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André Bucher (Autre)
EAN : 9782361396879
160 pages
Le Mot et le reste (07/01/2021)
4.36/5   14 notes
Résumé :
Bernie et sa femme ne se remettront pas de la mort soudaine de leur fils. La douleur, insubmersible, a eu raison de leur histoire. À quelques encablures de là, Sylvain et Élodie jouent de malchance lors des premiers remous du mouvement des
 gilets jaunes: dans un accès 
de panique, cette dernière a mortellement renversé la mère
 du jeune garagiste, qui devra lui aussi composer avec le deuil. Plus bas dans la vallée, Édith fuit vers l’inconnu. Son c... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
André Bucher possède la rare faculté de nous parler de la société des hommes en la replaçant au milieu d'un tout dont elle semble, depuis longtemps, avoir oublié qu'elle appartenait.


Bernie est un homme brisé : son fils est mort brutalement au soir d'une journée de travail comme les autres, le chagrin qui l'a rendu taciturne et solitaire a fait fuir sa femme et se retrouvant seul, il retourne vivre sur une parcelle isolée, une terre qu'il avait toujours voulu habiter.
Sylvain, gilet jaune, perd sa mère lors d'une manifestation, un accident, comme le reflet d'une contestation perdue d'avance.
Elodie a reçu un appel téléphonique : elle doit se rendre de toute urgence à l'école pour emmener sa fille à l'hôpital.
Edith fuit dans la nuit, elle veut s'éloigner de celui qui la violente, s'éloigner d'une vie qu'elle refuse désormais.

Ils sont tous en chagrin, tous perdus, seuls, sans rien ni personne, à quoi s'accrocher, la vie file, ils restent sur le côté, abandonnées, inadaptés.
Ils vont se croiser, se rencontrer , se parler, s'écouter et réapprendre à vivre doucement. Ils deviennent autant de consolants l'un pour l'autre, autant de raisons d'espérer que la vie peut continuer, alors que tout, hommes et idées, semble voué à une seule chose : la misère. La nature, la faune sauvage, les oiseaux, le rythme des jours, la lune et les étoiles comme autant de bergers vers un monde plus doux, qui pourrait être acceptable. Sans oublier cette belle image du chien surgi de nulle part et qui ne quitte plus celui qu'il a choisi de consoler, de guider, désormais...


C'est un récit d'une grande tristesse, tout en pudeur, qui parle du mal que sont capables de se faire les hommes quand il ne faudrait que vouloir s'entraider pour continuer à vivre ensemble, quand il faudrait ajouter le mot "Amour" tout simplement, comme le début d'un renouveau, à nos langages de vie...
Qui évoque l'incompréhension de l'homme devant son environnement, de celle qui est en train de détruire ce qui devrait être préservé.


La poésie des mots est toujours présente chez André Bucher, les images qui en naissent fabuleuses, le fond musical également : le Blues n'est jamais loin...


On dirait simplement que les ténèbres envahissent un peu plus ses récits au fil des livres comme nos vies...
Sommes-nous capables de nous en rendre compte et de réagir ? Il est encore temps de changer nos modes de vie humains et notre rapport à la nature. Mais sommes-nous assez en nombre pour le vouloir ?

Je remercie Babélio et les éditions le Mot et le Reste pour avoir permis cette si belle lecture.

