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EAN : 9798876586254
227 pages
Auto édition (18/01/2024)
4.58/5   32 notes
Résumé :
Service presse sur demande

Calixte est un jeune haïtien plein d'espoir en son avenir et en celui de son pays. Alors, il fera tout ce qui est en son pouvoir pour sortir de la cité Simone, le plus grand bidonville de Port-au-Prince, où sa famille tente de survivre. Mais quel est le prix de la liberté en Haïti dans les années 80 ?
L'auteur nous entraine aux côtés de Calixte pour découvrir ce pays aux mille couleurs, aux mots chantants, aux coutume... >Voir plus
Que lire après Hispaniola, tome 1 : CalixteVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (32) Voir plus Ajouter une critique
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En s'attachant aux pas de Calixte Fontaine, né en 1960 en Haïti, Yves Montmartin fait oeuvre romanesque et pédagogique, ce que j'apprécie beaucoup.
Trois ans plus tôt, François Duvalier a été élu Président de la République haïtienne. Dans ces Caraïbes où rien n'est simple, la famille Duvalier va détourner 80 % de l'aide économique, vivre dans l'opulence, laisser la majorité du peuple dans la misère et faire régner la terreur avec les Tontons Macoutes, tout en permettant aux gangs d'accomplir leurs trafics.
Calixte est le fils de Manman Olivette et de Toussaint Fontaine. Avec Charlemagne et Ma'Umtiti, ses grands-parents, ils vivent dans Village Démocratie, un quartier de cité Simone. Calixte a une petite soeur, Daniya. La cité Simone est un bidonville où chacun a construit sa Kabann, comme l'a fait Charlemagne, ce grand-père qui vient visiter régulièrement Calixte depuis qu'il est mort.
Le meilleur ami de Calixte s'appelle Gratitude mais celui-ci est surtout passionné de foot, ne comprenant pas pourquoi Calixte est principalement attiré par les études.
Chaque matin, avant le jour, Calixte et Manman Olivette partent à pied pour aller laver les légumes au Marché en Fer à quatre kilomètres de leur Kabann. La misère, la saleté, la puanteur règnent et il faut beaucoup de courage et de volonté pour espérer gagner quelques gourdes, la monnaie locale.
Les noms, les prénoms, les surnoms sont originaux et me font sourire. Yves Montmartin, dans son roman, fait honneur au créole, sans oublier de traduire mais c'est amusant d'essayer de prononcer les mots de cette langue grandement inspirée par le français.
Alors que Calixte grandit et va à l'école du Père Céleste, la Kay blé, la Maison bleue – une seule classe pour accueillir une flopée de gamins – je dois souligner la volonté pédagogique de l'auteur qui ne lésine pas sur les Notes. C'est instructif bien sûr et surtout précieux pour développer les aspects politiques et sociétaux comme les jeux, le Karnaval, la nourriture mais aussi la poste, l'accès à l'eau potable et la religion avec le vodou, culte qui sera reconnu officiellement le 4 avril 2003.
En suivant Calixte qui grandit, étonne en révélant toutes ses possibilités sans jamais oublier sa famille, je découvre un parrainage précieux. En effet, un couple français a accepté de financer ses études. Comme Yves Montmartin a inséré quelques photos dans ce tome 1 de Hispaniola, Haïti, la perle des Antilles, il me semble bien l'avoir reconnu sur un cliché…
Ainsi, Yves Montmartin a su me captiver avec l'histoire de Calixte, la racontant bien, réussissant à faire comprendre la psychologie des Haïtiens, celle du peuple surtout. Émotions, superstitions, croyances, culte des morts, tout cela ressort en suivant le vécu de Calixte, personnage attachant confronté à une dictature ne reculant devant rien pour asservir le peuple. Les tristement célèbres Tontons Macoutes ont oeuvré en toute impunité et Jean-Claude Duvalier, Baby Doc, successeur de son père, Papa Doc, est mort à 63 ans, en Haïti, le 4 octobre 2014, sans avoir été jugé…
Depuis, la vie des Haïtiens ne s'est guère améliorée et je salue le travail de Yves Montmartin que je remercie pour sa confiance, car il a su faire vivre Calixte en soulignant espoirs et souffrances de son peuple. Maintenant, il faut attendre le tome 2 de Hispaniola : Victoire, prénom dont l'explication se trouve dans la lecture de Calixte.
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« L'eau est si précieuse que nous l'utilisons avec parcimonie, j'aime bien ce mot 'parcimonie', c'est le père Céleste qui m'a expliqué ce que cela veut dire. Gratitude dit que je parle déjà comme un professeur. Nous devons économiser l'eau, alors le matin avant de partir travailler au port, Toussaint remplit à moitié la cuvette en plastique jaune dans laquelle Manman Olivette lave ses légumes. Il se débarbouille vite fait le visage et les mains. Cette eau servira à toute la famille pour faire une toilette de chat. »

