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Ceux de 14 tome 4 sur 4
EAN : 9782290099087
224 pages
J'ai lu (27/08/2014)
4.04/5   36 notes
Résumé :
LES ÉPARGES

On dit que nous faisons la guerre : et c'est vrai que nous l'avons faite. Cela n'a pas duré longtemps. Presque tout de suite, c'est elle qui nous a ^pris, et conduits nous ne savons vers où.

- Alors, voilà qu'on grimpe là-haut demain ?
- Oui, demain.

Ce dialogue est échangé le 17 février au soir entre le lieutenant Genevoix et l'un de ses hommes. Le lendemain à deux heures, les énormes mines creusées pa... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Un livre puissant, d'une beauté douloureuse.
Ceux de 14, le récit autobiographique de Maurice Genevoix, est un texte majeur qui témoigne avec force du calvaire vécu par les poilus dans les tranchées durant la première guerre mondiale, il prend aux tripes, plonge le lecteur dans l'enfer des combats et de la vie quotidienne, saisi sur le vif des dialogues, des échanges de regards… le décor est immédiatement planté, l'atmosphère restitué en quelques lignes, sans fioritures, ses descriptions sont précises, elles captent l'émotion du lecteur par un style vif.
Bernard Puchulu a sélectionné de nombreux extraits que j'aurais aimé tous mettre en citation tant je suis émue après la lecture de ce livre.
Les dessins de Bernard Puchulu sont d'une grande finesse, sa palette de couleurs est restreinte, avec une dominante de couleurs sombres, entre gris et marron, rehaussés de violet, de bleu gris et d'orange et il a réalisé un travail exceptionnel sur l'éclairage de chaque scène : la vie dans les tranchées apparait dans toute sa cruauté et sa dureté. Les cadrages sont remarquables, les visages, les corps et les regards sont troublants de vérité, de souffrance et d'humanité.
Chaque dessin fait entrer le lecteur encore plus profondément dans le texte bouleversant de Maurice Genevoix, le résultat est superbe.
Ce livre est comme un cadeau pour moi, toujours accompagnée par le souvenir affectueux de mon grand-père maternelle, décédé lorsque j'avais quatorze ans, revenu de quatre ans de combats et blessé à trois reprises, mais si peu disert sur cet épisode tragique de sa vie. Alors, Ceux de 14, si intimement et brillamment illustré me permet de lever un peu le voile sur ses lourds souvenirs.
J'ai lu ce livre avec une vive émotion et beaucoup d'admiration pour Maurice Genevoix, Bernard Puchulu et Ceux de 14. J'ai un énorme coup de coeur pour ce livre que je vais présenter aux enfants de CM2 de l'école de mon village lorsqu'ils aborderont la première guerre mondiale et le prêter à de nombreux proches.
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Nausée et respect à la lecture de ce témoignage de première main du jeune lieutenant Genevoix dans l'enfer des tranchées des Eparges en 1915.
Sensation éprouvante de "voir" L Histoire dans toute sa crudité, sans la distance de la fiction, de rencontrer réellement avant qu'un obus ne les emporte tous ces hommes nommés un à un et évoqués dans leur singularité et le courage ahurissant dont ils ont été contraints de faire preuve.
Emotion profonde face à la sensibilité assumée de l'auteur, qui n'en n'assume pas moins sa posture de commandement ni ne perd sa lucidité quant à l'absurdité absolue de "tenir", plusieurs jours d'affilée sous un déchaînement de bombes, une position qui sera perdue le lendemain.
Une lecture éprouvante et majeure.
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"Les Éparges" est un des romans réuni dans l'ouvrage "Ceux de 14" avec "Sous Verdun", "Nuits de Guerre", "Au seuil des guitounes" et "La Boue".

Nouvelle présentation du site internet consacré à "Ceux de 14" , aux "Éparges" de Maurice Genevoix et des fictions ou ouvrages historiques sur la Grande Guerre :

