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EAN : 9782070702787
280 pages
Gallimard (21/02/1985)
3.62/5   39 notes
Résumé :

Le grand désert, ses zones vivrières, pastorales, pétrolières, nucléaires, frontalières. La guerre, le viol de vivants et de morts, un crime passionnel, des incestes, la faim. Un bordel de femmes pour les soldats, un bordel de garçons pour les ouvriers ; contigus et communicants : quelques heures d'une exaltation sexuelle sans précédent. Epouses, fiancées, soeurs, libres, installées sur les limites du... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Plus que vraiment lu, disons que je l'ai parcouru, en lisant certaines pages en diagonale, tant chaque page se ressemble. J'avais beaucoup aimé "Tombeau pour cinq cent mille soldats", il y a quelques années, pour sa description de la guerre et ses horreurs, même si l'auteur se laisse aller souvent à son imaginaire. Ici, même si le contexte est le même, à savoir la guerre d'Algérie, l'auteur lui-même y ayant participé, je n'ai trouvé que des scènes de sexe dans toutes les combinaisons possibles, de la scatologie à la zoophilie, qui ne sont pas sans rappeler les textes de Sade. On peut y déceler une certaine poésie, comme le souligne Michel Leiris en postface, mais je n'y vois qu'une suite de scènes dénonçant, certes, la guerre et l'inhumanité, et sans réel fil conducteur, on ne comprend pas très bien où l'auteur nous emmène. D'autant que les personnages sont tous interchangeables sans réelles particularités qui pourrait les différencier.
C'est donc avec une grande déception que je laisse ce livre. Pourtant Guyotat reste un auteur qui m'intéresse et d'ici quelque temps, je retenterai d'autres livres.
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Vers 1980, je pense, j'avais vu et entendu Pierre Guyotat lire, dans une émission de tv (chez Pivot ? alleurs ?) un extrait d'un de ses textes et j'avais reçu un choc de la puissance de feu de cet extrait scandé, craché, comme un vagissement, un langage primaire, brut, sauvage etc.. Voilà pourquoi j'ai eu envie de lire ce livre.
Je ne mets aucune étoiles, non pas parce que je considérerais que ce livre ne vaut rien mais parce que je ne peux pas le noter pour la bonne raison que je renonce à continuer à le lire au bout de 17 pages fortes et pénibles, ceci parce que les situations dont il est question y sont l'horreur absolue (la même "horror" que gémit Brando/Kurtz dans d'Apocalypse Now ) des viols, sévices, tortures, meurtres, massacres, crimes, abominations inimaginables mais bien réelles que des soldats français d'un RIMA (Régiment d'Infanterie de Marine) font lors de descentes dans des mechtas ou dans les casernements pendant la guerre d'Algérie.
Pour dire ces horreurs y a-t-il des mots ? Il faut pourtant bien que quelqu'un le fasse, puisque les soldats eux-mêmes ont bien du mal (et pour cause !) à le faire ou que cela a été systématiquement censuré. Guyotat, qui a certainement vu cela, tente de le faire en créant un texte haletant et halluciné, les seules "respirations" étant des ;
Le livre est donc constitué d'une seule phrase, sans point final, phrase qui ne se termine pas puisque les derniers signes de ponctuation sont ... 3 petits points.
Littérairement c'est donc un ovni (Objet Vérité Naturellement Interdit, une fois édité), peut-être même sans équivalent (même si je suis quasi sûr que d'autres l'ont fait). Cette audace littéraire, plus proche de la musique que de l'écriture, est importante mais, dans le style je préfère de loin Claude Simon (qui est un de mes auteurs favoris et qui appréciait l'oeuvre de P Guyotat) et, plus éloignés, Nedjma de Kateb Yacine ou les Chants de Maldoror de Lautréamont.
Ici c'est davantage le "mal d'horreur" et c'est, en tous cas pour moi, juste impossible que je continue à laisser entrer dans mon cerveau la description sans auto-censure de tels actes. Je n'ai jamais pu lire jusqu'au bout non plus la cité de la joie de Dominique Lapierre ou les 120 journées de Sodome ou Justine du marquis De Sade : c'est trop crade, trop cruel, trop insupportable pour ma sensibilité..
Cela ne m'empêche pas de comprendre que c'est un livre important dans l'histoire de la littérature française et par rapport à l'histoire de la guerre d'Algérie. Les brefs textes de Roland Barthes, Philippe Solers et Michel Leiris, placés en exergue, sont là pour le signaler.
Donc un livre qui, sûrement, parvient à s'approcher d'une restitution écrite de l'Horreur.
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Aucun point dans ce texte qui répète sans fin les mêmes situations et les mêmes mots de vocabulaire. On dirait la description d'une partouze géante sans tabou, complétement idéalisée et ambiancée en Algérie. Si vous n'avez guère accroché au cercle du sperme, du sang et de la m... dans le film Salo ou les 120 jours de Sodome de Pasolini alors inutile de lire Eden, éden, éden. C'est encore plus glauque, le côté répétitif et lancinant en prime.
