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EAN : 9782882504012
192 pages
Noir sur blanc (07/01/2016)
3.77/5   371 notes
Résumé :
Deux récits se dessinent dans L’ombre de nos nuits, avec au centre un tableau de Georges de La Tour. En 1639, plongé dans les tourments de la guerre de Trente Ans en Lorraine, le peintre crée son Saint Sébastien soigné par Irène. De nos jours, une femme, dont nous ne saurons pas le nom, déambule dans un musée et se trouve saisie par la tendresse et la compassion qui se dégagent de l’attitude d’Irène dans la toile. Elle va alors revivre son histoire avec un homme qu’... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (138) Voir plus Ajouter une critique
3,77

sur 371 notes
On est parfois subjugué en admirant un tableau, en écoutant quelques notes de musique ou en lisant un livre. Par quelle alchimie parviennent-ils à toucher notre sensibilité, à nous faire monter les larmes aux yeux, à nous renvoyer à des moments intimes et forts de notre existence ?
C'est un de ces moments particuliers, si beau, si douloureux, que connaît une femme en découvrant dans un musée ce tableau du XVIIème siècle : « Saint Sébastien soignée par Irène » de George de la Tour.
Notre héroïne ne cherche pas à analyser cette attirance presque physique. Elle se laisse engloutir par le regard rayonnant de la jeune femme du tableau, par la légèreté de ses mains posées sur la blessure de Sébastien. Et son amour perdu lui saute alors au visage. Elle se souvient de ses moments miraculeux où elle ne touchait plus terre, où elle vivait plus fort, plus haut. Où sans lui, elle se sentait incomplète. Elle était éblouie, ou plutôt aveuglée par cet homme à qui elle avait offert la meilleure part d'elle-même.
Un amour unique, un amour banal, comparable à celui que Laurent, jeune peintre apprenti sorti du ruisseau par George de la Tour, entretient pour la belle Irène. Un amour impossible qui le fait souffrir autant qu'il le fait grandir.
Une passion qui transcende comme celle de George de la Tour quand il se lance dans la réalisation de son chef-d'oeuvre. Arrivé au sommet de son art, il a l'orgueil démesuré de vouloir « peindre le silence, le temps arrêté, l'appel d'une voix dans la nuit, la lueur qui nous guide ».
Au-delà des siècles, un roman à trois voix : celle du vénérable et contemplatif George de la Tour, du jeune et bouillonnant Laurent, de notre belle inconnue égarée dans le clair-obscur du tableau.
Un roman qui parle d'amour et de passion ; un roman qui chasse les ombres et toutes les insignifiances de la vie quotidienne.

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Lunéville, 1639. Un atelier sombre. Une toile vierge qui attend le geste. Des bâtons de fusain à côté de lui. Terre de Sienne, ocre, carmin, vermillon. le Maître demandera à son fils, Étienne, et son apprenti, Laurent, de commencer à préparer les pigments. Maintenant qu'il a en tête sa composition, il est prêt. Il a demandé à sa fille, Claude, de poser pour lui. Elle sera parfaite pour prêter son visage à Irène, la femme qui a soigné et guéri saint Sébastien...
Rouen, 2014. Une jeune femme, au détour d'une salle sans charme particulier du musée des Beaux-Arts de la ville, s'attarde sur une copie du tableau de Georges de la Tour et, comme hypnotisée par l'attitude et le visage d'Irène, se remémore son ancienne histoire d'amour désormais révolue mais toujours gravée en elle...

