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EAN : 9791092723571
138 pages
LOUISE BOTTU (15/07/2022)
4/5   3 notes
Résumé :
Le protagoniste s’appelle Protag. Il est dans le Service et il a un supérieur.
Le supérieur s’appelle Sous-Sol.
Il est question d’une taupe, d’une bande magnétique et d’un microfilm.
On n’y comprend rien.
Le photocopieur cosmique est détraqué. Protag est dans le photocopieur.
Protag est à la recherche de dix-huit scientifiques hongrois…

Faut-il vraiment croire à cette histoire pleine d’humour et surprenante à plus d’un titre ? Références cinématograph... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Entrechoquant les motifs authentiques et les clichés déjantés du film d'espionnage, un petit monument hilarant de subversion et de ruse du langage, à savourer en parfum fraise, naturellement.


Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2022/09/04/note-de-lecture-protag-pierre-barrault/

Avec « Clonck et ses dysfonctionnements » (2018), « L'aide à l'emploi » (2019) et « Catastrophes » (2020) – on concèdera que son premier roman, « Tardigrade » (2016), est d'une nature différente, et explore autre chose -, Pierre Barrault démonte depuis plusieurs années ce qui sépare les motifs et les clichés, en les entrechoquant et en les confrontant au comique de répétition, à l'absurde et à ce que l'on pourrait appeler un comique de dislocation, et démonte ainsi également ce que cette distance entre les deux peut impliquer pour nos vies. Prenant pour cible de ses enquêtes toujours riches en rebondissements certaines formations (comme il y a des formations rocheuses au-dessus de plaques tectoniques) structurantes de nos vies et de nos imaginaires, telles que l'environnement informatico-administratif (et le substrat fort du codage numérique) dans lequel baignent nos cités (« Clock et ses dysfonctionnements »), le nuage d'assistance et de contrôle obsessionnel qui régit notre rapport social au travail (« L'aide à l'emploi »), ou encore de la lecture pré-apocalyptique des événements et coïncidences qui attaque désormais les noyaux familiaux les plus fondamentalement innocents (« Catastrophes »), il démontre à chaque occurrence à quel point, y compris dans des domaines souvent d'abord insoupçonnés, le langage informe nos pensées et nos pratiques, pour le meilleur et pour le pire.

En s'interrogeant, avec ce « Protag », publié en juillet 2022 chez Louise Bottu, sur les constructions et reconstructions qui habitent l'imaginaire invasif du film d'espionnage contemporain, et de la paranoïa obligatoire qu'il introduit subrepticement partout – y compris dans la dérision et le ixième degré -, il nous propose son texte sans doute le plus décisif – et néanmoins le plus foncièrement drôle – à ce jour.

Agent d'un service secret, doté d'un supérieur, de collègues, d'ennemis, de traîtres, de comparses et de sbires, mais aussi de gadgets électroniques, de préférences consuméristes, de tracas bureaucratiques éventuels et de réflexes affûtés par un mode automatique total lorsque nécessaire, Protag doit évidemment beaucoup, dans ses fondations de protagoniste, aux origines littéraires du phénomène. Sans remonter nécessairement à Eric Ambler ou à Graham Greene (et moins encore à Erskine Childers) – on ne saurait trop d'ailleurs conseiller la lecture du fabuleux travail sociologique de Luc Boltanski, « Énigmes et complots : une enquête à propos d'enquêtes » (2012), qui magnifie avec tant de talent, sur ce sujet, l'expérience plus générale de l'historien Carlo Ginzburg -, Jean et Josette Bruce, Ian Fleming, Len Deighton et John le Carré sont là, et bien là. Mais pour exploiter au mieux une logique sous-jacente de labyrinthique mise en cliché, c'est bien entendu du côté des adaptations cinématographiques ou télévisuelles que « Protag » lorgne avec le plus d'insistance, des plus sérieuses – Rupert Davies dans « L'espion qui venait du froid » de Martin Ritt (1965), Alec Guinness dans « La taupe » de John Irvin (1979), Gary Oldman dans celle de Tomas Alfredson (2011), Ian Holm dans le « Game, set and match » de Ken Grieve (1988) ou Matthieu Kassovitz dans le « Bureau des Légendes » d'Éric Rochant (2015-2020) – aux plus excessives – Kerwin Mathews dans les « OSS 117 » d'André Hunnebelle (1963-1968), ou bien sûr Sean Connery, Roger Moore, Timothy Dalton, Pierce Brosnan et Daniel Craig dans les innombrables « James Bond » produits entre 1962 et 2021 -, en passant naturellement par les plus franchement parodiques – Jean-Paul Belmondo dans « le Magnifique » de Philippe de Broca (1973), Jean Dujardin dans les deux OSS 117 de Michel Hazanivicius, « le Caire nid d'espions » (2006) et « Rio ne répond plus » (2009), ou même Pierre Richard dans « le grand blond avec une chaussure noire » de Yves Robert (1972). Et c'est bien dans la juxtaposition, dans la superposition et dans l'intrication de ces figures désormais tutélaires et de leurs tribulations que se joue leur impact sur nos imaginaires à mettre en boucle.

