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Yves Bouillé (Traducteur)
EAN : 9782330177584
208 pages
Actes Sud (05/04/2023)
3.53/5   36 notes
Résumé :
Fin des années 2000, une jeune Vietnamienne rentre à Saïgon après avoir passé dix ans à Paris. En arrivant les souvenirs de son vécu dans la capitale française se conjuguent à la redécouverte de son peuple et des siens. La jeune narratrice, libre, lucide et critique à la fois, porte ainsi sur son époque, sur la condition féminine comme sur son avenir amoureux et professionnel un regard d’une singulière richesse.

Plume acide et loin des clichés, touch... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (10) Voir plus Ajouter une critique
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Doan Anh Thuân est née au Vietnam en 1967 et a fait des études de Lettres à l'université de Moscou et à la Sorbonne. Elle a une soeur jumelle, Doan Cam Thi, qui a traduit plusieurs de ses oeuvres en Français. À propos de traductions, Thuân a traduit Modiano, Sartre et Houellebecq en Vietnamien. Son mari, Tran Trong Vu, est artiste peintre et illustrateur de la couverture du livre sous rubrique.

Thuân vient donc d'un milieu qui aime art et littérature, tout en ayant elle-même une solide formation littéraire. Dans son pays d'origine elle a gagné d'ailleurs plusieurs prix littéraires.

Le thème favori de ses romans est incontestablement l'exil. Sujet dominant dans entre autres ses romans "Chinatown" en 2005, "L'ascenseur de Saïgon" de 2013 et "Un avril bien tranquille à Saïgon" en 2017.

"Le parc aux roseaux" n'y constitue pas une exception. Il s'agit d'un recueil de souvenirs d'adaptation aux moeurs locales dans le triangle Hanoï, Saïgon et Paris.

Lorsque à un certain moment du récit de la narratrice-sans-nom (l'auteure ?) quelqu'un lui conseille de rentrer gentiment chez elle, Thuân note : "Je ne suis jamais très sûre de savoir où cela se trouve : à Saïgon ou à Paris ?" Au bout de 10 ans à Paris, elle éprouve des difficultés d'adaptation dans son pays d'origine.

Le titre de l'ouvrage se réfère à l'endroit de la capitale française où la narratrice, de passage à Paris pour la préparation d'un doctorat, a rencontré son amoureux français, P.

Le dénommé P est un des personnages décrits dans ce roman relativement court (204 pages), il y a aussi la Russe Lena, son mari André et ses 4 enfants, l'étrange Monsieur Mac, qui avait tout perdu, etc.

Mais le centre de l'univers de la narratrice demeure cependant sa famille. Tout d'abord son père, qui malgré sa santé chancelante est toujours aux grands soins pour sa fille cadette, qu'il pousse inlassablement à terminer son doctorat. Puis sa soeur aînée de 2 ans, qui a épousé le fils d'un grand ponte du Parti, a pleins de moyens et lui finance ses études et séjour à Paris.

Thuân cite à ce propos son auteur fétiche Léon Tolstoï dans "Anna Karénine" : "Toutes les familles heureuses se ressemblent, mais les familles malheureuses le sont chacune à leur manière".

Thuân manie une belle langue poétique avec de brèves références à l'histoire sanglante de son pays, sans toutefois insister.

Personnellement, je préfère un récit linéaire, même si cela soit probablement moins littéraire, plutôt qu'un récit dans lequel l'auteur saute d'un personnage à un autre, en rendant le récit moins captivant.

