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Anatole Pons-Reumaux (Traducteur)
EAN : 9782351782866
496 pages
Gallmeister (02/03/2023)
3.98/5   89 notes
Résumé :
Cynthia Bivins rend souvent visite à son père Toxey, dans une maison de retraite de Géorgie.
Un jour, alors que l'Amérique tombe sous la coupe d'un homme politique violent et sans scrupules, Toxey décide qu'il est temps de partager son secret.
L'histoire se déroule des décennies plus tôt. Tout juste sorti de l'adolescence, Toxey se rêve photographe, et ses clichés se vendent déjà à l'épicerie locale. Un jour, une jeune femme est retrouvée morte dans la... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (23) Voir plus Ajouter une critique
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« Là où vont les cerfs, les hommes iront aussi ».

Il y a quelque chose de pourri dans le comté de Mercy Oaks en Géorgie. Sur ces anciennes terres des Creeks et des Lokutta, massacrés et spoliés de leurs terres, les cerfs se meurent peu à peu. Sur les bords de la Lakutta, les espaces naturels s'aménagent et le cadavre d'une jeune femme noire est retrouvé un beau matin.

Issu d'une famille nombreuse qui survit comme elle peut, le jeune Toxey travaille dans l'épicerie locale mais s'échappe dès qu'il peut pour assouvir sa passion de la photo. Même qu'il est plutôt doué. Ce que ne manque pas de remarquer Fiona, naturaliste, qui le prend sous son aile.

Mais leurs excursions vont devenir explorations et entraîner des découvertes bien sombres que le magnat local, sénateur putatif qui a mis la main sur le comté à coups de dollars, préfèrerait conserver bien cachées…

Autant le dire clairement, le Présage de Peter Farris – traduit par Anatole Pons-Reumaux – est un des romans US les plus réussis qu'il m'ait été donné de lire ces derniers temps. Et comme l'a dit avant moi la plus grande chroniqueuse littéraire du Gers (et peut-être même au-delà…), assurément le meilleur Farris.

Parce qu'à côté de la trame romancée, certes classique mais solide, addictive, noire et naturelle, l'auteur ajoute une deuxième couche de réflexion sociétale moderne et touchant juste sur l'état actuel de l'Amérique et de ses élites, qu'on pourrait d'ailleurs sans mal extrapoler à d'autres pays occidentaux, le nôtre compris.

Derrière ses personnages, se cache ces néo-politiciens, préalablement enrichis dans d'autres activités ce qui leur donne l'impression d'une légitimité supérieure ; ces citoyens serviles parce qu'apeurés, devenus lobotomisés et handicapés de toute pensée propre ; et ces lanceurs d'alertes, qui n'ont de cesse que de troubler le silence complice…

Son politicien est abject et populiste… mais si réaliste : « Écoutez, je n'ai pas besoin d'argent. J'en ai déjà gagné plein. (…) J'ai l'intérêt du peuple, de cette nation et notre formidable héritage chevillé au corps somme personne, alors que plein de politiciens cherchent juste à s'en mettre plein les poches. Ces gens-là sont déplorables. Ce sont eux, les escrocs. Ce qui leur faut, c'est une figure paternelle pour leur remonter les bretelles de temps en temps. Ce dont ce pays a besoin, c'est d'une main ferme ».

À travers lui, Farris décrypte le destin qui semble s'offrir à son pays : « Nous sommes au bord d'un précipice, au point de bascule pour une nation tellement scindée et tribalisée qu'elle est irrécupérable. Quand les gens n'ont plus envie de partager le même pays, ni de trouver un consensus autour de faits incontestables, comment continuer à avancer ensemble, sans parler de résoudre plusieurs crises internationales à la fois ? »

Ainsi, après celui des cerfs de la Lakutta, le chaos des hommes semble inéluctable : « L'expérience américaine touche à sa fin, elle mute en quelque chose d'imprévisible. le résultat sera une boucherie comme on n'en a pas vu depuis 1863 ».

À moins… À moins que le futur et ses nouvelles générations fassent mentir le présage et que, peu à peu, comme dans les forêts de la Lakutta, on finisse par revoir un à un des cervidés revenir reprendre la main sur leurs territoires : « La biche lui donnait l'espoir que le troupeau puisse se rétablir ».