Gaëlle Josse donne la parole, à tour de rôle, à cette jeune femme se rappelant avec émotion et douleur son histoire d'amour, au Maître, lors de la création de son tableau et à Laurent, son apprenti, nous offrant par ce procédé ingénieux un roman habilement construit. Par delà le temps et l'espace, entre ce musée rouennais et cet atelier lorrain, ce tableau unit ces trois personnes. Au coeur de ce roman envoûtant, l'amour, ses tourments et ses blessures. Gaëlle Josse évoque brillamment, avec douceur, finesse et émotion les sentiments qui les animent. Elle sonde les âmes de chacun, décrit avec sincérité l'art et la création. Pas un mot de trop dans ce court roman. Chaque phrase est ciselée, l'écriture douce, poétique et d'une grande justesse. Gaëlle Josse évoque brillamment, avec finesse, force et émotion les sentiments et l'amour, et d'un coup de pinceau, donne vie à ce tableau.
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Quand littérature rime avec peinture ça donne " L'ombre de nos nuits" de Gaëlle Josse. Ma première lecture de cette auteure. J'ai été fortement impressionné par son écriture, une certaine douceur que l'on retrouve dans une aquarelle, une couleur délicate, fragile bref un clair obscur littéraire.
Une jeune femme assise devant le tableau de Georges de la Tour," saint Sébastien soigné par Irène".
Elle est perdue dans ses pensées, elle se souvient de lui, de son amour à sens unique, aveuglée par cette lumière qui tire les larmes et cette part d'ombre qui n'autorise aucun écart. " L'amour, c'est donner ce qu'on n'a pas à quelqu'un qui n'en veut pas".
Autre temps autre époque, tout aussi douloureux.
Dans le Duché de Lorraine sous le règne de Louis XIII, la guerre de trente ans fait rage, amenant son cortège de vols de viols, de massacres de famines. Georges de la Tour las et fatigué de ces crimes ne peindra que des clairs obscurs. Fuir la lumière du jour et sa violence pour rendre à la nuit cette douceur et cette part de mystère.
Les phrases de Gaëlle Josse sont aussi douces que la lanterne éclairant le visage d'Irène.
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Je dois être passée à côté de ce roman qui avait pourtant tout pour me plaire. L'écriture est belle, sensible, raffinée, féminine à souhait, de beaux passages,... mais je n'ai pas compris ni perçu ce lien entre le peintre et son apprenti et cette femme plongée devant ledit tableau.
La femme nous raconte avec prestance l'ombre de ses nuits, de sa rencontre amoureuse à sa séparation, c'est beau sans conteste mais est-cela l'amour ? Se fourvoyer avec un égoïste mal léché, se pendre au cou sans rien recevoir en retour, souffrir et souffrir encore d'aimer? Je n'en suis pas certaine.

J'avais beaucoup aimé Une longue impatience pour cette écriture fine mais avec un lien et une histoire à vous retourner le coeur, ici dans l'ombre de nos nuits, je n'ai pas compris le voyage...
Rendez-vous manqué.
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Une jeune femme d'aujourd'hui se rend à la gare, sans doute est-elle en déplacement à Rouen… Il lui reste du temps avant de prendre le train qui doit la ramener chez elle. Elle pénètre dans le musée des Beaux Arts où elle va s'alléger de ses bagages, de son manteau qu'elle dépose à l'entrée. Au cours de cette visite improvisée un tableau va la happer : une copie de Saint Sébastien soigné par Irène de Georges de la Tour

La vue du tableau l'entraîne, la met hors temps, hors champ comme l'a fait une douloureuse liaison qu'elle se remémore ; une passion mortifère, désormais révolue, dont le souvenir reste toujours vif.
Georges de la Tour et son Irène vont lui permettre de revivre ce bouleversement amoureux, de l'apaiser en lui en restituant la beauté lumineuse et sombre, beauté transfigurée par le silence et la profondeur du tableau tout en clair-obscur.
« Je n'arrive pas à détacher mon regard du visage de la jeune femme du tableau. Ni de la légèreté de ses mains sur la blessure, comme des ailes bienveillantes qui emporteront la douleur au loin et la laisseront se dissoudre dans la nuit. »

"L'ombre de nos nuits" ce sont trois voix qui se répondent par delà l'espace et le temps, par le truchement d'un tableau et la magie de l'écriture de Gaëlle Josse qui permet leur dialogue : celle du peintre Georges de la Tour, celle de Laurent l'apprenti dont on peut imaginer qu'il ait pu faire une copie de ce tableau où Claude la fille de Georges de la Tour incarne Irène, et l'inconnue qui contemple. Ils sont tous unis par la beauté douloureuse de leur passion.

Ainsi de la Tour qui se prépare dans l'isolement de son atelier :
« Je regarde les bâtons de fusain posés à côté de moi, alignés, pour l'esquisse de la scène. À chaque fois, cette hésitation. La trace de la main, le contact avec la toile. Éternelle initiation. Comme on approche un corps qui s'offre pour la première fois. Découvrir comment il va réagir, frissonner, trembler, gémir. Deviner quel est son secret, sa joie, sa blessure. Éprouver cette sensation qui ne peut être qu'une seule fois et disparaît dans le geste qui l'accomplit. le geste de la connaissance.
(…) J'aime le silence qui accompagne la nuit, j'aime le feu, l'ombre et leur danse, ils se cherchent, s'évitent, s'enlacent. le silence qui accompagne nos vérités. Je n'ai pas besoin de grand-chose d'autre, quand j'y pense.

