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EAN : 9782258106871
450 pages
Presses de la Cité (02/01/2014)
3.67/5   63 notes
Résumé :
Lorsqu'elle tombe enceinte en 1952, Philomena Lee n'est qu'une adolescente. Dans l'Irlande de l'époque, avoir un enfant hors mariage est considéré comme un péché. C'est pourquoi sa famille l'envoie au couvent de Roscrea, tenu par des soeurs de Madeleine, comme d'autres « femmes déchues ». Quand son fils Anthony a trois ans, il lui est enlevé afin d'être adopté par de riches Américains. On oblige la jeune femme à signer un document dans lequel elle s'engage à ne jama... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (30) Voir plus Ajouter une critique
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Un grand merci à Babelio pour l'envoi de ce roman...

Abbaye de Sean Cross en Irlande. C'est par un jour orageux de juillet 1952 que naquit le petit Anthony Lee, fils de Philomena Lee. Malheureusement pour elle, parce qu'elle a péché aux yeux de l'église, elle a été rejetée par sa famille et vit recluse dans cette abbaye. Etre fille-mère en Irlande à cette époque était très mal vu, ainsi l'état s'occupait de ces enfants nés hors mariage et les plaçait dans des familles, la plupart étrangères. Philomena restera trois ans aux côtés de son fils, dans cet établissement. A l'instar de ses amies, elle participera au bon fonctionnement de l'abbaye, à savoir travailler à la cantine ou à la blanchisserie. Elle vivra dans des conditions précaires, de façon à lui faire comprendre qu'elle a fauté et qu'elle doit en payer le prix. de plus, elle n'aura le droit de passer qu'une heure par jour avec son fils. La jeune femme se liera d'amitié avec Margaret, maman d'une petite Mary, âgée seulement de quelques mois de moins qu'Anthony. Les deux bambins ne se quittent pas, jouent très souvent ensemble et semblent ainsi être comme frères et soeurs.
Aux Etats-Unis, à la même époque, Marge Hess, déjà maman de trois garçons, voudrait tant faire plaisir à son mari, Doc, en lui offrant une petite fille mais malheureusement, elle ne peut pas lui en donner. Aussi, décident-ils tous les deux d'en adopter une. Parce que cela semble bien plus compliqué aux Etats-Unis, ils se tournent vers l'Irlande, un pays très peu regardant sur les conditions d'adoption. Moyennant finance, les couples Américains pouvaient ainsi librement disposer des enfants nés dans le péché. C'est ainsi qu'elle se rend dans ce pays et plus précisément à l'abbaye de Sean Cross où elle est reçue par Mère Barbara et Soeur Hildegarde. Son regard se porte aussitôt sur la petite Mary et elle n'en doute pas un instant: c'est elle qu'elle désire. le petit Anthony étant souvent avec la petite fille, Marge craque pour lui et convainc son mari d'adopter les deux enfants qui semblent inséparables. Sous la contrainte et parce qu'elles n'ont pas d'autre choix, Philomena et Margaret signent les papiers d'adoption et font le serment de renoncer à leurs droits de mère. C'est ainsi qu'en 1955, Anthony et Mary quittent l'Irlande et leurs mamans pour une toute autre vie...

Voici une bien triste histoire que nous livre le journaliste Martin Sixsmith. Contacté par Philomena qui veut à tout prix savoir ce qu'il est advenu de son fils, le journaliste a enquêté, farfouillé, s'est documenté sur les pratiques d'adoption alors en vigueur dans l'Irlande des années 50 et au prix d'efforts mérités, il a retrouvé ce petit garçon devenu Mickael Hess. C'est ainsi toute la vie de cet homme qui nous est conté, une vie à la fois tragique, éprouvante, émouvante, dramatique, riche et hors norme aussi bien professionnellement qu'intimement. Mais c'est aussi la vie politique qui est décrite dans ce roman. En effet, alors que les démocrates et les républicains se chamaillent pour le découpage électoral, le sida fait son apparition dans les années 80, essentiellement dans le milieu gay. Se sentant très peu concerné par le problème, le gouvernement, quelque peu homophobe, mettra du temps à se rendre compte de la teneur de cette maladie. Evidemment, l'on ressort de cette lecture avec beaucoup d'émotion, de tristesse, de rancoeur, d'admiration, d'amertume, de désarroi ou de sympathie. Martin Sixsmith a, d'une certaine manière, su rendre un bel hommage à cet homme. D'une écriture prenante et entraînante, l'on ressent que l'auteur y a mis tout son coeur. Seul petit bémol: une quatrième de couverture trompeuse et des photos trop explicites au milieu du roman qu'il est préférable de regarder une fois la lecture terminée.

