Et si la cuisine avait fait des humains ce qu’ils sont devenus ? Et si un régime alimentaire nouveau avait permis à l’espèce humaine de se doter d’un gros cerveau, capable de performances cognitives inédites dans le reste du monde animal ? Voilà la thèse défendue depuis quelques années par quelques anthropologues évolutionnistes.
L’une des premières à avoir défendu cette idée est Leslie Aiello, une anthropologue américaine qui a élaboré une hypothèse (dite « des tissus expansifs ») selon laquelle le développement du cerveau humain n’a été possible que par une diminution de la taille de l’estomac. Sachant que le cerveau est un très grand consommateur d’énergie (il pèse 2 % de notre poids mais consomme 20 % de notre énergie), l’entretien d’un gros corps se fait à son détriment. Comment résoudre ce dilemme ? En changeant de régime alimentaire.
L’Australopithèque était globalement herbivore et frugivore (tout comme le gorille), le chimpanzé a un régime plus varié : il consomme fruits et insectes et chasse de petits mammifères, mais sa consommation de viande reste limitée. Quand nos ancêtres se sont mis à consommer de la viande, le temps consacré à l’alimentation et à la digestion a été raccourci, car la viande détient un apport énergétique et en protéines très supérieur aux végétaux. Le passage du régime végétal au régime carné a allégé le système digestif, en temps, en poids et en énergie. La digestion de la viande étant plus rapide que celle des végétaux, l’estomac et l’intestin ont pu régresser au profit du cerveau.
Selon la théorie du cerveau imaginatif, le propre de l’espèce réside dans l’essor de ses capacités créatives. Le trait commun des techniques, du langage, de l’art (et d’autres activités symboliques) est de reposer sur la manipulation d’images mentales, qui servent à voyager dans le temps et dans le champ des possibles : émettre des hypothèses et des scénarios d’avenir. Ces simulations prennent la forme de fantasmes, de récits, de projets, de rêves plus ou moins réalistes, qui peuvent être communiqués, se transforment en histoire, en objet, en actions communes. L’humain a accédé à un nouveau monde : celui de l’imagination.
Carte blanche à Sciences humaines
Avec Héloïse Lhérété, Jean-François Dortier
Il y a 600 millions d'années, l'un de nos très lointains ancêtres ressemblait à une salamandre sortie des eaux. Mais la sortie des eaux ne fut que relative. Les humains, comme les autres espèces terrestres, sont restées entièrement tributaires du milieu aquatique, ne serait-ce que parce que leur corps est constitué de 65% d'eau. Incapables de stocker l'eau dans leur organisme, ils doivent en permanence rechercher des apports hydriques pour rester en vie. Des chasseurs-cueilleurs à aujourd'hui, la dépendance à l'eau a ainsi structuré toute leur histoire, et reste aujourd'hui un enjeu économique, écologique, géopolitique majeur.
Dans cette conférence, il sera question des oasis paradisiaques et de la déesse Thalassa, d'empires hydrauliques, d'imaginaire marin, de sécheresse, de déluges, d'eaux minérales et de guerres de l'eau.
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