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EAN : 9782072693922
272 pages
Gallimard (28/02/2019)
4.25/5   6 notes
Résumé :

«L’âme humaine […] est comparable à ces créatures fabuleuses – la Chimère, Scylla ou Cerbère – qui unissent en un seul corps les formes de plusieurs espèces d’êtres vivants.»

Platon (env. 428-347 av. J.-C.) fait aujourd’hui figure de mythe. Fondateur de nombreux concepts dont nous sommes les héritiers, il apparaît comme le père de la philosophie moderne. Mais quel homme fut-il? Remarquable par son physique athlétique et son esprit brillant, c... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
De cet ouvrage je vais vous dévoiler l'épilogue tout de go, sans masquer le texte : Platon est mort. Car c'est bien d'une biographie dont il s'agit, que nous sert Bernard Fauconnier. Celle d'un homme qui fait encore parler de lui de nos jours. Un homme qui a réussi le tour de force de survivre à 25 siècles de ce que ses congénères sauront faire de mieux au fil des siècles: détruire. Ses écrits sont miraculeusement parvenus jusqu'à nous, contemporains d'un "siècle qui sera religieux ou ne sera pas" à en croire Malraux. Religieux, mais pas philosophique. Les accapareurs de conscience sont passés par là.

Et qui plus est, double prouesse, Platon en a fait survivre un autre du même coup : le bien nommé Socrate. Lequel pour ce qui le concerne s'était refusé à consigner par écrit le fruit de ses réflexions, privilégiant la rhétorique à l'écriture. Préférant haranguer son auditoire, pourvu qu'il fût composé de jeunes éphèbes, plutôt que s'échiner à gratter le papyrus. Question d'affinité.

Lorsque Platon se laisse subjuguer par le vieux Socrate, Athènes vient de conclure par une défaite son démêlé de plusieurs décennies avec Sparte. Les citoyens de cette dernière étaient donc définitivement plus … spartiates que leurs adversaires, amollis quant à eux par un système politique les versant aux discours et causeries plus qu'à la cohésion : la démocratie.

Platon avait en réalité une conception bien à lui de la république. Celle du règne d'un roi philosophe. Un roi qui s'imposerait à ses sujets par la hauteur de son raisonnement, seul à la gouverne d'un navire qui voguerait sur les flots de ce qu'on appellera plus tard l'humanisme, lorsque la Renaissance aura remis la Grèce antique au goût du jour. Un souverain éclairé par la morale et la science donc, mais souverain quand même, qui aura soin de convaincre ses sujets de l'effacement nécessaire des intérêts particuliers devant la raison.

Le Banquet, La République, Phédon, le Sophiste, Phèdre, Gorgias, autant de ses oeuvres magistrales qui l'ont fait connaître des férus de philo. Les autres auront sans doute entendu parler d'amour platonique sans trop savoir ce que cela recouvre. Un peu sur la défensive quand même. Conception de l'amour défendue par le célèbre philosophe, sujet phare du Banquet, prônant une élévation vers le Bien " en substituant le monde des Idées aux pulsions irrationnelles". Platonique que nombre de jouisseurs, pas forcément gourmets, auront tôt fait d'écrire en deux mots, plat tonique, pour ne rien sacrifier à la fringale de leur sens. Platon se serait peut-être bien attablé quand même devant cette perspective de bonheur. Philosophe certes, mais pas moins homme.

Il y a un gouffre entre lire la biographie d'un philosophe et se frotter à ses oeuvres. L'exercice est plus périlleux et requiert de l'aguerrissement à la joute philosophique. Mes études dans ce domaine s'étant conclues au point final de ma copie du bac, je me suis cantonné à l'aspect historique de l'oeuvre, m'interrogeant sur ce qu'une culture de transmission essentiellement orale à l'époque a pu faire survivre de ses géants de la pensée. Averti que j'étais par une phrase retenue de Paul Veyne, lequel a certainement été plus assidu que moi sur le banc des cours d'histoire et nous avoue dans son ouvrage Comment on écrit l'histoire que cette dernière "est connaissance mutilée. Un historien ne dit pas ce qu'a été l'empire romain ou la résistance française en 1944, mais ce qu'il est encore possible d'en savoir." Me voilà conforté par cette précaution oratoire que je ressers volontiers quand ma culture est mise en défaut. Heureusement que je me suis pris d'amitié pour la lecture, demandant à Platon de me pardonner d'avance, lui qui n'avait que mépris pour la poésie et les arts.

Belle et bonne biographie à mes yeux qui aborde juste ce qu'il faut de thèmes philosophiques pour que mon entendement ne perde pas pied : la difficile question de l'Un et du multiple, l'être et le non-être, puisqu'il paraît que le non-être est. Il en est de plus contemporains, de philosophes, qui ont résolus de traiter le problème de l'être par l'absurde. Je ne sais pourquoi, je me sens plus d'affinité avec eux. Platon avait-il encore toutefois à mes yeux le mérite de trouver grâce en la science mathématique en quoi il trouvait une synthèse harmonieuse avec l'univers et le cosmos, prenant garde tout de même de ne pas vexer les dieux. La philosophie n'exclut pas la prudence.

