J'avais lu ce roman il y a quelques années.
Mon intérêt pour son dernier roman et ma brève rencontre émotive avec l'auteure que je tentais d'approcher depuis plusieurs semaines, sans avoir eu le courage avant cette semaine, m'a donné envie de relire le seul roman que j'ai lu de
Justine Niogret et de lui consacrer un billet, vous faire partager cette expérience. Car je me souviens avoir beaucoup aimé cet atmosphère post-apocalyptique, pessimiste et grisâtre.
Tout d'abord, j'adore sa façon d'écrire, la construction de ses phrases. Des phrases courtes, parfois froides, parfois poétiques, parfois simples, parfois porteuses de profondeurs. Des phrases que je trouve absolument magnifiques et que l'on veut répéter à haute voix. Comme celles-ci : « Une zone. La fille ne baisse pas les yeux, et il se souvient à peine de ce qu'elle verrait ; les cicatrices fines, les traits blancs sur la chair, les punitions d'autrefois, quand cette partie de son corps voulait exister malgré lui. » ou « Il sait que la fille retourne au silence. Elle s'y réfugie ou plutôt elle s'y noie, comme lui se noyait autrefois dans sa rage. » ou « Peut-être que le monde est mort de fatigue. » et d'autres encore et encore…
Et derrière un personnage ultra violent, et une ambiance brut de décoffrage, nous ressentons beaucoup de tristesses et de sensibilités. Un personnage d'une « tendresse étrange ».
Gueule de Truie a été élevé dans une très grande violence, dans la haine viscérale des êtres humains, donc des autres mais également de lui-même, dans le but de finir le travail de Dieu : exterminer la race humaine, majoritairement disparue sous : une bombe ? une météorite ? La volonté de Dieu ? La haine de la vie ? Pour les Pères, c'est l'évidence : « Dieu a ouvert la bouche et le monde est mort. » Il deviendra une bête dépourvue de délicatesse et de réflexions.
Mais un jour, il rencontre une fille (une jeune femme ?Une fillette ?), ce sera La Fille. Cette fille taciturne, qu'il a besoin de sacraliser, qui détient entre ses mains une boîte qu'elle se refuse à quitter. Cette rencontre le contraint à repenser sa quête…
Malgré l'aspect religieux de sa mission, nous ne sentons pas de réflexions métaphysiques dans le sujet principale, comme le fait
Brian Evenson dans immobilité. Mais on se pose la question du conditionnement, de l'endoctrinement religieux et surtout de la violence portée sur l'innocence, la destruction de l'enfance par des adultes sans espoir, la transmission de la désolation à un être qui aurait dû aimer la vie.
Roman singulier, qui pose des fondations froides, hyper violentes, d'une cruauté franche, d'une Terre inhumaine et pourtant c'est ici que va se construire un début de belle histoire, d'une relation lente, chaotique mais intègre.
J'ai vraiment hâte de lire son dernier.