http://ceuxde14.wordpress.com/
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Jean Norton Cru, qui a la dent dure et l'objectivité austère, le tient pour un des écrivains-soldats le plus talentueux parmi ceux qui ont vécu les horreurs de la grande guerre, y compris pour ses qualités littéraires. Cela frappe le lecteur dès les premiers paragraphes où la légèreté du style contraste avec les abominations que les soldats ont vécues. Je n'avais pas lu ce livre, malgré sa renommée et sa célébrité. J'ai pensé aux premières séquences de “Il faut sauver le soldat Ryanˮ où la brutalité explose aux yeux du spectateur. Il en est de même avec Genevoix qui réussit ses descriptions en conjuguant un réalisme froid et une compassion sans borne pour ses “collègues de malheur. La litanie des morts, des blessés, des disparus, des déchiquetés, taillés en pièces… ne cesse jamais. Et pour rien. Un livre majeur assurément.
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Maurice Genevoix, jeune officier commandant la 7eme compagnie au 106eme RI, nous témoigne de son expérience au front,
en février 1915 durant la bataille des éparges. Il nous décrit le quotidien du fantassin dans la boue, les camarades assassinés atrocement et méthodiquement par les pluies d'obus. La peur, l'attente de l'assaut, l'attente de la relève, l'ennui, le grotesque et l'absurdité des combats, les souvenirs cruels qui restent accrochés à la mémoire.
Ce livre est un témoignage littéraire sur la première guerre mondiale, bouleversant jusqu'aux dernières pages.
L'armée française a perdu 6102 hommes durant des attaques et contre-attaques qui ont duré trois mois pour réussir à maintenir faiblement sa position sur la crête des éparges.
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Citations et extraits (12) Voir plus Ajouter une citation
Couché sur une civière, dans le réduit encombré d’outils et de planches, Sicot a gardé les yeux ouverts.
A la lueur d’une chandelle qui est là, sa face exsangue semblerait morte, n’était ses yeux toujours vivants. Il me voit, me reconnaît, et sans rien dire, pendant que je regarde, il pleure à grosses larmes lentes d’être sûr qu’il va mourir.
« A revoir, Sicot… tu seras ce soir à l’hôpital de Verdun… On y est bien… Il y a des toubibs épatants… »
Les larmes roulent, de ses yeux déjà éteints.
Sous la montée brillante des larmes, ses prunelles ne vivent plus que d’une dernière clarté : la certitude et la tristesse de mourir.
Il fallait bien sortir de cette petite casemate, ne plus voir ce corps étendu, cette force jeune, cette simple bonté, tout cela qui était Sicot, et qui mourait lentement, depuis le claquement grêle d’une balle au bord de l’entonnoir 7.
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20 février ( 1915 )

Un grand balancement de la terre et du ciel à travers le, paupières cuisantes; du froid mouillé; des choses qu'on retrouve dans l' aube blême, les unes après les autres, et toutes; personne de tué dans les ténèbres, personne même d'enseveli malgré l'acharnement des obus: la même terre et les mêmes cadavres; toute la chair qui frémit comme de saccades intérieures, qui danse, profonde et chaude, et fait mal; même plus d'images, cette seule fatigue brûlante que la pluie glace à fleur de peau: et c'est un jour qui revient sur la crête, pendant que toutes les batteries boches continuent de tirer sur elle, sur ce qui reste de nous là-haut, mêlé à la boue, aux cadavres, à la glèbe naguère fertile, souillée maintenant de poisons, de chair morte, inguérissable de notre immonde supplice.

Est-ce qu'ils vont contre-attaquer encore ? Ils ne tirent que sur nous: c'est lâche. Nous savons que le colonel, chaque fois qu'il monte et redescend, téléphone vers le Montgirmont: " Qu'on relève mes hommes! Ils sont à bout! Si les Boches contre-attaquent encore, ils pourront venir avec des gourdins, avec leurs poings nus... " C'est ce que nous pensions, nous, l'autre jour. Ce matin, nous le pensons encore ; mais nous ne le croyons plus. Nous sommes très las, c'est vrai; on devrait nous relever, c'est vrai. Nous sommes presque à bout; presque... Et pourtant, ce matin encore, on a entendu cracher les canons-revolvers de Combres et claquer des coups de mauser: une nouvelle contre-attaque, que nous avons repoussée.

Il ne faut rien exagérer: au-dessous de nous, de l'autre côté du parados, un caporal de la 8e fait mijoter du cassoulet sur un réchaud d'alcool solidifié. Quelques hommes, de la 8e aussi, sont descendus près de lui; l'un d'eux parle du kiosque de sa soeur, marchande de journaux à Paris: " pour qu'elle comprenne les trous qu'ils font, explique-t-il, j'lui écrirai qu'on pourrait y loger au moins deux kiosques comme le sien. Et ça s'ra pas bourrage de crâne, hein, c'est-i' .? vrai "

Le colonel Boisredon a téléphoné une fois de plus: " Trois cents tués au régiment; un millier de blessés; plus de vingt officiers hors de combat, dont dix tués; des tranchées vides, ou du moins "tactiquement" vides; la crête perdue si les Boches contre-attaquent encore... " Le colonel Tillien a répondu: " Qu'ils tiennent. Qu'ils tiennent quand même, coûte que coûte. "

Comme s'ils savaient, les Boches répondent eux aussi. Et , c'est pire, au long du temps martelé d'obus énormes, de chutes sombres et multipliées. Le grand caporal a éteint son réchaud: il est parti, les autres avec lui. On redevient ce qu'on était hier, cette nuit, un peu plus las encore, sans étonnement d'être si las. Et malgré cette fatigue dont nous avons les reins brûlés, une lucidité vibrante rayonne de nous sur le monde, touche doucement et nous donne d'un seul coup toutes les choses que nous percevons, nous les impose entières, si totalement que nous souffrons surtout de cela, de ce pouvoir terrible et nouveau qui nous oblige à subir ainsi, continuellement et tout entières, la laideur et la méchanceté du monde.
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Une plaque d'acier blindé monte très haut et retombe, comme un couperet de guillotine. Souesme passe devant moi, la face plâtrée de boue jaune, les deux mains sur les reins; derrière lui, Montigny ; derrière encore, Jaffelin: c'est bon; allez-vous-en, ensevelis, blessés, démolis. Je regarde bien, au passage, la crispation de vos visages, l'angoisse presque folle de vos yeux, cette détresse de la mort qui reste vacillante au fond de vos prunelles, comme une flamme sous une eau sombre... Quel sens ? Tout cela n'a pas de sens. Le monde, sur la crête des Éparges, le monde entier danse au long du temps une espèce de farce démente, tournoie autour de moi dans un trémoussement hideux, incompréhensible et grotesque.

