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Jean-Louis Le Touzet (Collaborateur)
EAN : 9782749106922
252 pages
Le Cherche midi (23/10/2008)
3.8/5   175 notes
Résumé :

"Prendre la mer, c'est tout sauf une fuite, c'est au contraire une discipline et une contrainte. Décider d'aller chevaucher les vagues, c'est une conquête et, pour conquérir, il faut partir. C'est l'extraordinaire tentation de l'immensité. La mer, c'est le cœur du monde. Vouloir visiter les océans, c'est aller se frotter aux couleurs de l'absolu. Il m'a toujours semblé indécent de ne pas aller voir partout dans le monde. Il me fallait partir sur tous les océ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (26) Voir plus Ajouter une critique
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Je ne m'autoriserai pas à parler de l'Océan. Je n'en n'ai acquis les droits. Ce serait de ma part une usurpation, un vol manifeste. Rien à partager, de ce qui m'est étranger et n'ai été chercher. Du fond de mes Ardennes, je n'ai pu capter son appel. L'on est plus marqué par le lieu de sa naissance qu'on ne veut l'admettre.

Par deux fois, la Bretagne m'a rejeté. Par deux fois déjà. Rudement, violemment. Probablement je ne la méritais pas. Aussi quelle arrogance : prétendre découvrir la Bretagne en ayant dédaigné l'Océan. "Au bout du compte, je me dis que nous ne nous sommes pas compris mutuellement, qu'il y a eu vingt-cinq ans de rendez-vous loupés avec l'autre. J'ai l'impression que l'échange a été un peu raté." p.185 (à propos des Antilles). Je prépare finalement une nouvelle tentative. J'ai demandé à un ami d'enfance qui affectionne la Bretagne de me prêter quelques livres, nous en avions jadis feuilleté un très beau sur les phares bretons, c'est à celui-là que je pensais. Je me retrouve avec deux guides Michelin. Mais ce n'est pas à ce genre de rencontre que j'aspire.

Quels meilleurs ambassadeurs pourrais-je trouver que des Bretons ? D'où cet emprunt Ocean's Songs. de toute façon, il y a deux ou trois ans que j'ai décidé de lire Mr de Kersauson après un passage à On n'est pas couché pour présenter un de ses livres. Celui-ci, un autre ? Peu importe, j'ai écouté ses silences et comment ne pas être marqué par ce regard vif où transparaissent une brillante intelligence et une profonde émotion. Bien sûr quelques flèches pour se défendre, quelques bons mots pour se détendre, quelques convictions pour s'identifier, une ou l'autre réflexion par l'occasion, la moitié d'une confidence par la connivence d'un autre Breton. Mais ces silences éloquents. Qui me hurlaient : j'ai tout écrit ; qui leur hurlaient : c'est bientôt fini toutes ces questions à la con.

Alors j'ai lu : "Voyager, c'est rechercher toujours les lumières, les instants de grâce promis. De ce point de vue, les femmes possèdent souvent les clés du voyage. Ce sont les plus grands peintres de mes lieux visités." p.91 Je serais mufle de ne pas remercier ces Bretonnes qui m'aident dans ma préparation, elles se reconnaitront:-) Oui, Mr de Kersauson, j'ai tout lu de ces belles pages couvertes de votre prose vraie, délicate car toute en retenue. Je me suis attardé dans les interlignes, cette intériorité des grands écrivains comme le sont les silences des grands hommes.

Aussi je partirai me perdre pour me trouver. Et comme toujours, dans cette chronique et ce proche voyage, je ne vole rien mais je garde tout. du reste si vous vous tâtez, je vous renvois vers les belles critiques bretonnes qui vous parlent d'Ocean's Songs en toute légitimité. Pour ma part je me prépare :
https://www.youtube.com/watch?v=JgvKMnrig74
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Si nous l'aimions avant il n'y avait aucune raison pour qu'on ne l'en aimât pas davantage. Il est consistant par son aura, par son verbe et en plus il a ce regard de mer, calme ou agité, ça dépend ! Cette poésie magnifique témoigne qu'aucune de ses traversées ne lui a ravi l'attraction qu'il porte à tous ces horizons parcourus et qu'aucune mer, fût-t-elle sournoise dangereuse même, ne parviendra jamais à l'éloigner. Il est l'homme, fait de ses voyages et celui de ses aspirations. J'aime bien que l'on attribue à ce récit de la sensualité puisque son amour est incommensurable et que c'est à courir le monde que son coeur a été conquis. S'il vient nous le raconter, c'est un grand plaisir pour le lecteur de prendre le large avec lui pour découvrir sa géographie maritime.
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Je referme le livre, relève la tête, regarde les objets qui m'entourent, j'hésite …

