expression latine signifiant étoile de mer, c’est aussi comment on appelait Marie, la mère de Jesus, la Vierge des catholiques.

1972. Black River Falls, Wisconsin. Alicia Western, vingt ans, est admise à sa demande dans une institution psychiatrique.

Au cours de neuf séances avec son thérapeute, elle nous livre les clés de son monde intérieur. Un monde tourmenté, peuplé de créatures chimériques et de figures puissa... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (22) Voir plus Ajouter une critique
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Le Passager prend place en 1980 : Bobby Western, ancien physicien, qui a dilapidé la fortune de sa grand-mère pour devenir pilote de Formule 2, est désormais plongeur, enchaînant les missions risquées pour retrouver, en eaux profondes, objets et corps immergés. Lors d'une opération, il pénètre dans un avion qui s'est crashé au fond de l'océan. La boîte noire a disparu. le manifeste de vol compte 10 passagers pour seulement 9 corps retrouvés. Des hommes du gouvernement interrogent Bobby sur ce passager manquant, cambriolent son appartement, en font une cible recherchée, alors que les documents personnels de son père décédé, scientifique qui a travaillé sur le projet Manhattan au côté de Robert Oppenheimer, se sont également volatilisés.

L'action semble lancée et le titre du livre explicité : il s'agira de découvrir qui est le 10ème passager, au coeur d'un récit qui raccrochera les wagons avec l'histoire personnelle de Bobby. Il n'en sera rien. Portant le deuil de sa soeur Alicia Western, qui s'est suicidée une dizaine d'années plutôt, Bobby passe ses journées dans des bars, à philosopher avec ses amis, à questionner un collègue sur son expérience de la guerre du Vietnam, à chercher du réconfort platonique auprès d'une proche transgenre, à visiter sa grand-mère Ellen, seul membre de sa famille encore vivant, à l'exception d'un oncle dément. Héros de roman noir sans raison de vivre, c'est à peine s'il tentera de résoudre l'affaire. La fuite en avant de Bobby est entrecoupée des discussions de sa soeur, Alicia, atteinte d'une maladie psychologique inconnue, avec ses amis imaginaires, et en particulier un nain, qui possède des nageoires à la place des bras, nommé le Kid.

Stella Maris se déroule, lui, en 1972 alors qu'Alicia Western, âgée de 20 ans, est internée dans l'institut psychiatrique du même nom. Il contient 250 pages de séances entre Alicia et son psy, le Dr. Cohen, où la jeune femme revient sur sa carrière précoce de mathématicienne, qui l'a amenée à côtoyer les plus grands génies du siècle, ainsi que sur son histoire d'amour impossible – un amour chaste et puissant – avec son frère Bobby. Si ce second texte n'a pas pour rôle d'éclaircir les zones d'ombres de la trame du Passager, il donne toute sa dimension intellectuelle au projet global, au point de rendre impossible l'analyse du premier sans avoir lu le second.

Au tout début du Passager, page 17, alors que le lecteur n'a pas encore trouvé ses marques, le Kid dit à Alicia : « Qu'est-ce que tu crois ? Qu'à la dernière minute le petit Bobby la Bourlingue va se réveiller d'entre les morts pour voler à ton secours ? Avec ses éperons d'argent et tout le bastringue ? Il est hors du coup, Marie Lou. Depuis qu'il s'est enrubanné la tête dans son bolide. » Stella Maris débute avec une sentence similaire, page 11, racontée par la jeune femme à son psy : « J'avais quitté l'Italie. Où mon frère était dans le coma. On voulait absolument que je donne l'autorisation de le débrancher. Que je signe les papiers. Alors j'ai fichu le camp ». Dès lors, les enjeux changent. le Passager et Stella Maris, portés respectivement par l'ex-physicien, Bobby, et l'ex-mathématicienne, Alicia, deviennent une illustration de l'expérience physique du Chat de Schrödinger et une schématisation du Ruban de Möbius, bande repliée sur elle-même, conceptualisée par les mathématiciens Möbius et Listing.

Dans un premier temps, en 1972, Bobby Western, dans le coma, est simultanément vivant et mort, dans le sens quantique exposé par Schrödinger. Les deux textes ne permettront jamais de trancher entre un état ou l'autre. En 1980, soit Bobby est sorti du coma et a repris sa vie, faisant du Passager un récit réel ; soit Bobby est toujours entre la vie et la mort, tout le livre se déroulant dans son cerveau, ce qui expliquerait à la fois la difficulté pour l'histoire de résoudre ses propres énigmes, et la rencontre dans le « monde réel » entre Bobby et le Kid, personnage créé par sa soeur ; ainsi que l'idée inconcevable qu'Alicia se soit suicidée alors qu'il y avait encore une chance que son frère sorte du coma. Mais, et c'est là qu'intervient le cycle infini du Ruban de Möbius : si Bobby est toujours dans le coma, cela signifie qu'Alicia ne s'est pas suicidée et qu'elle est probablement coincée à Stella Maris, attendant son réveil ; mais si elle ne s'est pas suicidée, le deuil de Bobby – et donc l'histoire du Passager – n'aurait aucun sens. « L'expérience, répétée ad-ce-que-vous voulez, montre qu'une seule particule peut passer en même temps par deux ouvertures distinctes », nous dit-on dans Stella Maris. Il s'agit peut-être là du mantra des deux romans.