Philomena... un destin incroyable...
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Ça commençait TELLEMENT bien !!

Pourquoi ? Mais pourquoi cette lente descente vers l'ennui et ce mélange inextricable des thématiques quand une seule, celle de l'adoption, suffisait amplement ?

Oui, tout commençait très bien avec « Philomena », l'histoire vraie d'une jeune fille ayant conçu un enfant hors mariage. En 1952, en Irlande, ça ne le faisait pas du tout, mais alors pas du tout ! Ainsi, pendant les 150 premières pages de ce pavé qui en compte 500, nous suivons la descente aux enfers de Philomena Lee, dans un contexte digne de l'excellent film « The Magdalene Sisters » de Peter Mullan.

Philomena, rejetée par sa famille sur laquelle retombe sa honte d'avoir péché, rejoint ainsi la cohorte des mères célibataires à la destinée similaire enfermées entre les murs des abbayes irlandaises. Pendant trois ans, Philomena ne sera parmi elles rien de plus qu'une prisonnière, incarcérée avec son fils Anthony qu'elle peut voir une heure par jour. Les soeurs, profitant de sa détresse sociale et convaincues de sauver l'âme d'une pécheresse en agissant de la sorte, lui feront renoncer à ses droits sur sa progéniture qui sera confiée, en adoption, à une famille américaine conservatrice.

Pendant ces 150 premières pages, j'ai été emballée. Ce roman aux allures de documentaire sonnait juste, le style de son auteur me plaisait car ce n'était pas celui d'un romancier mais bien celui d'un journaliste. Je me disais : « En voilà un qui n'a pas cherché à étirer la guimauve ! C'est factuel, c'est saisissant, c'est un beau témoignage ». Et, puis, tout à coup… patatra ! le fameux coup du « soufflet au fromage » ; je n'ai rien vu venir, rien compris sur le moment mais, page après page, j'ai bien dû me rendre à l'évidence : Martin Sixsmith, emporté par son sujet, se prenait non plus pour un journaliste qui a déniché un os particulièrement difficile à atteindre mais bien pour un romancier et là, hélas, son talent ne va pas jusque là, à chacun son métier.

Les deux tiers du roman versent donc illico dans une narration larmoyante qui a rapidement fait naître l'ennui. de Philomena, cette femme qui m'a tellement émue au commencement, ne subsiste plus une trace. A la place, voici retracée la vie de son fils adopté, rebaptisé Mike, année après année, dans une succession sans joie de faits et gestes qui pour moi n'ont présenté qu'un intérêt mineur. Et puis, là, la guimauve elle est étirée, pas de doute ! Dans un joyeux mélange, l'auteur touille les problèmes liés au sentiment de rejet et au sentiment d'appartenance de Mike en tant qu'enfant adopté, son homosexualité et sa séropositivité, ses rapports sociaux, son ascension professionnelle, ses opinions politiques… C'est un peu comme si on vous racontait année après année l'existence d'un citoyen américain lambda avec pour objectif de témoigner des changements survenus dans la société américaine, dans ses moeurs, dans son rapport au monde, etc.

J'aurais tellement préféré que l'auteur tisse son roman autour du seul thème de l'adoption mais ses tentatives sont maladroites et donnent à penser qu'il généralise le comportement de tous les enfants adoptés par le prisme d'un seul exemple, celui de Mike. On sent que Mike s'est interrogé sur ses origines et a envie d'en apprendre plus mais comme il n'a pu concrétiser ses recherches que sur la fin de sa vie, il a bien fallu que l'auteur comble le « vide » même si son existence a été bien remplie. La mienne aussi d'ailleurs a été bien remplie, peut-être que je devrais me préoccuper de la coucher sur le papier ?

