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EAN : 9782363390042
96 pages
Finitude (25/02/2012)
4.17/5   3 notes
Résumé :
Il y a deux passions dans la vie de Béatrice Commengé : la littérature et les voyages. C’est donc tout naturellement que, depuis de nombreuses années, elle tente de les concilier. Chaque page lue pique sa curiosité, et c’est livre en poche qu’elle part sur les traces des auteurs, de leurs villes natales, des cimetières hébergeant leurs tombes, ou des paysages ayant nourri leur plume.

Et, lorsqu’au retour de ses pérégrinations, elle raconte ses voyages... >Voir plus
Que lire après Flâneries anachroniquesVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Une nuit d'insomnie... et je suis partie dans les rêveries et balades
littéraires de Béatrice Commengé, la traductrice d'Anaïs Nin...

Alors quoi de plus naturel que ces Flâneries commencent par un des séjours parisiens d'Henry Miller, tirant le diable par la queue, changeant fréquemment d'hôtel, selon les " sous restants" !...
Un Miller et sa passion amoureuse pour Anaïs Nin, Miller et sa rencontre , son amitié pour Cendrars...ses amis parisiens, ses lectures : de David Herbert Lawrence, Gide, Céline...

Béatrice Commengé part en pensées mais pas seulement...sur les traces de cinq écrivains de son coeur: de Miller à Diderot, en passant par Lawrence Durrell, Italo Svevo et Hölderlin; entre Paris, Tübingen, New Dehli, Darjeeling, et Trieste...

Cinq très beaux textes... même si je ressens une préférence pour le texte concernant Henry Miller...ses pérégrinations parisiennes, ses rencontres et boulimies de lectures !

[Sur Henry Miller ]

"Les rues l'entraînent vers d'autres rues, d'autres visages. Changer de lieu pour renouveler le regard, stimuler la création. "(p. 16)

Je reprends une phrase du 4 e de couverture qui convient on ne peut mieux à cette lecture très plaisante : "Ce petit livre refermé, on se sentira deux envies contradictoires, celle de sortir sa valise et celle de se plonger dans sa bibliothèque"....Les deux pour Béatrice Commengé... sont très heureusement compatibles !!...


****Acquis le 27 octobre 2016...à la Librairie Tschann...
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Citations et extraits (20) Voir plus Ajouter une citation
La magie de la constance [Diderot et Sophie Volland]