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Très difficile. de se prononcer, de lire.
Difficile, difficile, difficile... Prononcez un mot autant de fois que vous le pouvez. Que reste-t-il de ce mot ?
Eden, Eden, Eden... est écrit sur ce principe. Qu'est-ce que le Paradis une fois que vous en avez terni le sens, au point même de ne plus savoir ce que le mot est sensé exprimer. Est-ce que cela ne pourrait pas ressembler à un certain enfer ? Pierre Guyotat, auteur génial de Idiots, chez Gallimard (disponible en folio), est pris d'une logorrhée pornographique, un dégueulis de sexe, de foutre, de merde. Des enculades, des coups de fouet, des odeurs de pisse, des enfants violés (plutôt des adolescents, ce me semble, mais le mot enfant est employé, à raison). Des hommes, dehors, accroché à des grilles, supplient qu'on les touche, d'autres (et parfois les mêmes) payent un putain ou une, pour une virulente expression de leur désir, les queues roides n'en ont jamais finies de d'exprimer leur sperme (une endurance folle qui ne peut être que fantasmée, hors du monde réel), on glisse dessus quand on marche, on chie dans un coin, ou on va baiser le boiteux qui vit dans les WC... Avec une présence entêtante du sable, de soldats, qui nous amène dans les bordels algériens du temps de la colonisation et (surtout) de la guerre de libération.
Voilà, voilà. le mot amour, quant à lui, est très rare sous la plume de Monsieur Guyotat, il n'apparaît qu'à la page 106 (L'imaginaire Gallimard). La lecture est pénible, même lorsqu'on voudrait se persuader d'y trouver une quelconque sensualité - recherche complètement vaine, je vous rassure, au moins quand on éprouve une aversion pour la merde et le sexe avec des ados. le style maîtrisé, la folie de ce livre, le scandale aussi, méritent quant à moi d'être soulignés. Est-ce que Eden, Eden, Eden est un roman ? Non. Est-ce que c'est un essai ? Non. C'est un poème de 270 pages. D'une brutalité digne De Sade, avec quelques bizarres moments de... tendresse ? Je ne suis même pas sûr que ce soit le bon mot.
Donc, on a compris, à ne pas laisser entre toutes les mains.
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Les premières pages dérangent, les suivantes aussi mais on s'y habitue, on s'y perd, on s'imprègne, comme dans une hallucination. C'est difficile à lire, alors passons en lecture automatique. Ne pas chercher à comprendre, juste lire et laisser les images mentales prendre forme. Alors, des moments poétiques émergent, on devine des sentiments, on perçoit une certaine beauté.
Ce livre repoussera les limites de chacun de ses lecteurs, et c'est rare.
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
Le paysan adolescent s'agenouille au bord de la flaque de sangs mêlés, l'épaule appuyée au rideau de fer de la boucherie ; sa main fouille dans la poubelle entre les chairs déchiquetées, prend un coeur de chevreau transpercé, le porte à la bouche ; les chauves-souris, prises dans la chambre froide, s'agrippent aux quartiers suspendus ; le paysan, mâchant le coeur de chevreau, entre dans le bordel des femmes ; la maquerelle le prend entre ses bras, elle le pousse vers l'escalier, il s'accroupit, découvre les pots, lape la gelée (...)
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« / Les soldats, casqués, jambes ouvertes, foulent, muscles retenus, les nouveaux-nés emmaillotés dans les châles écarlates, violets : les bébés roulent hors des bras des femmes accroupies sur les tôles mitraillées des G.M.C. ; le chauffeur repousse avec son poing libre une chèvre projetée dans la cabine ; / au col Ferkous, une section du RIMA traverse la piste ; les soldats sautent hors des camions ; ceux du RIMA se couchent sur la caillasse, la tête appuyée contre les pneus criblés de silex, d’épines, dénudent le haut de leur corps ombragé par le garde-boue ; les femmes bercent les bébés contre leurs seins : le mouvement de bercée remue renforcés par la sueur de l’incendie les parfums dont leurs haillons, leurs poils, leurs chairs sont imprégnés : huile, girofle, henné, beurre, indigo, soufre d’antimoine — au bas du Ferkous, sous l’éperon chargé de cèdres calcinés, orge, blé, ruchers, tombes, buvette, école, gaddous, figuiers, mechtas, murets tapissés d’écoulements de cervelle, vergers rubescents, palmiers, dilatés par le feu, éclatent : fleurs, pollen, épis, brins, papiers, étoffes maculées de lait, de merde, de sang, écorces, plumes, soulevés, ondulent, rejetés de brasier à brasier par le vent qui arrache le feu, de terre ; les soldats assoupis se redressent, hument les pans de la bâche, appuient leurs joues marquées de pleurs séchés contre les ridelles surchauffées, frottent leur sexe aux pneus empoussiérés ; creusant leurs joues, salivent sur le bois peint ; ceux des camions, descendus dans un gué sec, coupent des lauriers-roses, le lait des tiges se mêle sur les lames de leurs couteaux au sang des adolescents éventrés par eux contre la paroi centrale de la carrière d’onyx ; les soldats taillent, arrachent les plants, les déracinent avec leurs souliers cloutés d’autres shootent, déhanchés : excréments de chameaux, grenades, charognes d’aigles ;[…] »