Il faut alors voir le diptyque comme une version physico-mathématique de Roméo et Juliette de Shakespeare : l'histoire d'amour, tragique et impossible, entre un frère et une soeur, qui chacun porte le deuil de l'autre, alors que leur âme soeur l'attend dans une autre dimension quantique du monde. le « passager » du titre n'a donc rien à voir avec le crash de l'avion. le « passager » est simultanément Bobby et Alicia, deux êtres qui voyagent entre les strates des possibles, avec l'espoir fou, qu'ils conçoivent à peine, de se retrouver un jour – Alicia dira d'ailleurs au Dr. Cohen que mathématiquement, on ne peut pas réduire la probabilité de l'existence d'une vie après la mort à zéro.

John Sheddan, un ami de Bobby, lui dit : « le temps et la perception du temps. Deux choses très différentes, j'imagine. Tu as dit un jour que le terme même d'instant T était une contradiction puisqu'une chose ne saurait exister qu'en mouvement. Que le temps ne saurait être circonscrit dans une brièveté qui contredirait sa définition même. » le Passager et Stella Maris ne peuvent pas se comprendre comme une succession de moments chronologiques. Il faut les prendre comme un tout, perpétuellement en mouvement, qui boucle sur lui-même – l'idée de mouvement perpétuel se traduit aussi dans les deux romans par l'absence de tiret pour initier les dialogues, qui s'enchaînent en continu.

Le Passager et Stella Maris – et leur deux personnages principaux – fonctionnent comme des aimants qui s'attirent et se repoussent. En s'éloignant l'un de l'autre, ils ne font que se rapprocher, pour s'éloigner à nouveau dans un cycle infini. À ce titre, les magnifiques couvertures de la version française des livres, aux Éditions de l'Olivier, synthétisent les enjeux : si on les place dans l'ordre chronologique, Bobby et Alicia s'éloignent, mais si on les replace dans leur ordre de sortie en librairie, Bobby et Alicia se rapprochent.

Alice et Bobby sont les facettes d'une même pièce, qui contre toute attente est la réalité – mais une réalité abstraite : la première incarne le côté face (les mathématiques), le second le côté pile (la physique). Ces deux disciplines ont pour particularité de pouvoir expliquer le monde et, dans un même mouvement, le rendre indicible. C'est ce qu'il se passe avec le Passager et Stella Maris : on sort de la lecture avec simultanément l'impression de mieux cerner le sens de l'existence, et en même temps avec la sensation d'avoir perdu tous ses repères. C'est ce qu'il faut comprendre quand Alicia raconte que le mathématicien Gröthendiek parvient à « un niveau d'abstraction logique totalement original » : il est question à la fois du monde dans lequel se déroule le livre, et du livre en lui-même.

Contrairement aux apparences, le Passager et Stella Maris pourraient bien être des romans post apocalyptiques, qui partagent plus de liens avec La Route, le chef-d'oeuvre de Cormac McCarthy, qu'on ne pourrait le croire au premier abord. Les deux livres sont hantés par le bombardement atomique d'Hiroshima, qui est une apocalypse en soi, et dont le père de Bobby et Alicia est à l'origine. L'explosion constitue le fait générateur des deux romans et le début de la dégradation de la réalité. La figure du père et le questionnement de ses actions planent sur les textes comme un spectre.

Dans ce monde ravagé, le Passager et Stella Maris proposent une réflexion inouïe sur le sens de la vie, sur la réalité et la fiction. Cormac McCarthy nous dit que peu importe la vie ou la mort, peu importe la réalité ou la fiction, nous sommes portés par les mêmes histoires. Quelle différence existe-t-il entre les conversations que Bobby entretient dans les bars avec ses amis fantasques et celles que sa soeur développe avec ses amis imaginaires ? Dans le Passager, Odier est mort, Broman perd la tête, John Sheddan est en bout de course. Tout se délite. Bobby est le seul point de stabilité. Dans Stella Maris aussi, Alicia, bien que considérée comme instable, constitue le seul point fixe. Dans un monde fou en pleine déliquescence, seuls les conteurs peuvent maintenir la cohérence, et ce indépendamment de leur statut propre. D'ailleurs Alicia explique bien au Dr Cohen qu'elle ne voit pas des personnes, mais des personnages, tandis que dans le Passager, on peut lire : « Je sais que les personnages de l'histoire peuvent être réels ou imaginaires et qu'une fois qu'ils seront tous morts il n'y aura plus de différence. »

