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EAN : 9782707188601
184 pages
La Découverte (07/01/2016)
3.84/5   40 notes
Résumé :
Depuis plusieurs décennies, la sociologie est régulièrement accusée d’excuser la délinquance, le crime et le terrorisme, ou même de justifier les incivilités et les échecs scolaires. A gauche comme à droite, nombre d’éditorialistes et responsables politiques s’en prennent à une « culture de l’excuse » sociologique, voire à un « sociologisme » qui serait devenu dominant dans les médias. A leurs yeux, le regard sociologique aurait pour effet de « déresponsabiliser » l... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Bernard Lahire en a visiblement assez que la sociologie soit méprisée, incomprise, critiquée par tous ceux qui pensent que la volonté seule d'un être humain le conduit à faire des choix. Ce court essai tend à démontrer que la sociologie, qui étudie l'histoire et l'environnement de chacun, n'a pas pourtant pour vocation de trouver des excuses aux criminels, comme beaucoup se plaisent à le croire...

Bernard Lahire cherche à remettre les pendules à l'heure, et le fait plutôt bien. Non, la sociologie n'est pas inutile et peut apporter beaucoup d'éléments qui expliquent non pas pourquoi quelqu'un a commis un crime mais plutôt ce qui l'a amené à une action criminelle, analysant ainsi son parcours depuis la naissance. Lahire ne cherche donc certainement pas à excuser les criminels, mais à comprendre comment ils en sont arrivé là, pour mieux non pas les critiquer eux, mais pour en tirer des conclusions utiles au fonctionnement de la société et éviter de futurs dérapages du même style.
La sociologie est une discipline qui est intéressante, qui cherche à comprendre, tout simplement. Connaître, comprendre et interpréter le parcours de vie d'une personne est TOUJOURS intéressant, quelles que soient les circonstances. Pourquoi ? Parce que nous sommes ce que nos parents, notre éducation, notre environnement, nos rencontres, nos joies, nos peines ont fait de nous. Je crois fermement que la nature n'est que le résultat de la culture. Aujourd'hui on pense telle chose car il nous est arrivé telle chose. Si on est quelqu'un de timide, extraverti, passionné, émotif, etc., c'est pour une raison.
Maintenant, je ne suis pas si en désaccord que ça avec tous les gens qui prônent l'idée que "si on veut, on peut". Si on veut, on peut faire les bons choix. D'un côté, la vie nous amène à faire certains choix, criminels ou non, mais au final on reste quand même coupable d'un mauvais choix. La sociologie, ainsi, explique mais n'excuse pas. Il est toutefois extrêmement difficile, pour cause d'environnement, d'appliquer cette formule du "si on veut, on peut". Certaines situations (comme les moules sociaux, les habitudes, les connaissances, les qu'en dira-t-on, etc.) peuvent clairement empêcher quelqu'un dans une situation difficile d'en sortir par simple volonté. Cela demande, à mes yeux, beaucoup de courage, que néanmoins beaucoup ont. Il en faut beaucoup pour aller à l'encontre de la majorité, des traditions, du jugement des autres.
Alors je sors de cette lecture avec la conviction que nulle idée peut être toute blanche ou toute noire, que tout a des nuances, que la sociologie n'excuse pas mais qu'au final un mauvais choix doit se payer, que la volonté est une arme puissante mais qui demande beaucoup de courage tandis que le courant nous emporte souvent là où n'aurait pas forcément envie d'aller.
Il est, de toute façon, toujours intéressant de parler, s'interroger, réfléchir, et ce livre constitue un bon outil avec des exemples pertinents.
Lien : http://livriotheque.free.fr/..
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Avec son dernier livre, Bernard Lahire démontre tout l'intérêt des « sciences du monde social » dont fait partie la sociologie. Alors qu'il avait déjà formulé l'utilité sociale (mais aussi « politique", entendons par là pour le citoyen) de la sociologie dans un ouvrage maintenant déjà ancien, « A quoi sert la sociologie ? » (La Découverte, 2004), il retravaille, dans cet essai, son argumentation de manière plus accessible pour un public de lecteur non familiarisé avec le langage sociologique. Et s'il le fait, c'est principalement parce que, d'une part, son livre est une critique radicale du pamphlet de Philippe Val: « Malaise dans l'inculture » (Grasset, 2015), et d'autre part, parce que la sociologie est accusée des maux qui rongent la société française.
En effet, Philippe Val donne de la sociologie une vision délirante, réductrice, imaginaire, infondée et néfaste à ce citoyen qu'il prétend, lui-même, éclairer grâce aux idées des philosophes des Lumières. Bernard Lahire passe alors au scalpel de son analyse tous les arguments à charge de l'ancien patron de Charlie Hebdo. Pour ce faire, il s'appuie sur ses nombreux travaux (et d'autres) dans le domaine de l'éducation, de l'école et de l'apprentissage des savoirs. Contrairement à Val, Lahire, loin du sociologisme totalitaire, adopte une démarche essentielle à tout sociologue ; « désévidencialiser » les faits sociaux et non les « essentialiser », autrement dit, lutter contre les évidences du sens commun et ainsi procéder à une rupture avec ses présupposés, ses prénotions et ses préjugés quel que soit le sujet. Cette démarche typiquement scientifique, et non idéologique, repose sur une posture compréhensive contrairement au « mythe de l'excuse sociologique » qui suppose un jugement moral. La sociologie n'est donc pas une science morale ni idéologique, même si certains sociologues (Lahire ne dit rien sur ce point) s'y fourvoient et confondent science, politique et journalisme.
Enfin, Bernard Lahire va plus loin. Pour lui, les méthodes et les techniques appliquées en sciences sociales (observation, questionnaire, entretien, description, narration, … ) devraient être enseignées dès l'école primaire. Elles permettraient une connaissance objective, dès l'enfance, du monde dans lequel le citoyen vit et, probablement, une fois adulte, une meilleure appréhension de son destin.
Tout citoyen qui consent à prendre conscience des mécanismes sociaux et économiques, de la réalité des milieux sociaux, ne serait-ce que du sien, aurait intérêt à lire et à méditer l'ouvrage de Bernard Lahire.
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La sociologie pour les nuls


