Avez-vous entendu parler de collapsologie ? de décroissance ? Des termes dans l'air du temps, depuis quelques années. C'est ce dont parle ce roman... écrit il y a presque 50 ans.
Y a-t-il une intrigue ? Oui, en quelque sorte. C'est l'effondrement de la société, décrit par une femme âgée qui a pris en charge une petite fille avec son chien.
L'écriture est incroyablement riche, exigeante, ne cédant à aucune facilité (et impeccablement traduite par
Marianne Véron).
Chaque plan de l'histoire recèle plusieurs dimensions.
La femme âgée est la narratrice passive de l'effondrement, du fond de son appartement où semble régner encore une sorte d'ordre. Mais par moments, le mur de son salon s'évanouit pour lui donner accès à un univers onirique où elle se promène dans des maisons vides, des jardins accueillants, et dans les souvenirs d'autres personnes.
L'enfant dont la responsabilité lui est échue, Emily, au fil de ces deux cents pages très denses, semble un condensé d'une vie de femme : elle grandit, passe par l'adolescence et un premier amour, se révèle dans l'effondrement une personne pleine de compétences : bricolage, botanique, cuisine... Survie, en un mot.
Et à son tour elle prend en charge une flopée d'enfants perdus, telle une Wendy de cauchemar.
Le troisième personnage principal, c'est le chien, victime sacrificielle et muette, forcément, mais dont la présence constitue l'un des fils de l'intrigue.
Une oeuvre écologiste et féministe, perturbante par sa force, par la clairvoyance avec laquelle elle dénonce le monde à venir.