Le Dr. Cohen parle avec Alicia dans l'espoir que les mots maintiendront sa patiente en vie. C'est peut-être aussi ce que fait Cormac McCarthy avec le Passager et Stella Maris : écrire pour rester vivant. Mais il le fait en s'inscrivant dans une histoire, fictionnelle ou réelle, de notre monde. Il mélange les constructions à la William Faulkner, les mystères policiers d'Edgar Allan Poe, la folie de Thomas Pynchon – notamment lors des phases d'hallucination d'Alicia –, les dialogues minimalistes mais ultra significatifs d'Ernest Hemingway, l'autodestruction du récit chère à David Foster Wallace, le récit des grandes affaires politiques à la James Ellroy – confer l'histoire de l'assassinat de John et Robert Kennedy, dans laquelle Oswald n'aurait été qu'un pantin –, ou encore la monstruosité de H.P. Lovecraft – la folie d'Alicia débute avec un rêve où elle entrevoit des sentinelles garder une porte au-delà de laquelle se trouve une puissance maléfique, nommée l'Archatron. C'est un peu comme si Cormac McCarthy, à l'aune de la mort, tentait le tout pour le tout et intégrait tous les grands auteurs américains dans un diptyque unique, pour créer l'oeuvre la plus emblématique de son époque. Face à cette ambition impossible, Alicia répondrait que la probabilité qu'il ait réussi est loin d'être nulle.

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Entretiens entre un psychiatre et Alicia, la soeur de Bobby Western du roman « Le passager ».

Ce n'est pas une lecture facile. D'abord, sur le plan de la forme des entretiens, sans tirets pour marquer le changement d'interlocuteur ni d'initiales pour les identifier, si bien qu'il arrive que je doive relire un paragraphe pour le situer.

D'autre part, il est beaucoup question de mathématiques, de science et de philo. Je l'avoue, je ne connais pas grand chose aux abstractions de haut niveau de ces domaines. Je reconnait parfois un nom ou l'autre, mais ne me demandez pas ce qu'est la topologie, par exemple. Mais la lecture d'un roman n'est pas une activité scolaire dont l'objectif serait de tout savoir.

Ce que j'ai lu, c'est le parcours d'une petite fille exclue parce qu'elle, elle comprend trop et se souvient trop. Se consacrer aux mathématiques, ne pas pouvoir dormir avant d'avoir trouvé la solution, mais la solution devient une hypothèse d'un ensemble plus grand encore, jongler avec l'infini ou l'infiniment petit. Une adolescente qui vit dans un monde à part, qui est aux prises avec un amour impossible, des personnages qui lui rendent visite et toujours, l'obsession de la mort et le spectre des bombes atomiques de son père.

Au final, un roman dense, mais qui en plus d'une expérience humaine hors du commun, apporte une réflexion sur le sens de la vie et de ce qui reste (ou non) après. Une réflexion tout à fait pertinente puisque c'est la dernière oeuvre un auteur de 89 ans, aujourd'hui décédé.
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« Stella Maris » (2023, Editions De l'Olivier, 256 p.) de l'américain Cormac McCarthy, traduit par Paule Guivarch, parait presque à la suite de « le Passager » (2023, Editions De l'Olivier, 544 p.), traduit par Serge Chauvin. le premier narre, avec quasiment les mêmes personnages, des évènements antérieurs qui éclairent le second.
Alicia Western, physicienne et mathématicienne de haut niveau, enregistre son analyse avec son thérapeute. Cela démarre avec sa grand-mère qui l'a élevé, son mentor Alexander Grothendieck (1928-2014), le mathématicien qui a eu le Medal Field et qui sombre progressivement dans l'autisme ou la folie, et surtout son frère Bobby, son amour impossible. En un sens, « Stella Maris », c'est le nom de la clinique de Black River Falls, WI, pas très loin, à l'est de Minneapolis. C'est là où Alicia consulte, éclairant les zones d'ombre de « le Passager », qui suit chronologiquement. C'est donc une sorte d'anti-roman, non pas au sens de contredire le premier, mais d'offrir une vision de l'autre côté du miroir. Alicia où es-tu dans ton terrier ? En conversation avec la Reine de Coeur, ou est-ce avec la Reine Rouge. On dit bien que les femmes sont bavardes, cela risque de durer.
Donc, pendant quelques 250 pages et 7 chapitres, ce sera un dialogue en forme d'interrogations ou d'inquisition, entre Alicia et son thérapeute. le tout sans tirets, ou annotation de changement de personnage. Les virgules aussi ont disparu. Mais la lecture reste très aisée, quelquefois très technique, mais intéressante. Un dossier (#72-118) d'octobre 1972 introduit les entretiens. « La patiente est une jeune Juive/Blanche de vingt ans ». Elle est reçue par le docteur Cohen. La conversation qui suit éclaire sur le milieu des hôpitaux psychiatriques.
On en arrive vite à son métier, mathématicienne, spécialisée en topologie, fervente élève de Alexander Grothendieck, à l'Institut de Hautes Etudes Scientifiques (IHES) de Bures-sur-Yvette. Un peu déçue par sa discipline. « Elle était menée par un groupe d'équations aux dérivées parfaits malfaisantes, aberrantes et totalement malveillants qui avaient conspiré pour puiser leur réalité dans les circuits discutables du cerveau de son créateur […] pour hisser leurs couleurs de nation indépendante qui n'a de comptes à rendre ni à Dieu ni aux hommes ». Qu'en termes savants, ces vacheries sont-elles dites pour juger des collègues. Il est vrai que les débuts sont difficiles pour l'IHES, calqué sur le prestigieux « Institut for Advanced Study » (IAS) de Princeton, NJ, entre New York et Philadelphie. Grothendieck intègre l'IAS, fondé par Léon Motchane en 1958, après avoir fait partie du groupe Bourbaki à Nancy « où ils ont fini par ne plus pouvoir le suivre ». A l'IHES, Alicia est la seule femme. « Au début tout le monde croyait que je travaillais à la cuisine ». de la topologie aux pots aux fourneaux. « Si vous n'étiez pas devenue mathématicienne qu'auriez-vous aimé être / Morte ». Il est vrai que c'est un métier où il n'y a que des CDI.

