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EAN : 9782234093690
336 pages
Stock (01/02/2023)
3.95/5   33 notes
Résumé :
« Le Roy se meurt ! » Ce cri résonne par un 15 août 1744 torride dans le Palais du gouverneur de la ville de Metz. En chemin pour la guerre contre les Autrichiens en Alsace, Louis XV se trouve aux portes de la mort. De saignées en purges inutiles, ses médecins l’ont abandonné, son aumônier le force à se confesser publiquement, ses maîtresses sont bannies, sa cour s’enfuit, les saints sacrements lui sont administrés.
Mais en trois jours, Louis XV sera sauvé... >Voir plus
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François Heibronn rend ici un vibrant homme aux hommes et aux femmes de sa famille, qui ont laissé une trace dans l'histoire du pays. Bien en amont des héros valeureux de la première guerre mondiale, le docteur Ibraïm Cerf Oulman, qui vit dans le ghetto de Metz, est appelé incognito au chevet de Louis XV, sur le point de trépasser après une journée de libations, suivie de traitements inappropriés administrés par un chirurgien aussi imbu de sa personne qu'incompétent. On peut ainsi dire que le bon docteur Oyulman a changé le destin du pays.

Cette anecdote qui fut soigneusement tue, en raison même de la religion du praticien, s'est déroulée lors de l'été 1744, et c'est un autre été qui marque profondément l'histoire familiale, avec les déportations en série. C'est ce lien que tisse l'auteur autour du passé, glorieux ou douloureux, avec en filigrane l'antisémitisme qui se décline tel un fil rouge.

L'épisode du dix huitième siècle est passionnant, par ce qu'il laisse entrevoir de l'état de connaissance de la science médicale de l'époque et des frasques de la cour !
L'aspect plus contemporain offre moins de surprises mais s'inscrit dans un devoir de mémoire à la fois personnel et collectif. La lectrice lambda que je suis risque cependant de se perdre dans la généalogie familiale un peu complexe.

Roman autobiographique et historique qui ne manque pas d'intérêt !

