Certes, d'après moi, ce roman mérite un prix : je lui accorde bien volontiers le Premier Prix de l'Invraisemblable ! Dans une autre critique, on peut lire qu'il y a du
Zola dans Bordes. Pauvre
Zola, il a dû se retourner dans sa tombe ! Il y a 2 points communs :
- la mine, mais ici, en dehors du titre bien accrocheur sur ce thème, les chapitres concernant la mine ne sont vraiment pas majoritaires
- une galerie de portraits, qu'on retrouve dans
Zola, c'est vrai, mais savoir animer une galerie de portraits, ça demande du talent ! Ici par exemple, on abandonne, à la fin d'un chapitre, le fils aîné, Henri, emmuré à 650 m de fond, par un éboulement dès ses débuts à la mine ( c'est tellement normal, c'est ce qui devait arriver à tous les jeunes mineurs, n'est-ce pas ! ) pour passer à un chapitre sur le jeune Marceau, chapitre qui se termine par "il ne savait pas ce qui l'attendait" ( il faut bien tenter par tous les moyens de maintenir le lecteur en haleine ) et à ce moment-là seulement, on lit le sauvetage du mineur Henri ! Quant à "ce qui attendait" Marceau, on n'apprendra que plusieurs chapitres après, ce qui l'attendait pourtant le jour-même, et, franchement, il n'y avait pas de quoi casser 3 pattes à un canard, cette expression nous ramenant aussi à la campagne !
J'ai eu déjà l'occasion de dénoncer, sur BABELIO, un certain nombre de ces romans où l'auteur veut nous faire vivre la réalité du vécu de nos proches parents, avec des descriptions, on ne peut, plus précises. Ici, c'est la ville de Saint Etienne, qu'on doit connaître, après cette lecture, encore mieux qu'en allant la visiter, oui mais voilà, des descriptions, c'est à la portée de presque tout le monde, mais de là à avoir le talent pour bâtir autour, un roman qui tienne la route, là ça devient plus difficile !
Quand j'ai constaté que la mine n'était vraiment pas prioritaire dans ce roman, je me suis demandé, alors, pourquoi ce titre ? J'espérais que, au moins, cette expression des mineurs serait employée là comme une image : le soir à venir, donc la suite, en l'occurrence, la suite de la vie après la fin du roman pour chacun des personnages, deviendrait plus lumineuse, que la noirceur ( comme le charbon ) dans laquelle les plonge l'auteur au cours de son roman. Ö déception ! Non franchement, on ne va pas décrire la fin, mais ça n'est vraiment pas le cas ! Je ne vois donc qu'une seule justification à ce titre : que chacun fasse comme moi, lise ce livre, parce que le thème de la mine intéresse !
Bien sûr, la mine, c'est l'occasion d'aligner des drames qui sont bien connus. En moins d'un an que dure le roman, on assiste à un éboulement, un coup de grisou, suivi d'une émanation d'oxyde de carbone. Bien sûr, c'est plus facile d'insérer dans un roman, des drames survenus à la mine, plutôt qu'à Manufrance ! Oui mais voilà, l'émanation d'oxyde de carbone, elle se produit pendant le sauvetage d'une victime du coup de grisou ! Ainsi donc, cet oxyde de carbone, capable de tuer un homme en quelques minutes, aurait tué tous les sauveteurs s'ils n'avaient pas pris immédiatement toutes les dispositions, en ne revenant qu'après la ventilation du puits, mais... n'a pas tué le mineur blessé, qui restait à sauver ! Décidément, les choses se passent de façon bizarre, dans la mine façon Bordes ! Sa motivation devait être plutôt, de retarder d'une page ou 2, le sauvetage de ce mineur, croyant maintenir un peu plus longtemps le lecteur en haleine "ah, vont-ils le sauver ?" Pas de chance, l'effet est complètement raté !
Quant à "l'intrigue" que, par ailleurs, on nous dit vraisemblable, j'attends qu'on me présente des faits similaires dans la vie ! Pour un livre qui veut coller à la réalité ! A la fin, l'auteur donne la liste des personnes qu'il remercie pour leur aide. Gageons que, parmi eux, il n'y avait pas de neurologue ! J'attends qu'on m'explique comment cet homme, le héros dont on parle toujours et qu'on ne voit jamais, bon passementier reconnu pour son travail, bon époux et bon père, peut, 15 ans après la guerre, subitement à la première page du livre, se comporter comme l'auteur nous débute son récit, en ne nous amenant son explication vraiment très personnelle, qu'à l'avant-dernier chapitre seulement, avec de curieuses conséquences d'une amnésie, des pertes ou des retours de mémoire, juste nécessaires pour bâtir son roman !
Bien sûr, il fallait que, en cours de route, le lecteur sache que "l'intrigue" allait venir, alors on apprend que le Cousin Jean savait la "vérité" selon
Gilbert Bordes, que Marceau aurait croisé ce père, et tout ça devrait faire un bon roman. Et bien, non, ça ne suffit pas, il aurait fallu le talent en plus !