Comme le souligne très justement Adrien Meignan dans son beau billet pour le webzine Un dernier livre avant la fin du monde (à lire ici), c'est bien dans la technique cachée derrière le décor que s'élabore le sens ultime de cette course en boucles et en options, de cette guerre des reboots (on songera certainement aussi au « La ville fond » de Quentin Leclerc), même si cette technique, loin des instruments ultra-sophistiqués perpétuellement évoqués dans les sources, prend la forme humble mais vitale du photocopieur en panne – ou plus subtilement encore, du photocopieur détraqué. Voué à la production du même pour méticuleusement domestiquer et in fine décourager les tentatives d'échappées imaginaires, c'est lorsqu'il bugge, que les copies deviennent délicatement imparfaites – ou qu'un pixel clignote là où il ne le devrait pas – que le décor se voit renvoyer à son origine, que l'imagination se dessille et que Potemkine devra peut-être laisser la place à Lénine.

Profondément hilarante, « Protag » n'en est pas moins une entreprise résolument subversive, pour peu que l'on suive attentivement ces aventures qui se prennent, volontairement et involontairement, mais toujours somptueusement, les pieds dans les stéréotypes malicieusement accumulés au fil du temps et de la mise en sommeil spectaculaire marchand.

Lien : https://charybde2.wordpress...
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Protag est... il est... heu... quoi donc ? Un agent ? Un duplicata ? Un prisonnier ? Un numéro ? Ou tout cela à la fois ?
Un agent, cela ne fait aucun doute, si on en juge aux armes à feu, aux hommes grenouilles, aux courses poursuites, aux microfilms et aux appareils photo camouflés.
Un duplicata, cela ne fait aucun doute, si on en juge aux nombreuses variantes de lui-même et à la photocopieuse capricieuse dans laquelle il est bloqué.
Un prisonnier, cela ne fait aucun doute, si on en juge à sa veste, aux voiturettes de golf et à l'étrangeté surannée des cabines téléphoniques.
Un numéro, cela ne fait aucun doute, si on en juge à sa veste, aux voiturettes de golf et à l'étrangeté surannée des cabines téléphoniques. Tiens, j'ai déjà dit ça. J'ai déjà dit ça. Serais-je à mon tour enfermé dans les variantes d'une intrigue aussi cyclique que détraquée, enfermé dans les variantes d'une intrigue aussi cyclique que détraquée ?

Protag est... il est... heu... quoi donc ? Un personnage de nouvelle ? de roman ? Ou les deux à la fois ?
de nouvelle, cela ne fait aucun doute, si on en juge à celle tirée du premier numéro de L'autoroute de sable.
de roman, cela ne fait aucun doute, si on en juge à celui dont il porte le nom et qui propose une version réécrite et développée de la première.

Protag est... il est... heu... quoi donc ? le produit d'un obsessionnel du non-sens ? D'un graphomane en pleine expérimentation ? D'un passionné de culture populaire et de films de genre ? D'un auteur fasciné par le montage et par les boucles cosmiques ? Ou tout cela à la fois ?
le produit d'un obsessionnel du non-sens, cela ne fait aucun doute, si on en juge à l'incongruité assumée du roman dans lequel il évolue et à l'absurdité, entre humour et sérieux, qui dicte son comportement.
D'un graphomane en pleine expérimentation, cela ne fait aucun doute, si on en juge à la structure et de et ponctuation qui oui et
D'un passionné de culture populaire et de films de genre, cela ne fait aucun doute, si on en juge aux références et aux allusions qui égaient ce pastiche.
D'un monteur fasciné par le montage et par les boucles cosmiques, cela ne fait aucun doute, si on en juge aux nombreuses variantes de lui-même et à la photocopieuse capricieuse dans laquelle il est bloqué. Tiens, j'ai déjà dit ça. J'ai déjà dit ça. Serais-je à mon tour enfermé dans les variantes d'une intrigue aussi cyclique que détraquée, enfermé dans les variantes d'une intrigue aussi cyclique que cyclique que cyclique que cyclique que détraquée ?

Protag est... il est... heu... quoi donc ? Un personnage sorti de l'esprit fécond d'un écrivain original et doué, affranchi de toute contrainte et motivé par sa seule liberté ? Cela ne fait aucun doute. Aucun !

