La Russie entre deux mondes est une analyse de la politique étrangère de cet immense pays, étendu de l'Europe à l'Asie, de la chute de l'URSS à 2010.
Même si cet essai a été écrit il y a onze ans, il conserve toujours de l'intérêt de par la poursuite actuelle de cette politique. Au regard des évènements contemporains, nous comprenons mieux les causes et les attitudes russes.
La Russie est cet aigle à deux têtes. L'une regarde vers l'Ouest, l'Europe, le libéralisme, la démocratie. L'autre tête est tournée vers l'Asie dont l'espace vide offre l'accès à des quantités de matières premières importantes mais aussi la possibilité de nouvelles opportunités politiques. Car finalement, la Russie est-elle européenne, asiatique ou eurasienne ? Evidemment, la réponse est loin d'être tranchée.
A la chute de l'Union soviétique, Moscou s'est tourné vers le camp occidental pour à la fois intégrer le groupe des « vainqueurs de la Guerre froide », trouver du soutien pour transformer son économie exsangue après des années de politique soviétique, tout en voulant conserver son aura de grande puissance et l'intégrité de son influence sur son ancien empire. Mais les Etats Unis n'ont pas accordé d'importance à la Russie, ce vaincu qui ne pouvait remettre en cause leur puissance mondiale unilatérale. Pas plus l'Europe, engluée dans un souci de maintien de la paix face à la montée des nationalismes dans les anciens pays de l'Est, qui d'ailleurs cherchaient et cherchent encore à échapper à toute influence russe, n'a donnée suite au retour de la Russie.
Alors, après dix ans de politique de la main tendue vers l'Ouest et systématiquement refusée, Vladimir Poutine, qui remplace
Boris Eltsine, va changer de tropisme. Il va donner une orientation asiatique à sa politique. D'abord, parce que l'Asie n'est pas une zone d'influence de la Russie, les pays qui la composent ne suspecteront pas Moscou d'impérialisme. Ensuite, la Chine avec qui elle partage les frontières possède des atouts économiques indéniables, même si elle est aussi une menace par le poids de sa population face à celle de la Russie.
Alors la Russie va rejoindre le club de Shangaï, se rapprocher de l'Inde, pour contrebalancer la Chine, l'Iran avec qui elle partage la Mer Caspienne et, plus généralement, des pays du Sud-est asiatique et des pays turcophones. Fort de son expérience impériale, Moscou ne veut pas s'aliéner cette population musulmane répartie des deux côtés des frontières.
Pour autant, la Russie ne délaisse pas son étranger proche, n'admettant pas que cette ceinture soit franchie par quiconque pour y exercer une influence. La guerre avec la Géorgie, en 2008, est l'exemple et un message moscovite au monde.
Pour conclure, l'académicienne reconnaît que la politique asiatique et vis-à-vis du monde musulman porte ses fruits. La Russie a retrouvé son amour propre et sa fierté en redevenant un pays influent et un acteur incontournable sur la scène mondiale. Cependant, au fond de lui, ce pays sait qu'il n'en demeure pas moins européen, caractère qu'il ne manquera pas de conserver et de cultiver.