et la jeune femme, comme en écho, parlant de celui qui va l'isoler dans sa passion :

« Dès l'instant de notre rencontre, j'ai découvert un état nouveau, du moins inconnu dans cette intensité, comme si je prenais conscience pour la première fois de la profondeur et du relief d'un paysage familier, soumis à un éclairage d'une violence nouvelle, dessinant des contours aigus et creusant des ombres insoupçonnées. Un état de tension, éprouvé dans chaque partie du corps, dans le ventre, les épaules, au fond de la gorge, comme un appel incessant et muet. L'attente. S'y joignaient les efforts surhumains pour ne pas la montrer, à la manière dont on isole dans une pièce un animal domestique trop bruyant ou trop turbulent pour un visiteur. Il me fallait la discipliner, la travestir pour ne pas t'effrayer d'un amour trop grand.

Il va leur falloir après s'être brûlés, poursuivre jusqu'au bout leur chemin amoureux et « Alléger. S'alléger. le plein naît du vide. Simplifier. Densifier. Nous n'emporterons rien avec nous dans notre ultime voyage. »
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Citations et extraits (184) Voir plus Ajouter une citation
Tout est prêt. Les grandes lignes, les principaux volumes sont posés. J'en ai la main engourdie et le feu est presque éteint dans l'atelier, seules quelques braises persistent à diffuser leurs lueurs rouges sous la cendre. Combien de temps ai-je passé là ? Je ne sais pas. Ce n'est plus la peine d'ajouter une bûche maintenant, ce serait une dépense inutile. Le soir tombe, il fait trop sombre pour continuer.
Ce vertige, à chaque fois, devant cette surface vierge. Tout y est possible. Elle attend le geste, la main accordée au souffle, comme une fécondation. Et cette question, la même depuis si longtemps. Saurai-je donner vie aux scènes qui m'apparaissent en songe ?
Je regarde les bâtons de fusain posés à côté de moi, alignés, pour l'esquisse de la scène. A chaque fois, cette hésitation. La trace de la main, le contact avec la toile. Eternelle initiation. Comme on approche un corps qui s'offre pour la première fois. Découvrir comment il va réagir, frissonner, trembler, gémir. Deviner quel est son secret, sa joie, sa blessure. Eprouver cette sensation qui ne peut être qu'une seule fois et disparaît dans le geste qui l'accomplit. Le geste de la connaissance.
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Après mon échec, mon désastre, je suis devenue silencieuse. Parler, pour quoi faire ? Pour quoi dire ? Les faits avaient parlé d'eux-mêmes. Seule la page blanche écoute, caresse, console. Aujourd'hui encore, je cherche les mots comme les coquillages,. Le nombre d'or. L'accord parfait. L'imperceptible et nécessaire dissonance. Page blanche. J'ai cinq ans pour toujours. Tes Docksides bleues, fatiguées, s'immobilisent à quelques centimètres de mes doigts. Tu écrases mon trésor. Ta voix, soudain, avec une impatience, une imperceptible dureté que je ne lui connaissais pas et qui me fait sursauter. " Mais qu'est-ce que tu fabriques ? Il y a vingt minutes que je t'attends ! " Impatience. " Tu sais que tu es bizarre par moments ? " " Désolée, j'arrive. " Je me suis rarement sentie si seule. En une fraction de seconde. J'ai réalisé que tu resterais à l'extérieur de mon monde. Je n'ai pas voulu le savoir.
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Ce marquis aux lèvres minces, tout en plumes, volants et dentelles, qui avait demandé à voir mon musicien à la vielle, dont l'un de ses pairs lui avait dit grand bien. Deux de ses gens l'escortaient, l'un tenant son chapeau, l'autre sa cape. Il a vu la toile, tourné autour, reculant, avançant, tête penchée, comme pour lui trouver le défaut qui lui permettrait de payer moins que le prix demandé. Pas un mot. Puis il s'est brusquement avancé, et d'un air agacé il a donné un coup de gant sur la toile. Puis un autre, quelques secondes après, encore plus agacé. Enfin, il s'est approché, toujours plus près, et il a compris que la mouche qu'il s'efforçait de chasser était en fait peinte sur le tableau. Non, ce n'était pas un simple insecte assoupi dans la chaleur de l'atelier et les effluves des pigments. J'ai vu son regard incrédule. Contrarié. Puis admiratif. Un éclat de rire. " Mes respects, Maître de la Tour. Vous m'avez mystifié. Il me faut cette peinture, vraiment. Je compte bien surprendre mes visiteurs comme je viens de l'être. Votre prix sera le mien. Faites-la-moi livrer dès demain, je vous prie. "
Ses valets lui ont tendu la cape et le chapeau. L'instant d'après, il avait disparu dans un bruissement de plumes et d'étoffes. Pas un mot pour prendre congé.
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Je n’ai qu’un peu de beauté à offrir au monde, celle du tremblement d’une flamme dans la nuit. Peut-être est-ce dérisoire, mais c’est mon seul talent. Je ne veux plus peindre à la lumière du jour, qui ne sait éclairer que terreur et désolation. C’est au creux de mon atelier, dans ce refuge, que je cherche à donner vie à cette lumière qui m’appelle et m’accompagne.
(...) Je m’aperçois que la nuit, à la lueur d’une simple torche, d’un brasero ou d’une chandelle, tout s’apaise. La ferveur du jour s’est tue, notre frénésie ralentit, nos passions s’assagissent. Ne reste que l’essentiel, une main, un geste, un visage. C’est ce que je poursuis en peignant, et rien d’autre désormais. De l’obscurité émerge une étrange vérité, celle de nos cœurs.
La pénombre paraît dissoudre les errements, nous absoudre de nos fautes, reléguer nos vaines préoccupations dans des espaces lointains. C’est dans ce crépuscule que se révèle ce que nous ne savons cacher, et qui, peut-être, seul nous appartient : le trouble du visage de ma fille lorsqu’elle devient Irène auprès du corps de Sébastien, et encore la douceur, l’effroi, l’attente, l’abandon, le remords, le recueillement.