Les mots écrits seront son coeur vibrant, son corps brûlant, son esprit aux aguets. Les lettres devront être livrées aussi rapidement que possible. (...) Sophie doit le" suivre pas à pas": "Je mets si peu de prétention à ce que je vous écris que, d'un courrier à l'autre, la seule chose qui m'en reste, c'est que j'ai voulu vous rendre compte de tous les instants d'une vie qui vous appartient et vous fait lire au fond d'un coeur où vous régnez" (p. 67)
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Hölderlin a même trouvé sa source. C’était le plus facile. L’eau ne manque pas à Tübingen. Au bout du "jardin" coule une fontaine. Les autres l’appellent "Fontaine des Philosophes". Lui, l’a baptisée "Castalie". Apollon et ses muses règnent désormais sur les lieux. Les mots suivront. Reprenons la lecture : une rivière, un haut platane, une source claire, une brise légère. Le décor est reconstitué, ici, sur la rive du Neckar. N’a-t-il rien oublié ? Quel parfum dans l’air ? Quelle musique à l’oreille ? Socrate est précis, pourtant : l’endroit est "tout embaumé" Quelle est donc cette odeur ? Quel est cet arbre "élancé", "en pleine floraison", qui "fournit une ombre si délicieuse" à Phèdre et à Socrate ? Un gattilier. Un gattilier ? A quoi ressemble un gattilier ? Agnus-castus dans les livres de botanique. Agnos dans la langue de Platon. Agnos reste énigmatique. Faut-il le rapprocher d’"agneia", la pureté, ou bien d’"a-gnoia", l’ignorance ? L’origine demeure incertaine. Quant à cactus, il serait une traduction de hagnos ou hagios (sacré), qui aurait dérivé en chaste. Le chaste et le sacré se seraient fondus l’un dans l’autre. On dit que les femmes grecques, lors des fêtes des Thesmophories, avaient coutume de couvrir leur lit de branches d’agnos afin de demeurer chastes. Le pouvoir du gattilier ne semble donc pas se limiter au délice de l’ombre qu’il projette. L’agnos procurerait l’agneia. Achevons notre description : "arbrisseau à feuilles caduques à la senteur agréable de un à trois mètres de haut" - des feuilles "palmées", formées de cinq à sept pétioles. Et ses fleurs, si odorantes, ont-elles une couleur ? sont-elles blanches ? ou mauves ? ou roses ? ou d’un bleu pâle ? Il semblerait que toutes ces couleurs soient possibles. Hölderlin a-t-il demandé à Vergo de lui décrire un gattilier ? de lui définir son parfum ? Qu’est-ce qu’un air "embaumé" pour ses narines ? Qu’est-ce qu’un air embaumé sous un bois de platanes ? Le poète est "grisé". Parle même de "nectar". Le gattilier a peut-être un parfum de troën, de rose, de seringa, que sais-je... Parviendra-t-il à communiquer à son Hypérion une "étincelle de cette douce flamme" ? Une flamme si chaude, si brillante. Le gattilier donne de la joie et libère la pensée. Le dialogue peut se poursuivre au "son harmonieux des cigales". Les cigales ? Comment chantent donc les cigales ? Les cigales habitent le grand Sud. Pas de concert à Tübingen. Que peut-il entendre, en lisant ? Quel oiseau ? Quelle sauterelle ? Quel grillon ? La lecture se poursuit en silence. Sous le platane et le gattilier, Socrate conte la légende des cigales. Il est midi à Tübingen, comme à Athènes. Hölderlin écoute. Avant la venue des Muses, le monde était un monde sans cigales. Les hommes buvaient, mangeaient, se reproduisaient -sans chanter. Certains s’en contentaient. D’autres espéraient de plus vifs plaisirs. C’est pour eux que les Muses vinrent au jour. Terpsichore les charma, Calliope les ravit, Euterpe les grisa. Ils en perdirent la soif et l’appétit - et s’éteignirent dans la joie. De leurs esprits extasiés naquirent des créatures qu’on n’avait encore jamais vues sur cette terre : des êtres capables de chanter au soleil, sans boire ni manger, jusqu’à la mort. Les autres hommes les nommèrent cigales. La cigale est une enchanteresse enchantée. Phèdre et Socrate sont comblés : l’oeil, par la majesté du platane, le nez par le gattilier, la peau par la douceur de l’air, l’oreille par le chant des cigales... et les pieds par la fraîcheur de la source. Hölderlin se souvient encore de cette mémorable journée où ils étaient allés déjeuner à l’Auberge de l’Agneau. "Ils", c’est-à-dire Magenau, Neuffer, et lui. Les trois membres de la "Ligue des Poètes". Auparavant, ils avaient traversé le jardin au bord de l’eau et s’étaient arrêtés devant la fontaine, sa fontaine de Castalie ; là, "ils s’étaient lavé le visage et les mains" avant d’entonner l’Hymne à la Joie de Schiller. Hölderlin avait "les larmes aux yeux." Magenau s’en souvient. Magenau l’a écrit.
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[ Sur Henry Miller ]