Mes yeux s'abaissent, croisent une fois de plus la couverture du livre, ce visage buriné, fouetté d'intempéries,
ces yeux ivres de bleus … J'y plonge.
Tour à tour incisif, tranchant comme une lame, passionné, rude, irritant, dérangeant,
puis subrepticement nostalgique, émouvant et si souvent poétique dans sa façon de « me » conter les houles, les vents et les couleurs des différents océans, Kersauson me bouscule, me chahute , m' illumine ou m'attendrit.

Sa pertinence me claque aux joues, je bouillonne … m'abandonne.
Surprenante description que ces « portraits de mers » ciselés comme un orfèvre,
dont je retiendrai celui qui sans doute me tient le plus à coeur, celui de la mer d'Iroise :

« Ouessant, Sein, Molène, l'une des zones du monde où il y a le plus de bouées et de balises, de phares et de feux.
Entre l'île de Sein, le Four, Ouessant, la pointe Saint-Mathieu, le cap de la Chèvre, la pointe du Raz,
tout n'est qu'un jardin d'épines sur une mer médiévale qui se défendrait contre les intrus.
Au couchant on dirait un orchestre des ténèbres où brille l'éclat des cuivres. Un accordéon de récifs sur lesquels
viennent culbuter les forts courants. C'est la mer des grandes nefs et des grandes orgues …
L'Iroise est une mer sanguine qui plante ses couverts dans la table … Une mer habitée par le vent …
Une mer de souffrance … qui meurtrit, blesse et mord jusqu'au sang.
C'est le royaume de la peinture à l'huile. Quatre saisons dans la même journée …
L'Iroise c'est ma tapisserie d'Aubusson. »

Mu par un déterminisme et une volonté qui me saisit, Kersauson me semble taillé dans la roche,
inébranlable, imperturbable, parfois presque intouchable.
En lui depuis l'enfance cette irrépressible envie de « partir », voyager, courir le monde ... Je l'envie.
C'est l'Océan son miroir d'immensité, de liberté, de dépouillement et d'absolu,
c'est dans ses teintes qu'il se retrouve, c'est dans son souffle qu'il se ressource … Je le suis.

« Je fais confiance au voyage pour qu'il me conduise dans le tourbillon émotionnel du monde …
C'est toujours comme ça que j'ai vécu le voyage. Cette infinité de bleus, de lumières
et ces arrivées de nuit ouvrent mon coeur en deux. »
« Pour moi, là où il n'y a pas de mer, le monde est gras, il sent l'humus, la glaise ou la ville ;
sans la mer, ça ne peut pas être joli ! La terre ne m'intéresse pas du tout,
sauf quand elle est frangée de mer, alors elle est belle … »
« Prendre la mer … C'est l'extraordinaire tentation de l'immensité.
La mer c'est le coeur du monde. Vouloir visiter les océans, c'est aller se frotter aux couleurs de l'absolu »

A peine trois pages sur Eric Tabarly, à peine trois mots, mais tout est dit, fort :
« C'était mon maître.»
Et puis cette brume aux yeux quand dans « l'à peine » surgit la peine, un sombre soir de juin 98 …
Je larme, touchée par ce passage où « l'intouchable » est vulnérable.

J'avale « sa » Polynésie, les Antilles, l'Asie ou l'Angleterre … anecdotes, aquarelles …
J'avale tout, avide jusqu'à la fin …
Je reviens sur Tabarly
C''est là que je m'arrête, émerveillée et proche,
C'est là que je m'arrête, au ras de l'eau, au milieu d'un silence, au bord d'une solitude, pleine.