Côté psychologie (car avec un sujet tel que l'adoption comment se passer de psychologie ?), Martin Sixsmith opte pour les « gros sabots » ; l'approche est convenue, prévisible et généraliste. Là où j'attendais du spécifique, j'obtiens de la globalisation voire de la banalité.

*** ALERT SPOILER***
Ah, si, pour être honnête on retrouvera Philomena en fin de livre, l'espace de quelques pages vite écrites, en un chapitre couvrant presque 40 ans quand on a eu le droit à un voire plusieurs chapitres par année pour son fils. Piètre consolation, l'émotion a eu amplement le temps de retomber.

Bref, « Philomena » n'est pas le phénomène que j'étais en droit d'attendre au vu du titre et du résumé proposés par l'éditeur.

Je remercie Babelio pour cette nouvelle découverte dans le cadre de l'opération Masse Critique.
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Pour ma dernière contribution de 2013, j'ai décidé de finir l'année sur une note d'émotion avec un roman certainement voué à un joli succès quand il va sortir en librairie le 2 janvier 2014. J'ai reçu Philomena dans le cadre d'une opération Masse Critique "privilège", c'est bien tombé car j'avais vraiment envie de découvrir ce live donc je remercie mille fois Babelio de m'avoir sélectionnée ainsi que les Presses de la Cité pour cet envoi.

En 1952, Philomena Lee, une jeune Irlandaise, se retrouve enceinte par accident. Dans un pays où les filles mères sont très mal-vues par la société, la jeune femme, abandonnée par sa famille, est placée au couvent de Roscrea, où elle donnera naissance à un beau bébé, le petit Anthony. Comme les autres pensionnaires du couvent, Philomena est considérée comme une pécheresse par les soeurs qui vont lui mener la vie dure. Contrainte à demeurer trois ans dans cet endroit sordide, Philomena se verra dans l'obligation de travailler dur à la blanchisserie du couvent pour expier sa faute, quand à son petit Anthony, elle aura à peine le droit de le voir une heure par jour. Des femmes comme Philomena, il y en a des centaines en Irlande, réparties dans différents couvents et l'Eglise, qui a le monopole dans les démarches d'adoption, n'hésite pas à profiter de la détresse de ces jeunes femmes placées contre leur gré afin de leur prendre leurs enfants qui seront envoyés dans de riches familles américaines en l'échange d'une généreuse contribution financière.
La pauvre Philomena n'échappera pas à cette triste règle, quand Marge Hess arrive à Roscrea pour adopter une petite fille, elle jette également son dévolu sur Anthony. Les soeurs voyant là une bonne affaire vont cruellement arracher Anthony à sa mère, Anthony qui deviendra Michael A. Hess une fois arrivé aux Etats-Unis... Cette séparation douloureuse, changera alors ces deux êtres à jamais...

Âmes sensibles préparez les mouchoirs !
Martin Sixsmith retrace avec exactitude cette histoire bouleversante que l'on ne peut pas lâcher avant de savoir la fin. le titre et le résumé en quatrième de couverture sont susceptibles d'induire le lecteur en erreur car l'histoire n'est pas centrée sur Philomena mais sur Anthony/Michael. Nous assistons à la vie de ce dernier de 1955 à 1995. de son enfance à sa vie d'adulte, j'ai été touchée par ce garçon qui a toujours réussi tout ce qu'il a entrepris et en même temps n'a pas pu s'empêcher de se détruire car tourmenté par les démons et les doutes qui l'ont toujours habité concernant sa mère biologique, signant lui-même son arrêt de mort...
En plus d'être envoûtant, le récit est également une triste fresque qui nous montre les dessous de l'Eglise en Irlande. Je n'ai déjà pas une grande estime pour les membres du clergé mais là j'ai été vraiment écoeurée de voir à quel point ces hommes et femmes de Dieu peuvent être pourris et corrompus. Avec leurs principes moyenâgeux, leurs oeillères, ils ont détruit des vies pour de l'argent, vraiment minable !
L'auteur nous emmène aussi dans les coulisses du pouvoir aux Etats-Unis où l'homophobie est omniprésente et quasi-obligatoire pour survivre au milieu des requins. Nous sommes aux premières loges pour constater le laxisme dont les politiques ont fait preuve quand le Sida a commencé à se propager dans les années 80...
Le contexte général du livre m'a révoltée, tant de connerie humaine ça me rend malade(d'où les quatre étoiles de notation). Néanmoins je tire mon chapeau à l'auteur qui a su rendre ce récit vivant, j'ai failli en pleurer tellement cette lecture m'a touchée et je suis curieuse de savoir ce que l'adaptation cinématographique va donner, réponse le 8 janvier dans les salles obscures !
A lire !
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Merci à Babelio et aux Presses de la Cité …pour l'envoi de ce récit très prenant…et bouleversant, en sachant que ce livre enquête sur un drame humain, sujet délicat, qui n'a pas fini ses ravages… Des enfants, largement adultes aujourd'hui n'ont toujours pas réussi à retrouver leurs mères biologiques et à prendre connaissance de leur filiation.

