AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,37

sur 93 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
“La belle époque”,
En 1895 ou 1900 à Paris personne n'aurait dit “nous vivons La Belle Époque, profitons en au maximum “. Cette période de paix de l'histoire située entre la défaite catastrophique de 1870-71 et la victoire catastrophique de 1914-18 de la France, ne sera mentionnée en ces termes que rétrospectivement en 1940-41, date d'une autre défaite française. Une époque dont l'adjectif « belle »semble assez surprenante, vu l'anarchie, la violence ( assassinat du président de la république Sadi Carnot en 1894, de Jean Jaurés en 1914, l'affaire Dreyfus.... ), la corruption et pour finir la colonisation brutale ( l'invasion de la Tunisie au printemps 1881 et l'organisation d'une rébellion en automne) qui marqueront la vie sociale et politique du pays. L'adjectif est uniquement justifié par le milieu florissant des Arts, avec les Impressionnistes, néo-impressionnistes, fauves et cubistes.
Barnes dans son dernier opus nous raconte cette époque, partant d'un tableau de John Singer Sargent, Dr Pozzi at Home (1881). Samuel Jean de Pozzi, chirurgien français d'origine italienne, « médecin à la mode », était le Zelig de la Belle Époque, fréquentant et côtoyant les personnages marquants de son temps,« Pozzi was everywhere », même dans les barres de chocolats Félix Pottin dans les deux premières décennies du XX iéme siècle. Il fut l'amant de Sarah Bernhardt, son « Docteur Dieu » qu'il opéra aussi, et surtout fit parti d'un cercle d'artistes et libertins de l'époque, dont le comte Robert de Montesquiou (« le professeur de beauté », comme le nommait son ami Marcel Proust), le prince de Polignac, l'écrivain scandaleux Jean Lorrain, le non moins scandaleux Oscar Wilde et James MacNeill Whistler. Il fut « l'homme sain d'une ère démente », où les dandys et les duels étaient monnaie courante.

Entre les fastes, potins et querelles d'un milieu excentrique et coloré et la personnalité curieuse et brillante du docteur mondain Pozzi, qui fut aussi sénateur, maire de sa commune, innovateur dans une profession conservatrice pour l'époque, coureur de jupons marié et père de trois enfants,....Barnes nous plonge dans les fastes et affres d'une époque fascinante, “distante, décadente, hectique,violente narcissique et neurotique “. Cette immersion dans ces vies françaises d'un passé assez lointain, dit-il est en partie une réaction de ma part au “départ masochiste et à tort de la Grande Bretagne de l'Union Européenne “, un geste envers l'insularité, une noyade salutaire pour se débarrasser de tout opinions et conceptions superficielles d'un présent qui nous est trop proche pour que nous puissions en saisir la vrai portée. « le chauvinisme est une forme d'ignorance », disait Pozzi, paroles qui illustrent mieux que jamais la situation présente des anglais, lesquels en se cloîtrant se sont condamnés à un misérable isolement. Mais l'auteur dans son épilogue termine par une note optimiste. Ses recherches sur le docteur Pozzi et le livre présent qui en découle et que je vous laisse découvrir, lui a redonné foi en l'homme. le temps nous montrera si cette foi tient la route ou non.....
Un livre brillant, original, foisonnant d'histoire et d'anecdotes intéressantes, souvent sulfureuses. Un bon cru du sieur Barnes.


