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EAN : 9782234073654
240 pages
Stock (09/10/2013)
3.73/5   153 notes
Résumé :
L’immigration qui contribue et contribuera toujours davantage au peuplement du Vieux Monde renvoie les nations européennes et l’Europe elle-même à la question de leur identité. Les individus cosmopolites que nous étions spontanément font, sous le choc de l’altérité, la découverte de leur être. Découverte précieuse, découverte périlleuse : il nous faut combattre la tentation ethnocentrique de persécuter les différences et de nous ériger en modèle idéal, sans pour aut... >Voir plus
Que lire après L'identité malheureuseVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (16) Voir plus Ajouter une critique
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Il y a déjà d'excellentes et synthétiques critiques de cet ouvrage sur Babelio, la mienne sera sûrement moins précise, moins agréable à lire.C'est en effet un excellent livre, constat et analyse d'une époque soi-disant méfiante à l'égard de toute idéologie, et qui s'enveloppe de toutes sortes de protections afin de ne pas voir ce qui est visible, entendre ce qui nous est corné aux oreilles, dire ce qui devrait être dit.Cette position étant en soi-`même une idéologie, celle du politiquement correct.
Ma foi, j’ai lu ce livre qui a bien fait parler de lui, considéré comme une infâmie par certains, une indignité par d’autres, un brûlot à manier avec prudence par les plus tièdes, récupéré comme peuvent l’être les livres engagés, tordu et essoré dans tous les sens. Je me suis assise à côté du pilote dans ce rallye quelque peu risqué, mais à l’arrivée, mis à part quelques passages en effet un peu verglacés où il a fallu toute la maîtrise d’Alain Finkielkraut pour éviter une sortie de route, je constate que rien dans ce livre ne justifie le barouf qui a été fait autour, sinon l’égocentrisme bien connu des intellectuels attirés par un débat croustillant.. Barrès, d’ailleurs plusieurs fois cité et commenté par A.F., en a écrit bien d’autres et il n’y a a contrario absolument aucune violence à rechercher dans L’identité malheureuse. Au contraire on pourrait presque y trouver un excès de consensualité, à force de précautions et de clarifications, de conceptualisation intelligible et d’effort pédagogique. Tout le monde ne se donne pas tout ce mal vis-à-vis du lecteur, c’est le moins qu’on puisse dire (cf un débat récent autour du dernier et très opportuniste ouvrage d’ Olivier Todd.)
En ce qui concerne la forme donc :
Ce que j’ai apprécié, dans ce livre, outre l’intelligence, la probité intellectuelle et l’écriture cristalline (c’est déjà beaucoup, mais il y a plus), c’est la courtoisie extrême de l’auteur, qui ne prend ses lecteurs ni pour des idiots, ni pour des puits de science. Pour transposer un terme, qui a fait se gausser d’aucuns, dans un de ses chapitres, je dirai qu’A.Finkielkraut a la galanterie de s’effacer derrière notre ignorance éventuelle, et de ne pas faire tout un plat de sa culture supposée.Il nous tient la porte et presque il règle les consommations. Les citations ou références ne sont jamais des cuistreries mais des petites lumières qui balisent le chemin qu’il nous propose de parcourir en sa compagnie. Si bien que ce livre grave et sérieux a été lu par moi avec plaisir et parfois jubilation, en l’espace d’une soirée d’été. Lu, et souligné, pour y revenir. Il ne faudrait pas que la galanterie tourne à la séduction tout de même.
Pour ne donner qu'une illustration d'un des thèmes forts (éducation et transmission) J'ai été particulièrement instruite par la découverte de l'idée grecque de l'aÏdos (hélas je ne fus nourrie que de latin, pas de grec), c'est à dire "la réserve, la modestie, la pudeur qui naissent, en nous, de l'intériorisation du regard de l'autre." A ne pas confondre avec la honte, qu'on a un peu vite peut-être cru pouvoir conceptualiser de façon nouvelle à partir des écrits-très estimables- d'Annie Ernaux et Didier Eribon. L'aïdos aide l'enfant à "se situer dans l'orbe de la société des hommes", ainsi il est "soucieux de l'image visible qu'il donne de lui-même et c'est pourquoi il écoute ce qu'on lui dit".(Aristote) Entrez dans une salle de classe, n'importe laquelle, et vous comprendrez que l'aïdos n'a pas le vent en poupe.