Je referme le livre, relève la tête, regarde les objets qui m'entourent, les quitte
Je prends mon rien de rêve, mon tout de vie, monte sur le « tapis volant »
Ivre de bleus … j'y plonge.
Je vais, moi aussi, rejoindre « les griffures de la mer ».
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Merveilleux Olivier de Kersauson, grand navigateur, bourru, capable d'aligner des mots d'une sensibilité étonnante aussi bien pour parler de la mer et de son infinité que de l'homme, celui qu'il est, communiquant ses certitudes et ses doutes, ceux qu'il côtoie, essentiellement en mer mais aussi sur terre.

Kersauzon, c'est l'homme libre, baudelairien, qui chérit la mer, toutes les mers et tous les océans où il emmène ses lecteurs qu'ils aient entendu ou non l'appel du grand large, et qui ressentiront dans tous les cas ce qu'il exprime dans ces lignes, avec vigueur, pudeur, sincérité.

Et puis, il y a dans ce livre l'évocation de cette nuit où il apprend en mer la mort de Tabarly et nous fait partager sa peine et même sa prière. C'est le marin et l'humain qui souffre de la disparition de celui qui était la référence, celui qui domptait vent et mer qui l'emportèrent vers son linceul.

Ce chant de l'océan offert par Olivier de Kezsauzon est celui qu'entendront parfaitement tous les solitaires, un chant qui vient des vagues, de tous les marins perdus, plus langoureux que celui des sirènes d'Ulysse, qui nous entraîne pour de trop brèves pages à la suite de ce grand navigateur.
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Olivier de Kersauson et l'océan , une belle histoire qui dure .

Quel plaisir de retrouver ce mec que l'on sait pudique mais aussi capable de vous étendre pour le compte au détour d'une répartie cinglante dont lui seul a le secret . S'il est un sujet qu'il maîtrise parfaitement , c'est bien celui qui le passionne depuis tout gamin , l'appel du grand large . Il suffit , pour s'en convaincre , de parcourir son foisonnant relevé de navigation s'échelonnant de 1967 à 2008 ( date de parution du bouquin ) .
Bien loin du vide abyssal habituellement côtoyé par un Ribery , voir un Benzema des grands jours , le bonhomme , en plus d'être gouailleur , semble réellement érudit , ce qui ne gâche rien .

OdK se propose de vous embarquer sur tous les océans , vous faire part de son ressenti quant aux autochtones fréquentés et ce , en quelques 250 pages , tout en se livrant à dose homéopathique , l' étalage n'ayant jamais été son fort .
Le bouquin est calibré comme un véritable petit lexique maritime . Chapitré judicieusement , il survole les océans et les continents puis vous sèche sans en avoir l'air au détour d'une petite anecdote bien sentie .
Son rapport au père spirituel et mentor qu'était Tabarly traduit parfaitement la retenue touchante du bonhomme . OdK consent à se raconter , avec parcimonie , dissimulant régulièrement sa réserve naturelle derrière le masque d'une causticité cinglante .
Ce vieux loup de mer fait partie de cette race de taiseux solitaires que l'on écoute attentivement histoire de faire mentir l'adage : la parole est d'argent...

