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EAN : 9782362291593
64 pages
Editions Bruno Doucey (05/10/2017)
4.43/5   15 notes
Résumé :
Le mot de l’éditeur : Elle a cinq ans. Autour d’elle, les adultes s’affairent en silence. La langue muette des mères. Ces armoires que l’on vide en hâte. Ces lourdes malles de fer qui attendent sur le seuil. La mer qu’il faudra bientôt traverser. Ce chien qui erre sur le quai, perdu. La côte qui s’éloigne. Premier voyage. Premier exil… Avec La Géographie absente, Jeanne Benameur pose des mots sur le drame qui a marqué son enfance lorsque sa famille dut quitter l’Alg... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Comme je le pressentais ce poème éclaire ma dernière lecture de cette auteure que j'apprécie immensément...["Ceux qui partent", Actes Sud, 2019]; Dans ce poème continu qui saute de page en page avec des grands blancs... L'écrivaine se raconte "petite fille" qui doit quitter tout ce qui lui est familier, petite fille qui sent, ressent , souffre en plus du chagrin silencieux de la maman... le chagrin universel de tous les enfants et les mamans de l'exil... Ce poème met en avant la force des mères,
déchirées de l'intérieur, à jamais... Et puis l'aide à la réparation , la cicatrisation de ces drames du déracinement par l'écriture des enfants...afin de
combler les peines des leurs !

Je n'en dirai guère plus...les mots, cette fois, sont superflus... Je préfère laisser la parole à la poétesse ,
Jeanne Benameur...

"Nous avons porté de nouveaux souliers
nous avons appris les saisons nouvelles
nous avons appris les langues nouvelles des pays
nouveaux

seule seule et seule.

Aujourd'hui nous faisons revenir dans
notre bouche les sons que nos mères
gardaient au secret de leurs palais

la langue ancienne
vient rythmer notre souffle

nous découvrons
que rien n'est oublié

au fond de nous
la langue sauvage de nos mères
la seule grammaire
des corps
vivants.

Notre enfance a pénétré
l'unique maison où nous pouvons
habiter

nous en avons lentement franchi le seuil

dans la langue de nos mères nous pouvons nous asseoir à la table de
la cuisine et attendre le soir
nous avons notre place

en silence
lentement
dans les pages
qu'elles ne liront jamais
nous écrivons
nous habitons "(p. 59)
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C'est par ce très court mais magnifique recueil de poésie que je fais connaissance avec Jeanne Bénameur: ce ne sera clairement pas ma dernière lecture d'elle!
Je l'ai pris au hasard, attirée par ce titre poétique et mystérieux. Je m'y suis plongée avec des émotions changeantes, nouvelles, et j'ai été fascinée par tout ce que ces quelques mots alignées sur l'espace des pages pouvaient exhaler de l'expérience vécue. L'exil, le départ précipité d'Algérie à l'Indépendance, la douleur des mères abandonnant leur vie, leur espace pour une errance silencieuse, dans le regard muet de leurs enfants.
C'est profond et douloureux, on ressent en soi cet exil et surtout cet espace vide qui entoure ces exilés qui ont tout à réécrire.
Magnifique.
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Jeanne Benameur fait partie de ces écrivains dont le style m'a souvent émue. Je ne la savais pas "officiellement" poète (c'est un peu idiot de dire ça, non?) mais je sentais dans certaines pages un glissement vers ce que nous pourrions appeler de la prose poétique. Il y avait ce je ne sais quoi de silence, de ténuité, un alignement de mots qui me laissait toute chose, qui faisait surgir cette émotion particulière que je ne ressentais qu'avec la poésie.
Ce recueil est celui de l'exil : quelques mots sur les pages, comme autant d'îlots sur lesquels naufrager, les mots de l'abandon, de la mémoire, de l'absence... Ces vers communiquent avec une retenue subtile ce que signifie "la géographie absente". Avec pour tout lien la mère en guise d'amarres, l'enfant apprendra la langue nouvelle, mais elle gardera la langue ancienne comme un héritage fort, elle apprendra aussi cet autre langage qu'est la poésie :
"En silence
lentement
dans les pages
qu'elles ne liront jamais
nous écrivons
nous habitons."
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Quel beau titre que cette "géographie absente" pour parler de l'exil.
Ce poème est court, précis, insicif.
En peu de mots on ressent le besoin des enfants de s'accrocher à leurs mères quand la famille doit quitter la maison où elle a toujours vécue. Pour Jeanne Benameur c'est le départ de l'Algérie pour la métropole mais cette poésie pourait aussi faire échos à tous les exilés. Face à l'incompréhension et l'angoisse de ne plus avoir de chez soi, face à cette géographie de l'absence, la mère devient la seule attache, comme un refuge.
Je l'ai lu plus comme un éloge à la mère plus qu'à la terre. Mais peu importe les mots sont beaux.
D'ailleurs, j'ai l'impression de connaître jeanne Benameur alors que je ne l'avais jamais lue auparavant. Ce sentiment vient peut être du langage poétique propice à faire passer des émotions. Et puis il y a le besoin de l'auteure de se retrouver dans l'écriture. Cest ce qu'elle dit aussi dans "La geographie absente".