Une conséquente bibliographie étoffe cet ouvrage pertinent au regard de la pensée et impertinent au regard de la bien- pensance.
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Avec son élégance de style coutumière, le philosophe nous propose un essai courageux sur l'identité de la France, qu'un certain nombre de sociologues, de politiques, d'intellectuels ou prétendus tels, de pédagogues même, s'évertuent à mettre en cause. Pour certains, la France est condamnée à un repentir perpétuel, sans espoir de rachat, non seulement pour ce qu'elle est, mais surtout pour ce qu'elle a été. Couverte d'opprobres éternels, la France n'aurait plus qu'à rentrer dans le rang ; le seul fait d'évoquer une identité nationale s'apparenterait désormais à un sacrilège. Finkielkraut nous montre avec finesse les dangers que recèle le procès en sorcellerie de l'identité nationale ; dès lors, son essai fait jaser.
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Alain Finkielkraut expose le bouleversement que connaît l'Europe et la France en particulier depuis quelques décennies, depuis son enfance notamment (né en 1949) avec la vision pessimiste mais certainement réaliste qu'on lui connaît (donc surtout à ne pas lire lors d'une baisse de moral car cela vous achève !), Il reprend des thèmes qui lui sont chers : conception de la Nation, laïcité, voile, école, immigration, nouvelles technologies, perte de valeurs, culture, relativisme absolu dont beaucoup étaient déjà exposés en 1985 dans "la défaite de la pensée".
L'Europe contemporaine est prisonnière de son passé et en particulier d'Auschwitz et de la colonisation. Elle a renoncé à l'universalisme des Lumières, ne croit plus en son identité. A force de dire "plus jamais ça", elle ne voit pas le présent et les dangers du communautarisme et se croit toujours dans les années 1930..Elle est partisan du "Romantisme pour autrui" (le Romantisme ayant entraîné au XIX° siècle le Nationalisme), de l'orgueil identitaire sauf pour elle-même.
L'école qui intégrait en refusant les particularismes en enseignant l'histoire, la langue, la littérature, offrait "la France en partage" n'assure plus son rôle en se complaisant dans la démagogie, la culture est dénigrée. Il évoque la notion grecque d'aïdos, modestie, pudeur dans la vie en société qui tend à disparaître.
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Est-il encore possible d'hériter et de transmettre ? Témoin de son temps, passeur d'éducation, Alain Finkielkraut a l‘outrecuidance d'aller à rebours d'une certaine idée de la modernité bien pensante pour fouiller son « identité malheureuse ». Non, tout ne se « vaut » pas et la culture ne doit pas être le parent pauvre de notre présent. Au risque de heurter les nouvelles valeurs du « politiquement correct » - le respect, l'égalitarisme, l'universalisme, les nouvelles technologies - Finkielkraut se livre à un exercice intellectuel brillant et sain, souvent risqué, parfois scabreux, mais toujours courageux et salutaire.
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Papi ronchon reprend la plume et il a beaucoup baissé depuis "la défaite de la pensée". le pamphlet commence par la question de la laïcité à l'école, enchaîne sur celle du féminisme moderne, poursuit par les marottes européennes (Shoah et décolonisation), se prolonge (péniblement) par l'idée que l'on peut avoir des racines sans être raciste, s'étend encore par celle que les technologies envahissantes empêchent le développement de la réflexion qui ne s'exprime plus que par la vulgarité, et s'achève, enfin, par le refus moderne de l'autorité où le "jeune" (celui qui sait ce qu'il veut et s'il ne le sait pas, les autres comme lui sont là pour le lui dire) a remplacé l'élève.