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Platon doit son statut de père de la philosophie moderne à la fois à la profondeur de ses idées recouvrant une multitude de sujets mais aussi au fait que la plupart de ses écrits ont été conservés jusqu'à nos jours.

La lecture de ce petit livre de Bernard Fauconnier dans la collection folio biographie permet de mieux comprendre à la fois l'homme et les idées du philosophe sans doute le plus connu du grand public. On s'aperçoit à la lecture d'un tel ouvrage (à la fois biographie et introduction à la philosophie platonicienne) qu'il est très utile de connaître la vie d'un homme pour mieux comprendre ses idées et ses actions. Les biographies des grands hommes permettent de discerner ce qui dans leur oeuvre ou leur comportement relève d'une intuition pure de ce qui relève de l'expérience vécue.

Bien qu'il soit Grec et philosophe il serait erroné de considérer Platon comme un défenseur ou inspirateur de la démocratie. Il y était opposé. Et cette opposition s'est peut-être formée en réaction à la condamnation injuste de son précepteur Socrate par l'assemblée athénienne qui voulait protéger les intérêts du régime au détriment de l'émergence de la vérité. Platon conforme à son idéal de justice, d'équité et de vérité préconisait un gouvernement composé de philosophes . Il attachait beaucoup d'importance au langage source de tous les maux quand il n'est qu'un instrument de pouvoir pour les sophistes. Il cherche à établir une pensée de vérité, un système basé sur la raison qui s'oppose à l'influence des discoureurs irresponsables, dont les mots et les raisonnements fallacieux, aujourd'hui encore, sont les armes sournoises du populisme et de la démagogie. Cette exigence s'exprime au travers de sa théorie des idées selon laquelle le monde matériel n'est que le reflet imparfait de celui des idées (théorie exprimée dans le fameux mythe de la caverne). Platon nous dit qu'il faut se dégager de la tromperie des sens et des apparences pour accéder au monde de la lumière qui dépasse le monde matériel. le monde des idées suppose une âme externe au corps. Il n'est pas excessif de dire que Platon fut le fondateur lointain du christianisme. Lui-même était considéré comme d'origine divine au même titre que beaucoup de grands hommes de l'époque (Pythagore, Alexandre le Grand, etc.). le mythe d'Er raconté par Platon dans son livre la république a largement inspiré les fondateurs et les théologiens du christianisme avec son idée selon laquelle récompense ou punition attendent les défunts selon qu'ils se seront bien ou mal conduits pendant leur vie terrestre.

Ce qui est paradoxal c'est qu'à l'époque les Grecs ne croyaient pas vraiment aux mythes, ils les utilisaient comme des outils pédagogiques pour comprendre et expliquer le monde à défaut de théories scientifiques. Au cours des siècles, les mythes relatés dans la bible ont été reçus par certains comme une réalité. Aujourd'hui une interprétation différente commence à se faire jour et beaucoup considère à l'instar de Borgès que la théologie est une catégorie de la littérature fantastique (ce qui n'empêche nullement la croyance en Dieu).

Au cours de la lecture de ce livre et par mes lectures parallèles j'ai noté quelques citations intéressantes : « Aucun homme ne peut, pas sa nature, régler en maître absolu toutes les affaires humaines sans se gonfler de démesure et d'injustice » Aristote dans « Métaphysique ».
« Platon, à l'instar de Socrate, croyait que, si nous parvenions à la définition parfaite par le dialogue, les dissensions politiques disparaîtraient ».

Les idées de Platon peuvent se ranger sous la bannière de deux principes fondamentaux :
1) Seuls celui ou ceux qui détiennent la connaissance profonde des choses (les philosophes d'après Platon) peuvent gouverner et diriger les cités.
2) Toutes les institutions ou les comportements doivent être guidés par la justice. Pour Platon la justice était la vertu maîtresse, celle qui ordonne toutes les autres (cette idée sera reprise par le philosophe américain John Rawls 2500 ans plus tard).

Tous les maux de la politique proviennent, selon Platon, du fait que ce sont les opinions, les passions et les intérêts, et non la raison, qui gouvernent les décisions des humains. Ce message fossile provenant d'une époque si lointaine me semble d'une grande actualité.

J'allais oublier de rappeler que Platon est le premier philosophe à avoir accordé autant d'importance à la question de l'éducation (il a fondé l'Académie, considéré aujourd'hui comme la première université), c'est tout cela qui fait de lui un philosophe incontournable. Cet enthousiasme pour la philosophie platonicienne doit toutefois être pondéré, car certains peuvent à juste titre reprocher à l'État platonicien d'être un État totalitaire parce qu'il aspire à contrôler tous les aspects de la vie humaine, y compris les sentiments, les émotions. La place insuffisante laissée aux femmes dans la cité pourrait également être un sujet de critique.

– « Platon », Bernard Fauconnier, Folio biographies (2019) 263 pages.
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Platon nous oblige à penser au delà de nous-mêmes. La loi n'est pas toujours contradictoire avec la nature. Il faut habiter cette terre avec mesure et hauteur.
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