Lors de la session suivante, on en vient à parler d'Oppenheimer. le père d'Alicia a travaillé pour lui. C'était au Los Alamos National Laboratory (LANL), à Los Alamos, NM, dans le sud-ouest américain, au cours du « Manhattan Project », lors du développement de la première bombe atomique. Très vite, Alicia passe à la musique, et à son achat d'un violon Amati. Une folie, mais qui lui tire les larmes des yeux. Même si c'est de la famille des luthiers qui ont « inventé » le violon, cela ne vaut pas ceux de Stradivarius, dont le célèbre alto « Gustav Mahler ». Son fond composé de deux pièces de peuplier et non d'érable comme d'habitude, lui donne des couleurs plus appuyées dans le médium-grave.
Quant à son père, à Oppenheimer, et aux mathématiciens en général, elle les considère de façon négative, souvent comme des jeunes, souvent en dessous de la trentaine. « Ils ont eu des scrupules après coup ». Seule l'allemande Emmy Noether (1882-1935) trouve grâce à ses yeux. Il est vrai que Albert Einstein la considérait comme « le génie mathématique créatif le plus considérable produit depuis que les femmes ont eu accès aux études supérieures ». Elle a expliqué le lien fondamental entre les lois de conservation et la symétrie d'un système (par invariance du lagrangien lors des changements de coordonnées), ce qui est aussi important que la théorie de la relativité. Cela signifie aussi l'invariance de l'énergie, de l'impulsion ou simplement de la charge ou du moment cinétique, lors des changements de repères par rotation, translation pou changement de phase.

Ces séances de dialogue, ou de joute oratoire, entre Alicia et son docteur Cohen se déroulent donc à « Stella Maris ». Tout y passe ou presque. Son enfance avec sa grand-mère, son adolescence et ses rapports avec le monde. Ses fantasmes et les monstres qui la hante, dont « le Thalidomide Kid » ou plus familièrement « le Kid ». « Il n'a pas de mains. Juste des espèces de nageoires ». Ses liens familiaux, aussi. Mais quelles limites, le frère et la soeur, liés tragiquement par cet amour impossible, auront-ils franchies ? « Quelle était votre relation avec votre frère ? À votre avis ? Je ne sais pas. Moi non plus ». C'est l'une des nombreuses questions qui resteront ici sans réponse, avec « Où se trouve « la vérité de l'existence » et « Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? ». Mais là, on rentre dans des questions qui dépassent de loin le roman, fut-il brillant.
Le roman ressemble, tout en étant très différent, il est vrai, de « Lunar Caustic » de Malcolm Lowry et de sa suite « le Caustique Lunaire » tous deux traduits par Clarisse Francillon (1987, Maurice Nadeau, 222 p.). Alors qu'au « Bellevue Hospital », Lowry est en cure de désintoxication pour alcoolisme notoire, il reste tout de même très lucide vis-à-vis de lui-même et de ses compagnons de chambre. « Stella Maris » est une longue discussion entre une femme brillante et son thérapeute, dont quelquefois on sent qu'il n'est plus tout à fait à la hauteur de sa patiente. Il faut reconnaitre que l'auteur Cormac McCarthy était administrateur (trustee) au Santa Fe Institute (SFI), établissement de recherches assez débridées, plutôt originales, et en dehors des chemins battus. C'est là qu'ont été élaborées les théories mathématiques des embouteillages, à propos des fourmis, ce qui a permis la mise en place de feux tricolores sur les bretelles d'entrées d'autoroute pour réguler le traffic. le SFI est également le centre des recherches en pointe sur les cartes cognitives des insectes.