En découvrant le parcours de cet enfant adopté, Anthony-Mickael, arraché à sa terre natale d'Irlande pour partir dans une autre vie , en Amérique… nous sommes interpellés par tout le déchirement d'un homme qui réussira socialement, au-delà de toutes les espérances (proche collaborateur au sein du gouvernement de Ronald Reagan) mais qui trainera avec lui une douleur de vivre intense, qu'il jugulera par des excès, des périodes de dépression intense, des séparations provoquées, etc.

Cela fait plusieurs jours que j'ai rédigé ma critique de ce livre… mais j'en suis profondément mécontente…J'ai fini par la détruire, pour la reformuler… Déjà plus de 20 critiques de ce récit-enquête ont été rédigées sur BABELIO. Ce livre me pose quelques problèmes… car il soulève plusieurs réalités politiques et humaines, inacceptables…découvertes au fil de ce récit-enquête…

Que mettre en avant ?? il y a de nombreux sujets graves,qui méritent ,chacun, que nous les soulignions...

Réalités scandaleuses tant en Irlande qu'en Amérique, couvrant les années 1952-2004, qui mettent à mal et la toute puissance de l'Eglise Irlandaise, mercantile, et puritaine… et les coulisses très sombres du monde politique américain…

Je parlerai donc un peu plus des mes impressions sur ces informations découvertes, en sus du parcours douloureux de cet « enfant perdu »..…

Comme plusieurs babéliens, je suis d'accord, avec le fait que retranscrire fidèlement le titre original de ce texte aurait été plus explicite et plus conforme à son contenu : « L'Enfant perdu de Philomena »…Alors que l'adaptation cinématographique de Stefan Frears, offre un regard différent mais très complémentaire du récit du journaliste, Martin Sixmith, mettant au centre du long-métrage, la vie, le portrait et les recherches de la mère, Philomena, le livre narre le destin fulgurant de « cet enfant perdu », brillant avocat… mais être humain brisé à l'intérieur, à qui le silence de ses origines… a laissé une hantise de l'opinion , du regard des autres, de l'abandon et d'une solitude infinie, inguérissable…

En juillet 1952 Philomena accouche seule d'un petit garçon, Anthony…mise à l'écart par sa famille, qui s'en remet aux religieuses du comté, pour cacher cette honte. Etre fille-mère en Irlande à cette époque est un véritable crime….où la « fille-mère » [aujourd'hui appellation plus respectueuse,de « mère célibataire »] se retrouvait exclue de la société, devant payer seule « sa faute »… Les plus zélés en la matière étaient les instances religieuses. Nous lisons avec effarement comment ces religieuses et la supérieure de l'institution, en question, font travailler ces jeunes filles « perdues », en les exploitant, et en faisant constamment pression sur elles. Quelques rares figures de religieuses bienveillantes, dont cette jeune soeur qui aidera Philomena à accoucher de son petit garçon… et qui en cachette, le prendra en photographie… pour que la maman puisse avoir un souvenir…

Cette histoire bouleversante que le journaliste Martin Sixsmith narre est celle de Philomena, mais surtout de son fils, avec en arrière-plan le très grand nombre de femmes qui n'ont pas eu la possibilité comme Philomena d'aller au bout de recherches complexes que le journaliste a pu faire aboutir, avec une ténacité incroyable, vu les résistances et mensonges perpétrés par L'Eglise irlandaise…
Celle-ci ayant posé l'interdiction absolue que les mères et les enfants renouent contact…