Touchez mon blog, Monseigneur...
Lien : https://touchezmonblog.blogs..
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Duplicata à l'absurde, par un photocopieur détraqué, des rocambolesques aventures d'un espion nommé Protag. Jeu malin sur les variantes du récit, sur tout ce que le roman d'espionnage peut avoir d'emprunté, de redites de situations caricaturales, d'invraisemblances sans doute aussi. Protag propose un insidieux basculement dans l'absurde, dans son comique mais surtout dans une interrogation sur l'identification à un personnage qui jamais n'est autre chose qu'un duplicata. Pierre Barrault pastiche admirablement le roman d'espionnage, en de très courts fragments qui le réduise à l'essentiel (dissimulation et à de rocambolesques pirouettes physiques) dans une poursuite effrénée de scientifiques hongrois, de micro-film et d'une dangereuse caméra thermique.
Lien : https://viduite.wordpress.co..
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Le protagoniste s’appelle Protag
Le protagoniste s’appelle Protag. Il est dans le Service. Et comme presque tout le monde dans le Service, il a un supérieur. Le supérieur s’appelle Sous-Sol.

Le supérieur s’appelle Sous-Sol
Le supérieur s’appelle Sous-Sol. Il est assis derrière un bureau métallique de style industriel. Il porte une petite moustache et un sourcil droit. Il conduit une voiturette de golf et dissimule des micros dans des stylos. Ses gestes sont rapides et précis.

Le supérieur s’appelle Sous-Sol
Un peu avant midi, Protag arrive dans le bureau de son supérieur. Le supérieur s’appelle Sous-Sol. Il porte un monocle. Protag se tient debout au milieu de la pièce. La pièce est un assez long couloir. Tout au fond se tient Sous-Sol, assis derrière son bureau.
Il est question d’une taupe.
Il est aussi question d’une bande magnétique. Protag est à la recherche de dix-huit scientifiques hongrois.
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Protag, ses figures de gymnastique
Sous-Sol est assis derrière son bureau. Il dit :
– C’est au sujet d’une taupe infiltrée depuis un certain temps dans le Service. Il s’agit de la neutraliser. Inutile de vous dire que nous ignorons son identité. Je compte sur vous pour la trouver. Faites ce qu’il faut débrouillez-vous mais trouvez-la.
Protag dit C’est intéressant.
Sous-Sol lève le sourcil droit.
Protag tente un C’est vous la taupe.
Sous-Sol répond par un Alors comme ça il a fallu que vous veniez fourrer votre nez dans mes affaires.
Ensuite Sous-Sol veut tuer Protag avec l’arme à feu cachée sous les papiers qui s’entassent dans le tiroir de son bureau. L’arme à feu est un Walther P38. Protag s’en sort en sautant dans tous les sens comme un gymnaste. Il se retrouve à exécuter des figures improbables avec des barres asymétriques et Sous-Sol assis dans les gradins l’applaudit.
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Les objets dissimulent des secrets d’État
La jeune femme s’appelle Tentru et il est question d’une taupe.
Il est question d’une taupe et de la disparition de dix-huit scientifiques hongrois.
Il est aussi question d’une bande magnétique et d’un microfilm.
Il faut également savoir que presque tous les objets présents dans cette histoire dissimulent des secrets d’État.
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Protag au salon de coiffure
Entré dans le salon de coiffure, Protag dit au vieux coiffeur bossu :
– Ne coupez pas.
Le vieux coiffeur bossu répond :
– Dans ce cas je me permets de suggérer à monsieur de s’installer dans le fauteuil le plus au fond je suis à monsieur dans cinq minutes le temps d’aller chercher ce que monsieur demande.
Protag s’installe dans le fauteuil le plus au fond. Au bout de cinq minutes, le vieux coiffeur bossu revient avec une bouteille de G.H. Mumm Cordon Rouge et la tend à Protag en disant :
– Je suggère à monsieur de faire l’acquisition d’un seau à champagne avant de rentrer chez lui à moins que monsieur n’en possède déjà.
Protag tue le coiffeur et quitte rapidement les lieux.
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Protag utilise une caméra thermique
Protag se tient debout au milieu de la pièce et Sous-Sol est assis derrière son bureau, au fond de la pièce qui est un couloir.
Sous-Sol dit :
– C’est au sujet d’une taupe infiltrée depuis un certain temps dans le Service. Il s’agit de la neutraliser. Inutile de vous dire que nous ignorons son identité. Je compte sur vous pour la trouver. Faites ce qu’il faut, débrouillez-vous, mais trouvez-la.
Protag dit C’est intéressant.
Sous-Sol lève le sourcil droit et fait comme s’il conduisait une voiturette de golf. Protag se doute de quelque chose et décide d’utiliser une caméra thermique, ce qui déstabiliser un peu Sous-Sol qui ne s’attendait pas du tout à cela.
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Vidéo de Pierre Barrault
"Casastrophes" c'est comme la vie, mais en mieux - Le replay de la rencontre avec Pierre Barrault est disponible, bon visionnage ! - avec les éditions Quidam
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