C'est aussi là, entre ces murs, qu'il découvre Louis Ferdinand Céline. Il lui faudra toute une semaine pour lire le livre, "à l'aide d'un dictionnaire". ça ne s'oublie pas. Quarante ans plus tard, il en parlera encore à Brassaï : il ne se souvient plus du nom de l'hôtel, mais il se souvient de ses jours et de ses nuits passés à lire et à écrire. Miller à Paris... Céline à New-York...Etrange chassé-croisé... C'est quoi, le voyage, la vie ailleurs, l'exil ?
J'ouvre le livre et trouve la réponse :" c'est cela, l'exil, l'étranger, cette inexorable observation de l'existence telle qu'elle est vraiment pendant des longues heures lucides, exceptionnelles dans la rame du temps humain, où les habitudes du pays précédent vous abandonnent, sans que les autres, les nouvelles, vous aient encore suffisamment abruti..."(p. 23)
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A Athènes, le temps est à l’orage. Pas de lumière rose sur l’Hymette. Mer grise. L’autoroute de l’aéroport se nomme "Boulevard de Poséïdon". Les dieux oubliés des hommes se sont réfugiés dans les noms. Le taxi roule à grande vitesse entre mer et béton, entre plages et balcons. Le chauffeur est heureux de la pluie qui s’annonce. L’été fut si chaud. J’ai demandé qu’il me conduise jusqu’au Stade, là où débute le Léoforos Vasileos Constantinou. Je n’ai pas osé parler de l’Ilissos qui coulait à la place de cette longue avenue rectiligne, il n’y a pas si longtemps. Comment se porte une rivière sous le bitume ? Pas parlé non plus du platane, ni du gattilier. Le chauffeur a moins de trente ans. Tout est allé si vite. J’en ai les preuves : des plans, des dates. 1952 : entre les bâtiments orange de la carte de mon Guide Bleu, on peut encore suivre du doigt le cours noir de la rivière, en amont et en aval, à partir du pont du Stade. Des ombres brunes, couleur de terre, laissent même espérer la présence de quelque verdure, de l’herbe, des arbres. Mais les guides ne retiennent que les pierres. Brisées ou neuves. Athènes est aussi fière du fragment miraculeusement conservé de l’enceinte d’Hadrien que de son tout nouveau Tennis Club et de sa rutilante Piscine Publique qui, si mes calculs et l’échelle de mon plan sont exacts, pourrait presque se trouver au pied du platonien platane. 1967 (date de naissance vraisemblable de mon chauffeur de taxi) : le pont a complètement disparu et, là où coulait l’Ilissos, en amont, se détache, sur un fond gris, la ligne droite et blanche du Leoforos Vasileos Constandinou. Malgré tout, cette année-là, il suffisait encore de parcourir une centaine de mètres sur la gauche (c’est-à-dire en aval) pour que l’eau surgisse de terre au milieu des maisons - une eau que les cartographes avaient colorée en bleu pâle. La promenade était encore possible (Heidegger aurait pu la faire, en 1962), le long du bleu, entre la Piscine Publique et ce que mon guide nomme pompeusement : "l’antique Fontaine Kallirrhoï", au Sud de l’Olympeion. En 1967, il y a beau temps que Kallirrhoï n’est plus sacrée : ce n’est plus qu’un "seuil rocheux", mesuré, répertorié, qui barre le lit de la rivière. Un seuil ?... Un gué ?... J’entends encore la voix Socrate debout sous son platane et montrant du doigt à son disciple le lieu où Borée était censé avoir enlevé Orithye, fille de Roi et "Coureuse des Montagnes" : "non, c’est plutôt en aval, explique-t-il, à deux ou trois stades, à l’endroit où nous passons l’Ilissos pour aller vers le sanctuaire d’Agra..." Les seuils ne sont pas si nombreux dans le lit de la rivière. Le gué d’Agra et la "Fontaine Kallirrhoï" ont tôt fait de se superposer dans mon esprit. Personne ne viendra me contredire. L’image se fait de plus en plus précise. Peu à peu, dans cet entrelac de rues et d’avenues bitumées, je recompose mon paysage : oserai-je encore planter mon platane et mon gattilier au bord de la piscine ?
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En 1998, le plan est rose et la Fontaine a disparu. Un petit rectangle bleu perdu au milieu d’un vert tendre révèle l’unique point d’eau de ce quartier : l’"Olympic Swimming Pool" signale désormais sa présence en anglais. Eau javellisée sur fond de mosaïque turquoise. Les médailles ont remplacé les offrandes, les athlètes ont pris la place des Nymphes - et les gradins celle du platane et de l’arbuste de chasteté... Quant au nom de "Kallirrois", il s’est coulé en lettres noires sur le jaune vif d’une longue avenue. Plus de pont, plus de gué, plus de seuil. L’avenue serpente, au-dessus de la rivière invisible, épousant ses méandres, sur plus de quinze stades à partir de la Fontaine engloutie - trois kilomètres tout en courbes, bordés d’immeubles roses, contournant l’Acropole, jusqu’au moment où l’eau triomphe et se retrouve enfin à l’air libre, où le "Potamos Ilissos" reprend son nom et sa couleur bleue, au nord du Quartier "Kallithea" - Quartier "Bellevue"... Il lui reste si peu de temps à vivre, si peu de mètres à parcourir avant de se fondre dans la mer. Je n’ose pas compter. La rivière est là. Elle existe. Cela me suffit.

