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Akutagawa, le plus fameux prix littéraire japonais,équivalent du Goncourt, porte le nom d'un grand écrivain du début du siècle dernier, l'auteur de ces cinq nouvelles.
Comme dans "Ivresse de brocart ", de Hisako Matsubara,récemment lu, le Japon moderne qui peine à terrasser le Japon traditionnel nous marque déjà avec la première nouvelle, "Les Poupées ". On se retrouve avec trente boîtes en bois de paulownia contenant "les poupées",une collection se composant de l'empereur et de l'impératrice , de trois dames du palais, cinq musiciens, pages et chambellans, ainsi que tout le mobilier. Considérées à l'origine comme servant à purifier la maison des vicissitudes de l'année, elles étaient exposées le 3 mars dans les maisons où il y a une fille.Une tradition qui remonte à l'époque Heian (794-1192). Les poupées appartiennent à une famille qui se trouve dans l'obligation matérielle de s'en séparer. Le pére,la mère, la fille ,le fils ont chacun des ressentis différents face à cette séparation lourde de signification.
"Un crime moderne", reflète le résultat de la contradiction entre une union traditionnelle et une union moderne , définit comme celle où l'homme et la femme s'unient par une attirance naturelle, plutôt qu'une union arrangée. Alors que dans "Un mari moderne" , une réflexion sur le concept et la valeur de la dite " modernisation ", à travers l'histoire d'un mariage "moderne", met en doute ce changement de cap à l'occidentale.
" La Magicienne", la quatrième et la plus longue nouvelle du recueil, qui y donne son titre est d'un tout autre ordre, une plongée dans le monde occulte. Comment porter plainte auprès de la police pour un futur crime prévu dans le monde invisible ? Une histoire dans la veine de Poe, qu'on lit comme un mini thriller.
Dans la dernière,"Automne" , un amour sacrifié nous laisse dans le flou de la condition féminine, qui malgré la modernisation ne semble pas vraiment avoir évolué.

À part la dernière nouvelle, l'auteur procède en nous transmettant une histoire qui lui est raconté. L'intrigue toujours présente , le style fluide,et les histoires riches en détails de divers traditions, croyances et superstitions donnent un recueil plaisant et intéressant à lire.
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(EN)VERS LE JAPON MODERNE.

C'est peu de dire que Ryûnosuke Akutagawa est un auteur japonais méconnu en France. Sans doute est-ce lié à ce qu'il fut essentiellement créateur de nouvelles, de poésie et de textes critiques, autant de genres littéraires plutôt modestement prisés du public hexagonal, et si l'on compte environ deux cent de ces oeuvres, celles-ci seront par ailleurs écrites en à peine plus d'une dizaine d'années, Ryûnosuke Akutagawa s'étant suicidé à l'âge de trente-cinq ans. Souffrant en effet d'hallucinations, à l'instar de sa mère décédée en 1902 et morte en pleine folie à quarante-deux ans, il préféra mettre fin à ses jours, encore parfaitement lucide... Génie relativement précoce - il n'avait encore que vingt-trois ans lorsque sa première nouvelle, le Nez, fut remarqué par l'immense Natsume Soseki qui encouragera vivement le jeune écrivain à poursuivre dans cette voie. Esprit ouvert à d'autres cultures que la sienne - il connaissait fort bien la culture chinoise de même que la littérature occidentale de son temps -, intellectuel à l'esprit fin et pénétrant, Ryûnosuke Akutagawa a marqué de son emprunte la littérature japonaise, son nom demeurant par ailleurs célèbre puisqu'en 1935, huit ans après sa disparition, l'un de ses proches donnera son nom en hommage à ce qui deviendra très vite le prix littéraire le plus célèbre du Pays du Soleil Levant, plus ou moins l'équivalent de notre Prix Goncourt.

Les cinq nouvelles proposées ici par les éditions Philippe Picquier, dont on connait le long et passionnant travail de défrichage des littératures extrêmes-orientales, ne sont qu'un avant-goût de celles écrites par Akutagawa, celles proposées ici étant extraites de différents cycles de l'auteur.