« I was drawn to Dr Pozzi by the Sargent portrait, became curious about his life and work, wrote this book, and still find the picture a true and dashing likeness. »
( J'ai été attiré par le docteur Pozzi à travers son portrait de Sargent, devint curieux de sa vie et de son travail et ai écris ce livre, et je pense encore et toujours que le tableau reflète une vérité fringante du personnage )




Commenter  J’apprécie          9719
Les Dandys dandinent à la « Belle Epoque ».
Il est plutôt jouissif de vagabonder parmi les bons mots des mauvais esprits. Esprit, Esprit es-tu là ? Et où veux-tu que je sois, pas dans ta tête en tous les cas. Tourne ces pages pour renifler l'écume de notre érudite décadence.
Julian Barnes fait les présentations avec un beau panel de mauvaises fréquentations. Enchanté, Oscar. Désenchanté le monde. Vivote la III ème République.
L'Homme en rouge donne son titre à l'ouvrage et sa silhouette à John Sargent en 1881 qui le peint dans une sorte de robe de chambre écarlate du meilleur effet. Un vêtement qui n'irait pas à tout le monde et pas à moi en particulier.
Il s'appelle Samuel Pozzi, pionnier de la gynécologie, pas avare de travaux pratiques, sauveur et tombeur de ses dames, homme poli et politique, collectionneur d'art et d'aventures, meilleur amant que mari, savant brillant mais père médiocre. le tout en seul homme. Comme quoi, certains bonhommes arrivent à faire deux choses à la fois.
C'est son goût pour le gratin et sa popularité dans le beau monde qui font de lui l'ami des esthètes sapés comme Cedric Villani. Julian Barnes se détourne rapidement de son sujet, énervant de perfection, pour s'intéresser aux saillies de toute nature qui chroniquent l'époque. Agrémentés des portraits photographiques qui firent la renommée des tablettes de chocolat Félix Potin et de tableaux de l'époque, l'auteur fait l'inventaire des flamboyants : Oscar Wilde, Robert de Montesquiou, Jules Barbey d'Aurevilly, Jean Lorrain, le comte de Polignac, Leon Daudet. Sarah Bernhardt s'octroie le premier rôle féminin, patiente et impatiente du docteur Pozzi. Les duels s'enchainent, les réparties sont cinglantes, les jalousies et course à la renommée sont sans merci ni s'il vous plait.
Ce livre est un bel objet mais c'est plus un délicieux concentré de citations et d'anecdotes à relire pour étaler sa culture dans les diners qu'une histoire romancée, plus un essai carné de ce microcosme qui glorifiait ses excès que la biographie d'une figure aujourd'hui méconnue mais pourtant illustre à l'époque.
Au milieu de ces aimants à scandale, Pozzi aurait mérité de conserver le monopole du récit. Les passages où il entre en scène, ainsi que sa femme et sa fille sont les plus intéressants du roman, les plus profonds, ceux qui sonnent juste et je regrette qu'au terme de cette lecture, ce personnage reste pour moi un mystère. Il était bien plus pourtant que l'homme à la robe de chambre rouge.
Ceux qui veulent connaitre le tout Paris de l'époque, la mode des duels, les courants contraires du scientisme et le Who's who de sexualités affichées en auront pour leur sesterce.
Randonnée plaisante mais un peu trop futile, comme un bon mot glissé à l'oreille d'un sourd.
Julien Barnes n'a pas perdu son humour mais ce n'est pas son meilleur roman.
Une petite citation pour tirer le rideau de ce Paris fin de siècle :
« le dandy doit aspirer à être sublime sans interruption. Il doit vivre et dormir devant un miroir. » Baudelaire
Commenter  J’apprécie          882
La postérité est certainement redevable d'une lorgnette mal ajustée à l'égard de Samuel Pozzi, chirurgien talentueux titulaire de la première chaire de gynécologie spécialement créée pour lui. Mais en se lançant sur les traces de cet homme qui a introduit les bonnes pratiques et l'hygiène à l'hôpital, Julian Barnes préfère jouer les chroniqueurs mondains.
La difficulté à reconstituer le passé de cet homme mondialement connu à l'époque n'y est pas étrangère. Mais c'est surtout la toile de fond, foncièrement romanesque qui intéresse l'auteur. Samuel Pozzi peint en 1881 avec des doigts fins et délicats et revêtu d'un manteau rouge qui lui donne une magnificence digne des princes de la Renaissance, est semble-t-il une figure incontournable de la Belle Époque. Barnes en fait l'épicentre d'une vaste fresque parisienne qui mêle esprit de salon et péchés baroques. Nous contemplons alors le vaste réseau des relations de Pozzi avec le beau monde, entraînant d'autres histoires faîtes de rumeurs, d'anecdotes piquantes et de bons mots caustiques. Et l'auteur semble se délecter de ces intrigues de boudoir, n'hésitant pas à se rendre visible dans son travail d'écriture, entre réflexions personnelles et analyse témoignant de sa fine connaissance de ce qui agite l'époque.
Si l'auteur anglais s'égare parfois, c'est peut-être parce qu'il n'y a pas de véritable chemin pour percer les mystères qui entourent ce scientifique rationnel et progressiste vivant au milieu d'une société décadente, narcissique aux aventures trépidantes mais un peu vaines. On peut aussi considérer que l'auteur a envisagé ce livre comme un immense moment de liberté, les lacunes historiques l'ayant conduit à renoncer au récit pur ou à l'illusion d'une continuité naturelle susceptibles de constituer une biographie romanesque. La seule oeuvre de fiction présente ici est À rebours de Huysmans, incarnation de la transgression et qui agit comme un miroir des personnes qui peuplent cet objet littéraire.
C'est une oeuvre qui se déguste comme une sucrerie que l'on s'autorise parfois. Pour le plaisir de lire l'érudition d'un auteur francophile.
Commenter  J’apprécie          604
Julian Barnes, avec son érudition mais son esprit léger et taquin, nous invite dans le monde brillant et suranné de la Belle Epoque, entre la guerre de 1870 et celle de 1914.