Nous sommes à la cité Simone en Haïti dans les années 1980.

Mon frère aîné a vécu ses cinq premières années avec le même souci d'économie de l'eau dans une toute petite maison sans eau courante en bordure de forêt. Ma mère allait chercher de l'eau potable à une source qui coulait en filet, elle remplissait quelques contenants qu'elle ramenait à l'aide d'une brouette sur un parcours d'environ 1 kilomètre. Une eau rationalisée ensuite dans sa consommation avec la même méthode d'utilisation multiple de la cuvette d'eau au moyen d'un « parcours » allant du moins sale au plus sale. Nous étions en France au début des années 1960.
Je n'ai pas connu cela car j'ai eu la chance de grandir dès ma naissance dans une maison avec eau courante. J'ai toutefois été élevée avec la notion du caractère précieux de l'eau, comme du reste d'ailleurs. Je suis reconnaissante envers mes parents pour la transmission de cette valeur qui, loin d'être ringarde, est essentielle pour le bien-être de notre planète avec une utilisation parcimonieuse de ses ressources. Je pense que nous sommes tous d'accord sur ce point :)

Cependant, le parallèle que je cite en exemple s'arrête là car le tome 1 d'Hispaniola, c'est tout autre chose. C'est un voyage en Haïti dans les années 1980 au coeur de la cité Simone, un bidonville fait de kabanns à l'image de celle que l'on voit en couverture. Mais cela n'a rien d'un circuit touristique, c'est plutôt un reportage en zone sensible, un territoire francophone en proie à une dictature où règnent corruption, violence, grande pauvreté.
L'auteur nous plonge avec brio dans cette ambiance au moyen de l'histoire de Calixte, un enfant de ce bidonville, qui forme le désir de s'extirper non seulement de sa condition mais surtout d'un avenir tout tracé où il ne ferait que vivoter sans jamais nourrir l'espoir d'une vie meilleure. Il rêve de devenir professeur. Mais selon son copain Gratitude, « pas besoin d'être pwofesè pour vendre du poisson séché ou pour laver des légumes. Il suffit de savoir compter et de sourire ! ». Quant à sa Manman Olivette, elle lui dit que « personne dans le quartier n'a le certificat d'études, ce n'est pas avec des bouts de papier qu'on fait bouillir la marmite ». Elle pense que « sètifika a nan syans, li fè slackers ! (le certificat d'études, ça fait des fainéants !) ».

Le roman est court mais très riche en informations car il dresse un portrait très complet de la vie à Haïti, les croyances, les coutumes, le créole (toujours traduit dans le texte), l'insécurité, l'école etc...
Il est complété d'une partie documentaire dont chaque portion figure en fin de chapitre venant éclairer le texte. Riches et passionnants, ces passages documentaires ont toutefois rompu le fil de ma lecture du roman, me maintenant un peu à distance des personnages et des émotions. Au bout de plusieurs chapitres, j'ai donc décidé de laisser reposer le livre pour le reprendre quelques jours plus tard dans sa partie roman uniquement, puis documentaire ensuite. le tout, lu de cette manière, m'a emportée, l'histoire de Calixte est particulièrement touchante, celle d'Haïti également. C'est le coeur serré que j'ai refermé ce livre, j'ai poursuivi avec des recherches sur le net pour en savoir encore plus. Guère plus finalement, car l'auteur a réussi son objectif cité en 4e de couverture.
J'ai également consulté les clichés de la photojournaliste Maghan Dhaliwal réalisés à la cité Soleil (anciennement cité Simone) en 2012. Des images saisissantes qui complètent ce docu-roman.