Une citation en guise de conclusion. " Toi et Lena, me dit un jour P, vous êtes d'incorrigibles romantiques. L'amour est la première victime et le plus grand perdant de la guerre." (Page 154).
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Quelle est la nature des liens qui subsistent entre Français et Vietnamiens ? La période coloniale est close depuis longtemps, la guerre ayant ensanglanté ce pays est terminée depuis 1975, si l'on n'inclut que les guerres menées par les Français , puis les Américains . Dans un roman à la facture originale, Thuân, auteure vietnamienne conte le parcours d'une thésarde qui a étudié longuement à Paris, s'est liée avec un certain P. C'est la dénomination accordée à son amant français. Ce qui frappe d'emblée dans le récit, ce sont les liens familiaux décrits avec le père de la narratrice : un homme patriote qui décide de rentrer au Viêtnam après la victoire de 1975 : « de l'aéroport de Marignane, il se rendit à l'entreprise où il était ingénieur en mécanique, tenant en main son passeport de la république démocratique du Viêtnam. Ses collègues se jetèrent sur lui pour le prendre dans leurs bras et l'applaudir. « le Viêtnam a gagné ! ».
Ce père exerce sur la narratrice une sorte de tutelle à distance, de surveillance discrète , lui demandant lors de chaque conversation téléphonique :quoi de neuf à Paris ?
Ce sont les descriptions des tempéraments respectifs des peuples français et vietnamien qui éclairent le lecteur sur la vision de la narratrice de son pays de résidence , la France : « Si le pessimisme est la maladie chronique des Français, l'optimisme est le plus grand point commun des Vietnamiens .Ils ont sont si fiers qu'ils ont mis au point pour l'espèce humaine un nouveau concept qu'ils ont baptisé « optimisme révolutionnaire », mais qu'au final eux seuls comprennent et célèbrent à l'unisson . »
La narratrice s'interroge, aussi sur le recul de l'influence française au Viêtnam, et plus particulièrement sur l'apprentissage de la langue, délaissée au profit de l'anglais, dont la possession et la maîtrise sont synonymes de réussite sociale reconnue. Une autre interrogation décisive pour la narratrice est exposée : quel est mon chez soi ? Paris, Saigon, Hanoi ? Au terme d'un long débat intérieur, notre thésarde vietnamienne se rend compte qu'elle n'aurait pas été prête à « sacrifier tous mes dimanches matin pour aller faire du jogging dans les bois avec lui. » Cet homme, c'est P., l'amant français. La réponse à cette question est négative, ce qui la décide à retourner au Viêtnam.
Roman original dans son approche, qui ne dédaigne pas égratigner les stéréotypes entretenus en France sur les femmes asiatiques, et éclaire d'un jour particulier les aspects de la vie du Viêtnam contemporain, pas celui des guerres, celui de la paix retrouvée, mais un Viêtnam sorti des imageries journalistiques, plus ancré dans le quotidien des choses.
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Paris, Saïgon et, à un degré moindre, Hanoï. C'est entre ces lieux que la narratrice du Parc aux roseaux navigue, juxtaposant les époques, dans cette chronique à la fois individuelle et familiale. Point de progression dramatique ni chronologique ici, mais une mise au point, comme en photographie, sur la situation d'une jeune femme qui se rend compte, en revenant dans son pays natal, le Vietnam, qu'elle est nostalgique de son pays d'adoption, la France. Un roman impressionniste, donc, agréable à lire, qui questionne la quête d'identité d'une exilée, qui n'est plus vraiment chez elle près de ses racines, et qui essaie d'exister entre un père trop protecteur, qui a aussi connu la France, avant la révolution dans son pays, et une soeur, symbole d'un certain Vietnam clinquant d'aujourd'hui. D'autres personnages apparaissent également au fil des pages, comme l'amant français de la narratrice, très présent par son absence, et d'autres, de moindre importance, mais auxquels l'autrice accorde quelques instants, pour enrichir son récit, sans craindre de se perdre en digressions. Un livre attachant, doux et amer, écartelé entre le pessimisme français et l'optimisme vietnamien, y compris avec des "sourires forcés", pour dire aux autres que tout va bien, finalement, même si le chemin vers l'équilibre se révèle bien tortueux.
Lien : https://cinephile-m-etait-co..
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Ce nouveau roman de Thuân est passionnant. Il questionne de façon poignante la notion de l'exil, car ce n'est plus la nostalgie du Vietnam qu'il raconte, mais celle de la France. Il fallait en effet pour la narratrice ce douloureux retour dans son pays natal après dix années d'absence, où elle se sent complètement inconnue, pour savoir combien elle est attachée à la France, pays d'adoption. La vie certes luxueuse mais étouffante à Saigon lui fait regretter sa liberté parisienne : « Tout était si chic et si moderne que je me sentis gênée. C'est sans doute pour cela que depuis mon retour ma valise est restée intacte dans un coin de ma chambre, avec mes vêtements et quelques romans que j'avais remis dedans après les avoir lus. Parfois le matin en me réveillant, je regrettais mon appartement parisien désuet, avec son parquet grinçant et ses petits coins secrets. le vasistas avec vue sur le ciel. le minuscule oranger placé juste en dessous, offert par P pour mon anniversaire, cet étrange oranger qui ne vivait que d'air et d'eau de source et qui restait fleuri toute l'année » (p.136). Elle parvient à cet aveu qui prend soudain la dimension d'une quête identitaire : « Parfois (…) je ne suis jamais très sûre de savoir où cela se trouve, « chez moi » : à Saigon ou à Paris ? » (p.136).
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L'autrice Thuân est née au Vietnam en 1967.
Dans son parcours, elle étudiera les littératures russes et anglaises.
Arrivée en France en 1991, elle y poursuit ses études de la littérature française à la Sorbonne.
L'exil est le thème principal de son écriture, rien d'étonnant
quand on connaît l'histoire tourmentée de son pays d'origine où ses écrits ont été censurés.