« La sociologie, c'est de la connerie », non, ce ne sont pas les paroles d'un simple béotien squattant jours et nuits la table 6 de l'angle obscur près du flipper du PMU du coin, mais bien l'opinion d'un étudiant en master passé par des études de science politique. Surprenant non ?

Vous me direz, pourquoi une telle accroche pour ma brève bafouille ? Parce qu'en substance, l'objectif du sociologue Bernard Lahire, dans son opuscule, est justement de revenir sur l'intérêt de la sociologie, son rôle bénéfique pour notre société, une meilleure compréhension du monde social (comprendre pour changer et non comprendre pour excuser), mais aussi pour déboulonner des opinions, caricatures, erreurs communes commises constamment à l'encontre de cette dernière (selon lui). En clair, qu'est-ce que la sociologie ?

En effet, chacun peut le constater autour de soi, la méconnaissance de ses apports est tout bonnement consternante et d'abord surprenante. Des moues dubitatives s'inscrivent régulièrement sur le visage des récepteurs de l'information sociologique. J'ai par exemple pu le vivre récemment lorsqu'un professeur de sociologie dispensant un enseignement sur les « opinions publiques » s'arrêta brièvement sur les « opinions communes » propres à tel ou tel groupe. « Hum, je ne suis pas convaincu » réagit mon voisin, pourtant pas grand thuriféraire du scepticisme.
C'est comme si, finalement, les analyses sociologiques peuvent se trouver dérangeantes pour certains, de manière consciente ou non d'ailleurs. le mythe de « l'individualité de l'individu » (formule sympathique hein) est en effet battu en brèche par les chercheurs, et l'illusion du libre arbitre, sujet important de l'ouvrage de Lahire, révélée depuis longtemps. En effet, on ne peut analyser et tenter de comprendre un individu sans prendre en compte sa position dans un milieu social donné et analyser les interactions qu'il entretient avec ce dernier et vice versa. Les économistes néoclassiques et leurs séides lisent-ils de la sociologie ?

En somme, mettre en lumière les déterminants de nos actions (multifactoriels, évidemment…), souligner ce qui conduit un individu à agir de telle ou telle manière, à penser de telle ou telle façon dérangerait. Et comme insiste bien Lahire dans son livre, reconnaitre ces biais publiquement, changer de paradigme, entrainerait de lourdes conséquences qui ne sont pas prêtes d'être acceptées.