Ainsi, les trois premières sont-elles issues d'un cycle nommé «kaika (ki) mono», littéralement "histoires du temps de la modernisation" dont la première, «les poupées» est, sans nul doute la plus saisissante, la plus troublante et douce-amère des trois textes de cette série. Il y est question d'une famille souffrant directement du changement de société lié à la diffusion de la modernisation, voulue sous l'ère Meiji, et dont l'appauvrissement régulier oblige peu à peu le père de famille à vendre tous les trésors - fussent-ils symboliques - de sa lignée. Ainsi en est-il de ces poupées traditionnelles représentant l'Empereur, son épouse et sa cour, au milieu de leur décorum de bois, qu'un intermédiaire de leur connaissance a trouvé moyen de leur vendre à bon prix auprès d'un collectionneur américain (déjà !). Cette histoire, c'est à travers le regard de la cadette que nous la découvrons - c'est à elle qu'avaient été confiées les poupées - et si l'auteur nous fait comprendre la profonde tristesse que la jeune fille peut éprouver à devoir se séparer, presque sans mot dire et sans être autorisée à le pouvoir faire, de ses beaux jouets anciens, la fillette nous permet de comprendre les sentiments plus que divers des autres membres de la famille corrélativement à cette séparation d'une collection hautement symbolique d'objets quasi sacrés. le fils aîné fait part de sa morgue et de tout son dégoût à l'égard d'objets surgit d'un passé à oublier d'urgence ; la mère n'en finit pas de regretter déjà cette séparation de biens précieux qui la reliait aux valeurs d'un régime en passe d'être définitivement aboli ; quant au père, il tâche de se maintenir dans un entre deux compliqué et instable, ni intensément passéiste ni totalement engagé dans la modernité du moment. L'ensemble est rédigé sur un mode réaliste d'une grande délicatesse contextuelle dans lequel l'auteur exprime les différents points de vue par l'entremise, dans cette première nouvelle, de cette jeune fille ou, dans le cas de «Un crime moderne» et de «un mari moderne», par le principal protagoniste de la narration. Chaque fois, cependant, l'on comprend le point de vue de Ryûnosuke Akutagawa qui, s'il n'est pas de ce passéisme intolérant et stérile, n'en éprouve pas moins une certaine nostalgie douce à l'égard de tout ce que la modernité semble devoir obstinément mettre à bas et détruire, sans commisération aucune à l'égard de ce que ce même passé pouvait avoir de beau, d'équilibré, d'éprouvé. Alors, Ryûnosuke Akutagawa se moque doucement, avec une sensibilité affirmée, beaucoup d'intelligence et d'élégance ainsi qu'une profonde culture (dont il faut rappeler ici qu'elle était en partie tournée vers les auteurs occidentaux de l'époque, nombres de nos auteurs y étant même nommément cités) des travers grands ou petits de ces modernistes effrénés mais confrontés à cette civilisation multi-millénaire tout autant qu'à leurs propres incohérences.

La nouvelle qui donne son nom à l'ensemble du recueil, «La magicienne» est d'un tout autre genre. Scindée en plusieurs brefs chapitres, à la manière d'une "novella", celle-ci présente une autre facette de l'auteur, à mi-chemin entre tradition mystique japonaise et culture magique chinoise. On y découvre l'importance, dans ce Japon pourtant en pleine mutation, des vieilles croyances, des êtres possédants des dons plus ou moins néfastes ou bénéfiques, interférant par les biais de la magie sur l'amourette que vivent deux jeunes gens, la jeune fille n'étant autre que la nièce de cette méchante sorcière ! Un texte placé par l'auteur sous les auspices de Poe, même si, avouons-le, nous en sommes très loin, tant y est prégnante la culture extrême-orientale. Seule la conclusion aux faux airs de relativisme scientifique peut nous faire penser à l'auteur de la chute de la maison Usher ou de le corbeau.

L'ultime texte, «Automne», est d'une sensibilité extrême qui, bien que d'un réalisme saisissant, pourrait se placer dans la lignée de certains symbolistes français ou, par certains aspects, d'un Francis Jammes tant est nostalgique, d'une douceur spleenétique et empli de références ce texte. On notera, entre autres éléments, la citation d'un aphorisme de Remy de Gourmont, écrivain français aujourd'hui trop oublié mais qui fut un phare auprès d'un grand nombre d'écrivain de son temps. La finesse psychologique de cette nouvelle le partage avec la rudesse de ce destin de femme qui, par obligation envers sa cadette, abandonne l'idée d'épouser l'homme avec lequel elle pourrait être heureuse - mais qu'elle apprécie plus comme un compagnon et un pair que comme un amant -, sa jeune soeur en étant éperdument amoureuse. L'ensemble se joue dans un cercle d'intellectuels de ce début XXème, dans lequel la femme n'a guère d'autre liberté que le choix de son époux (lequel s'avérera désastreux en terme de destinée pour cette femme brillante promise jusque-là à un bel avenir d'écrivain).