Un an après cette matinée "divine" passée au bord de l’Ilissos, Hölderlin adressait à Schiller un fragment de son Hypérion. "Un matériau à l’état brut", qui paraîtra dans la revue Thalia. On y découvre deux jeunes gens, Adamas et Hypérion, se promenant "sous les platanes et les myrtes" sur la rive du Mélès. Le Mélès est le fleuve d’Homère. Le Mélès est l’Ilissos de Smyrne. Le myrte n’est pas un gattilier, mais peu s’en faut. Ses fleurs sont toujours blanches, et sa senteur "caractéristique". "Caractéristique" n’est pas tout à fait "agréable". Pas plus que le gattilier, le myrte ne pousse à Tübingen. Dans la ville d’Homère, comme au bord du Neckar, les saisons se succèdent. Hypérion n’a plus qu’un seul désir : "se retrancher du monde des vivants... et méditer sur les vénérables sentences qu’enfanta le profond génie de la Grèce." On dirait une lettre à Neuffer. Hölderlin et ses Grecs... Qui parle ? Et d’où parle-t-on ? L’air est doux. L’ermite sort de sa retraite : Hypérion choisit une "tranquille journée d’automne" pour se diriger vers un "bosquet", qui lui a toujours été "sacré". Un endroit familier. Il le décrit avec simplicité : "un lieu encerclé de platanes, d’où l’on aperçoit la mer au-delà des rochers du rivage". Où suis-je ? A quoi peut bien ressembler un bois de platanes au bord de la mer ? Tout est à recommencer.
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Videos de Béatrice Commengé (7) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Béatrice Commengé
Maison de la poésie (4 juin 2019) - Texte et Lecture de Alban Lefranc, extrait du Dictionnaire des mots parfaits (dirigé par Belinda Cannone et Christian Doumet, éd. Thierry Marchaisse, parution mai 2019).
Le Dictionnaire des mots parfaits :
Pourquoi certains mots nous plaisent-ils tant ? S?adressant à notre sensibilité, à notre mémoire ou à notre intelligence du monde, ils nous semblent? parfaits. Bien sûr, parfait, aucun mot ne l?est ? ou alors tous le sont. Pourtant, chacun de nous transporte un lexique intime, composé de quelques vocables particulièrement aimés. Après ceux consacrés aux mots manquants et aux mots en trop, ce troisième dictionnaire iconoclaste invite une cinquantaine d?écrivains à partager leurs mots préférés. Il vient parachever une grande aventure collective où la littérature d?aujourd?hui nous ouvre ses ateliers secrets.
Auteurs : Nathalie Azoulai, Dominique Barbéris, Marcel Bénabou, Jean-Marie Blas de Roblès, François Bordes, Lucile Bordes, Geneviève Brisac, Belinda Cannone, Béatrice Commengé, Pascal Commère, Seyhmus Dagtekin, Jacques Damade, François Debluë, Frédérique Deghelt, Jean-Michel Delacomptée, Jean-Philippe Domecq, Suzanne Doppelt, Max Dorra, Christian Doumet, Renaud Ego, Pierrette Fleutiaux, Hélène Frappat, Philippe Garnier, Simonetta Greggio, Jacques Jouet, Pierre Jourde, Cécile Ladjali, Marie-Hélène Lafon, Frank Lanot, Bertrand Leclair, Alban Lefranc, Sylvie Lemonnier, Arrigo Lessana, Alain Leygonie, Jean-Pierre Martin, Nicolas Mathieu, Jérôme Meizoz, Gilles Ortlieb, Véronique Ovaldé, Guillaume Poix, Didier Pourquery, Christophe Pradeau, Henri Raynal, Philippe Renonçay, Pascale Roze, Jean-Baptiste de Seynes, François Taillandier, Yoann Thommerel, Laurence Werner David, Julie Wolkenstein, Valérie Zenatti
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