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C'est avec joie que j'ai retrouvé la prose si poétique, indissociable de cet écrivain ,pour qui la nature est source d'inspiration.
Un enchaînement d'événements malheureux va tisser la toile de cette histoire. Face à ces magnifiques paysages des Alpes de Haute Provence,en contraste ,nous allons suivre des êtres abîmés,déchirés ,par la vie:
-Bernie,qui a perdu son fils Thomas d'un A.V.C. ,un an auparavant ,qui ne s'en remet pas,dont la femme ne supportant plus leur " semblant " de vie ,va fuir chez sa soeur ,le laissant totalement désemparé.
--Élodie, caissière, qui ,prévenue par la directrice,doit récupérer sa petite fille ,en pleine crise d'asthme, pour l'emmener à l'hôpital. Malheureusement ,dans sa précipitation, en reculant ,elle renverse mortellement la mère du petit garagiste: Sylvain ,au moment du rassemblement des gilets jaunes,mauvais moment,mauvais endroit.
--Édith, qui ,une fois de plus ,dans leur restaurant après la fermeture,subit à coups de poing la violence de son mari alcoolisé au volant de sa voiture en pleine nuit ,elle fuit vers l'inconnu.
Des vies ,au début détruites mais qui ,par un heureux hasard...mais chut ....je ne vous dévoile pas la suite ,à vous de la découvrir.
C'est un beau conte,sur la fin ,en symbiose avec la beauté de ces montagnes enneigées.Et ,si au début, André Bucher, porte un regard amer et désabusé sur l'espèce humaine , la fin de ce roman nous réconcilie avec les hommes.Un roman plein d'espoir ,avec ce côté pantheiste ,que j'apprécie toujours chez cet écrivain. À recommander. ⭐⭐⭐⭐
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André Bucher se taille un chemin bien particulier dans l'univers du roman francophone. Chacune de ses nouvelles publications apporte sa part d'émotion mais aussi d'émerveillement. « Tordre la douleur » apporte sa pierre à l'édifice. A la fois une ode à la nature, comme dans ses romans précédents, mais aussi une belle évocation des sentiments et des relations humaines, dans ce qu'elles ont de plus touchant. En toile de fond, ces Alpes du Sud qu'André Bucher connaît si bien ; au premier plan, des personnages malmenés par les épreuves difficiles qu'ils traversent. Les premiers chapitres présentent une succession d'événements dramatiques, sans lien apparent, puis, au fil des pages, les différents protagonistes sont amenés à se côtoyer.
L'auteur ne se fatigue pas à inventer des situations trop compliquées, pour mettre en présence ses personnages. Son histoire se déroule dans un contexte politique récent et le mouvement des gilets jaunes (auquel il témoigne une sympathie évidente) lui fournit l'occasion de réunir des personnalités très diverses.
Un an après la mort de leur fils, Annie quitte Bernie qui s'effondre et ne tarde pas à retourner vivre dans sa ferme « en réalité une vaste étendue de bois et de landes (…) et un vétuste mobil-home. ». Sur un rond-point occupé par les manifestants se produit un incident gravissime : Elodie, souhaitant conduire sa fille à l'hôpital, panique et force un barrage. Son comportement entraine la mort d'une femme, la mère de Sylvain. Bernie est témoin du fait-divers… etc…
Tout cela est conté sur un ton froid, détaché, journalistique par moment. le début du roman est fait de souffrance pure et suffocante, une accumulation de tensions parfois difficile à supporter. Au fur et à mesure que la situation se complexifie, une part de plus en plus importante d'humanité s'infiltre dans l'histoire. Comme si la nature environnante, omniprésente, venait relativiser les rapports complexes entre les humains. On peut se demander à un moment du récit, si André Bucher ne cherche pas seulement une occasion de célébrer la forêt, les forces de la nature qui peuvent être, elles aussi, d'une violence inconcevable. Dans leur refuge montagnard, Bernie et Elodie vont connaître une tempête mémorable. Après cet événement, nous dit l'auteur, Bernie « révisa son jugement, les arbres également étaient capables de souffrir. »
Car la souffrance reste le fil conducteur. La photo de couverture c'est une écorce tourmentée et ce n'est pas un hasard. « Les liens entre les êtres ne se créent pas tout seul ou par magie, même la souffrance pouvait y contribuer ». Cette phrase que l'auteur place dans la bouche d'Elodie pourrait bien être une des clés de cet ouvrage.
N'oublions pas que le titre « tordre la douleur » est une allusion évidente à l'expression « se tordre de douleur » et peut se prêter à diverses interprétations.
Inutile de vous dire que j'ai beaucoup apprécié ce livre et que je remercie l'éditeur « le mot et le reste » pour son envoi dans le cadre d'une « masse critique ».
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Tordre la douleur quel joli titre qui nous annonce un livre à fleur de sentiment. L'expression c'est à fleur de peau mais sentiment est plus parlant je trouve.
André Bucher je me souviens d'une rencontre dans une bibliothèque voisine il y a quelques années. Un homme étonnant, au plus près de la nature. Bernie on se dit que c'est lui lorsque l'on voit sa photo. En tout cas c'est sa région, ses montagnes, ses arbres et cette grande connaissance d'un monde assez mystérieux pour les citadins.
Destins croisés de quelques personnages qui ont en commun cette douleur qu'il faudra bien extirper pour continuer à vivre et sous fond de combat social, ah ces gilets jaunes que l'on rencontre souvent dans les romans. C'est un témoignage utile quand on aura oublié ou que l'on ne pourra plus supporter d'entendre comment à été déformé leur combat.
Bernie c'est le personnage central, on suivra son parcours dans cette montagne hivernale, on l'écoutera parler des arbres, des animaux, du vent et de la neige... Rude, courageux, droit il prendra soin d'Edith, trouvé sur une route. L'autre histoire c'est celle d'un "gamin" des ronds-points dont la mère vient d'être tuée lors d'un barrage. Un roman dont les personnages se font échos avec une force touchante.
André Bucher a une écriture poétique, qui nous met au coeur de ces paysages. Militant ce sorte d'ermite sans concession est un sacré observateur qui a su placer ses personnages dans une histoire qui fait sens.
Sinon j'ai beaucoup aimé comment il parle de notre président actuel, un petit coup de griffe bien utile. Ce livre n'est pas qu'un nature writing.
Merci à masse critique et l'édition le mot et le reste pour cet envoi.
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Ce 10e roman d'André Bucher rompt avec les précédents, tout en gardant la prose poétique de l'auteur pour chanter la nature.
Le ton du livre est donné par le titre, renforcé par le tronc noueux de la couverture teintée de vert, et confirmé par le résumé de l'éditeur.
Tordre la douleur, dont la vie des personnages possède son lot de misères et de malheurs, commence dans les montagnes reculées de Bernie, forestier un peu solitaire. Son couple n'a pas survécu à la mort du fils. On rejoint rapidement ceux d'en bas où la mort frappe la mère de Sylvain et Solange à un rond point occupé par les gilets jaunes, où la main lourde d'Étienne vient encore une fois de trop frapper le visage d'Édith, sa compagne, qui s'enfuit du restaurant où elle vit et travaille avec son compagnon.
Le destin de ces personnages va tisser des rencontres entre regrets et espoirs, douleur et résilience.