Alors, qu'apporte la lecture de ce roman, puisqu'il est référencé comme tel. Tout d'abord une brillante conversation entre Alicia et le docteur Cohen la quarantaine, marié divorcé et remarié. Des plongées, assez courtes finalement dans le monde de la physique quantique. Les sentiments ou état d'âme des chercheurs du « Manhattan Project » lors de la mise au point de l'arme atomique. Pas plus de la suite de leur collaboration avec Edward Teller (1908-2003) qui mettra au point la bombe thermonucléaire. « Si le monde lui-même est une horreur, il n'y a rien à réparer et la seule chose qui pourrait nous être épargnée serait sa contemplation ».
J'ai eu la chance de travailler, et de discuter, alors en année sabbatique au « National Institute of Advanced Industrial Science and Technology » (AIST) à Tsukuba, à une heure en bus de Tokyo. Invité par le directeur, dont je partageais le vaste bureau, et qui m'a fait parcourir le pays pour y donner des conférences. Trois mois pleins, à voyager et discuter. Par contre, un matin, nous avons commencé à parler. Il était originaire d'un village, proche de Hiroshima, et voyait les bombardiers américains passer, avec les pilotes qui leur adressaient de gestes d'amitié. le matin du 6 aout 1945 est resté gravé dans sa mémoire. En milieu de matinée sont arrivés, à pied, les premiers réfugiés. Chez lui, ses parents ont logé une femme seule, à l'opulente chevelure, « belle comme quelqu'un de Tokyo ». le jeune gamin était préposé à lui monter son petit déjeuner. Et un matin, elle a secoué sa tête, et toute la toison est tombé. Imaginez l'émotion du garçonnet d'une dizaine d'années. Cela remplace toutes les excuses ou regrets d'un Oppenheimer.
Pour terminer, au psychiatre qui lui demande si elle croit qu'il y a une vie après la mort, Alicia répond sans détour « Je ne crois pas qu'il y ait une vie avant la mort ».