336 pages Stock 1er février 2023

Lien : https://kittylamouette.blogs..
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Qui sait qu'un juif à Metz, en aout 1744, a sauvé le roi Louis XV, 34 ans, de la dysenterie ?
Aux portes de la mort, confessions faites et extrême onction reçue, les « médecins » l'abandonnent. Sur un organisme fragilisé par l'infection et la fièvre, ils ont pratiqué inconsidérément une dizaine de lavements et de saignées, techniques utilisées systématiquement à cette époque par des praticiens peu instruits en connaissances scientifiques, mais toujours arrogants et sûrs d'eux.
Le maréchal de Belle-Ile, Charles-Louis-Auguste Fouquet, petit fils de Nicolas Fouquet emprisonné à vie (ou à mort) par Louis XIV pour cause de « lèse majesté » après avoir fait construire le château de Vaux-le-Viconte, était un militaire éclairé, homme de culture, amateur des sciences et des arts, bienveillant quant à la présence d'une communauté juive dans la ville de Metz qu'il gouvernait, mais surtout pétri d'une intelligence lucide et pragmatique. Les juifs n'avaient pas encore acquis le statut de citoyens « français » sur le sol de France, reclus dans ce qu'on appellerait aujourd'hui « quartier, ou zone communautaire », mais jouissaient de la liberté d'exercer différents métiers, dont la médecine (étudiée en Allemagne car la France leur refusait ce droit !). Belle-Ile connaissait ses membres et les appréciaient.
Estimé par Louis XV pour ses faits d'armes et de diplomatie, il avait libre accès à ses appartements. Instruit par la déconvenue de sa maladie et l'échec des médecins, il use d'un stratagème assez prodigieux grâce à la complicité d'un médecin militaire, Hélian. Ils font quérir le médecin juif, Isaïe Cerf Oulman, 39 ans, réputé pour avoir déjà guéri la dysenterie à l'aide de « potions », puis le dissimulent sous l'apparence d'un autre médecin militaire retraité, totalement dévoué à Belle-île, Alexandre de Montcharvaux. Alors le « charlatan », « empirique », ainsi les affublaient les messieurs de la faculté, déguisé en militaire catholique, pratiqua sa « sorcellerie » sur sa majesté qui s'en remit fort aise. le roi aurait découvert la supercherie et contre guérison, pardonné à tous les acteurs, mais bannis ad vitam de leurs fonctions : l'évêque de Soisson, le premier chirurgien, le confesseur et plusieurs autres personnalités, intrigantes contre sa majesté durant ses jours de presque trépas !
Une première partie à l'écriture alerte, parfois burlesque, se lit comme un roman enchâssé dans la réalité historique très détaillée.
La deuxième partie est plus personnelle. En aout 1944, exactement deux siècles plus tard, François Heilbronn, descendant de la 8ème génération d'Isaïe Cerf Oulman nous dresse un tableau peu honorifique de la période d'occupation allemande en France et du sort des familles juives. En 1994, il recueille de sa grand-mère l'histoire familiale et le sort funeste d'une partie d'entre-eux, déportés en aout 1944, jamais rentrés. Probablement dénoncés, car arrêtés en même temps, dix membres de la famille descendants directs d'Isaïe furent assassinés à Auschwitz-Birkenau : Marguerite, Marie-Louise, Maurice, Claudine, André, Etienne, Henri, Lucienne, Denise, Georges.
François Heilbronn, vice-président du mémorial de la Shoah et professeur à sciences-po, dont l'écriture de ce premier livre est d'une qualité littéraire et historique remarquable, est un passeur de mémoire. Pour ses aïeux, pour les vivants et les générations futures, l'arbre généalogique de la famille demeure la référence historique et permet de rendre hommage à chacun et chacune d'entre-eux. Brillant témoignage.
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Résumé
Août 1744. Sur le chemin de la guerre, le roi Louis XV se voit forcé de faire halte à Metz, terrassé par la maladie. Ses médecins exercent sur lui de nombreuses purges et saignées qui l'épuisent et achèvent pratiquement de le tuer. On le force à confesser publiquement ses péchés, on lui administre les derniers sacrements et on quitte sa cour, l'abandonnant à son triste sort. Et pourtant, le roi ne meurt pas de la dysenterie qui le touche, car un stratagème est monté pour qu'il puisse être soigné par un médecin juif, convaincu que les purges et les saignées aggravent l'état du roi. Isaïe Cerf Oulman guérit le roi en toute discrétion, cachant sa véritable identité à la France entière, si ce n'est une poignée de proches du roi. C'est un héros national qui doit demeurer secret pour ne pas faire scandale auprès de l'Église… Deux cent ans plus tard, pendant l'été 1944, la communauté juive n'est pas mieux acceptée dans le pays, au contraire. Les descendants du mystérieux “empirique” qui a sauvé le roi sont envoyés dans des camps de concentration où beaucoup d'entre eux trouveront la mort.

Commentaire
Les deux récits historiques de ce roman sont contés à l'occasion d'un hommage rendu au Panthéon à l'un des ancêtres de l'auteur. Cet illustre monument devait être une basilique construite sur ordre de Louis XV pour remercier le Seigneur de sa guérison, à laquelle est consacrée la première partie de l'histoire. Puis, la seconde, datée de 1944. En fin de roman, l'auteur conclut par des informations sur les recherches qu'il a entrepris sur sa famille. La première histoire est plutôt intéressante et cocasse, avec de petits airs rabelaisiens. le second récit n'est pas inintéressant, mais le style immersif et XVIIIème siècle du premier récit confronté à l'histoire narrée par la grand-mère, incarnée pendant qu'elle raconte ses souvenirs, donne un trop grand contraste de genre et de style. Je ne suis pas convaincue que le lectorat appréciant un style de récit sera également sensible à l'autre.
Quant au tout début du roman, où la famille se rend au Panthéon, il ne m'a pas happé dans l'histoire.

Structure du récit : 2/5 : le roman débute au Panthéon, où l'on raconte l'histoire de 1744 (pendant laquelle plus aucune référence n'est faite au cadre spatio-temporel du Panthéon, on est complètement immergé dans l'histoire), puis dans la deuxième partie c'est la grand mère qui raconte ses souvenirs de 1944, le mode de récit est donc différent. Ensuite, l'auteur raconte ses découvertes comme dans un carnet de bord. Tout cela reste compréhensible même si les styles sont biens différents.