Car souvenons-nous que « là où vont les cerfs, les hommes iront aussi » !
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Toxey Bivins est un jeune garçon qui a terminé le lycée, tout en os, pas bagarreur et passionné par la photographie. Jusque-là, tout va bien…

Là où ça se corse, c'est que nous sommes dans le Sud des États-Unis, dans les années 60, que Toxey est Afro-américain et qu'il vit, avec toute sa famille, dans le quartier le plus pauvre de la ville.

Non, l'écriture de l'auteur n'est pas de celle qui cherche à faire pleurer dans les chaumières.

Pas de pathos dans ce récit noir comme le café, juste des faits, des parcours de vie comme il en existe tant dans l'Amérique fracturée par tout ce qui peut diviser des Hommes (couleurs de peau, position sociale, argent,…).

J'avais le présage que ce Présage allait être une bonne lecture et si je ne suis pas capable de vous tirer les cartes, je peux vous présager un excellent moment de lecture avec ce roman noir sombre, profond, qui alterne les récits au passé et au présent, avec un vieil homme souffrant de la maladie à corps de Lewy, qui perd la mémoire et qui tente de raconter un épisode important de sa jeunesse, à sa fille, Cynthia.

Le titre en anglais parlait de "Bone omen" et comme dans ce roman noir, un personnage porte le nom De Bone, on peut dire qu'il y avait un jeu de mot avec son présage à lui et il avait bien raison, ce Bone, personnage étrange, taxidermiste et associé à un politicien aux dents longues, imbu de sa personne, pété de thunes et qui m'a fait penser à un autre politicien, celui avec une touffe orange sur le crâne (et rien dedans).

Oui, dans ce roman noir, les personnages sont réalistes, mais aussi travaillés, sans pour autant que l'auteur doive en ajouter des tonnes.

Ses personnages sont naturels, pas forcés, comme on pourrait en croiser, que ce soit dans les Quarters, le quartier pauvre ou dans l'entourage d'Elder Reese, qui se présente aux élections, sans programme, disant tout et son contraire et ne pensant qu'à attraper les filles par la techa… Son personnage est réussi et fout la trouille.

Dans ce roman noir, il y a du contexte social, des interrogations sur les anciens peuples qui vivaient là avant et qui furent spoliés, sur la nature qui trinque, sur les cerfs malades, sur la corruption dans la politique (et ailleurs), sur le fait que les gens soient fiers d'être incultes, non-lecteurs, sur la lobotomisation des masses, sur le racisme, sur la difficulté de trouver du travail.

Il y a aussi une grosse réflexion sur le fait que lorsque que certains fous accèdent au pouvoir, ils peuvent transformer le pays en zone de non-droit, laisser les gens faire la loi avec leurs armes, tirer à vue, instaurer des couvre-feux et jouer avec les médias, jouer avec les faits et transformer tout en attaque de sa petite personne, sous les regards énamourés et enfiévrés de ses supporters… Certains passages dans le présent font peur, très peur.

Le Présage est un roman noir qui claque comme un coup de fusil, qui pète à la gueule, qui fait peur, réfléchir, tout en nous entraînant dans une nature sauvage, avec des personnages qu'on n'oubliera pas de sitôt… Un portrait d'une Amérique réaliste, même si on n'a pas envie de voir se réaliser le présage, funeste, d'une Amérique aux portes d'une guerre fratricide…

Bref, c'était une lecture marquante, une lecture qu'il faut ensuite digérer, en se demandant ce que l'on va bien pouvoir lire ensuite… Un autre roman de Peter Ferris, sans aucun doute !