Il y a une autre dimension du roman, sinon plusieurs autres. Toutes font référence à James Joyce, l'irlandais auteur de « Ulysse » et « Finnegans Wake », entre autres. Cormac McCarthy est né en 1933 de Charles Joseph McCarthy et Gladys Christina McGrail. Initialement prénommé Charles, il fait partie du clan McCarthy (Mac Cárthaigh en gaélique), originaire du Munster, le sud de l'ile, une région sur laquelle ils règnent pendant tout le moyen âge.
Pas étonnant qu'il y ait une référence à Joyce. La première, la plus visible est la ponctuation. Finies, les distinctions pointilleuses entre virgule et point-virgule. C'est une spécificité de l'anglais, enfin celui de Oxbridge, avec son système d'espace ou non après la ponctuation. Il faut bien une règle stricte pour distinguer les élites d'Eton du menu peuple. Cormac McCarthy, dans un entretien avec Ophra Winfrey, en 2008, revient sur cette « règle », citant James Joyce et McKinley Kantor (1904-1977), auteur de plus d'une centaine de nouvelles. Pour ce qui est des virgules, elles sont supprimées, on l'a vu. « La virgule, pourrait-on dire, c'est une génuflexion devant un développement logique, une énumération ». Dans les conversations, point non plus de guillemets. La lecture s'en trouve facilitée. Enfin, les autres signes de ponctuation sont aussi quasiment inutiles, car « notoirement encombrants ». Ces modifications de la ponctuation sont encore minimes par rapport aux longues phrases de Mathias Enard dans « Zone » (2008, Actes Sud, 516 p.) ou de László Krasznahorkai, traduit par Joelle Dufeuilly dans « le retour du Baron Wenckheim » (2023, Cambourakis, 528 p.).
Ceci dit, c'est plutôt la philosophie sous-jacente de ces romans, puisque j'inclue aussi « le passager ». le « New York Times » a titré, pour son décès que son travail « adoptait une vision sombre de la condition humaine et était souvent macabre ». Ce n'est pas vraiment le cas, il s'agit, selon moi, plus qu'un répit à la culture de la mort, une proposition pour un plan tragique de sa conception. Et dans ce cas, le lien avec Joyce devient plus évident. Les quatre oeuvres, de Joyce et McCarthy, sont toutes deux préoccupées par les mêmes thèmes généraux, que sont la conscience et le suicide. de même, elles sont surtout préoccupées par la relation de la société avec la génération suivante. Cela en dit long sur notre « culture de la mort » actuelle et sur la mesure dans laquelle l'Occident s'y est engouffré.
Il convient de lire les romans de ces auteurs, catholiques irlandais, comme les tourments religieux, issus principalement de la culture mariale, qui ne semblent pas les abandonner. Dans les premières pages d'« Ulysse », Stephen Dedalus assiste à la parodie d'une messe catholique effectuée par Buck Mulligan. « Introibo ad altare Dei ». Plus tard, le roman passe devant une église dédiée à « Marie, étoile de la mer » (Stella Maris) et joue avec des thèmes déjà explorés dans « Dedalus Portrait d'un artiste en jeune homme » à travers la fixation de Dedalus sur la Vierge Marie en tant que « tour d'ivoire » et « maison d'or ». Ce sont également les termes utilisés par Bobby lors de la découverte du cadavre de sa soeur. « Tour d'ivoire, dit-il et Maison d'or ». L'expression fait partie des « Litanies de la Très Sainte Vierge Marie », telles qu'elles sont approuvées par l'Eglise Catholique avec « Tour de David / Tour d'ivoire / Maison d'or / Arche d'alliance / Porte du ciel / Etoile du matin ».
La vie d'Alicia s'est construite autour des mathématiques après qu'elle se soit rendue compte qu'elle ne pourrait aimer Bobby et avoir un enfant. La scène dans laquelle elle berce son violon Amati, acheté avec l'argent de sa grand-mère est significative à ce sujet du transfert enfant-violon. Elle l'explique d'ailleurs durant sa thérapie. « Ce que je voulais vraiment, c'était un enfant. Ce que je veux vraiment », dit-elle. « Si j'avais un enfant, j'irais juste la nuit et m'assiérais là. Tranquillement. J'écoutais mon enfant respirer. Si j'avais un enfant, je me ficherais de la réalité ». Chose que l'on retrouve dans nom de « Thalidomide Kid », ou simplement « le Kid », la figure récurrente de ses hallucinations.
Ceci dit, il serait plus tentant de se tourner vers les mathématiques pour déchiffrer en partie Joyce et McCarthy, et plus spécifiquement vers la topologie. Dans ces deux cas, on a affaire à un père, créatif et savant, qui a l'intention de briser les codes existants. C'est bien sûr Robert Oppenheimer et James Joyce. Tous deux ont deux enfants, une fille et un garçon, tous deux également doués. Lucia Joyce pratique la danse, et la révolutionne, à la suite de son passage chez Isadora Duncan. Giorgio veut croire en une carrière d'écrivain. Il est plutôt dilettante. Entre les deux enfants, une complicité s'établit, bientôt interrompue par un début de dépression de Lucia, qui sera internée. Certains biographes parent d'inceste, en fait un mauvais jeu de mot entre insecte et inceste. Voir et lire le livre, romancé, de Annabel Abbs, « La Fille de Joyce », traduit par Anne-Carole Grillot (2021, Editions Hervé Chopin, 416 p.). Chez les Western et Oppenheimer d'adoption, on a vu Alicia en thérapie, par manque de progéniture, et son frère Bobby, très doué, mais plutôt flambeur, qui cumule des petits boulots. En topologie, on appelle ce duo d'ensemble père-enfants un isomorphisme, c'est-à-dire une application qui fait passer d'un groupe à l'autre. C'est le domaine de Alexandre Grothendieck, le maître à penser d'Alicia. L'idée se poursuit, puisqu'à la mort de James, puis celle de Giorgio, le petit fils Stephen Dedalus, devenu légataire de son grand-père, fera toute une scène au reste de la famille, brulant les papiers de famille, qui suppriment toute preuve de l'internement de Lucia. C'est le syndrome d'un père (ou ascendant) très brillant, dont la lumière finit par aveugler ses descendants.