Chez toi, Porchon : l'ample Beauce, les champs de blé au crépuscule; les corneilles dans le ciel frais, entre les deux tours de Sainte-Croix... Chez nous, Porchon : la Loire au fil des berges lentes... Quel sens ? Pourquoi ? Des hommes crient dans l' entonnoir 7 entre les rafales d'obus. Encore ! Et de sombres débris soulevés dans la fumée, et leur chute mate heurtant la boue...

C'est alors que ce 210 est tombé. Je l' ai senti à la fois sur ma nuque, assené en massue formidable, et devant moi, fournaise rouge et grondante. Voilà comment un obus vous tue. Je ne bougerai pas mes mains pour les fourrer dans ma poitrine ouverte; si je pouvais les ramener vers moi, j'enfoncerais mes deux mains dans la tiédeur de mes viscères à nu ; si j'étais debout devant moi, je verrais ma trachée pâle, mes poumons et mon coeur à travers mes côtes défoncées. Pas un geste, par pitié pour moi ! Les yeux fermés, comme Laviolette, et mourir seul.
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Quelque chose de lourd a cogné dans mes jambes, et j’ai fléchi, les jarrets coupés nets.
« Par-dessus ! En avant ! »
C’est la tête de Grondin qui a cogné dans mes jambes.
Je me suis retourné ; sans horreur ; et j’ai vu le corps écrasé, enseveli déjà sous l’immense piétinement, avec encore à ras de terre, la plaie glougloutante du cou.
Nous marchons toujours, soulevés par l’air qui tressaute, bousculés par les parois dansantes du boyau, souffletés de boue, de gravats, de flots d’air rougeâtre et brûlants.
Nous ne distinguons plus. Deux fois, trois fois de suite, nous avons vu la terre s’entrouvrir et cracher des pierres qui flambaient. Nous courons pliés en deux, poursuivis par les 75, par ces couperets sifflants qui rasent, terribles, les bords du boyau, par ce seul 75 qui tire trop court, qui frappe toujours à la même place, à notre droite.
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Elles sont infimes, par les gouttes de la bruine, par les écorchures de nos mains gercées, par le tintement d'une gamelle qu'on heurte, par la respiration imperceptible de Lardin ; mais si grandes, si monstrueuses qu'elles soient par l'étalement ignoble des cadavres, par le fracas sans fin des plus lourdes torpilles, elles ne peuvent l'être assez pour dépasser notre force de sentir, pour l' étouffer enfin, aidant notre immense fatigue. Plus nous sommes fatigués, plus notre être s'ouvre et se creuse, avide malgré nous, odieusement, de toute laideur et de toute méchanceté. Que tombent encore ces milliers d'obus, et pour n'importe quelle durée ! Entre les 77, les 150 et les 210, notre ouïe distingue au plus lointain les éclatements. Qu'ils sifflent plus raide encore! Que tout arrive ! Que tous ceux qui doivent être blessés le soient dans cet instant, et s'en aillent ! Que tous ceux qui doivent être tués cessent enfin d'être condamnés !

Le dernier obus qui est tombé dans l'entonnoir 7 a blessé Porchon à la tête. Quelqu'un nous l'a crié par-dessus la levée de terre: enseveli près de Rebière, dégagé avec lui, mais seul blessé d'un éclat léger, il est descendu au poste de secours, à cause du sang qui lui coulait dans l'oeil. Il y a longtemps déjà... Descendrai-je à mon tour, blessé comme lui d'un éclat heureux, mon sang coulant assez pour me contraindre à descendre ?..II ne voulait pas, d'abord; mais il n'y voyait plus, aveuglé par ce ruissellement, et Rebière lui disait: " Descends... Descends, mon vieux... Tu es idiot. "
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Videos de Maurice Genevoix (28) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Maurice Genevoix
https://www.laprocure.com/product/1049468/genevoix-maurice-rrou
Maurice Genevoix, illustrations Gérard Dubois rroû Éditions La Table ronde
« On craque pour ce livre illustré de rroû de Maurice Genevoix aux éditions La Table ronde. Une petite merveille illustrée par Gérard Dubois qui est multi-primé en tant que dessinateur pour le Newyorker et le New York Times entre autres. Évidemment, Maurice Genevoix, c'est celui qui a été connu et reconnu pour Ceux de quatorze où il décrivait ses blessures de guerre et la guerre en elle-même, qui est un texte majeur en littérature française, puis qui avait eu le prix Goncourt pour Raboliot. Et ce texte-là, magnifique, n'est pas seulement l'histoire d'un chat, c'est bien plus que ça... » Marie-Joseph, libraire à La Procure de Paris
+ Lire la suite
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