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« …sous le surplomb du roc, les soldats soufflent sur un feu de branches dressé sur la bouche ouverte d’une femme morte […] ; je frotte ma poitrine à la toison de son sexe, une alouette y est prise ; à son cri, chaque fois que ma poitrine pèse sur le corps, jaillissent des larmes sur mes yeux ; un sang chaud ruisselle hors de mes oreilles ; la pluie d’excréments éclabousse le rocher ; les sangs, dans la vasque, brûlent, bouillonnent ; un jeune rebelle, ses pieds nus enduits de poudre d’onyx, ses lèvres de farine, sort de terre, se penche sur la vasque, plonge sa tête, ses poings […] ; au camp, les femmes pèsent sur les barrières, le sexe des soldats se tend vers leurs mères, venues de métropole, sur ordre de l’État-major, pour les Fêtes du Servage ; ma mère, je l’emporte dans ma chambrée de bambou, je la couche sur la litière de paille empoisonnée ; tête, épaules plongées sous sa robe, je mange les fruits, les beignets d’antilope sur son sexe tanné tandis qu’elle, fatiguée par le voyage en cale, en benne, s’endort ; à l’aurore, elle s’est échappée de dessous mon corps ; étreinte par les soldats sous le mirador où je veille éjaculant, leurs genoux la renversent sur le sable… »
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Les soldats, casqués, jambes ouvertes, foulent muscles retenus, les nouveau-nés emmaillotés dans les châles écarlates, violets : les bébés roulent hors des bras des femmes accroupies sur les tôles mitraillées des GMC ; le chauffeur repousse avec son poing libre une chèvre projetée dans la cabine ; au col Ferkous, une section du RIMa traverse la piste ; les soldats sautent hors des camions ; ceux du RIMa se couchent contre les pneus criblés de silex, d'épines, dénudent le haut de leur corps ombragé par le garde-boue ; les femmes bercent les bébés contre leurs seins...
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« /le mirador surplombe la palmeraie calcinée ; la sentinelle peuhl, iris jaune glissant sur le globe bleu, laine crânienne ensuée, bascule le projecteur : le faisceau fouaille les chairs ensuées des soldats arc-boutés sur la femme ; la sentinelle broie son membre dans son poing, tourne le projecteur : le faisceau traverse le lit asséché de l’oued, saisit une vibration, sous le zéphir, des lauriers-roses empoussiérés : une troupe de chacals y déchire une charogne d’âne […] ; la sentinelle roule le projecteur sur le châssis, le faisceau arde les seins qui palpitent, pubescents, semés de sucre sous les pans encrassés du treillis […] ; la sentinelle, du poing, fait pivoter le projecteur vers la stratosphère… »
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Videos de Pierre Guyotat (27) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Pierre Guyotat
Dans le cadre des célébrations du soixantième anniversaire de la fin de la Guerre d'indépendance algérienne, la BnF accueille la première partie du colloque international sur l'oeuvre et la vie de Pierre Guyotat depuis sa disparition, qui interroge son rapport à l'Algérie. Ce pays qu'il affectionne tient une place majeure dans son parcours d'écrivain. La seconde partie du colloque a lieu le 24 novembre à l'Institut du monde arabe.
Pierre Guyotat est une figure majeure de la mémoire du conflit algérien, avec Tombeau pour cinq cent mille soldats et Éden, Éden, Éden. Avec Idiotie, il a offert une des oeuvres récentes les plus importantes sur ce sujet.
Le rapport de Guyotat à l'Algérie est unique dans la mesure où s'y nouent le politique, l'affectif et l'intime. Regardé comme un « ami de l'Algérie », Pierre Guyotat intègre dans son regard toutes les facettes d'un pays qu'il découvre soldat, également soucieux autant du sort des appelés du contingent, de celui des Français d'Algérie que de celui des combattants de la liberté algérienne. Il contribua aussi à établir, dans la création et l'action publique, un rapport nouveau, post-indépendance, à l'Algérie, à ses auteurs, et aux personnes qui en étaient originaires également en France.
L'oeuvre littéraire de Pierre Guyotat est conservée à la BnF, à la suite du don qu'il en a fait. Les manuscrits de Tombeau pour cinq cents mille soldats et d'Éden, Éden, Éden, ainsi que de nombreux textes et documents composés pendant les périodes algériennes, y sont conservés.
En donnant la parole à des figures de la recherche et de la création issues des deux côtés de la Méditerranée – d'Algérie, du Maghreb, de France – et d'ailleurs, ce colloque permettra de découvrir un regard unique sur l'Algérie, affectueux et savant, celui d'un des plus grand auteurs de langue française.
Voir le programme : https://www.bnf.fr/fr/agenda/pierre-guyotat-et-lalgerie
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