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D'une fluidité folle malgré sa construction, Stella Maris met en scène Alicia face à un psychiatre alors qu'elle s'épanche peu à peu, laissant transparaître ses fêlures derrière son cynisme. Dix ans avant le passager, la soeur de Bobby évoque ses hallucinations, son passé, son amour interdit dans ce roman uniquement constitué de dialogues - mais ni guillemets, ni tirets ou verbes introducteurs sont là pour repères. Les répliques s'enchaînent de manière grisante ; Alicia prend forme et gagne une essence grâce à ses mots (plus de détails : https://pamolico.wordpress.com/2023/05/05/stella-maris-cormac-mccarthy/)
Lien : https://pamolico.wordpress.c..
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Terriblement émouvant, poignant, indiciblement intelligent, ce prequel du Passager est une oeuvre inouïe et puissante. Je l'ai lu en second, comme l'a souhaité l'auteur, et cet enchaînement bâtit un diptyque où s'interrogent fiction et réalité, beauté et cruauté.
Le concept essentiel en est sans aucun doute le solipsisme. Si l'on accepte l'idée que le monde n'existe que par le "je" narrateur, alors, Alicia, morte dans le passager peut poursuivre son existence à Stella Maris tandis que Bobby, son frère mourant dans le présent volume, peut poursuivre sa vie et plonger à la recherche de son passager mystérieux.
Pardon si je vous égare, je me suis moi-même un peu perdue.
A contempler mon livre hérissé de post-it, je mesure l'ampleur incroyable de cette oeuvre qui affronte mathématiques, physique quantique et philosophie. Et sans doute le monde peut-il se suffire de ces trois disciplines, dessinant une chimère "selon laquelle la seule chose dont l'existence est certaine est le sujet pensant".
Retour au solipsisme…
Alicia est un personnage bouleversant d'humanité et de lucidité. Sa présupposée folie pointe avec exigence les fondements de la réalité, démontrant que l'inconscient, cerveau animal s'il en est, prime sur une pseudo-normalité qui ne serait sans doute pas une excellente nouvelle. "Se dire qu'il y a peu de joie dans ce monde n'est pas une simple façon de voir les choses. On finit par comprendre que le monde ne pense absolument pas à nous."
Pessimiste? Sans doute. Mais surtout extrêmement lucide. Cormac McCarthy est proche du dernier round, et cela transpire dans chaque phrase.
Alors, il joue. Il joue avec l'idée d'être, d'avoir été un habitant d'un monde capable et coupable d'avoir inventé le moyen de s'anéantir lui-même. Où l'on revient à la Bombe, événement fondateur, qui traverse les deux volumes. "Le projet Manhattan est l'un des événements les plus significatifs de l'espèce humaine. (…), peut-être même le numéro 1. C'est juste qu'on ne le sait pas encore. Mais ça viendra."
Le Passager et Stella Maris sont indissociables. Ils dialoguent, s'explicitent, se confrontent, se rapprochent et se repoussent. Alicia en est à mon sens le pivot central qui, du haut de ses vingt ans, a compris que vouloir expliquer le monde n'est que le rendre plus indicible. "Parce que je savais ce que mon frère ne savait pas. Qu'il y a une horreur sous la surface du monde et qu'elle avait toujours existé. "
Serait-ce notre passager manquant, ou la connaissance intime de notre finitude? "L'élixir de la vie coule au sol." "Il faut se dépêcher. "
Au seuil de la dernière porte, c'est un message diablement exigeant que nous délivre Cormac McCarthy. Et, s'il nous semble si infiniment triste et pessimiste, il abrite une beauté universelle. L'esprit humain EST le monde tout entier. Il en génère les merveilles comme les horreurs. Il est le Langage, l'Art, la Littérature, l'espoir, le désespoir et la lucidité
Je ne résous pas à conclure ce billet sans citer la toute dernière phrase.
"Tenez moi la main.
D'accord, et pourquoi?
Parce que c'est ce que font les gens quand ils attendent la fin de quelque chose. "
J'avoue, j'ai pleuré.
C'est mon petit hommage perso à ce très grand monsieur.
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critiques presse (3)
LeJournaldeQuebec
04 août 2023
C’est aussi déstabilisant que génial.
Lire la critique sur le site : LeJournaldeQuebec
SudOuestPresse
20 juin 2023
Situé dix ans avant « Le Passager », publié en mars, dont il éclaire les zones d’ombre, ce nouveau roman est le beau portrait d’une jeune fille aux prises avec des voix dans la nuit.
Lire la critique sur le site : SudOuestPresse
LePoint
16 juin 2023
On y retrouve la profondeur existentielle des grands romans de McCarthy et la douceur élégiaque de De si jolis chevaux. Un grand livre pour conclure une œuvre magistrale.
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[...] J'irais dans une petite ville et je m'achèterais des vêtements d'occasion au marché. Des chaussures. Une couverture. Je brûlerais toutes mes affaires. Mon passeport. Je jetterais peut-être simplement mes vêtements à la poubelle. Je changerais de l'argent dans la rue. Et puis je grimperais dans les montagnes. A l'écart de la route. Pas de risques inutiles. A pied à travers les terres ancestrales. Peut-être de nuit. Il y a des ours et des loups là-haut. Je me suis renseignée. Il serait possible d'allumer un petit feu la nuit. Peut-être de trouver une grotte. Un torrent de montagne. J'aurais un bidon d'eau pour quand je serais trop faible pour me déplacer. Au bout d'un moment l'eau aurait un goût extraordinaire. Elle aurait un goût de musique. Je m'enroulerais dans la couverture la nuit pour me protéger du froid et je regarderais les os prendre forme sous ma peau et je prierais pour pouvoir saisir la vérité du monde avant de mourir. Quelquefois la nuit les animaux viendraient tout près du feu et circuleraient et leurs ombres se déplaceraient parmi les arbres et je comprendrais alors que quand le dernier feu ne serait plus que des cendres ils viendraient et m'emporteraient et je serais leur eucharistie. Et ce serait ma vie. Et je serais heureuse.
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Pourquoi pleuriez-vous ? Pourquoi pleurez-vous ?
Excusez-moi. Pour davantage de raisons que je ne pourrais dire. Je me vois encore essuyer mes larmes sur la table d’harmonie de l’Amati et le poser à l’écart et me rendre à la salle de bain pour m’asperger le visage d’eau. Mais ça a recommencé. Je n’arrêtais pas de penser au vers : Quel chef-d’œuvre que l’homme. Impossible de m’arrêter de pleurer. Et je me rappelle avoir dit : Que sommes-nous ? Assise sur le lit avec l’Amati dans mes mains, si beau qu’il semblait à peine réel. C’était la plus belle chose que j’aie jamais vue et je ne comprenais pas comment une telle chose pouvait être possible.
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Dans ce cas précis c’est la prise de conscience que ce que l’on soupçonnait depuis longtemps est vrai en réalité. Que les mathématiques n’ont pas de limites. Qu’elles sont inépuisables. Il n’y avait plus aucun doute là-dessus. Et il fallait maintenant s’asseoir un moment et réfléchir à l’univers.
Et qu’est-ce qu’on s’est dit ? Sur l’univers.
On s’est dit que l’investigation allait souffrir d’une disponibilité de plus en plus réduite de l’empirique. Pendant même qu’on travaillait l’univers s’éloignait. Alors qu’est-ce qu’on apporterait à l’investigation ?
La seule chose qu’on possède, je suppose. L’esprit.
Et pourquoi penserait-on que l’esprit est à la hauteur de la tâche ?
Parce que nous sommes là. Que nous ne sommes nulle part ailleurs. Et qu’il n’y a rien d’autre à savoir
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...notre expérience du monde consiste en grande partie à nous prémunir contre la déplaisante vérité que le monde ne sait pas qu'on existe.

