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EAN : 9782246323242
574 pages
Grasset (06/11/2002)
4.04/5   105 notes
Résumé :
Homme invisible, pour qui chantes-tu ? est un roman de légende. L'homme invisible, c'est l'homme noir dans la société américaine... Voilà trois siècles que, là-bas, il vit, travaille, mange, parle - et pour l'Amérique il arrive même au Noir de se faire tuer... En quelque sorte pour rien. Car aux yeux de l'Amérique le Noir est invisible.
Écrivain lui-même noir, Ralph Ellison a donné ce titre paradoxal, dérisoire et pathétique aux six cents pages qui racontent ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (17) Voir plus Ajouter une critique
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Dans ce roman édité en 1952, avant Rosa Parks et Martin Luther King, avant le Civil Rights Act, Ralph Waldo Ellison dépeint les difficultés de la communauté noire américaine qui cherche son identité et son intégration face à une société américaine dominé par les blancs. Ce roman est assez difficile à lire, parfois même assez hermétique, quand le lecteur ne comprend pas beaucoup plus que le personnage ce qui se passe, ce qui est en train de se jouer. Mais c'est aussi une de ses qualités, réussir à placer le lecteur dans la peau de ce jeune noir américain. le héros et narrateur est un jeune afro-américain, d'autant plus invisible que le lecteur ignore tout de son nom ou de son apparence physique, un citoyen anonyme de seconde zone, ce qui contribue à donner à son cri de solitude une dimension universelle. Ce jeune homme, originaire du Sud, est talentueux, nous le suivons au début en étudiant idéaliste dans une université noire, puis successivement chômeur et ouvrier à New-York pour finir par se retrouver orateur dans un mouvement activiste dirigé par des blancs. le récit est émaillé de nombreuses scènes marquantes qui ne laissent pas de répit au lecteur et impriment au texte un rythme très particulier, à commencer par la scène du combat de boxe humiliant, scène violente et odieuse, raciste, qui est liée à son accession à l'université. Mais d'autres scènes sont mémorables comme celle de l'expulsion d'un couple de petits vieux. Certaines scènes sont écrites dans une écriture qui semble d'un seul jet, comme hallucinée, mêlant description des événements et réflexion existentielle du héros qui cherche son chemin dans la vie et qui évolue au fil des péripéties. Il lui faudra beaucoup d'expériences pour comprendre que l'obéissance et le respect des blancs ne mènent nulle part, qu'il va d'humiliation en humiliation, que le rêve américain est un jeu où les gagnants sont toujours les mêmes et où les perdants sont les naïfs qui ont besoin d'y croire. Son récit est celui d'un observateur critique du comportement des Wasps envers les minorités dites «visibles». Que ce soit au Sud ou au Nord, il se retrouve confronté au racisme qui prend des formes différentes. le jeu est truqué car peu importe le comportement des noirs, qu'ils soient humbles, soumis, obséquieux ou traîtres à eux-même en singeant les blancs, dans tous les cas le résultat est à peu près le même. A la fin, revenu de tout ce en quoi il avait cru, il décide dans une scène totalement improbable de rester invisible. Un roman qui prend aux tripes.
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Cet homme invisible, protagoniste du roman, n'a pas de noms - oui, au pluriel, car on l'affuble, pourtant, de différents noms selon ses fonctions - ni de physique, vraiment, sa seule particularité étant d'être jeune et noir, dans les Etats-Unis des années 40 tout d'abord dans le Sud puis à Harlem.
Il se dit invisible - et vous comprendrez enfin pourquoi si vous lisez tout le roman - mais il est bien tout de chair, de sang et de nerfs. Son corps est entraîné, poussé, provoqué, bousculé, maltraité, utilisé, manipulé, dans une succession d'événements dont il ne connaît ni les tenants ni les aboutissants.
Jeune étudiant, le narrateur obtient son inscription à la plus grande université noire du Sud grâce à ses résultats mais surtout lors d'un combat humiliant que des pontes blancs organisent.
Une fois à l'université, il commet une erreur impardonnable en désirant révéler la vie misérable d'un ancien quartier d'esclaves, et est envoyé à New York sous de faux prétextes.
Il en faudra beaucoup pour que le jeune homme reconnaisse que l'obéissance et le respect aveugle envers les Blancs ne l'entraîneront nulle part, que sa voie est de toute manière tracée.
