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John Edwin Jackson (Auteur de la postface, du colophon, etc.)
EAN : 9782070327188
240 pages
Gallimard (02/10/1992)
4.21/5   14 notes
Résumé :
Yves Bonnefoy invente le genre du récit en rêve : publication de Rue Traversière, récits, en 1977 puis récits en rêves écrits dans les années 1980 publiés sous ce titre Récits en rêveau Mercure de France en 1987. Ce qu’il nomme le « rêve » et le « souvenir » : dans Ce qui fut sans lumière, le recueil est encadré par des poèmes intitulés « Le souvenir » et « L’agitation du rêve. » La maison apparaît comme lieu d’émergence, en rêve, d’un matériau imaginaire autobiogra... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Longtemps après la lecture de recueils essentiels comme Les Planches courbes, du mouvement et de l'immobilité de Douve ou encore de L'Heure présente, je reviens vers l'oeuvre poétique d'Yves Bonnefoy. Une lecture pas toujours des plus aisées mais qui recèle une portée infinie.

Quand on évoque la poésie de Bonnefoy, on la désigne souvent comme une poétique du lieu. Dans ce recueil, le poète choisit d'évoquer La Rue Traversière.

Elle est pour lui le lieu de l'enfance et l'adolescence, l'endroit où se situait la maison familiale. On le sent La Rue Traversière est chargée d'une valeur affective pour Bonnefoy, d'une somme de souvenirs et d'expériences qui sommeillaient dans son inconscient et qui sont remontés à la surface à la faveur d'un passage dans sa ville natale (Tours) de nombreuses années plus tard.
Le lieu, à cause de son nom, de sa prononciation, de l'instant, des conditions, des souvenirs qui y sont attachés, permet par l'écriture, le miracle de sa reconnaissance, comme celle d'un arrière-pays.


Les textes qui composent le recueil étaient à l'origine publiés dans plusieurs revues, ils étaient présentés comme des « poèmes » en soi. Mais rassemblés, ils ont perdu cette définition et ne constituent pas un tout homogène. On entre plus dans un récit qui grandit à mesure que le poète médite, non sur ce qui est, mais sur ce qui pourrait être.


Au début du recueil, divers itinéraires sont donnés, qui ont en commun d'apparaître comme autant de récits de rêves. Puis en reprenant ces images incertaines, Yves Bonnefoy médite sur leur origine, cherche leurs racines, progresse dans la direction qu'elles semblent indiquer, puis il revient sur ses pas, reprend sa marche, en procédant par retouches et repentirs, dans une sorte de questionnement incessant et répétitif.

Dans une succession de textes tout en prose, Bonnefoy n'interroge pas l'objet ou le lieu (la Rue Traversière) qui lui suggère une impression, une parole, mais bien plus le mouvement de sa conscience qui fait (re)naître l'objet ou l'endroit qu'il a devant lui.

Pourquoi évoquons-nous un souvenir avec certains mots plutôt qu'avec d'autres ? Pourquoi le retour sur un lieu nous suggère-t-il telle impression plutôt qu'une autre ? s'interroge le poète. Qu'est-ce qui détermine notre rapport au langage ? Qu'est-ce qui alimente depuis l'enfance notre imaginaire ? Qu'est-ce qui a fait notre sensibilité si particulière ?, etc.

Ces questions toutes intéressantes sont abordées avec beaucoup d'intuition et de savoir par Yves Bonnefoy, dans les pages d'un livre qui se rapproche plus du récit et d'une méditation poétique sur la langage que d'un véritable recueil de poèmes.

Lire Yves Bonnefoy est toujours une expérience à part, très particulière, mais c'est une écriture qui donne une consistance, une épaisseur à l'intérêt que chacun peut avoir pour la poésie.

Aimer la poésie, dire ce qu'elle nous procure est une chose. Mais découvrir ses soubassements, ses racines, approcher de son coeur-même, voilà ce qui la rend plus belle encore.
L'écriture d'Yves Bonnefoy est ce chemin d'emprunt.