Son héros ? le docteur Pozzi, qui est LE médecin du tout Paris à l'époque, et même du tout Londres.
Ses amis : le comte Robert de Montesquiou (le modèle du baron de Charlus chez Proust et de des Esseintes chez Huysmans), le prince de Polignac, Adrien Proust (confrère médecin), Marcel Proust, Oscar Wilde,….
Ses patients : les mêmes et aussi Sarah Bernhardt
Le point commun de tous ces hommes : le dandysme qui mène chacun de leur faits et gestes.
Leur quête : l'amour, hétérosexuel ou homosexuel. Mais celui-ci doit se conjuguer avec les normes sociales, la fortune et surtout la reconnaissance et l'admiration qu'il doit procurer.
Leurs portraits sont reproduits dans le livre grâce aux vignettes des tablettes de chocolat des magasins Felix Potin ! Imagine-t-on aujourd'hui, sur les vignettes Paninis, des portraits de Pierre Bourdieu, Régis Debray, Jacques Lacan, Michel Foucault ou Michel Houellebecq…..

Ce récit, un peu fourre-tout avouons-le, oublie un peu son sujet principal au profit d'anecdotes multiples sur les duels des uns, les ennuis judiciaires et les mésaventures conjugales des autres.
Mais je l'ai trouvé extrêmement attachant, riche de renseignements sur le tout-Paris de l'époque et il m'a donné très envie de lire « A rebours » que je n'ai jamais lu…
Commenter  J’apprécie          3111
"Je me suis intéressé au docteur Pozzi en découvrant son portrait par John Sargent, je suis devenu curieux de sa vie et de son oeuvre, j'ai écrit ce livre, et je vois toujours dans cette image une réelle et vivre ressemblance."

Ce livre, que j'ai trouvé passionnant de bout en bout, ne se limite pourtant pas à la figure de ce médecin familier des membres de la haute société et des artistes de la Belle Epoque. Professionnellement, il a été reconnu comme un précurseur, notamment en gynécologie, mais ses talents ne se limitaient pas à son métier.

