Anthologie de la littérature chinoise classique

Quand on ouvre un livre, on rencontre des anciens,
Quand on marche dans les rues, on rencontre des contemporains.
Des anciens, les ossements sont devenus poussière,
C'est seulement leurs sentiments que nous pouvons approcher.
Les contemporains forment notre génération,
Mais les écouter est comme mâcher une chandelle.
Je préfère vivre avec des objets et des pierres
Que de passer mon temps avec des gens ordinaires.
Heureusement il n'est pas nécessaire d'appartenir à son époque,
Ma véritable époque est celle des livres que je lis.

[Poèmes, Yuan Mei]

Bang, bang, je coupe un arbre
Et le pose sur la rive du fleuve
Dont l'eau est claire et dessine des vaguelettes.
Sans semer, ni moissonner,
D'où vous viennent ces trois cents bottes de céréales ?
Sans chasser, ni traquer,
Pourquoi voit-on des sangliers suspendus dans votre cour ?
Le seigneur
Sans effort se rassasie.

Bang, bang, je découpe un timon
Et le pose au bord du fleuve
Dont l'eau est claire et coule droit.
Sans semer, ni moissonner,
D'où vous viennent ces trois cents boisseaux de céréales ?
Sans chasser, ni traquer,
Pourquoi voit-on du jeune gibier suspendu dans votre cour ?
Le seigneur
Sans effort se nourrit.

Bang, bang, je découpe une roue
Et la dépose sur la berge du fleuve
Dont l'eau est pure et tourbillonnante.
Sans semer, ni moissonner,
D'où vous viennent ces trois cents quintaux ?
Sans chasser, ni traquer,
Pourquoi voit-on des pigeons suspendus dans votre cour ?
Ah ! le seigneur
Sans effort dîne de plats chauds.

[Chanson de Wei]

En littérature, le souffle vital est essentiel. La pureté et l'impureté du souffle dépendent de la nature de la personne et ne peuvent être atteintes en se forçant. C'est comme en musique : la partition a beau être la même et le rythme identique, la qualité de l'interprétation diffère suivant les divers souffles vitaux des interprètes, et c'est quelque chose que les pères ne peuvent transmettre à leurs enfants ni les frères aînés à leurs cadets.

[Sur la littérature, Cao Pi]

Un homme vendait dans la rue des lances et des boucliers. Il vanta la solidité de ses boucliers en disant que rien ne pouvait les transpercer. Puis il prétendit que ses lances étaient si acérées que rien ne pouvait les arrêter. Un spectateur intervint : "Qu'est-ce qui se passe si l'une de vos lances attaque l'un de vos boucliers ?" L'homme ne put rien répondre¹.

[Anecdotes de Han Fei Zi]

1. L'expression chinoise pour "contradiction" vient de cette anecdote et se dit "lance-bouclier".

Dans la cour un vieux sophora
Dont le tronc se dresse et pénètre les nuages.
Ses branches accueillent les oiseaux de toutes parts
Ses feuilles raccompagnent le vent qui part.
Xue Tao (770-832)