D'une manière générale, on est régulièrement catastrophé quand on entend certaines réactions puériles devant les conclusions d'un travail sociologique. Bien entendu, malgré le sérieux « objectif » des méthodes de recherche et d'analyse, nous ne sommes jamais à l'abri d'erreurs ou de présentations trompeuses. Mais c'est le cas dans tous les domaines, comme l'historien François Furet le montre bien …
Nonobstant ce point, prendre les conclusions d'un travail sociologique comme une sorte « d'absolutisme déterminant » est tout bonnement déplorable et risible. Quand il est montré que certaines catégories d'individus agissent, pensent, s'habillent, mangent, votent etc plutôt de telle ou telle façon, ou pour dire autrement, sont en grande partie amenées à avoir telle ou telle attitude, un nombre incalculable d'individus interprète cela comme une loi d'airain au déterminisme moniste indépassable. On nous ressort ainsi de manière sempiternelle « c'est faux, je connais untel qui lui a fait ça ça ou ça contrairement à ce que ton auteur raconte ». Pour eux, une hirondelle fait le printemps, usant n'est-ce pas ?

L'écrit de Lahire est une réflexion qui s'inscrit dans l'actualité, en cela il s'inscrit par exemple en faux avec certains propos tenus par Manuel Valls (en même temps …) mais qui pourraient être élargis à la caste des zélateurs pourfendeurs de la sociologie. C'est à cette occasion qu'il développe une argumentation sur le statut du travail sociologique (« Comprendre est de l'ordre de la connaissance, juger et sanctionner sont de l'ordre de l'action normative », ou quelque chose du genre), cherchant à comprendre les événements, chose largement reléguée au second voire troisième plan aujourd'hui. Tenter de comprendre et d'expliquer, c'est, pour extrapoler, presque une forme de crime, une collaboration avec celui qui a enfreint la loi. Il embraye ainsi sur une certaine forme de « neutralité » du travail sociologique et comme prélude à l'action. le sociologue n'est pas un parangon de vertu, pour Lahire comme pour d'autres, étant eux-mêmes déterminés, Pierre Bourdieu promeut ainsi une espèce de sociologie des sociologues.

Il est aussi important de signifier que le propos de Bernard Lahire est argumenté (ce qui ne veut pas dire que ses positions ne peuvent être critiquées et elles le sont surement déjà), explicatif, clair, limpide et surtout, compréhensible par « tous ». En cela, il est clairement différent de « La distinction » de Pierre Bourdieu (et comment) que je suis en train de feuilleter avec légèreté, ce qui en fait un ouvrage hautement recommandable (je suis déjà en train de le diffuser à ma petite échelle), notamment pour les profanes.
Ainsi, ce bref essai échappe (en partie seulement) à ce qu'on peut appeler le « paradoxe bourdesien » mis en lumière dans « Questions de sociologie » où est expliqué que Pierre Bourdieu écrit pour des gens qui ne peuvent le comprendre, alors que ce sont ceux qui ne sont pas théoriquement les destinataires de ses analyses qui ont les moyens de le comprendre. Triste non ?
Nonobstant ce point, et malgré le côté accessible au grand public de cet essai, tout lecteur curieux souhaitant dénicher quelques pistes de lectures supplémentaires et approfondissements pourra bénéficier d'une bibliographie assez large pour assouvir ses pulsions consommatrices.

Pour terminer, avec la sociologie (et pas seulement me dira-t-on), on peut se retrouver dans une certaine forme d'impasse intellectuelle, car, d'une certaine manière, quand on ne veut pas comprendre, on ne peut pas comprendre.

PS : Pour ceux qui partagent mon aversion pour le médiocre Philippe Val, ils liront avec délectation une mise au pilori de son dernier ouvrage en annexe du livre de Bernard Lahire.
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La sociologie. « En rendant visibles les régularités collectives ou les habitudes dont les individus ne sont pas toujours conscients, en mettant en lumière des structures, des mécanismes ou des processus sociaux qui sont rarement le produit de la volonté des individus tout en les traversant en permanence de manière intime, elle a infligé à l'humanité une quatrième blessure narcissique »

Dans son introduction, Bernard Lahire souligne, entre autres, que « l'individu n'est pas une entité close sur elle même », la réalité des dissymétries ou des inégalités, les rapports de domination et d'exploitation, les exercices de pouvoirs ou les processus de stigmatisation… Il parle de ceux qui ont intérêt à faire passer les vessies pour des lanternes « des rapports de forces et des inégalités historiques pour des états de fait naturels, et des situations de domination pour des réalités librement consenties ».