«Une vague inquiétude» laissera cet auteur fin, mélancolique, ombrageux comme ultime message à l'heure de la mort qu'il se sera choisi. C'est aussi le sentiment calmement pénétrant qui saisit le lecteur tout au long de ces cinq textes à l'amertume sans violence ni désespoir acerbe, se jouant souvent de notre regard par le biais d'une doucereuse ironie, l'ensemble étant servit par un style sobre et précis - qui en devient poétique alors même que l'écrivain semble fuir tout effet de manche facile, toute "japonaiserie" tellement attendue, et sans jamais donner dans l'imitation abusive des auteurs occidentaux qu'il appréciait - Anatole France, Mérimée, Baudelaire et bien d'autres - faisant sombrer peu à peu le lecteur dans le tragique aussi profond qu'il parait de prime abord impavide. Avec ces nouvelles qui vous environnent longtemps, Ryûnosuke Akutagawa au destin si tragique est à la fois l'envers et l'endroit de ce monde japonais en pleine rupture de ban d'avec lui-même et dont on sait comme cette modernisation tout azimut à marche parfois forcée ne se fera pas que pour le bonheur des peuples... Par ses touches pour ainsi dire impressionnistes, Ryûnosuke Akutagawa l'avait, dans une certaine mesure, pressenti... jusqu'à la folie et à la mort.
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Avec cette courte série de nouvelles, Akutagawa met en scène ses hésitations. D'abord une hésitation face à un Japon de plus en plus ouvert sur la culture occidentale, vectrice d'une modernité paradoxale, mise en avant dans les titres « Un mari moderne » et « Un crime moderne ». En effet, la modernité introduit dans le couple et dans l'acte criminel lui-même des sentiments ambivalents, quelque part entre la dignité et la jalousie, ou entre « l'indulgence ou le dégoût » anticipés chez les lecteurs par le criminel de la seconde nouvelle. Cela est susceptible de refléter la mélancolie d'Akutagawa face aux changements amenés par l'ère Meiji, même s'il était lui-même très influencé par la culture occidentale (de Gustave Moreau à Poe, qu'il enseigna, en tant que professeur d'anglais). Dans la nouvelle « Les poupées », le fait de rejeter sa propre culture empêche la communication avec ceux qui s'émeuvent encore devant elle. Portés par leurs penchants respectifs, les héros font ainsi éclater l'unité de la famille japonaise et se retrouvent isolés les uns des autres, si bien que l'amour pour des poupées représentant une cour impériale fantasmée (monde du passé par excellence) ne peut plus se perpétuer que dans le silence, dans l'imminence de leur disparition.

Pour retenir ce monde fuyant, Akutagawa fait appel à une magie relevant du shintoïsme : un mystérieux kami aquatique confère des pouvoirs à la magicienne éponyme, qui s'avère malfaisante (ce Japon regretté n'est donc pas idéalisé). Akutagawa déploie ici des visions d'une grande originalité, portées par les ailes de nuées de papillons de nuits, entre lesquels apparaissent et disparaissent aussitôt des yeux de sorcières détachés de la matérialité. Difficile de penser que les névroses hallucinatoires dont souffrait l'auteur ne sont pour rien dans ces esquisses fugitives et saisissantes.

D'ailleurs, face au déchaînement de ces forces obscures contre le héros et sa bien-aimée, ces derniers hésitent à se soulager de leurs tourments par un double suicide amoureux, le fameux shinjū également cher à Dazaï. On aboutit là à une seconde forme d'hésitation, qui s'avère poignante à l'aune de la fin de vie d'Akutagawa. Aurait-il résisté à ses démons s'il avait embrassé la modernité de plein pied, ou bien seule une intercession auprès d'un kami aurait-elle pu le soulager, de sa « vague inquiétude », reflet nippon de l'inquiétante étrangeté où nous plonge le croisement des mondes ?
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Akutagawa a quelque chose de magique dans son écriture. il manie l'art délicat de la nouvelle avec un rare talent, très tôt reconnu par Soseki.

S'il en a écrit quelque chose comme 150, bien peu ont été traduites en français et celles de ce livre l'ont été merveilleusement bien.

Il mêle volontiers le fantastique dans ses écrits et cela ne m'étonnerait pas qu'il ait influencé le célèbre Haruki Murakami avec alors malheureusement une certaine dilution de la force de l'écrit…

Akutagawa est peu connu en français et je ne peux que vous inviter à le découvrir !!


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Ce recueil comprend 5 récits :

Les poupées
Un crime moderne
Un mari moderne
La magicienne
Automne

Le plus long est La magicienne. C'est un récit fantastique, le personnage principal, Shinzô, se fait du souci à cause d'une jeune femme qui fût servante dans sa famille, dont il est amoureux, et qui a soudain disparu. Il la retrouve chez une magicienne dont elle s'avère être la fille, et qui ne veut pas la laisser partir car elle lui est indispensable pour communiquer avec le dieu Basara. Elle provoque donc toute une série de sortilèges pour séparer les jeunes gens.
C'est la nouvelle qui plonge le plus dans le surnaturel et dans la culture japonaise ancienne, même si l'action se place à l'époque où elle a été écrite. C'est un récit empreint de poésie et de mystère, on ne comprend pas forcement tout ce qui se passe, l'auteur joue aussi beaucoup sur le contraste entre les éléments moderne (le téléphone, le tramway) et les éléments de magie.