Cette fois-ci, André Bucher « descend de sa montagne » pour aborder la situation sociale et politique, égratignant au passage nos dirigeants et le système actuel. Il aborde ici plusieurs sujets sociaux, tels que la révolte des gilets jaunes, le deuil prématuré et la maltraitance des femmes. Il ne s'arrête pas au malheur, mais poursuit vers la reconstruction et sa réussite grâce aux rencontres, à l'acceptation, à l'entraide.

En lisant le résumé, j'avais peur de tomber dans le glauque dont pas grand monde n'a envie en ce moment… mais l'auteur a su éviter le piège du pathos. Chaque personnage est bien planté (normal pour un forestier) et le jeu d'assemblage des caractères est finement ciselé dans leur évolution. le titre est un peu fort et risque de repousser, alors qu'en réalité, cette histoire est lumineuse, partant du quotidien, malheureusement ordinaire pour certains, pour s'ouvrir, offrant à chaque personnage un peu de lumière.

Par certains aspects, j'ai trouvé ce roman plus ouvert que les autres où jalousie, rancoeur, sournoiseries, secrets de famille et règlements de comptes habitaient les montagnes, et ayant sur moi une tendance à me sentir enfermé dans la forêt et les comportements ancestraux de paysans bourrus.
Cela ne m'empêchait pas d'apprécier l'écriture poétique d'André que l'on retrouve ici beaucoup plus aérienne, plus fluide encore, comme dépouillée malgré le poids de l'histoire.

Derrière un aspect sombre, une histoire lumineuse et très humaine… un nouvel André Bucher à découvrir.
Lien : https://dominiquelin.overblo..
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Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
Le soir, après le repas, Sylvain en adoptant le ton de la confidence, lui fit partager sa lecture et feignant de solliciter son avis, il s'écria : "Doit-on tendre ou tordre la douleur ?"
Sérieusement, il avait posé ce genre de colle à un chien. Dilemme shakespearien pour un guérisseur. Celui-ci avait incliné la tête de part et d'autre, comme s'il refusait de choisir. Les animaux aussi pouvaient avoir le coeur brisé.
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Bernie avait hissé son gamin sur ses épaules et imitant le cri du hibou, il faisait mine de s'envoler. La lune se pavanait, son disque argenté oscillait doucement, elle tournoyait telle une toupie à la parade. Thomas, survolté, battait des mains, allongeant ses petits bras pour la toucher pendant que des centaines d'étoiles somnolentes et paresseuses striaient le ciel de leurs providentielles flèches de lumière et cris silencieux.
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La pluie, machine à coudre les flaques, lui agrafait le dos pire qu'un volée de clous. Il discerna un bruissement d'ailes aussitôt ponctué par un gémissement d'effroi. A l'évidence, le dénouement d'un sombre complot perpétré par un rapace nocturne, quelque part dans un taillis proche du serpent de bitume accomplissant sa mue à travers bois dans une lente reptation.
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Le monde est en mouvement. Nous-mêmes sommes en mouvement. Nous avons tous perdu un être cher. Nous avons tous dansé avec le chagrin, et un jour nous danserons avec la mort.

Terry Tempest Williams
Refuge


(une des épigraphes du livre)
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La température remonta d'un cran et la neige si douce depuis le ciel ,si dure sitôt chue à terre ,survint comme une seconde peau.Les arbres surpris par cette greffe intempestive, se grattèrent et le vent jetant son dévolu sur le penchant côté nord,fit s'envoler les feuilles les plus chétives tel un cheval apeuré au galop.Par contre ,sur le flanc sud,il enroulait les flocons,les tricotant en écharpes blanches et épaisses autour des branches encore persistantes des chênes pubescents. La neige était lourde, gorgée d'eau.Les charpentières finiraient par rompre et celles des fruitiers --pruniers ou pommiers --par se fendre en deux.Seuls les pins et les cèdres réussiraient partiellement à se protèger en repliant leur ramure,de la même manière que l'on referme à la hâte un parapluie où un parasol,à l'approche d'une tornade.
La poudreuse rendue compacte se déploya en rampant sur le dos aplati des champs qui jouxtaient la ferme.
Ensuite le mistral prit l'ascendant,il mitrailla cette étendue jusque -là uniforme,lui infligeant moult plaies et bosses, si bien que le relief sous les rafales s'apparentait plus à une scène de guerre qu'à une carte postale. La nuit entreprenait bien de saupoudrer de noir toute cette farine boursouflée mais en vain,tant le paysage virait au blanc.( Page 88/89).
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Videos de André Bucher (22) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de André Bucher
Rencontre avec André Bucher autour de son dernier livre "Tordre la douleur", aux éditions Le mot et le reste. Entretien filmé à la librairie Le Bleuet le 16 janvier 2021 (sans public). Partie 5.
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