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« Un poème, le mot d'adieu d'une suicidée et ma propre réflexion à propos de huit millions d'histoires dans la ville d'Emeraude » Ecrivain américain très prolifique, Lawrence Block a écrit de nombreux polars mettant en scène notamment des héros récurrents. Outre Matt Scudder, ses personnages de polar sont entre autres, Bernie Rhodenbarr, joyeux libraire de jour et cambrioleur la nuit et Evan Tanner, agent secret ayant perdu la faculté de dormir pendant la guerre de Corée. Concernant « Huit millions de façons de mourir », le roman original « Eight Million Ways to Die » est sorti en 1982, le cinquième de la série des Matt Scudder. Sa première publication en français date de 1985. Policier à New York dans les premiers romans, Matthew Scudder a quitté l'institution après avoir tué une fillette Estrellita Rivera d'une balle perdue. Il devient alors détective privé sans avoir obtenu de licence officielle. Dans les épisodes précédents, notre Matt a eu tendance à ingurgiter de grandes quantités d'alcool dans ses pubs favoris de New York. Résolu à arrêter de boire, il participe désormais à des réunions des Alcooliques Anonymes (AA) pour tenter de décrocher de ce fléau qui va le mener tout droit au cimetière selon les médecins. Néanmoins, son expression favorite lors de ces réunions reste : « Je m'appelle Matt. Je préfère écouter ce soir ». Au-delà de ce fil rouge des AA, à scruter le « modérateur » du jour qui raconte ses pires malheurs d'ancien alcoolique, Scudder veut rendre service à Elaine, en aidant son amie et Escort girl, Kim Dakkinen, à quitter son maquereau nommé Chance. Pour trouver cet individu, Matt va faire appel à ses anciens réseaux, notamment des indics lorsqu'il était encore flic. Une fois qu'il retrouve le dénommé Chance et pense avoir résolu le problème, il va apprendre dans les journaux que Kim a été retrouvée morte dans une chambre d'hôtel, assassinée par un malade à la machette facile. Non, non, pas « gâchette » mais « machette » ! Comme vous pouvez le deviner, Matt Scudder va tout mettre en oeuvre pour résoudre cette enquête qui va le plonger dans divers quartiers de New York, plutôt chauds ma foi. Au début de ce roman, j'ai retrouvé tous les ingrédients habituels du polar bien classique : l'ex flic alcoolique et déprimé, une prostituée assassinée, des flics pas vraiment impliqués dans l'enquête, … En outre, comme le titre l'indique, notre héros est obnubilé par la mort et toutes ses formes. Pour lui, New York est une jungle où les pires atrocités quotidiennes sont légions. Et puis, passé le début du récit, l'auteur nous surprend en distillant ses indices intriguant : un poème rédigé par une autre prostituée sous forme d'énigme, des objets manquants sur la scène de crime, notamment des serviettes de bain, un maquereau au profil pas vraiment proxénète adepte de l'art africain. Bref, on découvre un polar noir qui navigue entre le combat de Matt pour se sortir de sa dépendance à la boisson et cette enquête sur la mort de prostituées dont la police se moque éperdument. Avec un style propre et teinté d'humour, Lawrence Block réussit à révéler l'univers de ses personnages secondaires dont la prostitution, certes de luxe, n'est réellement qu'une activité annexe dans leur vie. Toutes ces conversations avec Matt, menant au meurtrier au final, demeurent l'essence même du roman plus que l'enquête finalement. Un sentiment étrange nous habite une fois refermé ce polar atypique et profondément humain. Pour conclure, je dois avouer que j'ai terminé la lecture de ce polar plus rapidement que prévu, intrigué par l'issue que réservait Block à ces prostitués peu banales. Pour en profiter pleinement, ce roman se déguste lentement et intensément comme un bon chocolat noir puissant et long en bouche. Je préviens tout de même les âmes sensibles que certaines scènes, notamment celle avec un voyou dans Harlem, peuvent ébranler quelque peu le lecteur. Un roman que je conseille donc aux fans du genre les yeux fermés. Bon (ou plutôt bad) trip New Yorkais… PS : Reste à découvrir d'autres pépites de cet auteur. + Lire la suite |