Les poupées est un joli récit raconté par une enfant, son père en difficulté financière a dû se résoudre à vendre les poupées de sa fille, les poupées servant rituellement à la purification de la maison et qui sont particulièrement somptueuses. Elles sont achetées par un riche étranger, et au fur à mesure que le moment de la séparation approche, une nostalgie s'empare de notre héroïne, qui voudrait au moins les voir exposées encore une fois, ce à quoi s'oppose son père. La fin est de toute beauté, entre rêve et réalité. La nouvelle met aussi en opposition l'attitude de ceux qui voudraient aller par marches forcées vers la modernité en bradant s'il le faut le passé (le frère) et ceux qui n'arrivent pas à se résoudre à abandonner la façon de vivre et les valeurs d'autrefois (la mère).

Un crime moderne est un bref récit ayant pour thème l'amour, son héros voue une passion extrême à sa cousine, et il veut que cet amour demeure désintéressé à n'importe quel prix.

Un mari moderne est un récit mélancolique sur un homme prêt à presque n'importe quoi pour respecter les principes qu'il s'est choisi, même si ces derniers ne lui donnent pas le bonheur.

Automne est une nouvelle dont l'héroïne se sacrifie pour sa jeune soeur, lui laissant épouser l'homme qu'elles aiment toutes les deux, et qui épouse un homme avec qui elle a peu d'affinités, et qui l'empêche de se réaliser en tant qu'écrivain.

Akutagawa possède un immense talent de conteur, il arrive en quelques pages à nous intéresser à ses personnages, à les rendre attachants, tout en faisant progresser le récit par petites touches très habiles, sans dévoiler tous les ressorts de l'intrigue, en laissant la place pour l'imaginaire de ses lecteur. Il a un style simple en apparence, et direct, mais qui recèle énormément de poésie, de clair obscur, de mystère et de nostalgie. Ses personnages semblent tous en recherche de quelque chose qu'ils n'arrivent pas à identifier eux-mêmes, sont des tendres rêveurs qui ont du mal à trouver leur place dans le monde, en permanence entre le passé et le présent, et jamais vraiment à leur place.
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Hina, Kaika no satsujin, Kaika no otto, Yôba, Aki
Traduction & avant-propose : Elisabeth Suetsugu

ISBN : 9782809703979

Cinq nouvelles, dont la plus longue, "La Magicienne", donne son titre au recueil, et qui datent toutes de la fin de la vie de leur auteur. Mentionnons au passage que "La Magicienne" justement est l'une des très rares nouvelles d'Akutagawa qui fasse appel à un thème carrément fantastique, l'invocation des dieux par un médium utilisé contre son gré.

Les nouvelles d'Akutagawa, ça se savoure, ça se relit aussi. Avec Tanizaki mais en utilisant moins de thèmes axés sur le sexe, le fétichisme et le sadisme, il demeure l'un des maîtres du genre au Japon. Par conséquent, ne vous contentez pas de "Rashômon", immortalisé à l'écran par Kurosawa qui, dans sa partie, était aussi un génie. Ces cinq nouvelles en particulier montrent la perplexité et la nostalgie d'Akutagawa face à la modernisation - qu'il sait nécessaire - de son pays mais dont il n'ignore pas non plus qu'elle risque de faire périr bien des traditions.

Comme, par exemple, celle des Poupées que l'on exhibe pour la Fête des Filles et qui est le sujet de la première nouvelle. Ces poupées, grandeur nature et représentant traditionnellement l'Empereur, l'Impératrice, quelques courtisans dans un décor splendide, s'apprêtent, au tout début du XXème siècle, à être vendues à un Américain afin de permettre à la famille de remonter un peu la pente sur le plan financier. L'histoire nous est contée, avec une infinie poésie, par la fille du vendeur, devenue adulte et la fin, l'image de cette petite fille occidentale qu'elle a vue un jour jouer avec les têtes de poupées dépareillées, est singulièrement émouvante et tragique.

L'amour assassine ou répudie, selon que vous lisez ensuite "Un Crime Moderne" ou "Un Mari Moderne." Les deux récits sont déchirants, de façon cynique et sanglante pour le premier, plus tendre et infiniment plus mélancolique dans le second. Dans le premier, on peut dire que le Japon traditionnel triomphe mais le "Mari Moderne", membre d'ailleurs de l'aristocratie samouraï, lui, a plutôt le comportement d'un vaincu.