Personnages : 3/5 : On entre dans la profondeur d'aucun personnage, qu'il s'agisse de l'auteur ou de sa grand-mère. Je pense que ce n'était pas tellement le sujet, mais cela ne rend pas ces “personnages” particulièrement attachants. Les personnages du premier récit m'ont plus touché par leur dévouement à sauver la vie du roi.

Style : 3/5 : le style est clair et compréhensible, malgré un langage un peu XVIIIème siècle rendu nécessaire par le premier récit, ce qui est agréable. Il y a quelques descriptions de repas qui sont intéressantes. Je pense aussi aux essais de style des premières pages du roman, où il y a beaucoup de métaphores, qu'on ne retrouve plus ensuite. Dans les premiers chapitres, le mot “Metz” est utilisé 1 à 5 fois par page.

Intérêt de l'histoire : 4/5 : L'histoire se déroulant en 1744 est assez cocasse, et l'idée d'attacher ces deux histoires également. C'est interloquant de penser que les histoires ne sont espacées que de quelques générations seulement. Les noms de familles auxquels on s'est habitué dans le récit de guérison du roi réapparaissent dans les registres des déportations, c'est dissonant et cela interroge sur la place des Juifs en France. L'idée de filiation est intéressante.

Globalement, j'ai bien aimé la première histoire, la deuxième entre moins dans le style de mes lectures habituelles. Je dirai que c'est le risque de cet ouvrage, mais si vous êtes ouverts à cette idée, l'ouvrage n'est pas iné-inintéressant !
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Août 1744, Louis XV agonise dans la ville de Metz, frappé par un mal que ses médecins ne parviennent pas à soigner. Il faut dire qu'entre les saignées et les lavements, le roi a peu de chance de se rétablir. Alors que tout semble perdu, que médecins et courtisans ont déserté la chambre du roi, le maréchal de Belle-Isle, par ailleurs Gouverneur de la ville de Metz, va jouer le tout pour le tout. Grâce à un habile subterfuge, il va réussir à ce qu'Isaïe Cerf Oulman, médecin juif, parvienne jusqu'au chevet du roi et le sauve d'une mort certaine. Et cela dans le plus grand secret car jamais un juif, fut-il médecin, ne devrait avoir accès au roi. Deux-cents ans plus tard, Henry Klotz, descendant de ce grand médecin et héros de 14-18 agonise au camp de Drancy.

Dans ce roman très intelligemment mené François Heilbronn tisse les liens entre les époques et les générations. Il nous dresse tout d'abord le portrait d'un médecin brillant et précurseur qui a compris que pour guérir, un patient n'a pas besoin d'être vidé de son sang et que des précautions d'hygiène sont primordiales. Il nous raconte aussi l'histoire sociale et politique de l'époque qui met à l'écart la population juive en la reléguant dans des quartiers spécifiques, en leur interdisant de se mélanger au reste de la population. Il nous dit aussi l'intelligence d'un homme, le maréchal de Belle-Isle, dont l'esprit curieux et éveillé lui a permis de comprendre les qualités d'un médecin juif, de passer outre les préjugés, et de sauver le souverain de la France.

C'est de ce médecin éclairé qu'est issue la famille d'Henry Klotz. Dans cette famille, les hommes ont versé leur sang pour la France. D'ailleurs, Emile Hayem, lui aussi descendant d'Isaïe, a son nom gravé sur l'une des colonnes du Panthéon en tant qu'écrivain mort au champ d'honneur. Mais cela ne suffit malheureusement pas, en ce XXème siècle en proie aux pires atrocités pour sauver une famille, un peuple.