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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
La mort du peintre d'icônes p 112
...le feu a là encore frappé, mettant à nu par endroit le bois du panneau, l'ourlant de veines de houille. Laquelle brille, sous quelques angles qu'il est aisé de trouver, dans ce lieu qui est désormais l'ouvert autant que l'enclos, la faille autant que la forme.
Je regarde ces beaux cristaux du charbon, et pense à la couleur, comme telle. aux miroirs, aux formes, et aux rythmes aussi, à l'émouvante sonorité des mots, à toutes nos façons qui sont insuffisantes et, en somme, contradictoires de chercher à atteindre en nous à davantage que nous. Comment est mort, me dis-je ainsi, le pauvre peintre qui pensait que l'on peut laisser Dieu --- ou le ciel d'été --- collaborer à nos oeuvres ? Qui avait poussé l'orgueil, c'était là le soupçon des autres, jusqu'à vouloir s'effacer devant ces rayons qui semblent pourtant nous chercher, dans notre nuit, comme quelqu'un avec une lampe ? A-t-il été lui-aussi consumé par ce coup de foudre ? L'a-t-on emporté de son rêve le visage noir, les yeux clos ?
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Les dieux p 41
Nous étions sur la plus haute terrasse, avec les maçons, à la fin d'un après-midi d'automne. Et soudain "cela" monta du ravin et passa comme appelé au levant. --- grappes d'ailes vibrantes et d'ombres de corps, translucides, qui tourbillonnaient par milliers et milliers au sein d'autres grappes... Quel silence ce fut, jusqu'à la tombée de la nuit ! Les ouvriers avaient cessé leur travail, aucun insecte ne crissait plus, nous regardions s'enfler ces grands tournoiements dont certains étaient si épais qu,ils obscurcissaient le soleil.
Et parfois quelqu'un de ces voyageurs s'abattait sur le parapet ou sur nos manches claires encore ; et nous nous disions que son coeur battait, nous aimions que son vieux visage ouvragé resplendit dans l'infime, sous une tiare.
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Je voulais de l'écriture qu'elle soit, non le déploiement d'un rêve, aux ambiguïtés infinies sur les marges du temps vécu, mais l'épreuve par laquelle on peut se prouver, et à soi-même d'abord, digne de vivre la vie à son lieu, c'est-à-dire « ici », « maintenant », dans la présence des autres êtres.
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C'étaient de grosses cerises, qui retenaient le soleil à leur bord fuyant.
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Videos de Yves Bonnefoy (31) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Yves Bonnefoy
Les derniers livres d'Yves Bonnefoy (1923-2016) expriment son désir de transmettre le legs de la poésie par-delà la mort. « Lègue-nous de ne pas mourir désespéré », lit-on dans L'heure présente (2011). Quant à L'Écharpe rouge (2016), c'est un « livre de famille » testamentaire en même temps que l'histoire d'une vocation : « Il se trouve que j'étais apte à me vouer à l'emploi disons poétique de la parole… » La Pléiade fut pour Bonnefoy l'occasion de porter sur son oeuvre un regard ordonnateur. Il choisit le titre du volume, Oeuvres poétiques, sans céder sur son désir de faire figurer au sommaire quelques textes brefs que l'on qualifierait spontanément d'essais. Tous les livres ou recueils poétiques, vers, prose, ou vers et prose, sont présents. Bonnefoy ne se reniait pas ; il a souhaité donner dans les appendices quelques textes rares. Il a voulu aussi que soit présente son oeuvre de traducteur, de Shakespeare à Yeats, de Pétrarque à Leopardi. Enfin il a ouvert à ses éditeurs les portes de son atelier.
« Le souvenir est une voix brisée, On l'entend mal, même si on se penche. Et pourtant on écoute, et si longtemps Que parfois la vie passe. Et que la mort Déjà dit non à toute métaphore. » L'heure présente, Yves Bonnefoy
À lire – Yves Bonnefoy, Oeuvres poétiques – Coll. La Pléiade, Gallimard 13 avril 2023.
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