Un livre tout à fait approprié pour réfléchir (par soi-même) à notre actualité, à la manière dont nous sommes contraints à "adopter" la pensée unique.
Excellent aussi pour réfléchir à la place de la technologie qui permet ou non à l'homme de grandir. J'adore ce positionnement qui permet de passer au-dessus des caricatures "tout blanc ou tout noir" pour expliquer le processus d'intégration dans l'individualité: développer nos capacités intérieures au fur et à mesure que l'état de masse prend de l'ampleur... Toujours trouver l'équilibre
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...C’est très difficile quand une part trop importante de ce que nous faisons dépend de la coopération des autres ou est réglée par eux.
Quelqu’un qui travaille sans s’intéresser au but de son travail ou à son produit final est en un sens une personne dépendante...
Dans notre société, beaucoup de salariés choisissent leur métier pour des raisons névrotiques plutôt que par inclination; qui pis est, cette dernière n’est souvent pas prise en considération, car ce qu’ils ont envie de faire est dissocié de la nécessité de gagner leur vie. Cela entraîne une contradiction psychologiquement dangereuse. Elle mine le respect de soi, elle empêche l’homme de prendre plaisir au travail auquel il consacre la majeure partie de son temps le prive du sentiment qu’il fait quelque chose d'important, quelque chose qui a un sens..Si l’on exprime la contradiction sous sa forme la plus simple : ils sont convaincus, et ils ont raison de l’être, que leur travail en tant que gagne-pain, est important; il leur permet de subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille, et de faire ce dont ils ont envie le reste du temps. .
Prendre position, que se soit intérieurement, sans conséquence tangible, ou mieux, en extériorisant ses convictions, dans l’action, absorbe de l’énergie.
C’est pourquoi, lorsqu’il résulte aucun avantage pour l’individu, il lui semblera au premier abord qu’il vaut mieux faire l’économie de cet effort. Du moins tant qu’il ne se rend pas compte du besoin de maintenir une “conscience de liberté”. Comme je l’ai dit, les deux situations les plus courantes où l’individu a l’impression qu’il est inutile de prendre des décisions sont un état d’oppression où il ne peut pas traduire
la décision en actes sans mettre sa vie en danger, ou un état apparemment satisfaisant résultant de décisions prises par d’autres au mieux de ses intérêts (les parents pour l’enfant, la religion ou l’Etat pour l’adulte).
Malheureusement, la prise de décisions est une fonction qui, comme les nerfs et les muscles, s’atrophie si elle ne s’exerce pas. En termes psychanalytiques, la prise de décision n’est pas seulement une fonction du moi; c’est elle au contraire qui crée le moi, le nourrit et le fait accroître....Ce qui m’intéresse, se sont les dangers que court l’autonomie dans notre propre société....
Imputer la responsabilité au groupe plutôt qu'à l'individu est l'une des tactiques les plus efficaces des régimes autoritaires pour contraindre l'individu à la soumission et finalement le détruire en tant qu'individu. Ceux qui ne veulent pas de la démocratie évitent délibérément de penser en terme d'individus et leur substituent les groupes. Ils mettent en cause les juifs, les catholiques, les capitalistes. S'en prendre à l'individu et non pas au groupe les mettrait en contradiction avec leur thèse fondamentale et impliquerait l'acceptation du concept d'autonomie individuelle.
Quoi qu'il se soit passé à d'autres époques, l'homme moderne souffre de son incapacité à faire un choix entre la liberté et l'individualisme d'une part, le confort matériel de la technologie moderne et la sécurité d'une société de masse d'autre part. C'est le véritable conflit de notre temps.
Les hommes ne sont pas des fourmis. Ils préfèrent la mort à une existence de fourmilière. C'est la raison de la passivité des victimes des SS. Que les SS les aient tuées est moins significative que le fait qu'elles soient allé à la mort en renonçant à une vie qui n'était plus humaine.