L'accumulation d'expériences humiliantes le pousse à se révolter, et le voilà embrigadé dans l'une de ces nombreuses organisations activistes qui sévissent alors à Harlem. On le suit, à moitié aveuglé par un rôle qu'il ne saisit pas vraiment, au coeur d'une communauté noire en colère.
Le roman est saisissant, galopant d'un événement à un autre et entrecoupé de méditations existentielles du héros qui cherche à saisir le but de sa vie et le chemin à prendre, dans ce monde gouverné par et pour la communauté blanche. On y travers le sud mais surtout Harlem, berceau des mouvements activistes noirs.
Enfin, j'aime le style, typique de ces années, direct, jazzy, moderne.
Classé aux Etats-Unis comme l'un des meilleurs romans du vingtième siècle, je suis surprise qu'il soit si peu connu en France, car il a tout d'un classique.
Homme invisible, pour qui chantes-tu? - Invisible Man en anglais - est le seul roman publié par Ralph Ellison.

Je remercie vivement Isaoubienrien qui me l'avait conseillé, ça valait vraiment le coup!
Lien : http://pourunmot.blogspot.fr..
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L'homme invisible, anonyme, le héros de ce roman, est l'homme afro-américain en quête d'une identité propre, dont l'homme blanc l'a spolié, le rabaissant à un rôle périphérique, à la marge de la société américaine. Roman initiatique, picaresque, Homme invisible, pour qui chantes-tu? Illustre les relations, sur un pied d'inégalité, qui mettent aux prises la population dominante des Wasps avec les minorités “visibles”. le héros, narrateur, à travers une suite d'épreuves, endossera des rôles successifs qui l'élèveront à un rang plus élevé de conscience. Étudiant idéaliste, chauffeur maladroit, ouvrier dans une usine de peinture, tribun manipulé par une confrérie socialisante bo-bo et finalement fugitif traqué par un nationaliste noir halluciné; toutes ces péripéties participeront à sa transformation complète. Il y verra des noirs humbles dans leur soumission, ou hypocrite dans celle-ci, obséquieux, faussement débonnaires, traîtres à leur nature profonde et à leur congénères, poussant le mimétisme jusqu'à “singer” les blancs, leur costumes et leur allure, pour ainsi dire complètement “chosifiés”. Il sera l'observateur critique et finalement désabusé de l'attitude des blancs à leur égard; ceux-ci étant farcis de préjugés même dans leur élan généreux, souvent portés à un réalisme cynique menant à une instrumentalisation de cette population qui n'a pas voix au chapitre. Les vieux réflexes racistes ont la vie dure dans cette Amérique de l”après guerre. Plus généralement Ralph Ellison se fait le contempteur des vieilles lunes du rêve américain, du “travailler dur et suivre les instructions” d'une discipline synonyme de sacrifice et de cécité, d'un jeu où les gagnants sont connus d'avance et où seuls perdent ceux qui y croient naïvement.

Baignant dans une atmosphère violente de cauchemar, cette oeuvre, assez nébuleuse, souffre d'une irréalité aggravée par le manque d'unité du roman; on a parfois l'impression de lire une succession de scènes édifiantes scandées par des chapitres.
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Préfacé par Robert Merle, traduit de l'américain par Magali et Robert Merle, ce roman a été, en 1964, lors d'une grande enquête lancée à travers les U.S.A. par "the Book Week", plébiscité comme le roman le plus important publié en Amérique depuis la fin de la guerre.
"Invisible Man" fait le récit, à la première personne, de l'existence d'un jeune homme pauvre. A force de luttes, et de péripéties en péripéties, il réussit à atteindre, sinon le succès, tout au moins la sagesse.
Mais d'entrée le jeu est truqué, le combat pour réussir de ce jeune homme est faussé. du fait qu'il soit noir, il ne lutte pas à armes égales contre la société.
Renvoyé à cause d'un blanc de l'université noire où il fait ses études, il mène dans un premier temps une vie précaire à Harlem, toujours à la recherche d'emplois subalternes. Puis, un parti politique, ayant remarqué ses talents d'orateur, fait de lui un de ses permanents rétribués. Ce parti, qui se nomme "Brotherhood" (confrérie) est dirigé par des libéraux blancs.
