Livre des arrières rayons de ma bibliothèque, acheté à sa parution aux éditions
Actes Sud dans les années 1990.
"Regarde la lune dans le ciel
C'est une branche de palmier", dit Rose dont les paroles suivent le récit
Ma mère, l'Algérie. Rose est une sage doublée d'une poètesse.
Texte daté de 1956 à Alger où
Jean Pélégri a vécu une partie de sa vie, en se revendiquant Algérien, lui dont l'Algérie fut la terre natale.
C'est d'abord un paysage qui s'impose à lui, des vignes et une orangeraie entourée de cyprès rectilignes tutoyant le ie ciel, des routes de pousière blanche, un petit bois d'oliviers au bord d'un oued, un douar, une montagne mystérieuse au loin, parcourue la nuit de feux allumés par des bergers.
Diversité et immensité des lieux que l'enfant ressent.
Un terrain de jeux dont il explore tous les lieux, les plus proches, la ferme, et les plus lointains, les cachettes dans lesquelles il fume avec ses compagnons.
Ses compagnons, il leur doit l'apprentissage de la réalité de ce pays où sont parlés plusieurs langues," (...) on a besoins de celui qui est d'une autre langue et d'une autre foi pour découvrir l'autre côté de la réalité, l'autre nom des choses (...) C'est la différence qui nous enseigne et nous agrandit."
Le reste, il le doit à son père qui, "avait une idée fixe, la justice (...)"
Ce père lui apprends que sa ferme El Kateb signifie l'écrivain en arabe...
A défaut d'écrire
Jean Pélégri, lit beaucoup, découvre la religion transpose la réalité de ses lectures à celle qu'il vit, l'analyse au filtre de ses héros.
Dès lors il ne pouvait partager la vision manichéenne des deux Algéries qui s'affrontaient à coup d'attentats, "(...) où chacun justifiait ses violences par celles des autres, (...)"
La rencontre avec Fatima, à qui il dédie son livre, "Une vieille femme illétrée", lui fait comprendre "sans heurt et sans fracas, le sens du combat du peuple algérien, l'autre côté et l'autre nom des choses, l'autre nom de Dieu."
Livre manifeste aux accents humanistes,
Ma mère, l'Algérie, cherche à transcender les frontières, à rapprocher ceux qui, "(...) s'ils parlaient du même paysage, ne parlaient pas toujours de la même Algérie."
Livre blessure qui saigne sans jamais s'arrêter à la mesure du drame effroyable que continuent de vivre ceux qui sont partagés entre les deux côtés de la Méditerranée sans jamais se décider à choisir, partisans comme
Jean Pélégri "d'une solution multiraciale (...) une révolution qui aurait évité le pire."
Mais, malgré "ce qu'on entendait chaque jour, dans chaque communauté (...) les "promesses ont duré ce que durent les roses, l'espace d'un matin."
Et, on a vu, en Algérie, " (...) le pouvoir promis au peuple passer progressivement aux mains de clans qui possédaient tout, qui décidaient tout et qui se suffisaient à eux mêmes."
Un texte qui prend tout son sens et toute son actualité face à la situation de l'Algérie aujourd'hui.
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