Je remercie @magielivre en particulier pour ce voyage que j'ai réservé sitôt lecture faite de son billet, ainsi que les babelcopines dont les billets ont suivi:)
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Si vous souhaitez prendre un bol d'air et vous évader pour quelques heures de l'Hexagone, n'hésitez pas et plongez-vous dans le dernier roman de Yves Montmartin : Calixte.
Ce récit est une véritable immersion en république d'Haïti et le dépaysement est garanti.
Calixte Fontaine est un jeune Haïtien né en 1960. Il vit avec ses parents Toussaint et Manman Olivette, sa petite soeur Daniya et sa grand-mère Ma'Umtiti, dans la maison que son grand-père Charlemagne a construite lui-même. Comme toutes les kabann de la cité Simone, cet immense bidonville de Port-au-Prince, elle est faite de matériaux de récupération, planches, tôles et bâches en plastique.
La famille tente de survivre, le père est employé au port à décharger les bateaux et Calixte, lui, chaque matin, avant le lever du jour, part à pied avec sa mère laver les légumes au Marché en fer pour espérer gagner quelques gourdes, la gourde étant la monnaie haïtienne.
Ce que Calixte apprécie, ce sont les après-midi, où il peut se rendre à la Kay blé, la Maison bleue, l'école du père Céleste, la seule école primaire de la cité Simone. L'école, porte de la Liberté ?
Calixte est le narrateur. Il nous entraîne dans ses pas, nous sert de guide et nous fait découvrir ce pays aux mille couleurs avec entre autre, cette langue chantante qu'est le créole haïtien, et d'emblée, je me prends d'affection pour ce jeune garçon.
En parsemant son récit de mots, de phrases et même de plusieurs proverbes écrits en créole, sitôt traduit, l'auteur lui donne ainsi, très judicieusement beaucoup d'authenticité et de saveur.
Yves Montmartin décrit avec talent, le courage extraordinaire et la force des habitants de la cité Simone qui tentent comme ils peuvent de subsister dans un lieu, où la misère est à ciel ouvert, où les habitants manquent de tout, où l'accès à l'électricité est très limité, l'approvisionnement en eau potable un problème majeur.
L'auteur mêle avec à-propos le récit romancé du destin de Calixte, sa jeunesse dans les années 70, 80, aux faits historiques et à cette dictature impitoyable de la dynastie Duvalier, responsable de nombreuses tueries, de massacres d'opposants et de civils et aux tristement célèbres tontons Macoutes, cette milice paramilitaire.
Il profite des chapitres intitulés Notes, disposés presque après chaque chapitre du récit, pour donner des explications très intéressantes.
Ce sont des renseignements sur les jeux, comme les combats de coq, qui structurent la vie de pas mal de gens en Haïti, sur les religions comme le vaudou encore bien présent sur l'île, sur les coutumes culinaires et cette « soup joumou », soupe traditionnelle, symbole de l'indépendance du pays le 1er janvier 1804 et devenue patrimoine culturel immatériel de l'humanité en 2021, mais aussi des renseignements beaucoup plus inquiétants sur Haïti aujourd'hui et sur ce peuple qui continue à souffrir et où la situation sécuritaire demeure extrêmement instable, et ce dans l'indifférence quasi générale.
Avec Calixte, premier tome d'Hispaniola de Yves Montmartin, j'ai suivi avec plaisir et tristesse le destin de ce garçon épris de connaissance et rempli de volonté et la confiance absolue aux conseils apportés dans ses rêves, par son grand-père décédé, m'a beaucoup touchée.
Grâce à ce roman qui s'apparente presque davantage à un documentaire, j'ai beaucoup appris sur la vie en Haïti et il m'a été d'une aide précieuse pour comprendre ce qui se passe actuellement sur l'île.
Je remercie Yves Montmartin pour sa confiance et attend avec impatience le deuxième tome, qui devrait m'apporter des nouvelles de Victoire.

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Pour son septième ouvrage en sept ans, l'ancien directeur de la Poste de Saint-Etienne devenu auteur nous transporte en Haïti, avec le premier volet d'un diptyque entre roman et documentaire.