Cet ouvrage très vivant et détaillé, retrace aussi la vie politique aux Etats-Unis, dans les années 1980, alors que les démocrates et les républicains se battent pour le découpage électoral, les éternelles compromissions liées aux milieux politiques…Au nom du pouvoir et des ambitions individuelles, on constate que les républicains pour flatter leur électorat, agissent comme l'Eglise Irlandaise, dans un puritanisme et une morale extrêmes . Ainsi un rapport initial signale un véritable drame médical et sanitaire… On cache, on oublie…on fait l'autruche…Le sida a fait son apparition essentiellement dans le milieu gay, mais pas uniquement, et le gouvernement ignore l'étendue de cette maladie…Les gouvernants se contentent d'accentuer dans leurs discours et programmes, leur homophobie, et de fustiger la population homosexuelle… dans son ensemble.

Notre protagoniste, Michael Hess, doit louvoyer entre ses fonctions prestigieuses, ses responsabilités au sein du Parti républicain, avec lequel, personnellement il n'est pas en accord… louvoyer avec ses amis… et au fond de lui, trainer son besoin lancinant et récurrent de savoir d'où il vient… l'histoire est bouleversante, tant par le destin exceptionnel de Michael, foudroyé par le sida, à 41 ans….et Philomena, la maman, de son côté, dans la même quête et le même besoin de retrouver son fils…
Intriguée par la toute puissance de l'Eglise irlandaise, et de celle d'un archevêque qui fit pression un grand nombre d'années sur le gouvernement de son pays, John Charles McQuaid, je me suis mise en quête de faire quelques recherches sur ce personnage-clef. Ce dernier a sévi au sein de l'Eglise irlandaise de 1940 à 1971…a été mis en cause plus tardivement dans un autre scandale que les enfants « du péché », vendus » aux riches américains…celui de la dissimulation de délits graves concernant des prêtres…

Entre les méfaits, les mensonges de l'Eglise irlandaise, et les ignominies des politiques américains, tout cela au nom soit disant de la « Morale »…nous ne ressortons pas indemnes de ce récit-enquête très dense et bouleversant… Systèmes clérical et politique ayant broyé , ou du moins fortement amputé les destins d'une mère et d'un fils… ; sans oublier tous ceux, encore vivants… qui ne sauront jamais d'où ils viennent.
Le récit de cette recherche d'un fils « faussement abandonné » a le grand mérite d'avoir été publié et d'exister …
Le style de Martin Sixsmith, ou du moins ce que nous en percevons par cette traduction, est très vivant, enrichi de nombreux dialogues… Sans omettre la présentation des résultats de ses recherches, en Irlande comme en Amérique…qui nous apprennent un grand nombre de choses sur les coulisses de la vie politique, en Amérique, ainsi que les coulisses et les stratégies ecclésiastiques irlandaises

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C'est un bien triste visage de l'Irlande que dévoile Martin Sixsmith dans cette poignante reconstitution. Sous couvert de morale religieuse, l'opprobre jeté sur les filles-mères par l'Eglise catholique jusque dans les années 60 servait un lucratif trafic d'enfants. Rejetées par leur famille, ces femmes — très jeunes pour la plupart, parfois victimes d'inceste — étaient enfermées dans un couvent spécialisé, exploitées et forcées de renoncer à tout droit sur leur enfant. Celui-ci pouvait alors être adopté, en échange d'une généreuse donation, par des couples d'Américains.

C'est ainsi que la jeune Philomena Lee, pour avoir approché de trop près un séduisant postier de Limerick, se retrouva enfermée à Roscrea pour 3 ans. Suant sang et eau à la blanchisserie de l'abbaye, elle paya son tribut pour la naissance du petit Anthony, qu'elle pouvait voir un peu moins d'une heure chaque soir. Contrainte d'abandonner son enfant, elle ne fut même pas informée de son adoption, si ce n'est par sa disparition soudaine du couvent en décembre 1955. Adopté par un couple aisé du Missouri en même temps que la petite Mary, Anthony devint Michael A. Hess et connut une brillante carrière d'avocat au Parti républicain. Malgré ses recherches, il ne revit jamais sa mère biologique. Quant à Philomena, après 50 ans de silence, elle finit par charger un journaliste de l'aider à retrouver son fils. Voilà comment Martin Sixsmith se lança sur sa piste.