Lien : https://thecanniballecteur.w..
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Divisé en quatre parties, le roman commence par un prologue en italique. On y voit C. T. Bone, du sang jusqu'aux coudes, confier un nourrisson à sa mère. Il a aussi apporté du lait, des biberons, etc. L'enfant dormira dans le berceau qui a servi pour C. T. et Hiram, son frère. On comprend que la mère de l'enfant, « la fille », est morte. On retrouvera périodiquement ces passages en italique qui nous éclaireront sur les relations de C. T. et de « la fille ». On rencontre ensuite Cynthia Bivins qui rend visite à son père, Toxey, dans une maison de retraite médicalisée : il est atteint d'une forme de démence qui perturbe sa mémoire et qui modifie son caractère. Il est parfois conscient de son état et il veut absolument « lui dire quelque chose » avant qu'il ne soit trop tard… On retrouve alors Toxey jeune homme, dans le comté de Mercy Oaks en Géorgie. Il travaille dans une épicerie et il a une passion pour la photo. le patron du magasin, un Blanc, conscient de son talent, vend ses photos aux clients et aux touristes. Une rumeur se répand dans le village : on a trouvé le corps d'une fille « de couleur » dans la réserve Lokutta...
***
Dans ce roman très noir, Peter Farris met au jour les pires aspect des États-Unis. La Géorgie est un État ultra-conservateur, religieux et rigoriste. le racisme y est toujours bien vivant, même si on tente parfois de sauver les apparences, et la mort d'une inconnue noire présente assez peu d'intérêt. Elder Reese, richissime héritier qui se lance en politique alors que Toxey est encore un tout jeune homme, rappelle évidemment un autre politicien, bien réel celui-là, par son populisme, sa totale absence d'éthique, son sexisme et… la couleur de ses cheveux. Sa famille a acheté une partie des anciennes terres indiennes qui constituaient la réserve, et personne n'apprécie de voir Frida, vétérinaire et naturaliste originaire du Nord, arpenter la région en compagnie de Toxey qu'elle a engagé pour prendre des photos. La fortune du clan Reese, leurs magouilles et leur amoralité rendent toute forme de résistance à leur pouvoir difficile et dangereuse. le récit laisse une grande place à la nature et à l'importance de sa sauvegarde. Il est épisodiquement question d'une maladie qui touche les troupeaux de cervidés, affection étrange au point d'être devenue une sorte de légende. J'avoue que j'aurais aimé en savoir plus à ce sujet. J'ai beaucoup aimé ce formidable roman bien que j'aie trouvé parfois difficile de m'y retrouver dans la quantité de personnages gravitant autour des Reese, leurs sbires et leurs proches à qui s'ajoutent les commerçants, les élus, etc., ce qui m'a dissuadée de mettre cinq étoiles. N'empêche : le Présage est un roman passionnant et brûlant d'actualité...
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Peter Farris, en tant qu'auteur de roman noir, s'inscrit dans la tradition du polar politique, porteur d'un discours critique, voire totalement contestataire. Son message est percutant et inquiet, au point de prendre parfois le dessus sur la trame romanesque.
Par un léger saut dystopique, il nous projette dans une Amérique en plein chaos et au bord de la guerre civile. Un homme est responsable de cette crise, un personnage mégalomane, narcissique, corrompu, manipulateur et populiste. Elder Reese, avatar évident de Donald Trump. A coups de théories du complot, de mensonges et d'incitation à la haine, il alimente une violence qui menace gravement la démocratie.

Mais Peter Farris, en écrivain aguerri, ne laisse pas sa colère et ses inquiétudes noyer la trame de son roman. Sans quitter des yeux son infâme personnage, il nous fait rencontrer Toxey, alternativement vieillard atteint d'Alzheimer qui a des secrets à révéler à sa fille ou jeune homme passionné de photographie.
Dans la réserve de la Lokutta, en Géorgie, à l'époque où un certain Elder Reese envisageait une carrière politique, on découvrit le cadavre d'une jeune fille noire et la disparition du bébé qu'elle portait. L'enquête fut bâclée, d'autant que la jeune fille était noire et que les rumeurs insinuaient que la richissime famille Reese pouvait être impliqué dans l'affaire.
Mais le jeune Toxey avait photographié la jeune femme enceinte au cours d'une fête foraine et des personnes plus ou moins bien intentionnées veulent récupérer la photo.

Autour de cette trame très simple, de nombreux événements et de nombreux personnages viennent enrichir le propos et donner vie à cette petite ville oubliée. La famille de Toxey, sa mère dépressive , son père alcoolique et ses soeurs avec leur marmaille expriment les difficultés des gens ordinaires qui se débrouillent comme ils peuvent avec leur vie mais sont liés par des liens puissants.
Le taxidermiste, capable du pire comme du meilleur, montre des qualités insoupçonnées en protégeant la jeune fille et son bébé. Tout comme Fiona la naturaliste qui se prend d'amitié pour le jeune photographe.
L'auteur évoque également ses préoccupations écologiques face à ces maladies qui touchent les cervides et qui, par analogie, suggèrent la menace qui pèse sur la société américaine. Par le même glissement analogique, il rend hommage aux populations indiennes disparues qui possédaient autrefois ces terres.