Depuis que le grand-père a dû se résigner à quitter son maigre champ pour tenter sa chance en ville, la famille Fontaine vit encore plus misérablement au coeur de la Cité Simone, le plus grand bidonville poussé à proximité de Port-au-Prince, sur son immense décharge sauvage. Pendant que Toussaint, leur père, trime sur le port pour quelques gourdes quotidiennes – soit quelques grosses moitiés de centimes d'euros – et lorsqu'ils n'accompagnent pas leur mère Olivette dans les corvées d'eau ou, pour moins de gourdes encore, dans quelque emploi à l'emblématique Marché en fer de la capitale, Calixte et sa petite soeur Daniya fréquentent à tour de rôle l'école primaire du Père Céleste, la seule classe ouverte et fonctionnant par roulement.


Calixte est intelligent et motivé. Mais, même avec l'aide du Père Céleste et le parrainage d'un couple français – occasion de reconnaître l'auteur sur l'une des photographies qui agrémentent le livre –, réussira-t-il à échapper à la précarité du bidonville, aux gangs qui rendent le pays aussi dangereux qu'une zone de guerre et à la violence des Tontons Macoutes ? Egrenant joies et tragédies, le parcours romancé du garçon est l'occasion d'une immersion haute en couleur, rythmée par le phrasé créole, dans la vie quotidienne haïtienne des années 1970 et 1980, le tout abondamment complété de notes souvent frappantes retraçant le contexte historique et culturel du pays.


Si ce parti-pris narratif pourra laisser le regret purement littéraire d'une documentation un peu trop scolairement visible et pas assez intégrée au roman – écueil déjà rencontré sous une autre forme dans un livre précédent de l'auteur –, l'on est autant emporté par la plume fluide et concise du versant romanesque que par l'intérêt tout journalistique du reportage qui l'accompagne. Il faut dire que les observations saisissantes ne manquent pas au tableau, à la fois dramatique et pittoresque quand il s'agit respectivement de la situation du pays et de ses particularités culturelles. Et puisque le récit s'achève pour certains personnages mais commence pour d'autres, l'on frémit d'avance de leurs futures épreuves, puisque le second tome verra sans nul doute le terrible tremblement de terre de 2010.


Entre roman et reportage, ce livre court et agréable mêle utilement information et agrément pour un panorama sensible et réaliste du Haïti des Duvalier.


Un grand merci à l'auteur et Babéliote Yves Montmartin de m'avoir offert son livre.
Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Après le destin tragique de Samira dans « le mauvaise herbe », l'émouvante histoire à hauteur d'enfant de « Brindille », le suspense de son roman policier « le code », je retrouve Yves Montmartin avec son dernier livre, « Calixte ».
Je vous remercie Yves pour votre confiance une nouvelle fois renouvelée. Je peux vous avouer que je suis admirative des nombreuses facettes de votre talent d'écrivain et que je suis à chaque fois surprise par votre facilité à vous exprimer dans tous les genres littéraires.

Cette fois-ci, vous avez choisi d'emmener vos lecteurs sur l'île d'Haïti qui se classe parmi les pays les plus dangereux et les plus pauvres au monde et de raconter l'histoire de Calixte Fontaine.

Il m'a fallu quelques pages pour entrer dans l'histoire, pour me sentir à l'aise avec la narration au présent qui mélange fiction et non fiction. Ce choix de votre part de parler au présent est, je trouve, particulièrement astucieux car il permet, à mon sens, de lier le récit à la documentation associée. Il assène aussi une vision très réaliste de la vulnérabilité de la population haïtienne soumise à la dictature de la famille Duvalier entre 1957 et 1986, à la violence des Tontons Macoutes et des gangs.

*
Calixte est né dans les années 80 dans la cité Simone de Port-au-Prince, un immense bidonville. Il vit dans un minuscule appartement avec ses parents, Toussaint Fontaine et Manman Olivette, sa petite soeur Daniya et sa grand-mère Ma'Umtiti.

Petit garçon vif et intelligent, Calixte rêve d'enseigner.
Le père Céleste le prend sous son aile, il croit en lui et surtout, il a la confiance de ses parents. Alors que son meilleur ami Gratitude travaille avec sa mère chaque jour au marché, la seule école primaire de la cité Simone, la maison bleue, devient sa seconde maison.

