Marion est une adolescente qui vit avec un petit frère étonnant (incapable de se taire mais apte à tenir plu
sieurs sujets de conversation
simultanément) et sa mère. Son père les a abandonnés brutalement, laissant une famille désoeuvrée, une ex-épouse branchée à son
site de rencontres et des enfants en manque de repère. Au collège, Marion est étiquetée "Intello". Bonne élève de 3e, sérieuse, pas
sionnée par la mu
sique, joueuse de guitare, chanteuse et compo
sitrice. Relativement isolée, sa vie amoureuse est aus
si désertique que celle de sa mère est mouvementée.
Enzo, beau gosse populaire dans l'établissement, s'amuse à la draguer. Marion reste froide à ses provocations. Mais un jour, à la fin des cours, les choses dérapent. Enzo dépasse les bornes, Marion se défend et écorne à la fois l'image et l'entrejambe de l'adolescent. A partir de là, une escalade commence. de basses vengeance en règlement de compte, les choses dégénèrent. Un mouvement dans lequel les réseaux sociaux et les nouvelles technologies tiennent une bonne place.
Avec un tel résumé, on peut s'interroger sur le titre mais expliquer le titre reviendrait à résumer le livre jusqu'au delà de la moitié. de plu
s, il ne s'agit que d'un épisode. le titre est en décalage par rapport à l'ensemble de l'histoire.
Titre mis à part, une lecture facile dans le style (mais pas
simpliste) et assez prenante, surtout pour les jeunes lecteurs qu'elle vise. Tout commence avec trois fois rien, de ce qu'on croise au quotidien dans un établissement scolaire : un garçon qui taquine une fille, de manière un peu lourdingue, la fille qui ne se laisse pas faire et c'est tant mieux. Et pui
s il lui pique son sac et réclame un baiser comme rançon. Les esprits s'échauffent, les gestes dérapent. Ça pourrait en rester là. L'une resterait surprise de sa propre témérité, un peu honteuse, un peu effrayée des représailles. L'autre retrouverait de sa superbe en inventant allez savoir quoi pour redorer son blason. Oui, ça pourrait en rester là. S'ils n'avaient pas 14 ou 15 ans, qu'ils n'étaient pas adolescents, qu'ils n'étaient pas à cet âge où un carnet à couverture noire peut être le bien le plus précieux au monde, où la tentation de la vengeance ne rencontre aucune contradiction, où les esprits s'échauffent, les défis emballent, les conséquences n'existent qu'une fois qu'on les a sous le nez.
J'ai aimé le côté réaliste de ces personnages adolescents. On comprend l'escalade, on comprend la succes
sion, on ne voit pas forcément les choses venir. le contexte familiale entourant le personnage de Marion (narrateur à la première personne) ne fait qu'expliquer d'avantage comment les choses dérapent. Cette
situation aurait besoin d'un regard extérieur, un regard adulte. Mais la communication entre Marion et sa mère est difficile. J'ai aimé le parallèle mené puis démonté entre ce que vit la fille et ce que vit la mère, d'abord mis sur un même pied pour mieux exprimer plus tard, entre les lignes, que
si l'une est adulte et responsable, l'autre est ado et agit surtout par colère, rage, frustration. Ces mêmes sentiments qui l'empêchent de se retourner vers d'autres adultes qui pourraient pourtant l'aider.
Par contre, en tant qu'enseignante, je ne peux qu'être un peu gênée par l'absence de l'équipe éducative. Tout ne se passe pas au sein de l'établissement mais tout de même en partie, et surtout, même ce qui se passe dehors a des répercus
sions dedan
s. Il me paraît impos
sible que personne dans l'établissement n'intervienne.
Mais surtout, et c'est là ma véritable réserve, je me demande
si les lecteurs adolescents comprendront bien que Marion et les autres paient tous les conséquences de leurs actes. Sans dévoiler trop de l'histoire, la fin a un côté "happy end" qui plaira forcément aux lecteurs mais ne cache-t-elle pas combien Marion a eu tort de se laisser entrainer dans ce cercle vicieux ? Son choix de répondre coup pour coup monte en graine et finit (même
si l'auteur a eu la finesse de ne pas tomber dans le sordide, le "trop", la caricature) mal pour elle également.
Je m'interroge donc un peu...
En bref : J'ai pris plai
sir à la lecture. le style est agréable et l'auteur a su doser : quelque part, on se balade dans un fait divers mai
s il ne fera pas la Une grâce à une certaine retenue. Je trouve ça habile de sa part, l'histoire touche davantage de monde car il ne franchit pas le seuil du "on sait que ça arrive mais ça n'arrive qu'aux autres". Les personnages sont bien mené
s, ils ne sont pas caricaturaux. Mention spéciale pour Barnabé, le petit frère, qui apporte un petit plus d'originalité qui fait sortir le roman du lot. La fin est peut-être un peu exagérée, le titre accrocheur alors que le livre ne le néces
sitait pas, mais ça n'empêche un sentiment général très po
sitif.
Je garde une réserve sur la lecture qu'en feront des adolescents. Sans partir du principe qu'un livre doit forcément délivrée une leçon, sur un thème comme celui-là, on ne peut laisser le lecteur sans conclu
sion. Ces conclu
sions existent mais le public visé aura-t-il le recule nécessaire pour les trouver ?