"La Magicienne" est un authentique récit fantastique comme seuls les Japonais sont capables de nous en écrire et qui, par certaines scènes (l'horrible vieille sorcière s'avançant lentement à genoux vers le héros), évoqueront au cinéphile un Japon certainement hypermoderne mais qui n'a pas oublié les racines dans lesquelles il puise une bonne part de son cinéma d'épouvante - qui est, nul connaisseur ne le niera, tout à fait différent, comme le cinéma coréen d'ailleurs, du genre "à l'américaine." En gros, un jeune homme tombe amoureux d'une servante qu'il voudrait épouser. Un beau jour, celle-ci donne sa démission. Après divers aléas, il retrouve sa trace : elle vit désormais chez une tante, voyante renommée de Tôkyô et personnage franchement détestable, qui a bâti sa renommée sur sa façon d'invoquer un certain dieu dont les arrêts peuvent se révéler aussi positifs que négatifs. Mais pour cela, elle a besoin de quelqu'un qui entre en transe. Il ne lui reste plus que sa jeune nièce qu'elle a si bien menacée des pires représailles que la jeune fille s'est soumise à son sinistre destin. Mais voilà qu'un riche client de la voyante veut désormais prendre la jeune fille comme concubine. La vieille est bien disposée envers ce prétendant : elle peut trouver un autre medium mais les sommes que lui versera le client se sentiront toujours très au chaud dans son escarcelle avide. Evidemment, la situation va se renverser ... Et Akutagawa en profite pour nous rappeler que, comme le disait Shakespeare par la voix de Hamlet, "il y a [...] bien plus de merveilles dans le ciel et sur la terre que ne peuvent rêver toutes nos philosophies." Les descriptions, tant diurnes que nocturnes de l'ancienne Edo, sont en outre saisissantes de beauté ... et de fantastique à l'état pur.

Quant à la dernière nouvelle, "Automne", c'est certainement la plus triste : deux soeurs qui aiment le même homme ; l'aînée se sacrifie (la tradition veut que l'aînée se marie avant la cadette) tandis que la puînée obtient l'homme qu'elle aime. A la fin ...

Ma foi, la fin, je vous la laisse découvrir : elle est d'une mélancolie insigne et raffinée et tout l'art du grand Akutagawa trouve à s'y exprimer avec cette simplicité poétique qui le caractérise.

A lire. C'est sûr. D'ailleurs, tout Akutogawa est à lire. ;o)
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J'ai très classiquement abordé l'oeuvre d'Akutagawa Ryûnosuke avec son plus célèbre recueil en français, Rashômon et autres contes – puis j'ai poursuivi l'expérience avec La Vie d'un idiot et autres nouvelles : si ces deux recueils témoignaient chacun de ce que l'auteur était avant tout un maître du récit court, ils illustraient en même temps combien son oeuvre sur ce format était variée – alternant vieux contes issus de la tradition japonaise, par exemple des Histoires qui sont maintenant du passé, et récits contemporains intimistes, davantage tournés vers la psychologie des personnages, et tout particulièrement le ressenti intime d'un narrateur au bout du rouleau qui se fait le porte-parole de l'auteur, à la façon des « romans du moi » dont un Dazai Osamu, notamment, était emblématique (voyez par exemple La Déchéance d'un homme) ; en même temps, quelle que soit l'époque choisie, le ton pouvait osciller entre un plus ou moins naturalisme un peu amer, et des expériences à la lisière du fantastique ou au-delà, éventuellement plus colorées – ce en quoi je suppose qu'il s'associe définitivement à son ami, moins connu de par chez nous, Uchida Hyakken (voyez Au-delà – Entrée triomphale dans Port-Arthur).



La Magicienne, troisième recueil de l'auteur que je lis, témoigne de cette diversité, mais, en même temps, met particulièrement l'accent sur une déchirure déjà sensible dans les deux précédents volumes, et à vrai dire emblématique des écrivains de Taishô : l'opposition parfois douloureuse entre un Japon traditionnel regretté et un déconcertant Japon engagé à marche forcée dans la voie de la modernisation à l'occidentale. En fait, trois des cinq nouvelles ici rassemblées, les trois premières, relèvent d'une sorte de « cycle thématique » qualifié de kaika (ki) mono, ou « histoires du temps de la modernisation » (le cycle comprend deux autres nouvelles figurant dans les recueils antérieurs : « Chasteté d'Otomi » dans Rashômon, et « Le Bal » dans La Vie d'un idiot) ; ce sont des récits assez divers, mais qui ont en commun d'illustrer cette thématique sans véritablement y apporter de solution – ce serait trop simple. Maintenant, on aurait probablement tort, à trop se focaliser sur cette question, de voir en Akutagawa un écrivain « passéiste », ou « réactionnaire » ; sans doute ne commet-il pas l'erreur de trop idéaliser le passé, comme celle de rejeter violemment et l'Occident, et la modernité (il y a trouvé son bonheur plus qu'à son tour, et au premier chef en littérature). Son propos n'est pas essentiellement politique, par ailleurs. Seulement, il fait part d'une vague nostalgie, pas forcément très rationnelle, pas moins poignante… Une vague nostalgie qui ferait alors écho à la « vague inquiétude », lacunaire explication par Akutagawa de son suicide en 1927, à l'âge de 35 ans – je relève au passage que les cinq nouvelles ici rassemblées ont été composées entre 1918 et 1920 pour quatre d'entre elles, et 1923 pour la dernière, toutes en tout cas avant le grand tremblement de terre du Kantô, qui serait un tel traumatisme pour les Japonais d'alors.