A ce stade, on est bien loin de la laïcité du départ dont on attendait la clôture du sujet, en vain. Ce qui relie tout cela ? l'identité. Qu'est-ce que l'identité ? Au lecteur de s'en faire une idée, qui sera sans doute aussi superficielle que celles que l'auteur a éructées sur le papier. En effet, par la cumulation du contenu de ses fiches "citations" - certainement consciencieusement constituée depuis quarante ans - comme on parcourt le dictionnaire, Alain Finkielkraut présente une réalisation linguistique qui n'est pas sans emprunter sa structure à "Wikipédia", ce qui, pour quelqu'un qui s'apitoie sur la fragmentation de la pensée contemporaine, n'est pas des plus heureux. Si on a lu les textes, on ne voit pas ce que la citation apporte, et, sans doute, si on ne les a pas lus, on ne comprend rien. L'effet d'autorité est aussi certain que l'effet de persuasion est nul.

Car somme toute l'essai ne dit que ceci : "tout part à vau l'eau, rien ne tient, l'école publique de mon enfance, c'était tout de même mieux, qu'on ne vienne pas m'embêter avec ces histoires nauséabondes d'immigration, de colonisation et d'Europe, ça ne m'intéresse pas, vive la République et vive la France". On attendait d'un académicien un peu plus de profondeur et, surtout, un peu plus d'optimisme. Car si on passe sa vie à acquérir des connaissances et qu'on l'achève en laissant pour témoignage que ça ne vaut plus la peine, ceux qui restent se demandent pourquoi ils s'acharneraient à apprendre des choses qui n'ont pas permis à celui qui les sait déjà de dégager la moindre lueur positive.

Par ailleurs, on se demande s'il a bien lu les livres qu'il cite, car sa pensée ne paraît pas, contrairement à ce qu'il soutient, en contradiction avec celles de ces affreux promoteurs du cosmopolitisme, Ulrich Beck et Jean-Marc Ferry - sans doute devait-il chatter pendant ce temps ou regarder la télévision, incorrigible qu'il est à glaner des arguments anti-modernité pour son prochain pamphlet. Il est vrai qu'en leur réglant leur compte en une dizaine de lignes, les arguments manquent pourtant pour soutenir ce point de vue - ou son contraire.

Enfin, si la conclusion de l'essai est que l'on a le droit d'être français sans être raciste, on était en droit de penser qu'il était possible de le faire comprendre en moins de 200 pages. Reste que les questions initiales ne sont pas résolues : pourquoi les autres pays s'offusquent-ils de la laïcité française ? qu'est-ce qui justifie fondamentalement, à l'heure de la mondialisation, la version française de la laïcité si l'essai prétend, en s'appuyant sur Claude Lévi-Strauss, que la communauté culturelle française a bien le droit, comme les autres (mais pas plus ni moins que les autres), d'exister... Bon, disons que j'ai dû lire trop vite...
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critiques presse (4)
LActualite
01 juillet 2014
La question de l’intégration des immigrés est une question politique trop souvent escamotée en faveur d’un débat idéologique qui polarise les « démons de l’identité face à ceux de l’universel ». Mais peu importe, même Finkielkraut devra admettre qu’aux trois principes républicains de « liberté, égalité et fraternité », il faudra désormais ajouter « diversité ». Les nations occidentales en sont là.
Lire la critique sur le site : LActualite
Bibliobs
28 octobre 2013
Finkielkraut règle ses comptes avec lui-même. C'est intéressant, c'est légitime. Mais pas sur le dos d'une catégorie de la population parmi les plus fragiles.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
LeMonde
25 octobre 2013
Toutefois la nouveauté du livre se situe bien du côté du lexique et du ton. Le vocabulaire, d'abord, se fait toujours plus national. Hier, Finkielkraut veillait sur la République, aujourd'hui il escorte "l'identité française".
Lire la critique sur le site : LeMonde
Telerama
16 octobre 2013
Tout au long de ce voyage en « identité malheureuse », Alain Finkielkraut entend faire la preuve qu'« on peut éviter le politiquement correct sans tomber dans le politiquement abject » — l'enfer identitaire, nationaliste, raciste, qui conduit à Auschwitz.
Lire la critique sur le site : Telerama
Citations et extraits (26) Voir plus Ajouter une citation
oikophobie
La haine de la maison natale.

