Charlie a la
rage.
Rage contre son père qui le maltraite quotidiennement sous prétexte de « faire de lui un homme »,
rage contre les professeurs qui l'humilie devant ses camarades,
rage contre les psychiatres qui le traitent comme une bête de foire,
rage contre lui-même et ses nerfs trop fragiles… Alors, très naturellement,
Charlie se pointe un jour dans sa classe et abat d'une balle en pleine poitrine sa professeure de mathématique. Tandis qu'à l'extérieur policiers, professeurs et parents pataugent dans la panique, le jeune assassin retient en otage les autres élèves.
Charlie ne veut tuer personne d'autre, non, pas pour le moment en tout cas :
Charlie veut parler, il veut se faire comprendre, mais surtout comprendre ses compagnons de classe, comprendre leur motivations cachées, leurs fêlures, leurs hontes et leurs craintes d'adolescents. Débute alors un jeu pervers de manipulation entre
Charlie et ses petits camarades, d'abord terrorisés puis de plus en plus fascinés par l'audace et le démence de leur jeune persécuteur.
Partagée je suis... Pour un premier roman, «
Rage » ne manque pas de qualités : l'intrigue est bien rythmée et dépourvue de temps morts, le style efficace à défaut d'être d'une grande richesse (mais le narrateur étant un gamin de seize ans, cela peut se justifier) et le sujet audacieux à aborder. Mais ces quelques bons points peinent à contrebalancer à mes yeux les défauts du roman, à savoir des ficelles scénaristiques aussi épaisses que des cordages, la subtilité d'un bulldozer et des situations si franchement irréalistes qu'elles éveillent davantage l'incrédulité que la terreur.
Je ne suis pas experte en psychologie adolescente, mais la justification des actions meurtrières de
Charlie par un traumatisme familial, somme toute assez anecdotique, ne m'a pas convaincue. Sans parler des comportements des autres élèves… Sincèrement, on a vite l'impression que la classe de
Charlie est constituée exclusivement de petits psychopathes en puissance ! Un seul gamin semble avoir un comportement à peu près normal, et encore, on pourrait difficilement le taxer de tout à fait sain d'esprit. Je veux bien que beaucoup d'ados soient névrosés mais, bon sang, ils ne sont pas tous cinglés ! Je suis également un peu perplexe sur le point de vue que King souhaite nous voir adopter vis-à-vis du narrateur : sommes-nous censés avoir de la sympathie pour lui ? En ce me concerne, je n'en ai pas éprouvé une seule pincée, tant ses motivations m'ont parues creuses et ses réactions disproportionnées. En conclusion, un
Stephen King plutôt faiblard desservi par une approche psychologique bas-de-plafond – preuve pour moi que King est vraiment un auteur capable d'alterner l'excellent et le beaucoup beaucoup moins bon.