Il s'agit d'une « réponse » au Malaise dans l'inculture du très libéral-libertarien Philippe Val, d'objections aux critiques confondant « travail de description » et « travail de justification ou de dénonciation », à celles et ceux qui pensent la critique comme « une atteinte à l'idée d'un sujet libre et conscient » (« à juste titre » ajoute l'auteur).

« Il faut donc expliquer ce que sont ces sciences de la société et ce qu'elles ne sont pas, détruire les procès d'intention les concernant, et rappeler leur utilité sociale ».

Il s'agit d'un livre écrit en langue commune, loin des jargons sociologiques, des habitudes universitaires ou soit-disantes savantes. Et ce faisant, Bernard Lahire poursuit, entre autres, son travail sur les socialisations, l'analyse des individu-e-s comme « plis singuliers du social »… Un livre de combat politique au sens le plus critique et nécessaire, un livre pour des citoyen-ne-s un peu plus sujets de leurs actions.

Je ne souligne que certains points et me laisse aller à des esquisses, quelques fois éloignées des analyses de l'auteur, comme invitation à lire et discuter

Causes non réductibles à la « seule décision intentionnelle », différence entre le normatif de la justice et le non-normatif de la connaissance scientifique, « Penser que chercher les « causes » ou, plus modestement, les « probabilités d'apparition », les « contextes ou les « conditions de possibilité » d'un phénomène revient à « excuser », au sens de « disculper » ou d'« absoudre » les individus, relève de la confusion des perspectives ».

Et l'auteur n'hésite pas à faire intervenir le commissaire Maigret, « son but est de rendre raison d'actes qui paraissent parfois ne pas en avoir, ou de nécessiter ce qui paraît n'être que surgissement aléatoire » et de rappeler que les crimes ne prennent éventuellement sens « que replacés dans le réseau social complexe de leur apparition ». J'ai écrit éventuellement car la recherche ne permet pas toujours de dépasser les états de sidération et d'incompréhension pour des actes humains perçus comme inhumains. Tous les actes faits par des êtres humains, ou des groupes d'êtres humains, relèvent pourtant bien de rapports sociaux, de rapports organisés (même si nous peinons à saisir ces organisations) entre êtres ou groupes sociaux. « Seules cette prise de distance et cette désindividualisation du problème permettant permettent d'envisager des solutions collectives et durables ».

Il ne s'agit pas de rejeter l'« affect », mais de mettre à distance son omniprésence, les attitudes magiques ou émotionnelles. Nos peurs et/ou nos désirs ne sont pas la réalité. Il convient d'analyser en prenant en compte notre position, nos intérêts, nos fantasmes, notre point de vue situé… de sortir « du rapport émotionnel et partial à la réalité » (peut-être serait-il plus juste d'écrire : de prendre en compte celui-ci). Prendre une attitude distanciée permet de « replacer les intentions individuelles, bien réelles, dans les réseaux d'interdépendance passés et présents qui les ont structurées et les ont rendues possibles ».

Fiction de l'Homo clausus et du libre arbitre. Nous sommes des « prématurés sociaux » prédisposés « aux interactions sociales ». Notre singularité relative (individuelle) « n'est que la synthèse ou la subtile combinaison de l'ensemble des expériences » que nous avons vécues avec d'autres « à des degrés d'intensité variables et dans un ordre déterminé ». le déterminisme ne se confond pas avec le caractère prévisible des événements. Il s'agit au mieux « des probabilités d'apparition de comportements ou d'événements ».