Il est un homme riche qui porte beau, amateur éclairé et collectionneur d'art. Les femmes l'adoraient et il le leur rendait bien car ses amantes étaient nombreuses, semble-t-il. Ce portrait de cet homme qui vivait pleinement sa vie est bien au centre de cet essai brillant, agrémenté de vignettes Félix Potin d'époque et de reproduction de tableaux. D'autres personnages secondaires, dandys plus sulfureux, ont aussi une grande place : Oscar Wilde, le prince Edmond de Polignac, le conte Robert de Montesquiou-Fezensac (le modèle du Charlus de Proust et du Des Esseintes de Huysmans)... Sans oublier Sarah Bernhardt, qui fut la maîtresse de Pozzi, et Catherine Pozzi, sa fille.

C'est un véritable tableau de cette époque qui se constitue au fur et à mesure de la lecture de ce livre de Julien Barnes. Ce n'était pas une époque douce dans le sens où les attaques personnelles très violentes étaient monnaie courante dans les journaux et les duels encore fréquents !
Commenter  J’apprécie          242
Un plaisir érudit et littéraire.
Ce livre retrace plus ou moins la vie de Samuel Pozzi, brillant médecin français de la Belle Epoque. Je ne le connaissais pas mais il s'avère tout à fait passionnant. le livre m'est apparu élégant et agréable, mais particulièrement décousu. On peut dire en tout cas que l'on est loin de la biographie conventionnelle, et ce d'autant plus que l'auteur ne cesse de réfléchir à ce que l'on peut savoir d'un autre aussi longtemps après. le livre est dont le prétexte à cette réflexion quasi-philosophique. Il brosse au passage le portrait de deux autres figures de l'époque Montesquiou, modèle de Charlus pour Proust et le Pince de Polignac. Et l'on croise aussi Oscar Wilde, Sarah Bernardt, Léon Daudet...Le livre est très agréablement et richement illustré, entre autre par le très beau tableau qui fut à l'origine de l'ouvrage, à savoir le Docteur Pozzi dans son intérieur de John Singer Sergent. Superbe.
Cette promenade élégante dans la Belle Epoque, en compagnie d'un homme aussi érudit constitue le plaisir essentiel de ce livre qui dévoile de brillantes anecdotes et nous cultive pas mal chemin faisant. Toutefois le livre, je le redis, m'est apparu très décousu (et par là un peu moins facile à lire) et le style de Barnes ne m'a pas frappé plus que cela, alors que certains de ses livres m'avaient laissé un très grand souvenir.
Commenter  J’apprécie          230
Lors d'une visite en librairie, j'ai repéré ce livre et en voyant le titre, je me suis dit "Tiens, un livre sur le cardinal Richelieu" qui est aussi régulièrement surnommé l'homme rouge. Bon, en fait pas du tout, une lecture de la quatrième de couverture m'apprend qu'il s'agit en réalité d'un livre sur Samuel Pozzi, un des pionniers de la gynécologie moderne. le point de départ choisi par l'auteur est un tableau du médecin sur lequel il est habillé en rouge, d'où le titre. Il n'en reste pas moins que le résumé a piqué ma curiosité et je me suis donc procuré l'ouvrage.

Me voici donc parti pour découvrir la vie de Samuel Pozzi et de beaucoup d'autres illustres personnes d'ailleurs dont je ne vais pas faire ici la liste, ça serait bien trop long. Je peux toutefois citer quelques exemples comme Sarah Bernhardt, le comte Robert de Montesquiou, Oscar Wilde et encore beaucoup d'autres célébrités de l'époque.

L'époque, il s'agit de la fin du XIXème siècle et du début du XXème siècle, passage de l'histoire surnommé "la belle époque" puisque marqué par les progrès sociaux, techniques et économiques. C'est une période riche en innovation et également sur le plan culturel. Vous imaginez donc qu'il y a largement la matière pour un livre.

Le moins que l'on puisse dire est que ce livre proposé par Julian Barnes est foisonnant. Un peu trop d'ailleurs... J'ai vraiment aimé découvrir des morceaux de cette époque, les nombreuses anecdotes sur les multiples personnages, les réflexions de l'auteur sur tel ou tel sujet mais l'ensemble part dans tous les sens et je me suis un peu perdu.