Le titre anglais "The Lost Child of Philomena Lee" est plus juste que sa traduction écourtée, car "Philomena" couvre en réalité la biographie de Michael et non celle de sa mère qui n'intervient que dans la première partie et dans l'épilogue. Hanté par l'abandon, Michael éprouve un besoin compulsif de plaire, d'abord à ses parents adoptifs, puis à ses supérieurs, servant les républicains alors que sa sympathie va aux démocrates. Homosexuel, il ne peut se satisfaire de partenaires stables et s'avilit dans des relations à risque, jusqu'à contracter le sida. Alcool, drogue et sexe extrême : les virées de Michael dans les bars gays SM sont à réserver à un public averti.

Pour reconstituer le parcours de Michael et celui de sa soeur Mary, l'auteur s'efface devant son sujet, donnant juste quelques indications sur les documents et entretiens nécessaires à l'élaboration de chaque partie. Tous les personnages prennent vie avec intensité et leurs sentiments sont exprimés au plus juste. Les photographies au milieu du livre sont très bien choisies pour illustrer cette histoire tragique qui se lit d'une traite. En toile de fond, on trouve une analyse politique de l'Irlande au temps de la promulgation de la loi mère-enfant, et surtout des Etats-unis sur les questions de société, pointant les lacunes du gouvernement dans la gestion de l'épidémie de sida des années 80.

Rompant le silence coupable entretenu par l'Église, cet hommage littéraire est une façon de rendre Anthony à sa mère. Un lien posthume qui redonnera, je l'espère, un peu d'espoir à tant de vies brisées au nom d'une morale d'un autre temps.

Un grand merci à Babelio et aux Presses de la Cité pour la découverte de ce livre en avant-première, en attendant la sortie du film éponyme de Stephen Frears.
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Citations et extraits (26) Voir plus Ajouter une citation
Ainsi, à l'âge de trente deux ans, Michael Hess, l'enfant naturel né dans un obscur couvent d'Irlande, avait, grâce à la loterie des adoptions, accédé à un poste de pouvoir dans l'une des plus grandes puissances mondiales. Parfois, il en éprouvait comme un vertige. Sa promotion aurait dû le combler, lui qui aspirait tant à être aimé et accepté, elle aurait dû lui confirmer qu'il avait sa place dans le monde, mais la conviction de son indignité ne le lâchait toujours pas.Je ne mérite pas ce poste; je suis un imposteur, tôt ou tard, je serai percé à jour, ainsi pensait l'homosexuel qui avançait masqué au sein d'un parti homophobe, l'orphelin déraciné dans un monde de certitudes inébranlables. (p.399)
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— Ta vraie mère te manque ? C'est ça ?
— Je ne sais pas. Parfois il me semble que je l'ai complètement oubliée. Parfois… j'ai l'impression de me rappeler sa présence.
Il peinait à mettre des mots sur cette sensation.
— C'est comme quand on entend une super chanson à la radio. D'abord, on n'arrive plus à se la sortir de la tête, mais elle finit par s'estomper, et un beau jour on ne se souvient plus de l'air, seulement de ce que l'on a ressenti en l'écoutant. C'est ça, que j'éprouve.
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"That's classic", Heinlein said. "The orphan is always looking for acceptance but always expecting rejection. It's like they feel they're never wanted and can never fit in.
Their birth mother rejected them so they think there's something wrong with them.: they expect everyone else to reject them too.
So you get the orphan who spends his whole life time being obliging and docile in the hope his new parents won't send him away.
Then you get the other type who's always causing trouble, like he's saying:
"You're gonna reject me, so screw you!"
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Une infinie solitude creusait les traits de Philomena, solitude commune aux jeunes filles qui peuplaient par centaines le couvent de Roscrea et d'autres établissements similaires à travers toute l'Irlande : répudiées pour un péché qu'elles avaient commis presque sans le savoir, il s'agissait souvent d'enfants soumises à un châtiment implacable et adulte.
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Le vin se boit par la bouche
L'amour se boit par les yeux;
Voilà tout ce que l'on saura
Avant de vieillir et mourir.
Je porte mon verre à ma bouche,
Je te regarde, et je soupire.
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