Il faut que les élèves aient le loisir d'oublier leur communauté d'origine et de penser à autre chose qu'à ce qu'ils sont pour pouvoir penser par eux-mêmes (Finkielkraut 2015, p. 27)

Nul ne pense par soi lui-même sans détour par les autres, et notamment par ce qui a été pensé avant lui (Finkielkraut 2015, p. 33)

Il ne revient pas à l'école ... d'être à l'image de la société... mais de la tenir à distance. (Finkielkraut 2015, p. 42)

il n'existe pas de pensée "ex nihilo" (Finkielkraut 2015)Bibliographie
Finkielkraut, Alain (2015) L'identité malheureuse. Paris : Gallimard (Folio, 5912). (Finkielkraut 2015, p. 42)

Elle se déploie sur trois registres : l'ordre de la chair, l'ordre de l'esprit, l'ordre de la charité.
La grandeur des gens d'esprit est invisible aux rois, aux riches, au capitaine, à des gens de chair.
... dégager la vie de l'esprit de la tutelle religieuse sans pour autant la faire tomber sous la coupe de la politique ou de l'économie.
... l'indépnednace de l'ordre spirituel. (Finkielkraut 2015, p. 42–43)

La transmission des savoirs a tout à perdre de la confusion du cognitif et de l'affectif (Finkielkraut 2015, p. 47)

... en matière de sexe, les hommes sont perçus dans la culture musulmane comme des animaux irresponsables qui perdent tout contrôle lorsqu'ils voient une femme. Faute de pouvoir lrs adoucir, il fait donc refroidir et couvrir le corps féminin des pieds à à la têtenpour le mettre à l'abri de leur lubricité (Finkielkraut 2015, p. 77)

porter le voile c'est refuser d'entrer en contact avec autrui (Finkielkraut 2015, p. 79)

Aïe le courage de te servir de ton propre entendement (Finkielkraut 2015, p. 85)

Pour l'écrivain nationaliste comme pour les penseurs romantiques, l'humanité s'écrit au pluriel, elle n'est rien d'autre qu'une addition d'identités collectives...
Il n'y a donc pas de règle applicable à tous les hommes. L'universel est un leurre et l'abstraction rationnelle, une dangereuse ivresse de l'esprit.

BARRES : l'individu s'abîme, la nation est une communauté organique qui engendre et qui façonne ses enfants. (Finkielkraut 2015, p. 89)

La repentance depuis lors a pris son envol : elle a mis le concept de Français de souche au pilori et la fierté de venir de ... au pinacle.
L'enracinement des uns est tenu pour suspect et leur orgueil généalogique pour nauséabond, tandis que que les autres sont invités à célébrer leur provenance et à cultiver leur altérité.
... la diversité dessine une France où l'origine n'a droit de cité qu'à la condition d'être exotique et où une seule indentité est frappée d'irréalité : l'identité nationale (Finkielkraut 2015, 109,110)

La France tend ainsi à se transformer en auberge espagnole et les mots d'assimilation ou même d'intégration perdent toute pertinence (Finkielkraut 2015, p. 111)