L'auteur insiste sur la complexité des individu-e-s, l'hétérogénéité et les éléments plus ou moins contradictoires, « le produit de l'interaction entre des (rapports de) forces internes et externes », la multisocialisaton et les multidéterminations… Il faut donc contextualiser, prendre en compte le « tissu des relations », historiciser, relier. « Modelés par ce monde que nous contribuons à modeler, nous ne lui échappons d'aucune façon »

Notre liberté n'est pas un donné a-historique et a-social, un inné ou un déterminisme biologique, mais bien au croisement de contraintes multiples… Ce qui nous permet, entre autres, aussi de nous demander « ce qu'il faut faire pour transformer la réalité et redonner aux individus un pouvoir sur le réel ».

La fonction sociale de la « philosophie de la responsabilité » est de légitimer l'ordre des dominants, de déréaliser les dominé-e-s (et nier bien évidement les relations sociales de pouvoir), de projeter « dans la tête des dominés une mentalité ou une psychologie de dominants » (voir l'apport incontournable des féminismes matérialistes sur ce sujet, par exemple, Christine Delphy ou Nicole-Claude Mathieu).

Bernard Lahire souligne que « le consentement individuel efface la domination ». Sur ce point, je renvoie à Nicole Claude Mathieu : « Quand céder n'est pas consentir » dans L'anatomie politique. Catégorisations et idéologies du sexe et à Geneviève Fraisse : « l'argument du consentement des dominés est un énoncé qui ne saurait faire preuve » dans du consentement.
Et pour l'utiliser moi-même je ne peux que souscrire à la démonstration autour du travail du dimanche et de la prostitution, de l'ironie d'appeler « liberté » un choix effectué sous contrainte… Les passages sur la prostitution, le « travail émotionnel », les rapports proxénètes-prostitué(e)s me semblent tout à fait adéquat à la démonstration. Il en est de même des choix des salarié-e-s…

L'auteur interroge les « conditions sociales de production d'un consentement », la question de la genèse des désirs, des volontés ou des choix… Et il poursuit sur la rupture avec les fausses évidences, la sociologie du travail, la mise à jour de logiques invisibles ou invisibilisées, les transformations des phénomènes considérés comme invariants ou éternels, les explications mono-causales, « les discours publics sur les problèmes sociaux nous parlent de bien d'autres choses », les effets différenciés et conjugués pour les individu-e-s, le penser relationnellement, « l'exigence d'un mode de pensée relationnel contre les modes de pensée essentialistes », l'éclairage sur les effets de la domination… les modifications des possibles, « nier l'état du réel n'est sans doute pas la meilleure façon de pouvoir le transformer ».

Et Bernard Lahire a tout a fait raison de faire un paragraphe intitulé « Inégalité mon amour ». Il s'agit pour Philippe Val et bien d'autres, d'« inverser le sens réel des stigmates », de refuser l'égalité non réduite à l'égalité des chances, « dans un contexte politique et social trouble avec son lot de visions identitaires essentialisantes, de catégorisations ethnico-religieuses du monde, de montée des visions sécuritaires et répressive, d'attaques anti-intellectualistes et d'étalages décomplexés des signes de richesse »

Reste à « nous » saisir des arguments et des analyses pour à la fois revenir sur les naturalisations de faits sociaux, les rapports asymétriques et historiques de pouvoir, les fantasmatiques Homo-économicus, self-made-man, individus « comme atomes isolés, libres, autonomes et responsables », les mythes du don ou du génie, la méritocratie, l'individu-e pré-existant-e à ses relations sociales ou l'individu-e « libre et autonome qu'on veut rendre responsable de tous ses malheurs ».

Mais aussi les essentialisations des opprimé-e-s, des exploité-e-s, des situations historiques… Sans oublier les écarts entre les possibles apports des sciences sociales et les raccourcis en énoncés politiques scientistes ou magiques.

Puis sur les possibles, le temps du débat démocratique…
Lien : https://entreleslignesentrel..
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Bernard Lahire précise dans son introduction que ce texte a été volontairement écrit pour s'adresser à des non-professionnels de la sociologie.
Et c'est tant mieux, car n'ayant pas fait de hautes études, je craignais qu'il me soit incompréhensible. Erreur, ce livre s'adresse à tout-un-chacun désireux d'apprendre et mieux ressentir le monde dans lequel nous vivons.

C'est avec des mots simples (ou pas trop compliqués) et beaucoup d'exemples concrets que l'auteur nous explique sa vision du monde, basée sur un apprentissage de chaque jour puisqu'il a étudié la sociologie toute sa vie et pratique cette science, entre autre, comme professeur.