Si les trois nouvelles de kaika (ki) mono figurant dans La Magicienne ont une parenté thématique marquée, elles se montrent cependant assez différentes les unes des autres. La première, « Les Poupées » (Hina 雛), qui est la plus tardive (1923), est aussi la plus touchante. Elle est narrée par une petite fille (ou, plus exactement, Akutagawa rapporte les propos d'une vieille dame se remémorant quand elle était une petite fille, durant l'ère Meiji), issue d'une bonne famille toujours plus désargentée – au point où le père décide de vendre une collection de poupées traditionnelles (dont l'histoire remonte à l'époque de Heian) à un collectionneur américain (…) tout disposé à lui payer un gros chèque. La narratrice est horrifiée par ce choix, elle qui accorde une importance sentimentale énorme à ces poupées – y attache-t-elle aussi une valeur symbolique ? Indirectement, c'est probable – d'autant que l'affaire incite à voir en chacun des autres membres de la famille des archétypes au regard de cette question : la mère est enfermée dans le passé, mais pas moins dans l'impuissance, le frère est un jeune homme fort en gueule et qui brûle volontiers les bateaux, tous les bateaux, pour ne surtout pas repartir en arrière, et le père, enfin, prétend naviguer dans un entre-deux nébuleux et comme tel probablement intenable. En définitive, nous verrons bien ce qu'il en est de l'attachement à ces poupées, symbole faussement frivole d'une culture en proie au doute quant à son identité même… C'est une nouvelle très forte, riche d'images puissantes à vrai dire – et si les membres de la famille ont quelque chose d'archétypes, dans un récit au symbolisme marqué, Akutagawa Ryûnosuke parvient pourtant à ne pas trop charger la barque, et surtout à faire que les émotions de ses personnages ressortent avec le plus grand et le plus douloureux naturel ; la voix de la petite narratrice y a sa part, indéniablement.



« Un crime moderne » (Kaika no satsujin 開花の殺人, 1918) aborde la question d'une manière bien différente, dans le fond comme dans la forme. Comme le titre le laisse entendre, cette nouvelle tient du récit policier, au travers de la confession, dans une ultime lettre, d'un crime et de son mobile – avec quelque chose d'un peu pervers, qui me renvoie, peut-être à tort, à certaines oeuvres à peine un peu postérieures d'Edogawa Ranpo, les deux écrivains étant des contemporains. En revanche, le qualificatif « moderne » du titre est probablement plus ambigu que dans la nouvelle qui précède et celle qui suit (« Un mari moderne ») ; je tends à croire qu'il renvoie, au moins pour partie, à ce genre policier, avec ses figures occidentales classiques chez Edgar Allan Poe, Arthur Conan Doyle ou encore Gaston Leroux, qui s'exportait bien, même si depuis tout récemment, dans le Japon de Taishô ? Bon, je ne sais pas… Cette « modernité » est probablement avant tout d'essence psychologique, en tout cas – éventuellement importée en même temps que le récit policier : dans cette confession, le crime compte peut-être moins que sa justification, ou plus exactement le fait que la justification initiale s'avère à terme, aux yeux mêmes du criminel, comme une imposture aux soubassements obscurs et d'essence égoïste, quand le geste fatidique avait été commis au nom de l'altruisme – et s'il faut encore chercher des équivalents parmi les écrivains japonais du temps, je suppose que c'est ici le nom de Tanizaki Junichirô qu'il faudrait avancer, un auteur qui s'était lui aussi, à l'époque, essayé et à plusieurs reprises au genre policier, avec une ambiguïté morale plus généralement caractéristique de son oeuvre ; en tout cas, j'en ai l'impression… Quoi qu'il en soit, dans son registre, c'est une nouvelle sympathique, qui fonctionne bien – sans renverser pour autant.