Ocean's Songs , vous n'en reviendrez pas , dixit Costa Croisières !
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Citations et extraits (67) Voir plus Ajouter une citation
La terre ne m'intéresse pas du tout . Sauf quand elle est frangée par la mer , alors elle est belle : un champ de blé agité par les brises marines où se mêlent l'odeur du blé qui est en train de mûrir et l'air frais qui vient de la mer , ça , c'est extraordinaire .
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Durant la nuit du 12 au 13 juin 1998, je suis à bord d'un ferry entre l'Angleterre et la France. La nuit est noir, il ne fait pas beau, vent de sud-ouest assez fort. A l'intérieur, il y a un relent de graisse qui monte des machines, des lueurs de néons atroces dans le bateau... Je suis un peu somnolent près d'une vitre, je tente de voir dans cette nuit noire. Il y a un marin qui vient me chercher et me dit que le commandant désire me voir. Je monte et, là, le commandant (un visage rond, très doux, un peu triste) me dit : "J'ai une mauvaise pour vous et pour nous tous: Tabarly a disparu en mer." Je suis séché! Je tente, avec mon portable, de joindre Gérard Petitpas ou Jacqueline Tabarly mais ça ne marche pas. Le commandant me donne les moyens de communication. Je parviens à les joindre. Et ils confirment. Je sors de là abattu. Pour moi, Tabarly, il est aussi éternel que le courage, la force, la droiture. Il représente tellement ces valeurs que l'homme qui les incarne ne peut avoir disparu . Ensuite, je monte sur le pont, il pleut, il y a trente-cinq à quarante noeuds de vent, et le commandant et un matelot viennent me voir. Ils me disent: "Si vous voulez, on va prier." Je ne suis pas très à l'aise et, dans le même temps, je suis très touché. J'arrive à peine à prononcer les mots du Notre-Père. C'est le commandant et le matelot qui récitent. On est sur l'eau, c'est la nuit, et, à mon sens, on est entrain de prendre la dépression qui a mis Tabarly au tas... J'entends la voix du commandant qui prie... J'imagine Eric jeté à l'eau... Et là, il y a quelque chose de paisible qui tombe... Surtout, sentir à ce moment-là que je ne suis pas seul à avoir du chagrin. On est trois, sur le pont, dans la nuit noire, tout est noir. Tout d'un coup, j'ai un peu de paix, je ne suis pas tout seul...
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(...) toujours se souvenir que le voyageur est un peu comme un type qui attendrait l'autobus . Il ne doit jamais rien imposer à l'autre , ni son verbe , ni ses idées . Les choses sont très différentes aujourd'hui puisque le voyageur est un consommateur . Il choisit , compare et parfois assigne devant les tribunaux si les frites sont molles .
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J'ai sept ans et la perception aiguë de la fin d'une souffrance qui a marqué nos pères. Mon frère Yves et moi étions très liés et avions compris très petits les nuances de l'horrible. Mes parents étaient tous deux orphelins de la Grande Guerre. On ne disait mot à la maison de ces deuils mais les silences, les centaines d'illustrations d'époque dans les malles du grenier, les clichés sur tous les guéridons de la maison, les photos jaunies des grands-parents et oncles disparus parlaient pour eux. La guerre n'était pas une fiction.
C'est étrange mais depuis mes huit ans, je pensais que j'irais faire la guerre et que je ne pouvais déroger à cette règle qui conduisait à sacrifier une génération d'hommes entre dix-huit et vingt-cinq ans.
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La Bretagne avec l’Île de Sein.

‘’Tout est grandiose sur l’Ile de Sein : simplement un mètre cinquante au-dessus de la mer. A cinq miles à l’ouest, Ar-men, qui éclaire la chaussée de Sein. La phare le plus éloigné de nos côtes : près de quarante mètres et presque 40 ans pour l’ériger sur un rocher gros comme une tête d’épingle. Mais Sein c’est l’appel du 18 Juin. 125 Sénans qui rejoignent De Gaulle :’’L’Ile de Sein, c’est un quart de la France’’, avait dit le grand homme. Cette ile est extraordinaire et d’une beauté ravageuse. Pas d’âme au rabais là-bas. Une ile de grand caractère. Population insoumise et muette, mais fidèle jusqu’à la mort. Il y a un quant-à-soi chez ces iliens. Ce ne sont pas des gens prompts à prêter l’oreille aux enchanteurs de passage. Ils sont chez eux. Ils sont dans leur ile, dans leur histoire, dans leur monde. Les iliens sont dignes et denses comme le marbre. Mais c’est vrai que sur ces îles en hiver, la vie est d’une grande rudesse. A Ouessant, lors des tempêtes de Noroit, les embruns montent à vingt mètres. Les vagues sont énormes. L’île est agressée, entourée d’un monde féroce. Sein a subi de telle tempête que l’île fut recouverte par la mer.

Ce monde insulaire est un monde clos : la nuit, le feu d’un bateau lointain, les gens réunis autour d’un poêle en fonte et le tic-tac de la pendule, les casquettes en toiles accrochées aux patèresalors que, dehors, la pluie ramollit la terre.’’
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