Les personnages secondaires developpent des personnalités riches et complexes et permettent aux lecteurs de ne pas sombrer dans le désespoir en assistant a l'énorme crise politique orchestrée par l'infâme Elder Reese, le seul personnage définitivement du côté obscur.
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Dans la réserve naturelle de la Lokutta, le cadavre d'une jeune femme est retrouvé. Alors que tous les habitants se demandent bien qui est cette mystérieuse inconnue, Toxey, jeune noir qui se reverait photographe professionnel, se retrouve mêlé malgré lui à cette sinistre affaire. Au même moment, un homme d'affaires aux intentions peu louables décide de se lancer en politique.

Peter Farris, l'auteur des excellents le diable en personne» et «Les mangeurs d'argile» n'en finit plus de livrer des bon gros romans poisseux dans la grande tradition littéraire du Deep South.

Le présage, son dernier roman en date que Farris est venu défendre il y a quelques semaines à Quais du Polar, mêle avec une belle habileté une enquête riche en rebondissements et une réflexion politique très intéressante sur la montée en puissance des mouvements populistes ancrés au coeur même de l'Amérique dite "profonde".Dans ce roman captivant de bout en bout, porté par une construction narrative ambitieuse et menée avec brio, la fiction flirte étrangement avec le réel.

Les dérives du pouvoir politique incarné par Elder Reese évoquent forcément les affres de Donald Trump, tout aussi outrancier et abject que son double de papier, exception faite dans le récit de Farris, les folles ambitions de cet homme politique prêt à tout sont soudainement mises à mal par la découverte d'un corps d'une femme enceinte retrouvée sans vie dans la réserve naturelle de Mercy Oaks, dont il est propriétaire des bois attenants.

Le présage est un roman noir particulièrement brillant au style impeccable, qui jongle habilement entre passé et présent et qui surtout réussit à éclairer les multiples visages sectaires des maux (corruption, lobby des armes, racisme...) qui rongent les États-Unis.

Sans aucun doute, et de l'avis même de l'auteur qu'on a eu la chance de croiser sur Lyon, le meilleur roman de son auteur !
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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critiques presse (1)
LeSoir
15 mai 2023
Peter Farris nous replonge dans les pires heures d’une Géorgie trop actuelle.
Lire la critique sur le site : LeSoir
Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
Il suffit de regarder l'histoire pour savoir ce qui se passe quand les gens s'abaissent à déshumaniser leurs voisins. ( p 458 )
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-- .... Tu sais qu'une bibliothèque peut te dire beaucoup de choses sur une personne.
-- Quoi par exemple ?
-- Par exemple, si tu rencontre quelqu'un qui ne lit pas, mon chou, ce quelqu'un vaut pas la peine.
-- Comme mon père.
-- Comment ça ?
-- Il ne comprend pas que des gens puissent lire pour le plaisir. Il trouve que c'est une perte de temps.
-- Comment il passe le temps, alors ?
-- Il picole.
( p 94 )
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Malgré ce que peuvent dire les gens, la vie n'est pas une méritocratie. ( p 180 )
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Pas besoin d’eux [les journalistes et la presse], dit Edler. Qu’ils aillent se faire foutre. C’est une bande de rats hypocrites, de toute façon. Le truc, c’est de se mettre dans la poche les riches et les pigeons, Lewis. C’est comme ça qu’on prend le pouvoir dans ce pays. En convainquant les gens de ne pas croire un seul mot de ce qu’ils voient ou de ce qu’ils lisent, et que seule ma parole compte.
(p. 126)
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Les gens ne veulent pas des faits. Ils veulent être remués. Il leur faut des idées qui tiennent sur un autocollant de voiture pour qu’ils puissent hocher la tête et dire, “bien parlé”. Ainsi va le monde : les gens choisissent la vérité qu’ils veulent, et au diable le reste.
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