La troisième nouvelle – et la dernière de ce « cycle » de kaika (ki) mono dans le présent recueil – s'intitule « Un mari moderne » (Kaika no otto 開花の夫, 1919) ; le titre renvoie à la précédente, et nous y croisons là encore un « vicomte Honda », le nom du destinataire (ou plus exactement d'un des destinataires) de la lettre d'aveu du « crime moderne », même si je ne suis pas certain qu'il faille à tout crin y voir un même personnage. le ton, de toute façon, est très différent : nul aspect policier ici, mais un discours sur la modernité plus ouvert, plus explicite, au travers de ce personnage qui entend conclure un mariage d'amour (à la française, dit-on), et vit dans un univers où le Japon traditionnel n'a tout simplement plus sa place – ce qui ressort notamment de la décoration de sa résidence. Citons le texte (p. 68) : « Tout avait un parfum de nouveauté surannée, la décoration vous plongeait presque dans l'angoisse à force de faste, et si je voulais la qualifier encore, je dirais que l'ensemble faisait songer au son d'un instrument de musique désaccordé, oui, ce cabinet de travail était un reflet fidèle de l'époque. » Mais, au fond, sous couvert d'une discordance, donc, entre la tradition et la modernité, la nouvelle fait probablement autant sinon plus état de ce que le désir d'idéal ne peut conduire qu'à la déception – ceci, pour le coup, n'est peut-être pas propre à ces Japonais d'alors, avides de s'occidentaliser... La peinture (si j'ose dire…) des moeurs est remarquable, dans cette nouvelle, qui trouve donc à s'illustrer dans le mobilier et les oeuvres d'art, même si la thématique prétexte du mariage d'amour ne m'a pas parlé plus que cela.



Avec la quatrième nouvelle, qui est de loin la plus longue du recueil (dans les 80 pages, contre une trentaine pour les quatre autres récits – en fait, il semblerait que ce soit une des plus longues nouvelles dans toute l'oeuvre d'Akutagawa), on change assez radicalement de registre : « La Magicienne » (Yôba 妖婆, 1919) est en effet, même contemporain, un long récit fantastique qui pioche dans le folklore nippon, mais en se mettant sous le patronage explicite de Poe et de Hoffmann ; à vrai dire, le caractère contemporain de cette aventure est probablement de la première importance, et, en cela, pourrait malgré tout renvoyer au cycle kaika (ki) mono, car, tout aussi expressément, le narrateur insiste sur le fait que son étrange histoire s'est bien produite dans le Japon de Taishô, consacrant beaucoup de pages à assurer son lecteur que le surnaturel et l'inexplicable sont toujours aussi prégnants en cette époque par essence « moderne ». En ce sens, « La Magicienne » explore bien la même tension caractéristique entre Japon ancien et Japon moderne, et le fait de citer expressément des auteurs occidentaux, comme les modèles d'un récit pourtant parfaitement japonais, joue de cette même ambiguïté – et, je suppose, non sans un certain humour. Car si le récit, sur une base classique d'amours contrariées, abonde en séquences cauchemardesques, et si la magicienne du titre est un personnage effrayant, au service d'une divinité à son tour ambiguë, l'histoire cependant se montre avant tout grotesque, délibérément : on ne fait pas du tout dans le fantastique subtil, ici ! À vrai dire, et d'autant plus que, passé donc un assez long préambule, le récit se montre assez frénétique dans ce registre, il m'a à nouveau fait penser à Edogawa Ranpo – mais, bizarrement ou pas, davantage celui du récit policier le Lézard Noir que celui d'histoires lorgnant plus ouvertement sur le fantastique. Hélas, cela a eu sur moi la même conséquence – un profond ennui… renforcé par une tendance du récit à se montrer bien trop bavard. Amateur de fantastique, et ayant particulièrement prisé certains récits d'Akutagawa dans ce registre qui lui plaisait bien, notamment dans Rashômon et autres contes, j'attendais beaucoup de cette longue nouvelle, mais, en définitive, c'est celle qui m'a le moins parlé – et même, autant le dire, celle qui m'a déçu, celle que je n'ai pas aimé… le folklore nippon, qui a forcément quelque chose d'original pour un lecteur occidental (ou qui l'avait – mais je dois dire que certaines scènes m'ont évoqué les yôkai de Mizuki Shigeru, par exemple dans nonnonbâ), et de manière concomitante la tournure grotesque du récit, pouvaient jouer en sa faveur, mais son rythme et son débit ont pesé davantage dans la balance, hélas, et je me suis… ennuyé, oui.