A la suite d'une émeute, où un de ses amis est tué, il décide de quitter une vie politique qui ne lui inspire que doute et suspicion.....
L'auteur, Ralph Ellison, ne nous donne, à aucun moment, ni le nom ni le pseudonyme de son personnage. Sans nom et sans visage, le héros est invisible, véritable citoyen de seconde zone dans son propre pays. Par ce paradoxe, Ellison donne à son récit la force d'une fable universelle.
La préface, brillamment rédigée par Robert Merle, l'auteur de "Week-end à Zuydcoote", de "La mort est mon métier", de "L'île" et de "Un animal doué de raison", éclaire d'une façon judicieuse, l'oeuvre très anglo-saxonne, à un public francophone.
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HOMME INVISIBLE POUR QUI CHANTES TU? de RALPH ELLISON
Il est noir, il s'est rendu invisible aux yeux du monde en habitant un lieu où il ne paye ni loyer, ni électricité qu'il pirate sur un branchement illégal, il s'éclaire avec 169 ampoules! C'est son parcours qu'il nous raconte, depuis son grand père sur son lit de mort qui dit à son fils « résiste, bas toi dans la gueule du loup »alors que tout le monde aurait dit qu'il était bien intégré lui et sa famille. Il étudie à l'université, un jour sert de chauffeur à Norton, un bienfaiteur de cette école noire, les circonstances vont les conduire dans les quartiers noirs et à entrer dans une sorte de tripot. Cette sortie de route va entraîner son exclusion de l'université par Bledsoe, directeur noir de l'école qui le tient pour responsable de l'incident avec Norton. Il va lui donner des lettres de recommandation pour travailler mais il réalise qu'en fait elles demandent à ses contacts de tout faire pour qu'il ne puisse pas revenir à l'université. Différentes galères vont le mettre en contact avec une confrérie de Harlem composée de noirs et de blancs qui luttent pour les droits des noirs. Frère Jack est un des leaders, il va l'aider financièrement et il sera chargé de porter la bonne parole dans Harlem. Il s'avère excellent orateur et rencontre du succès dans ses recrutements, mais il va se heurter à la hiérarchie de la confrérie en interne et à Ras, un nationaliste noir violent et cherchant la confrontation. Perdu au milieu de ces antagonismes il prendra le chemin de l'isolement, de l'invisibilité.
Un livre intéressant qui questionne la ségrégation à partir de cette notion de visibilité ou d'invisibilité des noirs. Louis Armstrong chantait « qu'ai je fait pour être si noir et broyer tant de noir » alors que notre héros a l'impression d'être totalement invisible. Entre un Ras extrémiste qui veut éradiquer tout ce qui est blanc dans Harlem et la Confrérie qui louvoie, se compromet et semble avoir un mystérieux plan politique à long terme que personne ne connaît, notre héros, dont le nom reste inconnu tout au long du récit, ne choisit pas et prend le maquis de l'invisibilité. A lire.
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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
Je désire être honnête avec vous - exploit que, par parenthèse, je trouve d'une extrême difficulté. Lorsqu'un homme est invisible, les problèmes du bien et du mal, de l'honnêteté et de la malhonnêteté, lui apparaissent si changeants, si fluctuants, qu'il les confond, au gré de la personne qui se trouve regarder à travers lui à tel moment. Eh bien, à présent, j'essaye de regarder à travers moi-même, ce qui comporte un risque. Je n'ai jamais été plus détesté que lorsque j'ai essayé, comme je viens de le faire, d'exprimer avec exactitude ce que je sentais être la vérité.
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Je voyais sur leurs mentons, à la place de leur jus de tabac favori, scintiller de l'écume de sang, et sur leurs lèvres, le lait caillé des mamelles flétries d'un million de nounous noires à l'état d'esclavage; moyen perfide et fluide de connaître notre essence, absorbée à notre source même et maintenant régurgitée tout aigre sur nous. Ceci est notre monde, disaient-ils en nous le décrivant, ceci, notre horizon et sa terre, ses saisons et son climat, son printemps et son été, et son automne et sa moisson, pour une durée inconnue, millénaire; et ceci, ses inondations et ses cyclones, et eux-mêmes figuraient notre terre et nos éclairs; et ceci, nous devions l'accepter et l'aimer, l'accepter même si nous ne l'aimions pas.