Il nous faut combattre la tentation ethnocentrique de persécuter les différences et de nous ériger en modèle idéal sans pour autant succomber à la tentation pénitentielle de nous déprendre de nous-mêmes pour expier nos fautes. La bonne conscience nous est interdite mais il y a des limites à la mauvaise concience. Notre héritage qui ne fait certes pas de nous des êtres supérieurs mérite d'être préservé et entretenu.
Ne pas confondre racisme et quant-à-soi.
Il n'est nullement coupable de placer une manière de vivre ou de pesner au-dessus de toutes et d'éprouver peu d'attirance envers tels ou tels dont le genre de vie, respectable en lui-même, s'éloigne par trop de celui auquel on est traditionnellement attaché.
La France est une nation à laquelle on peut s'attacher par le coeur aussi fortement que par les racines.
Dans Race et Culture, Claude Lévi-Strauss disait qu’il n’était « nullement coupable de placer une manière de vivre ou de penser au-dessus de toutes les autres et d’éprouver peu d’attirance envers tels ou tels dont le genre de vie, respectable en lui-même, s’éloigne par trop de celui auquel on est traditionnellement attaché » :
Cette incommunicabilité relative n’autorise pas à opprimer ou à détruire les valeurs qu’on rejette ou leurs représentants, mais, maintenue dans ces limites, elle n’a rien de révoltant. Elle peut même représenter le prix à payer pour que les systèmes de valeurs de chaque famille spirituelle ou de chaque communauté se conservent, et trouvent dans leur propre fonds les ressources nécessaires à leur renouvellement. (Finkielkraut 2015, 113 et suivantes)

Jamais l'immédiat n'a occupé une position aussi hégémonique.
... le silence, la solitude, la lenteur sont attaqués en même temps.
L'identité nationale est ainsi broyée comme tous ce qui dure, dans l'instantanéité et l'interactivité des nouveaux média. Il n'est donc pas besoin de philosophes ou d'historiens pour la déconstruire. La technique suffit à la tâche. (Finkielkraut 2015, p. 140)

Pour surmonter ses humeurs et pour ciseler ses phrases, il faut vouloir faire bonne figure; se montrer à son avantage. On parle comme ça vient, en revanche, quand on veut être et se montrer tel qu'on est. (Finkielkraut 2015, p. 153)

L'époque en d'autres termes exige de faire leur plce aux cultures étrangères mais il est, dans le même temps, formellement interdit de procéder à une lecture ethnologique des affects comme par exemple le sentiment d'humiliation.
L'aïdos, c'est la réserve, la modestie, la pudeur qui naissent, en nous, de l'interiorisation du regard des autres.
Sans crainte point de sagesse.
Au lieu de cela, elle (La société démocratique) flatte les suceptibilités ombrageuses,, elle entretient le narcissisme, vindicatif des grandes et des petites différences, elle prend, dans la guerre des respects, le parti catastrophique de combattre toute restriction de l'estime de soi. (Finkielkraut 2015, 170;183;201;)

Sens de la retenue
Humilité (vertu Lakota). (Finkielkraut 2015, 170;183;201;) Bibliographie
Finkielkraut, Alain (2015) L'identité malheureuse. Paris : Gallimard (Folio, 5912).
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Ce qui émerveille, en revanche, les apôtres de la nouvelle Marianne, c'est la pigmentation des heureux lauréats. Pour bien marquer l'unicité et l'irréductibilité de chaque être humain, l'antiracisme ancien était color blind. L'antiracisme contemporain, en revanche, s'aveugle à tout ce qui n'est pas couleur de peau. Ses fidèles cultivent l'obsession de la race au sens physiologique que ce terme n'avait pas chez Claudel. Ils s'enorgueillissent d'avoir obtenu, après un long combat, la mise hors la loi du mot, ils jettent furieusement l'anathème sur ceux qui ont le front de l'employer encore et ils placent, dans le même temps, l'origine au dessus de l'originalité et l'épiderme au dessus de l'excellence (page 157 édition Folio).
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Jamais l’école ne m’a fait honte de mes origines. Jamais elle ne m’a demandé de renier ma généalogie. Jamais non plus elle ne m’a invité à m’en prévaloir. Elle me demandait d’être attentif, d’apprendre mes leçons, de faire mes devoirs, et elle me classait selon mon mérite. L’origine était hors sujet.
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Sur la laïcité, les Français n’en sont pas à leur première bataille. Il a fallu la Révolution, rien de moins, pour que l’État se sécularise et l’école républicaine est née, un siècle plus tard, d’une lutte acharnée entre les laïques et les cléricaux. Ces derniers ne voulaient pas seulement défendre ce qui leur restait de pouvoir. Ils pensaient sincèrement que, si Dieu tombait dans l’oubli, rien ne retiendrait les hommes de mal faire. Or, argumentait M Freppel, archevêque de Paris : « Ne pas parler de Dieu à l’enfant pendant sept ans, alors qu’on l’instruit six heures par jour, c’est lui faire accroire positivement que Dieu n’existe pas ou qu’on n’a nul besoin de lui. » Réponse cinglante de Ferdinand Buisson, l’un des maîtres d’œuvre de la laïcité républicaine : « On devient clérical à l’instant précis où l’on incline sa raison et sa conscience sous une autorité extérieure qui s’arroge et à qui on reconnaît un caractère divin. »