Dans ce récit à la fois familial et historique, l'auteur fait le pont entre ces deux siècles à travers un monument bien connu : le Panthéon. Louis XV avait en effet promis d'édifier un monument à la gloire de Dieu s'il réchappait de sa maladie à Metz. Les vicissitudes de l'histoire française ont transformé son église dédiée à Sainte-Geneviève en un lieu pour accueillir les grands hommes. Un lieu chargé d'histoire où en 1927, les descendants d'Isaïe Cerf Oulman se sont recueillis en mémoire de leurs combattants morts lors de la première guerre mondiale. Avant d'être disséminés par la barbarie.
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François Heilbronn nous livre ici deux pans de son histoire familiale, transmise de génération en génération.
Eté 1744, le roi Louis XV, en visite à Metz, contracte une dysenterie. Les médecins royaux le soignent à grand renfort de purges, de lavements et de saignées, ce qui, loin de le guérir, l'affaiblit inexorablement.
Les facultés de médecine du royaume de France n'étant accessibles qu'aux seuls catholiques, Isaïe Cerf Oulman, un des trois médecins de la communauté juive de Metz, avait dû, comme son père, étudier la médecine en Allemagne.
Pour soigner le roi, un médecin militaire de Metz, le docteur Hélian pense à ce médecin juif dont la réputation dépasse les limites de la communauté, qui avait déjà réussi, par le passé, à soigner par ses potions un capitaine d'artillerie qui souffrait de troubles similaires.
Alors que le roi se meurt, absous de ses pêchés de chair par l'évêque de Metz, Belle-Isle, le gouverneur de la ville profite de la désertion de la chambre royale pour introduire les deux médecins auprès du roi. La science d'Oulman soigne le roi en trois jours. En reconnaissance Isaïe demande au roi que "la nation juive devienne française, avec les mêmes devoirs et les mêmes droits que tout autre Français"... il ne sera exaucé qu'après la Révolution française.
L'histoire officielle ne retiendra pas le nom de ce médecin, seule la tradition orale familiale en gardera la trace dans différentes branches.
Deux cents ans plus tard, on découvre que certains héritiers d'Isaïe Cerf Oulman figurent au Panthéon; comme leur aïeul, ils ont honoré et servi leur patrie. le nom d'autres héritiers figurent quant à eux sur les murs du mémorial de la Shoah. La seconde moitié du livre raconte l'arrestation par la police française, en juillet 1944, juste avant la libération de Paris, de plusieurs membres de la famille.
Connaissant Metz, j'ai particulièrement apprécié la première partie du livre et la promenade dans les rues de la ville du XVIIIè siècle. La découverte de cette communauté juive, "l'une des plus brillantes et enviées d'Europe", et le rôle important que ses membres ont joué dans notre histoire nationale, cela en toute discrétion, sinon en toute ignorance. J'ai étudié à côté de l'école hébraïque, me promène à côté de l'ancien cimetière juif dont il ne reste qu'une stèle sur un parking.
Et ce livre nous interroge : la quasi-invisibilité de cette communauté est-il le fruit de la laïcité ou plus certainement, le résultat de siècles d'oppression ?
Merci à #NetGalleyFrance et aux éditions #Stock
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
–Sire, j'applique des clystères pour vous soulager des mauvaise humeurs qui altèrent la santé de Votre majesté.
Le roi s'effondra sur sa couche et se vida sous l'effet du traitement. Les médecins s’empressèrent de recueillir les émissions royales dans des soucoupes.
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Et pour terminer cette présentation, voici un extrait de la page 203 qui explique bien le sens de ce livre :
« À deux cents ans d’écart, il y eut deux étés.
Deus étés 44.
L’incroyable dissonance me frappe. À rebours du sens de l’Histoire, de l’émancipation et de la liberté.
En 1744, on imagine les Juifs en France ostracisés et persécutés. Alors qu’en 1944, cent cinquante ans après la Révolution émancipatrice, et au terme d’un siècle d’or du franco-judaïsme courant de Louis-Philippe à la IIIe République, les Français juifs auraient dû bénéficier comme tous leurs concitoyens de la protection de leur pays.
La réalité est tout autre et l’ironie de l’histoire implacable. À Matz, à l’été 1744, bien qu’écrasés de taxes et tenus à l’écart, les Juifs, dont l’apport à la société était reconnu, jouissaient de certaines libertés et de la protection du gouverneur…
À l’été 1944, au moins vingt de ses descendants, citoyens et patriotes exemplaires, sont assassinés par les Allemands avec la complicité de l’État français, pour le simple fait d’être juifs. »
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