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Lecture achevée le 29/05/2020, alors isolé, je n’ai appris la mort de Georges Floyd que quelques jours après. Les racines du mal, là depuis des siècles, font une nouvelle fois surface de manière tragique. Avant d’entreprendre la lecture de ce livre, je venais de finir celle du « bruit et de la Fureur » de William Faulkner, avant celui de Toni Morisson « Beloved », et quelques mois encore avant « Les aventures de Huckleberry Finn » de Mark Twain. Le roman de Ralph Ellison complète ici la découverte de la vie des afro-américains et des « poor white trash ».
Puis, un témoignage reçu via internet le 4 juin, celui d’un français vivant aux Etats-Unis, nous rappelle que là « où tout est rapport à l’économie », à l’argent, « dans une ville de 10 000 habitants, dotée de bonnes écoles où il y a 2 à 3 familles d’origine asiatique, 1 à 2 de noirs, et 1 « latino » ; à 45 minutes de là , il y a des maisons qui ne valent pas 5 à 10% le prix de celles de cette ville où il réside. Le chômage, la criminalité, des écoles où les enfants n’ont aucune chance d’apprendre quoi que ce soit pour accéder à un enseignement de qualité et par conséquent supérieur. Il est allé dans cette autre ville avec sa fille, il y a rencontré des gens avenants. Un afro-américain sort d’un commerce, se dirige vers eux, que voulait-il, notre français a eu un peu peur… mais très vite il a eu honte… cet afro-américain avait préparé à sa fille une grande glace juste pour la consoler ». Là, ce n’est un roman mais la vraie vie, celle d’un peuple qui selon lui a eu de « l’espoir avec un président de type afro-américain ».
Ecrit en 1947-48 et publié à New York en 1952, « Homme invisible, pour qui chantes-tu ? » s’inscrit à la suite des prêches de Marcus Garvey à Harlem (1918-22), avant celles de Malcom X (années 1950), celles de Martin Luther King avec la lutte des droits civiques (année 1950-60) et le Black Panther Party (fondé en 1967 en Californie).
Comme en cette fin de mai 2020, où la population afro-américaine a été la plus durement frappée par la pandémie et le chômage qui l’accompagne, la mort d’un homme noir par violence policière entraîne un grand cortège funèbre et embrase ici Harlem. L’histoire semble ainsi répéter.
Dans les années 1940, jeune afro-américain issu d’un état du sud, le narrateur doit se conformer aux règles d’une société dirigée par les blancs, mais aussi par ces quelques noirs parvenus, mais toujours au service d’une caste blanche dirigeante, qu’elle soit celle des fondateurs d’une université noire du sud, celle d’une usine ou d’un mouvement social et de libération des noirs d’Harlem. Cet homme noir est et reste comme tous les autres, ces opprimés afro-américains, « un homme invisible ».
La narration imposée par l’histoire et l’apprentissage de son narrateur est linéaire mais elle recèle des rythmes différents, selon les souvenirs, l’incompréhension, le malaise d’un homme courageux, volontaire, travailleur qui, quoi qu’il fasse, se heurte à un mur ou plutôt à son inexistence, son invisibilité, devant le monde des sachants, des dirigeants, des nantis.

Nathalie Cochoy écrit dans « Ralph Ellison la musique de l’invisible » (édition Belin) «Dynamisée par le rire et l’humour, à la fois dénonciatrice et libératrice, la poétique de Ralph Ellison a le même fonctionnement paradoxal que le masque ». Selon Ralph Ellison, il revient au romancier, à l’artiste, "de déceler et de faire chanter l’identité invisible".
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Vous êtes dévoré du besoin de vous convaincre que vous existez, réellement, dans le monde réel, que vous faites partie intégrante de tout le bruit et l'angoisse, et vous brandissez vos poings, vous lancez des bordées de jurons, et vous jurez de les amener à vous reconnaître. Hélas, l'entreprise est rarement couronnée de succès.
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Je mordis une bouchée; je la trouvai aussi sucrée et chaude que les meilleures ignames de mon enfance; et une vague de mal du pays s'abattit sur moi avec une telle force que je dus me détourner pour me maîtriser. Je marchai sans but en mâchonnant mon igname, débordant d'un profond sentiments de liberté, tout aussi soudain, simplement parce que je mangeais en déambulant dans la rue. Cela m'emportait dans un tourbillon de joie.
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