Après ma lecture, j'ai été lire quelques critiques d'autres lecteurs sur internet. Quelques éléments m'ont sauté aux yeux car ils reflètent exactement ma pensée, mon ressenti sur cette lecture. J'ai pu lire par exemple que ce livre ressemblait à des travaux préparatoires, que l'on dirait les notes de l'auteur. Ce n'est pas faux, bien que le style soit soigné la construction et la chronologie sont complètement erratiques et on saute assez souvent du coq à l'âne. J'ai pu aussi lire des chroniques dans lesquelles les lecteurs regrettaient que ce livre ne soit finalement pas complètement centré sur le docteur Pozzi. Il est vrai que l'auteur s'attarde souvent sur d'autres personnages et finalement on peut parfois avoir un peu l'impression que Samuel Pozzi est un personnage comme un autre et pas le personnage principal.

La lecture s'avère donc intéressante, très riche en anecdote, il y a un gros travail de recherche derrière ce roman, mais l'ensemble souffre quand même un peu de son aspect décousu. Cela rend la lecture parfois un peu laborieuse et ça pourrait rebuter certains lecteurs. J'ai eu un peu de mal à certains moments mais je me suis accroché car l'écriture est agréable et on y apprend beaucoup de choses.

Au final, c'est un livre que je recommande si vous voulez vous imprégner de cette période historique, si vous êtes friand d'anecdotes historiques sur plusieurs illustres personnages et si vous n'êtes pas rebuté par un côté un peu décousu. On n'est pas vraiment sur un roman mais plutôt sur un livre historique. En tout cas, c'est intéressant, le style est agréable et l'auteur fait preuve d'érudition et a abattu un travail de recherche important. Un livre qui vaut le détour, d'autant plus si vous portez un intérêt ou de la curiosité pour la période et si le sujet (ou plutôt les multiples sujets puisqu'on parle médecine mais aussi peinture, littérature, relations sociales, politique, une vraie radiographie de l'époque).
Lien : https://marquepageetexlibris..
Commenter  J’apprécie          153
Sur la couverture, il a fière allure le docteur Samuel Pozzi
dans son vêtement écarlate à collerette blanche ; d'où le titre du roman de Julian Barnes "l'homme en rouge".
Il est en réalité un médecin et aussi un mondain fréquentant le tout Paris de la Belle Epoque.
Autour de lui, l'auteur nous présente une innombrable galerie de personnages, certains très célèbres (Proust,
le comte De Montesquiou, Sarah Bernhardt...) d'autres moins connus comme Jean Lorrain, journaliste, critique perfide et colporteur de cancans et potins plus ou moins vérifiables.
Parmi ce florilège, une place importante est accordée au comte De Montesquiou, dandy incontournable de ce temps là, incarné dans "la recherche du temps perdu" de Proust.
C'est pourtant le docteur Pozzi qui est le plus digne d'intérêt. Grâce à l'étendue de ses relations, à son immense empathie, sa grande intelligence, ses capacités d'innovation, son dynamisme, il est devenu le pionnier de la gynécologie. Son apport aux progrès de la médecine est important et mériterait un plus grand développement.
Julian Barnes étant un romancier avant tout, c'est la chronique mondaine qui a pris le pas et qui donne vie et légèreté au récit.

A noter : l'abondant crédit photographique fort utile.


Commenter  J’apprécie          110
Julian Barnes est l'un des grands écrivains anglais contemporains. L'homme en rouge est un récit-roman-chronique passionnant mais complexe. Disons un bout de chemin dans la France, une certaine France, des années 1880-1914, la Belle Epoque, plus ou moins et pas pour tout le monde. Mais pour le monde que nous conte Julian Barnes, si. La figure centrale en est le Dr. Pozzi, célébrité du tout Paris, autour de qui gravitent aristocrates, artistes, mondaines et demi-mondaines et quarts de mondaines, politiciens douteux, etc. le regard du très francophile Barnes se promenant dans la galerie fin de siècle de la Troisième République est d'une acuité et d'une complexité passionnante.

