Voici un livre qui trainait depuis plus d'une décennie dans ma PAL ( plus que monstrueuse, il faut le dire ). Et là, subitement, j'ai eu envie de lire un bouquin historique, histoire de varier un peu mes lectures.
Nous nous retrouvons à Saint-Malo. Colbert fidèle ministre de Louis quatorzième du nom, vient de fonder la Compagnie des Indes. Mathieu Carbec, commerçant de cette ville portuaire va se laisser convaincre d'acheter quelques actions dans la dite compagnie.
C'est un beau roman historique que nous livre là Bernard Simiot. On découvre l'essor d'une ville, Saint-Malo, mais aussi celui de la petite bourgeoisie qui va tout faire pour s'enrichir et acquérir ses lettres de noblesse.
C'est à travers quelques personnages, dont ceux de la famille Carbec que nous allons assister à de belles pages d'histoire. Ici, que l'on s'embarque pour Terre-Neuve pour la pêche à la morue ou vers les Indes, l'aventure et le danger sont au rendez-vous. Les négociants malouins savent qu'il faut prendre des risques et n'hésitent pas à armer un navire qui peut être taillé pour la course, le commerce d'épices ou d'autres un peu moins avouables.
C'est avec beaucoup d'authenticité que l'auteur nous restitue cette période de l'histoire bretonne et cette lecture fleure bon les embruns et les épices.
Beaucoup de détails et de descriptions, certes, mais ceux-ci ne déparent pas, au contraire, ils rajoutent encore du réalisme à ce roman.
Lecture sympathique, je suis contente d'avoir la suite à portée de main.
Challenge Pavés 2018
Un excellent roman, où s'entremêlent étroitement l'histoire d'une ville et d'une famille.
Bernard Simiot sait faire vivre et comprendre une époque, sa société et ses évolutions, son esprit et ses ambiguïtés, sans jamais lasser son lecteur. le style est alerte, précis, plein de descriptions colorées, de légendes et de parfums. Les personnages, forts et attachants, chacun à sa manière.
On apprend beaucoup de choses, sans avoir jamais l'impression d'apprendre, et on en redemande !
Un roman historique qui n'est pas dénué d'intérêt. Situé à Saint-Malo au tournant du XVIIIème siècle, il retrace la montée de la bourgeoisie urbaine, grâce à l'essor de la course (cet euphémisme qui désigne les raids corsaires sur les navires marchands des nombreux pays alors en guerre contre la France de Louis XIV) et au début du commerce avec les pays d'Asie et d'ailleurs.
Bernard Simiot n'est pas un conteur fantastique ; l'histoire est plutôt plate, et les personnages sans grande consistance. Ce livre ne vaut donc pour moi que par son aspect historique (même si je suis loin d'être qualifiée pour apprécier la justesse du propos). C'est avant tout le début du capitalisme, au fort goût d'aventure, où investissement et prise de risque vont de paire. C'est aussi et surtout l'histoire de la création d'une bourgeoisie au sens premier du terme, c'est-à-dire une élite de ville. Une élite d'abord économique, mais qui aspire à la reconnaissance (d'où les achats de lettres de noblesse), et qui très vite aspirera à plus, c'est-à-dire au pouvoir politique. C'est comme si ce roman montrait à l'oeuvre les ferments qui donneront la Révolution française, pas celle des Droits de l'Homme, cela c'est notre historiographie nationale, mais la révolution bourgeoise qui a triomphé et a marqué les institutions de notre XIXème siècle et de notre modernité.
A lire si la période ou le sujet vous intéresse.
Dans ce premier tome de la saga familiale des Carbec, nous suivons deux générations. Celle de Matthieu Carbec, et de son fils Jean-Marie.
Ces hommes que nous apprenons à apprécier, et ceux qui gravitent autour d'eux, ne sont qu'un prétexte pour nous faire découvrir le Saint-Malo sous le règne de Louis XIV. Très bonne description de l'ascension sociale des bourgeois et des commerçants qui ont pris le risque de partir à l'assaut des mers pour faire fortune. Corsaire, capitaine, armateur... Beaucoup de courage, d'aventures, d'ambition, de rapineries pour devenir un "monsieur de Saint-Malo".
Nous suivons donc cet univers de marins, avec leurs femmes bretonnes qui ne sont pas en reste au niveau courage et entreprenariat. J'ai particulièrement aimé personnage du chevalier du Couesnon.