En effet, la sociologie semble être actuellement (car tout cela est nouveau pour moi) la cible de nombreux politiques, intellectuels, journalistes, qui la dénoncent comme étant le centre de tous les maux et la cause de nombreux dysfonctionnements de notre société.
Bernard Lahire démonte et nous démontre, au contraire, toute son utilité. Cela se rapproche d'ailleurs du livre de Nuccio Ordine (L'utilité de l'inutile) lu récemment.

A quoi cela sert de comprendre ? La liberté individuelle existe-t-elle réellement ? Les dominants - les dominés. Qu'est-ce que la sociologie ? Quelles sont les interprétations du consentement ? Vous aurez réponse à toutes ces questions en lisant ce livre qui est, je trouve, une très bonne introduction à cette science.

J'aimerais ajouter que, ce qui m'a plu aussi dans cet ouvrage, c'est que l'on sent que l'auteur a une grande expérience de la vie des gens, toutes classes sociales confondues, comme s'il les côtoyait de près. Il n'est pas sur "un nuage", déconnecté de la réalité. Bien au contraire.
Pour moi, c'est une découverte.
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Citations et extraits (30) Voir plus Ajouter une citation
Les arguments sur le "consentement" sont des arguments juridiquement pratiques, mais qui manquent singulièrement de profondeur historique et de contextualisation. Il faudrait toujours s'interroger sur quel type d'individu donne son consentement, à la suite de quoi et dans quelles conditions. Faute de se demander quelles sont les conditions sociales de production d'un consentement, c'est-à-dire dans quelles conditions, à la suite de quelle série d'expériences, et dans quels contextes biographiques, économiques, politiques ou culturels, on consent, on passe à côté de la réalité objective des rapports sociaux. (p. 74)
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Alors que l'on est spontanément enclin à réifier en "traits de caractère" ou de "personnalité" les comportements des individus avec lesquels nous interagissons, la sociologie rappelle au contraire que ces "traits" ne sont pas une propriété intrinsèque des individus en question. Ils sont les produits des relations d'interdépendance passée, mais aussi de la forme des relations sociales à travers lesquelles ils s'expriment. (p. 105)
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La fonction sociale de [la] philosophie de la responsabilité est de légitimer les dominants et les vainqueurs de toutes sortes, notamment ceux qui réussissent scolairement comme professionnellement. Nous sommes riches, mais nous ne le devons qu'à nous-mêmes (mythe du self-made-man). Nous sommes scolairement brillants, mais cela tient uniquement à nos qualités intellectuelles (mythe du don) ou à nos efforts (mythe de la méritocratie). Nous sommes célèbres et reconnus, mais c'est exclusivement grâce à notre exceptionnel talent (mythe du génie). (p. 68-69)
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Apprendre à être attentif, à développer une écoute patiente, compréhensive et curieuse, à relancer une discussion au bon moment pour qu'elle puisse se poursuivre, voilà un moyen concret d'acquérir certaines valeurs, qui, laissées à l'état de slogans démocratiques, relèvent le plus souvent du simple prêchi-prêcha.
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La sociologie ne dit pas que des choix ne sont pas faits, que des décisions ne sont pas prises ou que les intentions ou les volontés sont inexistantes. Elle dit seulement que les choix, les décisions et les intentions sont des réalités au croisement de contraintes multiples. Ces contraintes sont à la fois internes, faites de l'ensemble des dispositions incorporées à croire, voir, sentir, penser, agir forgées à travers les diverses expériences sociales passées, et externes, car les choix, les décisions et les intentions sont toujours ancrés dans des contextes sociaux et même parfois formulés par rapport à des circonstances sociales. (p. 55-56)
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Videos de Bernard Lahire (22) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Bernard Lahire
Bernard Lahire vous présente son ouvrage " Les structures fondamentales des sociétés humaines" aux éditions La Découverte. Entretien avec Jean Petaux.
Retrouvez le livre : https://www.mollat.com/livres/2886324/bernard-lahire-les-structures-fondamentales-des-societes-humaines
Note de musique : © mollat Sous-titres générés automatiquement en français par YouTube.
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