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Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
Nous avons porté de nouveaux souliers
nous avons appris les saisons nouvelles
nous avons appris les langues nouvelles des pays
nouveaux

seule seule et seule.

Aujourd'hui nous faisons revenir dans
notre bouche les sons que nos mères
gardaient au secret de leurs palais

la langue ancienne
vient rythmer notre souffle

nous découvrons
que rien n'est oublié

au fond de nous
la langue sauvage de nos mères
la seule grammaire
des corps
vivants.

Notre enfance a pénétré
l'unique maison où nous pouvons
habiter

nous en avons lentement franchi le seuil

dans la langue de nos mères nous pouvons nous asseoir à la table de
la cuisine et attendre le soir
nous avons notre place

en silence
lentement
dans les pages
qu'elles ne liront jamais
nous écrivons
nous habitons (p. 59)
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Aujourd'hui nous faisons revenir dans
notre bouche les sons que nos mères
gardaient au secret de leurs palais

la langue ancienne
vient rythmer notre souffle

nous découvrons
que rien n'est oublié

au fond de nous
la langue sauvage de nos mères
la seule grammaire
des corps
vivants.
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Les yeux contraints à découvrir

Chaque chose était nouvelle

et pour la première fois
nos mères portaient au front
un soucis qui n'était pas le nôtre.

Personne pour nous apprendre ce qui fuit

l'exil est une vaste terre

comment trouver la forme de ce qui n'a plus
la limite familière ?
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Trouver pour chaque mot
sa forme véritable

c'était le lent travail 
des mères

elles apprêtaient le monde
pour nous.
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L’enfance de nos mères
est une terre sans aveu
nous y marchons pieds nus (...)

A la hâte
les bribes dans la malle de fer
dans les lourdes cantines

pressées entre les draps
des conversations entières
des rires au coin des rues

les appels familiers
froissés lentement
après l'adieu

comment traverser la mer ?
Il a bien fallu.
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Videos de Jeanne Benameur (38) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Jeanne Benameur
Après notre entretien avec Chloé Deschamps, créatrice du compte Instagram @aquoibonlespoetes, nous poursuivons notre exploration de l'univers poétique. Dans la 2ème partie de cet épisode spécial Poésie, nous sommes en compagnie de Laure, libraire à Dialogues.
Bibliographie :
- le Pas d'Isis, de Jeanne Benameur (éd. Bruno Doucey) https://www.librairiedialogues.fr/livre/20130380-le-pas-d-isis-jeanne-benameur-editions-bruno-doucey
- Made in woman, d'Hélène Dassavray (éd. La Boucherie Littéraire) https://www.librairiedialogues.fr/livre/16144462-made-in-woman-helene-dassavray-la-boucherie-litteraire
- Prends ces mots pour tenir, de Julien Bucci (éd. La Boucherie Littéraire) https://www.librairiedialogues.fr/livre/20480403-prends-ces-mots-pour-tenir-bucci-julien-la-boucherie-litteraire
- Faiseur de miracles, de Fadhil Al-Azzawi (éd. Lisières) https://www.librairiedialogues.fr/livre/15531936-faiseur-de-miracles-suad-labiz-ed-lisieres
- Brûler, Brûler, Brûler, de Lisette Lombé (éd. L'Iconoclaste) https://www.librairiedialogues.fr/livre/17378935-bruler-bruler-bruler-lisette-lombe-l-iconoclaste
- Des Frelons dans les coeurs, de Suzanne Rault-Balet (éd. L'Iconoclaste) https://www.librairiedialogues.fr/livre/17378693-des-frelons-dans-le-coeur-suzanne-rault-balet-l-iconoclaste
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