Belle compagnie que le Prince de Polignac et le Comte de Montesquiou, amis du médecin à la mode, séduisant play-boy avant la lettre. On se promène comme dans un exemplaire de Gala, splendidement dépravé, juste ce qu'il faut. Marcel Proust, Oscar Wilde le réprouvé, la grande Sarah Bernhardt, très jet set tout ça. Et que ce soit un sujet de sa Majesté qui soit une sorte de paparazzi de luxe, littéraire, de tout ce beau monde n'en prend que plus de précision et d'ironie. Anthologie du dandysme, délicieuse incursion dans le snobisme à la française, très différent d'outre-Manche.

Et puis L'homme en rouge présente une belle curiosité, un peu étrange et méconnue. Il est illustré tout du long par des vignettes, portraits de tous ces protagonistes, ces "people" avant l'heure, "sponsorisés' avant l'heure aussi par les magasins Félix Potin. dans les paquets de chocolat. Etonnant, non?
Commenter  J’apprécie          80
Barnes Julian – "L'homme en rouge :[une biographie de Samuel Pozzi]" – Mercure de France, 2020 (ISBN 978-2-7152-5402-2)
– format 21x14cm, 300p. – nombreuses illustrations
– traduit de l'anglais par Jean-Pierre Aoustin, titre original "The man in the red coat", cop. 2019

Il s'agit ici d'une biographie de Samuel Pozzi, ce médecin gynécologue très en vogue pendant la "Belle Epoque", pionnier en France de la gynécologie mais aussi collectionneur d'art et "homme du monde" fréquentant "le gratin".
Dans cet ouvrage, l'auteur consacre quasiment autant de place à Samuel Pozzi qu'au plus célèbre des "dandys" de cette époque, le comte Robert de Montesquiou, qui inspira le "Des Esseintes" de Huysmans autant que le "baron de Charlus" de Marcel Proust. Ce qui l'amène à évoquer substantiellement des personnages plutôt glauques comme Jean Lorrain et Léon Daudet, ou encore les frères Goncourt, sans oublier Sarah Bernhardt et le monde des "cocottes". Soit une bonne part de la galaxie des êtres réels qui inspirèrent "La recherche du temps perdu"...

Seul bémol : l'auteur se complaît souvent dans le clabaudage, les cancans, les commérages et les médisances, une pratique au moins aussi répandue, tolérée et suscitée par les médias de cette époque que les sont aujourd'hui les insanités, vitupérations, ignominies et harcèlements diffusés, suscités et encouragés par les réseaux dits "sociaux"...

En tant qu'anglais bon connaisseur de (ce qui fut) la culture française, l'auteur insère quelques remarques malicieuses ou ironiques parfois fort justes et drôles.

Remercions le traducteur pour la qualité de son "rendu".
Par ailleurs, rendons également hommage à l'éditeur et son imprimeur, pour au moins deux bonnes raisons. Primo, le "Mercure de France" n'a pas reculé devant l'insertion de nombreuses illustrations, aussi bien sous forme de vignettes en noir et blanc (issues de la collection Félix Pottin) que de reproduction couleur, de bonne qualité et en pleine page, des tableaux mentionnés dans le texte. Secondo, l'impression est bellement réalisée, sur du papier de qualité, dans un format agréable, une typographie irréprochable...

Un livre indispensable dans la bibliothèque de toute lectrice et tout lecteur de "La recherche du temps perdu".

Commenter  J’apprécie          82




Lecteurs (251) Voir plus



Quiz Voir plus

Quelle guerre ?

Autant en emporte le vent, de Margaret Mitchell

la guerre hispano américaine
la guerre d'indépendance américaine
la guerre de sécession
la guerre des pâtissiers

12 questions
3179 lecteurs ont répondu
Thèmes : guerre , histoire militaire , histoireCréer un quiz sur ce livre

{* *}