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EAN : 9782234062573
1602 pages
(01/01/1900)
4.09/5   29 notes
Résumé :
Que ce soit à New York ou à Varsovie, Isaac Bashevis Singer, en véritable maître conteur, construit un univers extraordinaire, hanté de démons, de revenants, de rabbins ou de révolutionnaires, d'artistes et de femmes perdues. Témoignages hauts en couleur d'un monde presque anéanti par la barbarie nazie, ces histoires ont résolument le parfum et la saveur de la culture yiddish. Mais les préoccupations de l'auteur dépassent largement les frontières de la rue Krochmaln... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Recueil de nouvelles ou de contes ? L'écriture d'Isaac Bashevis Singer apparaît souvent comme une parole détournée. En effet, le narrateur se fait la voix d'une vieille connaissance lui racontant à l'occasion une histoire, à lui qui s'intéresse à Dieu, aux démons, aux femmes et au sexe. Nous écoutons donc, nous aussi assis à la table d'une cafétéria enfumée, les souvenirs de ces hommes démunis devant les farces du destin, qu'il se manifeste dans les rues de New-York, de Varsovie, de Lublin, ou d'un shtetl polonais. La mémoire est l'élixir d'un passé tout aussi indéchiffrable pour les hommes pieux que pour les impies et autres anarchistes.
La singularité de l'écrivain se situe dans ce creuset où se déversent la culture talmudique, le vieux yiddishland, le fond slave, la séduction du socialisme et du sionisme, le choc de l'immigration juive. Tout s'interpénètre pour livrer une vision kaléidoscopique de l'univers singérien. Ainsi, dans la nouvelle Perdue, le vieux Sam Opal, raccourci de Shmuel Opalovsky, qui a enseigné dans un Talmud Torah avant de devenir prothésiste dentaire, affirme une rationalité toute pétrie de paradoxes en s'exclamant : « Qu'est-ce qu'un démon pourrait bien faire à New-York ? Il se ferait écraser par une voiture ou se perdrait dans le métro et ne pourrait plus jamais en ressortir. Les démons ont besoin d'une synagogue, d'un bain rituel, d'une maison des pauvres, d'une mansarde pleine de livres de prières à moitié déchirés – tout ce bric-à-brac que vous décrivez dans vos histoires. » Il y a dans ce commentaire ironique et désespéré, le court-circuit qu'opère à chaque instant la plume de Singer pour embrasser, dans sa totalité, la fragmentation de la diaspora juive entre la religion, la tradition et l'irruption d'une modernité qui redéfinit la place d'un juif dans ce monde nouveau.
L'humour de Singer s'infiltre à chaque ligne. Tantôt il se fait dérision comme dans le troisième : « Vous savez aussi bien que moi ce que c'est qu'être un poète yiddish à New-York. Placé dans ma situation, Lord Byron serait devenu logeur, lui aussi. » Parfois, il relève de la saillie (La dette) : « C'est un parent à vous ? […] Oui, un fils, enfin, pas le mien. C'est lui qui m'a adopté pour père, et il en avait parfaitement le droit. » Ou encore de la pure cocasserie : « Des années plus tard, j'ai discuté de cela avec des psychiatres et ils m'ont ressorti toutes leurs théories : Freud, Shmeud, complexes, shmonplexes. » (Perdue)
La couronne de plumes ouvre ce recueil, ce n'est pas ma nouvelle préférée, ma prédilection allant aux récits new-yorkais. Elle se conclut par cet aphorisme : « Parce que la vérité, si elle existe, est aussi complexe et cachée qu'une couronne de plumes. » J'ajouterai que le talent de Singer est incomparable parce qu'il est aussi original et rare qu'une couronne de plumes.


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Le puissant effet d'exotisme et le divertissement que procurent ces nouvelles sont assurés : en pleine Europe, en pleine Amérique, voici un peuple bavard, rêveur, aventureux, créatif, qui vit selon des valeurs et des mythes en décalage avec les nôtres et subit une condition humaine en grande partie différente de la nôtre, à cause de son exil. Pourtant, il faut savoir que Singer, qui après 1945 a conscience d'écrire dans une langue morte ou presque (mais, dit-il au jury Nobel quand le prix lui est décerné, son peuple a appris aux hommes la résurrection des morts), a traduit lui-même ses récits yiddish en anglais, et c'est de cette version anglaise que toutes les autres traductions, dont la nôtre, procèdent. En traduisant du yiddish à l'anglais, Singer a conscience de changer de public : il n'écrit plus pour des lecteurs juifs qui l'entendent à demi-mot, qui sont sensibles aux résonances de la langue à travers deux mille ans de culture juive, il traduit, donc adapte, ses textes à un public non-juif ou juif assimilé, ignorant ou oublieux des racines culturelles (hébraïques, araméennes, slaves) de sa littérature. Ce n'est donc pas le Singer original que nous lisons, mais le Singer qui s'est clairement adapté aux conditions nouvelles de son public, pour ne lui dire que ce qu'il est capable d'entendre. L'effet littéraire sera donc plus ouvertement exotique, mais sans doute moins profond que si nous étions capables de lire Singer en yiddish.
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Recueil de plus de 800 pages de nouvelles d'Isaac Bashevis Singer, prix Nobel de littérature en 1978. Ces nouvelles ont été écrites sur plus de 20 ans et se passent soit en Pologne avant la Seconde guerre, dans les communautés hassidiques, soit quelques années plus tard, à New York, dans la communauté juive immigrée. Et c'est tout le paradoxe des livres de Singer : si les histoires se passent dans sa communauté, avec ses traditions juives, son folklore, sa mythologie, son langage, ses règles, son passé, son propos est pourtant universel tant les personnages sont humains, tant par leurs qualités que par leurs défauts. Et les mésaventures d'un paysan du fin fond de la Pologne ou d'un étudiant d'une école talmudique dans les années 1930 nous émeuvent ou nous font rire. Et celle littérature qui pourrait n'être que confidentielle peut toucher le monde entier. Comme Faulkner et le sud des États-Unis ou Giono et la Provence, par exemple. Cela s'appelle le talent et nous permet de découvrir des mondes qui sinon nous resteraient totalement inconnus. Un livre à déguster à petites doses pour mieux apprécier et faire durer le plaisir.
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Divertissant et l'on apprend beaucoup de choses sur la culture et la religion juive.
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Perdue

J’avais lu de nombreux livres écrits par des libéraux et j’étais bien loin de croire aux démons, aux esprits, aux lutins et autres sornettes. Je suis un rationaliste né. Après tout ce qui m’est arrivé, je ne réussis pas encore à croire au supernaturel. N’essayons pas de nous leurrer. Les avions volent, les trains roulent et, si vous appuyez sur le bouton qu’il faut, vous entendez la voix de Caruso. Aucun démon n’a jamais arrêté un avion ou un train.
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Perdue

Mais pendant combien de temps les journaux écrivent-ils sur quoi que ce soit ? Ici en Amérique, si les cieux s’entrouvraient et que l’ange Gabriel en descende avec ses six ailes flamboyantes pour faire un tour sur Broadway, personne n’en parlerait plus d’un jour ou deux.
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Un jour,Nesha mourut subitement.Ren Naftali était presque octogénaire,et il était impensable qu'il se remarie un jour.Il consacrait la moitié de son temps à la religion,l'autre à ses affaires.Il se levait à l'aube,se plongeait aussitôt dans le Talmud et les commentaires,puis il écrivait des lettres aux notables de la communauté.
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Vidéo de Isaac Bashevis Singer
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