AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Laurence Tricoche-Rauline (Éditeur scientifique)
EAN : 9782081238190
120 pages
Flammarion (15/05/2010)
3.61/5   27 notes
Résumé :
Faut-il respecter la loi même lorsqu'elle est injuste ? C'est à cette épineuse question que tentent de répondre le père de Diderot et ses enfants réunis à ses côtés, dans une conversation sans cesse interrompue par de nombreuses visites.À mi-chemin entre le dialogue et le conte philosophique, l'oeuvre invite le lecteur à réfléchir à son rapport à la loi, à partir de cas concrets, inspirés du quotidien.Et Diderot de rappeler que l'intérêt collectif ne saurait en aucu... >Voir plus
Que lire après Entretien d'un père avec ses enfantsVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Ah que j'aime ce genre de conte. Et que j'aime la plume de Diderot.
Comme avec Supplément au voyage de Bougainville que j'ai lu il y a peu, encore une fois, Diderot réussit à susciter en moi une foule de questions de réflexions. Mais n'est-ce pas le propre des contes philosophiques ? Divertir tout en faisant réfléchir tout à fait en même temps ? Ces deux effets sont entièrement imbriqués et c'est ce que j'aime particulièrement et dont la magie opère sur moi chaque fois.
Ici le thème sur lequel Diderot nous propose de réfléchir c'est la notion de justice. Sous la forme d'une discussion familiale, et attention pas n'importe quelle famille : les Diderot !
En revanche je n'ai pas réussi à savoir si ce choix était réellement autobiographique ou totalement fictif mais bon qu'importe (la magie des contes !). Donc le père Diderot va faire, en compagnie de ses trois enfants ; la soeur, Denis et le frère chanoine, le récit d'une anecdote de son passé. Une situation fâcheuse dans laquelle il s'est retrouvé et qu'il a soumis à un grand dilemme moral. Aura-t-il dû, ou pas, respecter les dernières volontés d'un défunt au risque de déshériter d'honnêtes et pauvres membres de la famille et faire hériter un méchant ?
Une question sur laquelle la famille aura beaucoup de mal à se mettre d'accord, mais où chacun exposera son point de vue, et c'est bien sûr le jeune Denis qui se démarquera le plus de sa famille : exalté, passionné et révolté, il n'accepte pas l'hypocrisie de la justice qu'il nie les évidences au lieu de les voir. Car à partir du cas du testament ce sera l'occasion de débattre de la notion même de justice et de son fondement ; à savoir qu'elle est la même pour tous. Mais est-ce réellement juste ? le petit Denis nous démontre que non, le sage père — et les divers invités qui se joindront à la conversation — arguent le contraire, que le cas par cas n'est autre que le commencement de toutes les dérives. Et on sent bien qu'ils ont raison, et que si la société peut espérer faire corps et même coexister, il faut des lois communes. Et pourtant ce qu'avance Denis ; non pas se plier à la froide et imparfaite institution mais se fier plutôt à ses sens et à la raison du coeur – semble si évident et si naturel qu'on en vient à se demander comment faire coexister ces deux vérités ? Laquelle est supérieure ? le bien commun au détriment de certains ou le cas seul au détriment du bien commun ? Immense et vaste question.
Toujours dans un style dynamique porté par cette forme du dialogue intégral terriblement efficace permettant de confronter directement les points de vue et au travers de l'usage de l'anecdote qui permet d'aller du particulier vers le général, Diderot donne encore à réfléchir sur nos moeurs, sur notre société, et bien que ce ne soit qu'un conte on ressort de là avec beaucoup de questions dans la tête.
Commenter  J’apprécie          60
Quand il met sa pensée en dialogues, Diderot ne fait pas qu'adopter une forme agréable pour faire passer un message. le dialogue est la forme nécessaire de sa pensée, qui ne cesse de délibérer et de concéder aux thèses adverses ou différentes le bénéfice de la pertinence et de l'intérêt. Or ces thèses adverses sont autant de Diderot que son opinion propre et tranchée : autant dire qu'il se place bien plus haut que les dogmatiques, d'aujourd'hui ou même de son temps. Cela rend la lecture de cet entretien passionnante, mais aussi troublante, car il ne faudra pas chercher des solutions définitives à ces multiples études de cas, où chaque fois, sont pesés le pour et le contre du juste, du légal et de l'injuste. A partir d'une question qui se pose au milieu de la conversation au coin du feu, à Langres, dans la famille de M. Diderot père, en compagnie de ses deux fils, l'abbé et le philosophe, de sa soeur et de voisins de passage, de multiples cas sont passés en revue sur l'inconvénient et l'avantage de se faire justice à soi-même, ou même aux autres, de soigner un criminel recherché, de déshériter des parents misérables au profit d'un héritier déjà riche, etc ... Toute une France concrète et vivante ressurgit, celle de Louis XV, proche de nous, et le conflit entre légalité et justice est aussi une question qui nous intéresse de près. Un très beau livre.
Commenter  J’apprécie          90
C'est un texte qui évoque plusieurs genres. D'abord, la pièce de théâtre - le texte prend la forme du dialogue, du théâtre bourgeois même puisqu'on entre dans l'intérieur d'une famille avec la fille qui veille au bien-être du père, le bon docteur qui conseille le chocolat et le sucre dans le régime du malade, les deux frères qui se chamaillent. Ici, pas de drame, de révélation, ce n'est pas une tragédie avec de grands sentiments, mais presque les scènes ordinaires d'un repas de famille ou d'une causerie auprès du feu. J'aurais aimé d'ailleurs que ces aspects soient plus creusés, qu'on en sache plus sur l'intimité même de ces personnages et de leurs relations.
Mais si ce n'est pas cet aspect qui est au centre, c'est parce que l'oeuvre rejoint plutôt le genre du conte philosophique. Les personnages racontent et commentent différentes situations morales ; l'occasion pour Diderot D exposer des idées centrales pour lui : le refus de l'arbitraire, la condamnation de la misère sociale, la dénonciation de l'hypocrisie et de la cupidité des clercs...
Je ne sais pas en quoi le portrait du père s'inspire ou non du vrai père de Diderot, mais c'est le beau portrait d'un honnête homme au sens du XVIII ème siècle.
Commenter  J’apprécie          50
Comme souvent avec Diderot le fond est profond et la forme legere en effet c'est un dialogue qui nous est offert ici pour exposer les idees de l'auteur: un recit court mais passionnant !
Commenter  J’apprécie          40
Ce livre a un message très profond !
Il faut le lire attentivement pour comprendre chaque phrase se trouvant à l'intérieur. Merci à l'auteur !
Commenter  J’apprécie          30

Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Notice préliminaire.
On lit dans la Correspondance de Grimm, mars 1771:
«M. Diderot, maître coutelier à Langres, mourut en 1759, généralement regretté dans sa ville, laissant à ses enfants une fortune honnête pour son état, et une réputation de vertu et de probité désirable en tout état. Je le vis trois mois avant sa mort. En allant à Genève, au mois de mars 1759, je passai exprès par Langres, et je m'applaudirai toute ma vie d'avoir connu ce vieillard respectable. Il laissa trois enfants: un fils aîné, Denis Diderot, né en 1713, c'est notre philosophe; une fille d'un cœur excellent et d'une
fermeté de caractère peu commune, qui, dès l'instant de la mort de sa mère, se consacra entièrement au service de son père et de sa maison, et refusa, par cette raison, de se marier; un fils cadet qui a pris le parti de l'Église: il est chanoine de l'église cathédrale de Langres et un des
grands saints du diocèse. C'est un homme d'un esprit bizarre, d'une dévotion outrée et à qui je crois peu d'idées et de sentiments justes. Le père aimait son fils aîné d'inclination et de passion; sa fille, de reconnaissance et de tendresse; et son fils cadet, de réflexion, par respect
pour l'état qu'il avait embrassé."
Commenter  J’apprécie          10
- Mais apprenez-moi pourquoi vous ne m'aimez plus.
- Je l'ignore ; tout ce que je sais, c'est que j'ai commencé sans savoir pourquoi ; que j'ai cessé sans savoir pourquoi ; et que je sens qu'il est impossible que cette passion revienne.

"Ceci n'est pas un conte".
Commenter  J’apprécie          10

Videos de Denis Diderot (35) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Denis Diderot
Rencontre avec Christian Grataloup autour de Géohistoire. Une autre histoire des humains sur la Terre paru aux éditions des Arènes, et de L'Atlas historique de la terre (Les Arènes).
Christian Grataloup, né en 1951 à Lyon, agrégé et docteur en géographie, successivement enseignant du secondaire, professeur de classes prépas, formateur d'instituteurs puis de PEGC, maître de conférences à l'université de Reims et finalement professeur à l'université Paris Diderot. Les recherches et les publications de Christian Grataloup se sont toujours situées à la charnière de la géographie et de l'histoire. Une grande partie de ses travaux concernent la didactique, en particulier par la mise au point de «jeux» pédagogiques. Il a notamment publié: Atlas historique de la France (Les Arènes, 2020), L'invention des continents et des océans. Comment l'Europe a découpé le Monde (Larousse, 2020), Cabinet de curiosité de l'histoire du Monde (Armand Colin, 2020), Atlas historique mondial (Les Arènes, 2019), Vision(s) du Monde (Armand Colin, 2018), le Monde dans nos tasses. Trois siècles de petit-déjeuner (Armand Colin, 2017), Introduction à la géohistoire (Armand Colin, 2015).
--
20/03/2024 - Réalisation et mise en ondes Radio Radio, RR+, Radio TER
Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite (https://ausha.co/politique-de-confidentialite) pour plus d'informations.
+ Lire la suite
autres livres classés : dialoguesVoir plus
Les plus populaires : Non-fiction Voir plus


Lecteurs (64) Voir plus



Quiz Voir plus

Philo pour tous

Jostein Gaarder fut au hit-parade des écrits philosophiques rendus accessibles au plus grand nombre avec un livre paru en 1995. Lequel?

Les Mystères de la patience
Le Monde de Sophie
Maya
Vita brevis

10 questions
438 lecteurs ont répondu
Thèmes : spiritualité , philosophieCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..