... J'ai compris pour la première fois que le monde visible était à l'intérieur de notre tête. Le monde entier ,en fait. ...
le monde visible est créé par des êtres pourvus d'yeux pour le faire. Non pas créé à partir de rien mais de ce quelque chose dont la réalité est à jamais inconnaissable. ...

La colère des enfants me semblait inexplicable sauf si elle traduisait la rupture d'un engagement profond et naturel sur la façon dont le monde aurait dû être et qu'il n'était pas. J'ai compris que leur cruelle exposition au monde était le monde lui-même....
L'injustice qui les affole tant est irrémédiable. Et la colère ne concerne que ce que l'on croit réparable. Tout le reste n'est que désespoir. À un certain moment ils le comprennent....

Quand toute trace de notre existence aura disparu pour qui est-ce que ce sera une tragédie ?...

La réalité est-elle totalement dépourvue de conscience ? ...

Le rêve nous réveille pour nous dire de nous souvenir.
Peut-être que la question est de savoir si la terreur est une mise en garde contre le monde ou contre nous-mêmes. Le monde nocturne d'où on émerge d'un bond dans son lit, haletante et en sueur. Est-ce qu'on se réveille de quelque chose qu'on a vu ou de quelque chose qu'on est ?
Ou peut-être que la vraie question est simplement de savoir pourquoi l'esprit semble vouloir à tout prix nous convaincre de la réalité de ce qui n'en a pas. ...

Je savais ...qu'il y avait une horreur à peine contenue sous la surface du monde et qu'elle avait toujours existé. Qu'au coeur de la réalité se tapit un éternel pandémonium...
Et je savais qu'imaginer que les sinistres éruptions de notre siècle étaient exceptionnelles ou exhaustives était pure sottise.

Je ne pense pas qu'il existe une façon de se préparer à la mort. Il faut l'inventer. Il n'y a aucun avantage évolutionniste à savoir bien mourir. À qui est-ce qu'on le léguerait ? La chose que l'on a à gérer- le temps- n'est pas malléable. Sauf que plus on le retient moins on en a. L'élixir de la vie coule au sol. Il faut se dépêcher. Mais la hâte elle-même dévore ce qu'on cherche à conserver. On n'arrive pas à gérer ce qu'on a reçu pour mission de gérer.
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La première règle de l’univers c’est que toute chose disparait pour toujours. Au point que si on refuse d’accepter ça on vit dans un fantasme.

(De l’Olivier, p.225)
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