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Avec l’alcool, ce n’était plus une question d’envie, de plaisir. Il t’en fallait, c’est tout. Pour faire face, pour te lever, pour aller travailler, pour t’endormir. Mes amis m’ont conseillé de partir à ce moment-là. Je les voyais si peu. J’avais changé, paraît-il. Tu te perds, tu es devenue bizarre, on ne te reconnaît plus, disaient-ils.
Nous étions trop loin du rivage désormais, j’ai tenu comme j’ai pu la barre de notre bateau ivre. Oui, ivre, il l’était, et ça ne me faisait même pas sourire.
 
Ma vie, à ces moments-là, sombre comme la nuit de ce tableau, sans qu’aucune lueur vienne l’éclairer.
Je ne savais plus remonter à la surface, ni si je le désirais encore. Ni s’il me restait encore un peu de force pour m’occuper de ma propre vie.
 
On ne fait pas boire un cheval qui n’a pas soif. Propos lucide dans sa trivialité, entendu quelque part. Vraie sagesse, peut-être. Je n’étais pas sage. Je t’aimais.
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Vidéo de Gaëlle Josse
Dans son dernier ouvrage, Gaëlle Josse nous invite à plonger dans les méandres de la nuit intime de chacun. À travers une série de microfictions minutieusement ciselées, elle explore les vicissitudes de l'existence, les petites victoires et les grandes défaites qui marquent nos vies. Dans cet univers littéraire, les personnages prennent vie, chacun portant en lui son lot d'émotions lancinantes.
Que ce soit le père éloigné de sa fille, l'homme solitaire repensant à son amour de jeunesse, ou la femme attendant en vain son compagnon promis, tous ces individus traversent des moments de doute, de désir et de désillusion. Gaëlle Josse capte avec finesse les décalages entre les êtres, leurs espoirs et leurs regrets, offrant ainsi un reflet fidèle de la condition humaine.
Parmi ces protagonistes anonymes ou nommés, il y a le pianiste renommé qui sent son art l'abandonner, le petit garçon témoin des tourments de ses parents, et bien d'autres encore. Chacun est saisi à un instant crucial de son existence, révélant ainsi toute la complexité de l'âme humaine.
À travers les pages de son livre, Gaëlle Josse donne vie à ces personnages, les rendant éclatants dans leur vulnérabilité. Son écriture aérienne, teintée de mélancolie et de lumière, nous transporte dans un univers où se mêlent les voix de Billie Holiday et les mélodies de Bach. "Chacun de nous a sa nuit" se révèle être bien plus qu'un simple recueil de récits ; c'est une ode à l'humanité, à ses luttes et à ses rêves, magnifiquement capturée par une plume sensible et poétique
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