Doan Anh Thuân est née au Vietnam en 1967 et a fait des études de Lettres à l'université de Moscou et à la Sorbonne. Elle a une soeur jumelle, Doan Cam Thi, qui a traduit plusieurs de ses oeuvres en Français. À propos de traductions, Thuân a traduit
Modiano,
Sartre et
Houellebecq en Vietnamien. Son mari, Tran Trong Vu, est artiste peintre et illustrateur de la couverture du livre sous rubrique.
Thuân vient donc d'un milieu qui aime art et littérature, tout en ayant elle-même une solide formation littéraire. Dans son pays d'origine elle a gagné d'ailleurs plusieurs prix littéraires.
Le thème favori de ses
romans est incontestablement l'exil. Sujet dominant dans entre autres ses
romans "
Chinatown" en 2005, "
L'ascenseur de Saïgon" de 2013 et "
Un avril bien tranquille à Saïgon" en 2017.
"
Le parc aux roseaux" n'y constitue pas une exception. Il s'agit d'un recueil de souvenirs d'adaptation aux moeurs locales dans le triangle Hanoï, Saïgon et Paris.
Lorsque à un certain moment du récit de la narratrice-sans-nom (l'auteure ?) quelqu'un lui conseille de rentrer gentiment chez elle, Thuân note : "Je ne suis jamais très sûre de savoir où cela se trouve : à Saïgon ou à Paris ?" Au bout de 10 ans à Paris, elle éprouve des difficultés d'adaptation dans son pays d'origine.
Le titre de l'ouvrage se réfère à l'endroit de la capitale française où la narratrice, de passage à Paris pour la préparation d'un doctorat, a rencontré son amoureux français, P.
Le dénommé P est un des personnages décrits dans ce roman relativement court (204 pages), il y a aussi la Russe Lena, son mari André et ses 4 enfants, l'étrange Monsieur Mac, qui avait tout perdu, etc.
Mais le centre de l'univers de la narratrice demeure cependant sa famille. Tout d'abord son père, qui malgré sa santé chancelante est toujours aux grands soins pour sa fille cadette, qu'il pousse inlassablement à terminer son doctorat. Puis sa soeur aînée de 2 ans, qui a épousé le fils d'un grand ponte du Parti, a pleins de moyens et lui finance ses études et séjour à Paris.
Thuân cite à ce propos son auteur fétiche
Léon Tolstoï dans "
Anna Karénine" : "Toutes les familles heureuses se ressemblent, mais les familles malheureuses le sont chacune à leur manière".
Thuân manie une belle langue poétique avec de brèves références à l'histoire sanglante de son pays, sans toutefois insister.
Personnellement, je préfère un récit linéaire, même si cela soit probablement moins littéraire, plutôt qu'un récit dans lequel l'auteur saute d'un personnage à un autre, en rendant le récit moins captivant.
Une citation en guise de conclusion. " Toi et Lena, me dit un jour P, vous êtes d'incorrigibles romantiques. L'amour est la première victime et le plus grand perdant de la guerre." (Page 154).