Reste une dernière nouvelle, et c'est le jour et la nuit : « Automne » (Aki 秋, 1920) est un récit très délicat, très subtil, tout en notes discrètes, qui tranche on ne peut plus avec la frénésie grotesque de « La Magicienne ». le thème central du mariage rapproche peut-être « Automne » d' « Un mari moderne », mais en inversant les rôles, puisque c'est cette fois une femme qui sera notre personnage point de vue, si elle est elle aussi, à sa manière, éprise d'idéal – seulement, ce récit est beaucoup plus poignant, ce qui le rapproche davantage à mes yeux des « Poupées » ; et je me demande, naïvement peut-être, si ce sentiment ne tient pas à ce que ces deux nouvelles mettent au premier plan, et dans le rôle de narratrice dans la première, des femmes ? Non que je sache bien ce qu'il faudrait en déduire, concernant aussi bien l'auteur, son pays, son époque… ou mon ressenti de lecteur. Quoi qu'il en soit, nous y voyons une femme brillante, et qui avait tout notamment pour devenir un grand écrivain, se sacrifier, en n'épousant pas l'homme qu'elle aime, un écrivain lui aussi, afin de laisser sa propre soeur, follement amoureuse, l'épouser à sa place, et en épousant quant à elle un ennuyeux banquier – cette décision fatidique ayant aussi (et peut-être même surtout ?) pour conséquence de mettre un terme à ses ambitions littéraires. L'archétype de la femme qui se sacrifie est très commun dans la culture japonaise, mais cette illustration particulière touche énormément, avec cette décision peut-être imposée par cette culture, ou tout autant par le désir d'idéal, et qui en définitive ne satisfait personne. Notons aussi que cette nouvelle dépeint par moments les milieux intellectuels de Taishô, un tableau qui vaut le détour. « Automne » est une très belle nouvelle, très émouvante.



À vrai dire, c'est probablement celle que j'ai préférée dans ce recueil, avec, à l'autre bout, « Les Poupées », donc. J'ai apprécié, aussi, « Un crime moderne », dans un registre très différent. « Un mari moderne » m'a laissé davantage froid, si j'ai apprécié ses descriptions, y compris morales. « La Magicienne », je suis passé totalement à côté. le recueil, en prenant en compte ce bémol non négligeable (avec ses 80 pages, la novella occupe presque la moitié du volume auquel elle a donné son titre), m'a plu, toutefois bien moins que La Vie d'un idiot, et incomparablement moins que Rashômon. Mais je poursuivrai certainement l'expérience, probablement avec le quatrième recueil de nouvelles d'Akutagawa qu'est Jambes de cheval. À suivre, donc…
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JJ'ai lu ce recueil peu joyeux avant de connaitre l'auteur Ryūnosuke Akutagawa (1892 -1927). Akutugawa reconnu au Japon comme un grand écrivain faisait partie du groupe des écrivains japonaises du début du 20e siècle qui déploraient la modernisation de la société japonaise qui a suivi la restauration de Meiji en 1868. Bref, Akutugawa croyait détester la vie moderne mais en fait il détestait la vie tout court. Ill a consacré sa vie non à l'amour mais à son suicide qu'il a finalement effectué à l'âge de 35 ans. Son obsession avec le suicide rend les histoires d'amours malheureux deux fois plus tristes.
le premier conte, "Les Poupées" est banal à pleurer mais extrêmement bien fait. La narratrice s'en veut à son père, sa mère et son frère d'avoir vendu l'ensemble familial des poupées du festival "Hina Matsuri". Les poupées ne sont pas de jouets. Faites pour être exposées, elles représentent les membres de la cour impériale et ont une valeur plutôt religieuse. Dans la dèche, la famille les vend au nom de la modernité; la narratrice est la seule à s'y opposer. Elle va apprendre bien des années après que l'acquéreur, un anglais, avait donné les poupées à sa fille qui les avait toutes détruits. La narratrice refuse de pardonner aux membres de la famille leur geste ignoble même après leurs morts.
Le deuxième conte. "Un crime moderne", raconte l'histoire d'un médecin aux moyens modestes qui perd la femme qu'il aime à un homme très riche. Quand le médecin apprend que le mari de sa bien-aimée est un coureur de putes, il est outré. Il le tue. Aux yeux d'Akutagawa son héros a fait un excellent coup contre la modernité.
Le protagoniste du troisième conte, "Un mari moderne" veut être à tout prix un homme moderne. Il veut un mariage d'amour et rejette tout partie qui semble présenter des avantages matériaux. Sa femme le trompe immédiatement. Il ne veut pas la divorcer parce qu'il respecte son désir moderne de chercher l'amour parfait. Quand elle trompe son amant, le mari décide qu'elle est tout simplement une femme de mauvaises moeurs et la divorce. L'auteur blâme le mouvement féministe pour l'immoralité de l'épouse.
Le quatrième conte, "La magicienne" est le seul où Akutagawa semble admettre que les choses peuvent bien finir dans la vie. le héros veut sortir sa femme des griffes d'une sorcière ou magicienne. Son plan échoue mais la magicienne meurt providentiellement. C'est un dénouement est très surprenant pour un auteur si profondément pessimiste.
"L'Automne" le cinquième et dernier conte est parfaitement larmoyant. Deux soeurs sont amoureuses du même homme. L'ainée renonce à l'homme qu'elle aime. le bonheur de sa cadette la rend malheureuse pour le reste de sa vie.

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