Passionnant roman historique, malgré quelques longueurs, qui m'a fait découvrir un passé breton que je n'avais jamais pris le temps d'imaginer.
Formidable aventure des commerçants et marins de Saint-Malo sous Louis XIV.lors du 16 ème siècle.
Voyage entre bourgeoisie, chercheurs d'or, début de l'esclavage et monde des pêcheurs de morues.
On voit une famille monter dans l'échelle sociale au rythme des coups d'audace, mais aussi des bonnes fortunes.
On voit l'influence des décisions royales et des guerres qui font que ces messieurs de Saint-Malo doivent sans cesse s'adapter: tantôt commerçants avec des contrées lointaines, tantôt corsaires devant leurs côtes.
Entreprise par Colbert, la reconstruction de la flotte était loin d'être terminée, encore que trente magnifiques vaisseaux de ligne eussent été déjà engagés dans cette guerre de Hollande. Si le ministre avait réussi ses navires, les plus beaux du monde, personne n'en disconvenait,il n'avait pas eu le temps de réussir ceux qui devaient les commander. Créé depuis peu d'années, l’École des cadets n'avait encore formé que quelques promotions d'officiers. Les autres avaient été recrutés dans la noblesse d'épée, souvent sans tradition maritime et plus satisfaite de revêtir l'uniforme aux beaux parements rouges que soucieuse de connaître et d'assumer les devoirs imposés par la navigation. A part un petit nombre de gentilshommes devenus bons marins pour avoir fait leurs classes en Méditerranée sur les galères des chevaliers de Malte, la majorité des officiers ignoraient le long apprentissage du service à la mer.
De toutes les odeurs que le père d'Emeline aimait le mieux humer, c'était celle de la Loire, l'odeur moelleuse de la vase, douceâtre de l'eau, fade des poissons blancs. A la sentir, des paysages fluides se réveillaient au fond de ses yeux morts, îles sablonneuses et peupleraies qui glissent insensiblement vers la mer, barques de pêche au milieu des osiers, canots, espars, filins, vieilles coques abandonnées, filets ramenant des aloses et des saumons, et tout ce petit monde de charpentiers, gabariers, voiliers et taverniers qui vivaient de la mer sans jamais s'aventurer au-delà du Mindin.
"Toi, tu navigueras seul, moi en escadre. Chacun se bat comme il l'entend, l'ennemi demeure le même. Il n'en reste pas moins que nous, gentilshommes, nous faisons la guerre pour l'honneur, et vous autres pour l'argent. Comment expliques-tu cela ?"
La réponse partit comme une flèche
"C'est peut être parce que chacun fait la guerre pour obtenir ce qui lui manque le plus ?
Romain ne releva pas l'offense. Une lumière très douce baignait son visage et sa voix avait perdu le ton de la raillerie.
Deux semaines plus tard, au large des îles Maldives où le Saint François d'Assise avait fait relâche pour charger des cauris, le navire fut pris dans un terrible ouragan. C'était la première grosse tempête qu'il eût jamais subie. Pendant trois jours et trois nuits, des montagnes d'eau s'écrasèrent sur le pont, noyant les cales et brisant le gouvernail. Construit sur les meilleurs chantiers de Saint-Malo, il se comporta avec vaillance, craquant de partout, faisant face aux cavales écumeuses qui se ruaient sur lui, soulevé par des murs d'eau ou précipité dans des abîmes d'où il ressurgissait la proue dressée sur le ciel noir.La deuxième nuit, la masse du gouvernail, privée de son timon, s'était mise à cogner l'étambot à droite et à gauche avec une telle violence que tout l'équipage, des Bretons et des Normands, comprenant qu'ils avaient peu de chance d'en réchapper, avaient juré d'aller remercier sainte Anne d'Auray si elle les sortait de là. Mais c'est toujours la même chose : l'aumônier savait bien que si l'on s'en tirait il y aurait plus de monde au bordel qu'au pèlerinage.
Gorgées de poissons, les barques rentraient avec la marée. Habiles à manœuvrer dans les passes qu’ils étaient seuls à connaître, les patrons malouins s’y engageaient avec autant de prudence que de témérité : plus d’un navire qui avait franchi sans dommages les caps du commerce lointain s’était éventré sur des chicots à l’embouchure de la Rance.
Autant en emporte le vent, de Margaret Mitchell