Sans être un spécialiste de Perec et sans m'être renseigné véritablement, je me fais l'hypothèse que cet ultime roman de Perec est achevé, parfaitement complet dans son inachèvement même. le roman emprunte le chemin du récit policier (des meurtres, des accusés, des chausses-trappes) et d'un imaginaire assez cinématographique (l'action se passe d'abord dans un pays anciennement colonisé, il y a un certain exotisme et une violence diffuse). Mais cette première partie (officiellement rédigée) si elle se lit très bien est aussi profuse en méta-récits et en poupées russes. Des romans dans le roman semblent proposer des avancées dans la résolution de l'énigme tout en opacifiant les trajectoires. Quand le manuscrit s'achève, le lecteur est un peu perdu mais suit le cheminement du narrateur et mène avec l'enquête. C'est là où la forme elle-même (des chapitres évoquent une 2e partie qui semblent à nouveau retourner la situation) devient passionnantes et vient parachever cette situation d'enquête. le lecteur n'a plus à faire qu'aux énigmes mêmes d'un texte qui n'avance qu'en se délitant (puisqu'il n'est pas fini). le puzzle est lacunaire à la fois dans le récit mais dans le livre lui-même (fragments de la 2e partie, puis dossier de la rédaction avec les différents carnets de Perec). Comme si la machination du texte s'était retourné contre l'auteur et son narrateur et qu'ils n'avaient pu terminer l'enquête qu'en nous obligeant à la finir à leur place. Vertigineux.
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Cette vérité que je cherche n'est pas seulement codée dans le livre, mais aussi dans les circonstances de sa fabrication.
S’il était vrai que ce roman cachait un secret, il ne faisait pas de doute pour moi que l’examen des brouillons m’en fournirait la plupart des clés, en me révélant par exemple comment tel ou tel nom avait été choisi, ou quel événement réel avait trouvé sa transcription dans un des méandres de la fiction de Serval.
La vérité est dans ces pages. Elle doit y être. Mais où ? Parmi les innombrables chemins possibles, lequel m'y conduira ? J'ai la sensation un peu étouffante d'être au cœur d'un de ses problèmes de logique où l'on doit, avec une seule question, désigner l'éternel diseur de vérité et le total menteur. Mais ici ce ne sont pas deux hommes qui sont postés au carrefour, mais dix ou quinze, et ils n'ont rien de ses entités abstraites et sans failles : l'un dit parfois ce qu'il croit être la vérité, mais il arrive encore assez souvent qu'il se trompe ; l'autre dit le contraire de ce que dit un troisième qui dit n'importe quoi ; un quatrième dit quelque chose que l'on n'entend pas et qui est répété par un cinquième dont on sait qu'il faut se méfier ; un sixième, qui se proclame Februariste dissident, déclare avoir reçu de Dieu une vérité qu'il transmettra le jour où tous les mois de février aurons enfin trente jours ; le septième, se tait obstinément.
En 1981, l'écrivain Georges Perec livrait ses 20 choses à faire avant de mourir. Et vous, quelles sont les vôtres ?
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