Sous prétexte de moraliser les âmes, autrement dit, le cléricalisme asservit les esprits. Ce mensonge doit être dénoncé et remplacé par l’application du programme des Lumières magnifiquement défini par Kant comme « la sortie de l’homme de l’état de minorité dont il est lui-même responsable. L’état de tutelle est l’incapacité de se servir de son propre entendement sans la conduite d’un autre. […] Sapere aude ! Aie le courage de te servir de ton propre entendement. Voilà la devise des Lumières ». Cette résolution cependant ne peut venir toute seule. Le courage ne suffit pas : nous sommes jetés dans la mare de l’ignorance et ce n’est pas en nous tirant nous-mêmes par les cheveux, comme le baron de Münchhausen, que nous en sortirons.

Pour le dire d’une autre image : nous ne naissons pas tout armés de la cuisse de Jupiter. Bref nous avons besoin d’instruction, c’est-à-dire de maîtres, pour pouvoir, au bout du compte, nous affranchir de toute direction étrangère.
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Aucun écrivain ne figure au palmarès des personnalités préférées des Français publié, tous les six mois, par le Journal du dimanche. Et personne ne s’émeut. Personne ne s’interroge. Personne même ne remarque cette étrange absence dans un pays que Claudel, à l’époque où Curtius rédigeait son essai, présentait aux étudiants d’une université japonaise en disant que la littérature n’y était pas l’expression de quelques esprits exceptionnels mais « la nécessité de toute une race, la transaction ininterrompue entre ses différents versants, le moyen d’assimilation de tout problème nouveau qui lui était proposé ».

Ce qui émerveille, en revanche, les apôtres de la nouvelle Marianne, c’est la pigmentation des heureux lauréats. Pour bien marquer l’unicité et l’irréductibilité de chaque être humain, l’antiracisme ancien était color blind. L’antiracisme contemporain, en revanche, s’aveugle à tout ce qui n’est pas la couleur de peau. Ses fidèles cultivent l’obsession de la race au sens physiologique que ce terme n’avait pas chez Claudel. Ils s’enorgueillissent d’avoir obtenu, après un long combat, la mise hors la loi du mot, ils jettent furieusement l’anathème sur ceux qui ont le front de l’employer encore et ils placent, dans le même temps, l’origine au-dessus de l’originalité et l’épiderme au-dessus de l’excellence.

En 1998 déjà, ils rabattaient l’exploit sportif de l’équipe de France de football qui venait d’être sacrée championne du monde sur sa composition ethnique. En 2003, le journal Le Monde titrait sur cinq colonnes à la une : « Avec Alexandre Dumas, le métissage entre au Panthéon. » Le métissage et non Les Trois Mousquetaires, Vingt ans après ou Le Comte de Monte-Cristo. Ce n’était pas à ses chefs-d’œuvre que Dumas devait sa place dans la nécropole des Grands Hommes, c’était à la goutte de sang noir qui avait coulé dans ses veines.
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