Belle occasion de se remémorer les liens entre la France et le Vietnam.
En 1887, ce pays lointain devient une importante colonie française, renommée Indochine jusqu'à la défaite cuisante des envahisseurs et la proclamation de l'indépendance en 1954.
Petite ou grande parenthèse, ce pays du sud asiatique ne va pas pour autant connaître la paix.
Les américains débarquent pour combattre le communisme, les rouges qui sont leur bête noire.
On est reparti jusqu'en 1975.
Recentrons nous sur le roman, l'histoire personnelle de l'autrice inspire la narration.
A la fin des années 2000, l'héroïne quitte Paris où elle séjourne depuis 10 an pour étudier la langue française et rentre dans son pays.
Pour elle, une redécouverte de son peuple, des incompréhensions et beaucoup de questions.
Elle exprime son ressenti avec des critiques acides teintées d'humour absurde sur son pays, sa famille et la condition féminine.
Un sujet pas souvent évoqué dans la littérature, les liens du langage entre deux cultures, deux continents, des traditions et un art de vivre totalement opposés.
Certes enrichissants mais empreints de tragédie humaine.

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critiques presse (2)
Bibliobs
09 juin 2023
Humour grinçant, langue « sinueuse comme une bombe à retardement » : « le Parc aux Roseaux », le dernier roman de l’écrivaine, est un bijou à découvrir sans tarder.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
LeMonde
21 avril 2023
Enlevé et plein d’humour, ce texte pose un regard décalé sur l’exil, la famille et la France, peignant notamment « des Français si complexés par leur ­pessimisme qu’ils le justifient en écrivant ­inlassablement de la ­littérature ».
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Malgré la guerre, la famine, l’embargo, les persécutions, la corruption, les Vietnamiens sourient immanquablement en toute circonstance, d’un sourire triomphant, comme ils disent. Les larmes ne sont réservées qu’à deux occasions : les funérailles et les chagrins d’amour. Les Français ne pleurent pas aux enterrements, rarement lors des ruptures, mais ils vont se pendre dans la forêt ou se jettent du haut d’une falaise pour la simple raison que les feuilles d’automne sont trop jaunes, que la mer est trop bleue ou que les oiseaux sont trop insouciants. Les Vietnamiens, eux, se suicident lorsqu’ils perdent un pari mais sûrement pas à cause de la solitude qu’ils évoquent comme les Français parleraient de voyages. Ils sont fascinés par les chansons qui exaltent la solitude. Chaque soir, des hommes rassemblés autour d’une bière devant un écran de karaoké, la cuisse d’une hôtesse sous une main et un micro dans l’autre, chantent en chœur "Parce que je suis seul, aimer c’est aussi être seul".
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P m’enlaça et me demanda si j’allais bien et comment j’avais fait pour le trouver ici. Je ne lui répondis pas. Les larmes inondaient mes paupières, coulaient sur mes joues et mes lèvres. Incapable de les sécher, je les avalai. Elles m’empêchaient de lui dire quoi que ce soit. Je le regardais sans sourciller. J’avais le nez bouché. La bouche sèche. Comme si j'étais muette, je fis signe à P de me suivre: mon appartement n'était qu'à une centaine de mètres. Il secoua la tête. Ses cheveux blancs à la lumière du soleil ressemblaient à des filaments de nylon. Son teint était hâlé. Les rides de son visage étaient plus marqués. Ses yeux étaient décolorés. Il était comme le film en négatif de lui-même lors de notre dernière rencontre au parc aux roseaux.
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Si le pessimisme est la maladie chronique des Français, l’optimisme est le plus grand point commun des Vietnamiens .Ils ont sont si fiers qu’ils ont mis au point pour l’espèce humaine un nouveau concept qu’ils ont baptisé « optimisme révolutionnaire », mais qu’au final eux seuls comprennent et célèbrent à l’unisson .
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Dans un de ces rêves, P est à bord d'un train, un train très étrange, qui avance sans locomotive, ni conducteur, et je cours derrière en criant son nom, tout comme aujourd’hui j’ai couru dans la ruelle, avec ce courant d’air chaud qui soufflait dans mes oreilles, avec le sentiment que mon cœur bondissait hors de ma poitrine.
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Si en France les livres nous enseignent : "Je pense donc je suis", au Vietnam la vie nous apprend : "Je calcule pour ne pas mourir"
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