« le père Céleste dit qu'il faut toujours croire en ses rêves ... Dans la cité, on ne rêve pas trop. Tout le monde est préoccupé par le lendemain, et surtout savoir s'il aura assez de gourdes pour acheter de quoi nourrir sa famille. »

Avec Calixte, se dessine un monde sombre et sans avenir, où chacun s'use pour quelques misérables gourdes ; où chacun rêve d'un futur heureux, d'une vie agréable et douce dans laquelle les enfants pourraient jouer innocemment dans la rue et ne mouraient pas de sous-nutrition, par manque de soins médicaux ou faute d'un réseau d'assainissement correct.

« … notre île n'a aucun avenir, trop de misère, trop de corruption, trop de violence, et surtout un manque total de liberté. »

Mais avec Calixte, c'est aussi la beauté de l'enfance et la magie de l'innocence. Calixte s'émerveille de ce monde frémissant de vie, baigné de couleurs, de saveurs et de senteurs ; un monde bruyant, joyeux et chaleureux vibrant au rythme des fêtes et des traditions, des plats traditionnels, des chants et des tambours.

*
Au-delà de l'histoire de Calixte, c'est un voyage dans le temps et dans l'Histoire d'Haïti. On découvre aussi la géographie de cette île autrefois magnifique, on pénètre au coeur des bidonvilles, on est invité à entrer à l'intérieur les Kabann de la cité et à partager l'intimité des foyers au rythme mélodieux des mots créoles.
Surnommée autrefois « la perle des Antilles », son beau visage a bien changé depuis sa découverte par Christophe Colomb. Il devait être bon d'y vivre ! Mais aujourd'hui, la déforestation a ravagé la terre, la laissant exsangue et stérile. La dictature et l'escalade de l'insécurité ont opprimé les hommes.

« La terre est comme lui, épuisée. L'érosion emporte peu à peu la mince couche de terre arable, la chair vivante, celle qui nourrit depuis toujours sa famille. »

*
La cité Simone est un monde à part où règnent la misère et les privations : chacun y vit comme il peut au milieu de gangs qui ont pris la place d'un état défectueux. C'est la système de la débrouille dans cette sorte de no man's land où règnent la corruption et la répression, les violences urbaines, le trafic d'organes, les passages à tabac et les exécutions.

Pourtant, au coeur de cette misère et de cette violence quotidiennes, on sent poindre une douce lumière. L'émotion est présente dans la générosité, l'entraide et la bonté chez ceux qui n'ont quasiment rien.

« Un monde de vies invisibles, un assemblage hétéroclite d'abris de fortune, une architecture de la survie. Un mélange charnel où la discrimination n'a pas de place. Une précarité ciment d'une solidarité de tous les instants. Un toit qui s'envole et aussitôt des dizaines de bras qui viennent prêter main forte. Une semaine difficile faute de travail et voilà un sac de riz offert qu'on rendra quand on le pourra. »

Calixte vit dans cette ambiance de violence et de dénuement, d'insécurité et de peur, mais il veut s'en sortir et croit qu'un futur est possible. C'est un enfant courageux, gai, particulièrement sensible et attachant.
Un autre personnage m'a beaucoup plu, c'est celui du grand-père Charlemagne. Son esprit accompagne le récit tout du long en s'invitant dans les rêves des siens et les guidant de ses belles réflexions sur la vie.

*
J'ai aimé ce voyage particulièrement riche et instructif, ce témoignage sensible d'une culture, d'une histoire, d'une époque.
Ce premier tome m'a littéralement transportée à Haïti dans les années 80. Son jeune héros Calixte est attachant, son récit empreint d'une profonde humanité. Il me tarde maintenant de poursuivre avec l'histoire de Victoire, sa fille.
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Citations et extraits (42) Voir plus Ajouter une citation
Notre "Kabann" c’est Charlemagne Fontaine, mon grand-père qui l’a construite. Comme toutes les "Kabann" de la cité, elle est faite de matériaux de récupération, planches, tôles, bâches en plastique, ferrailles. La plupart des maisonnettes sont minuscules, moins de 9m2, les murs sont faits de tôles ondulées complètement rouillées, le toit est bas, un adulte peut à peine s’y tenir debout. À l’intérieur, des parents avec plusieurs enfants s’entassent la nuit pour dormir. La journée, quel que soit le temps, tout le monde vit dehors. La cité Simone c’est un immense bidonville, un dédale de baraquements, d’allées sombres, d’égouts à ciel ouvert. Une ville dans la ville, puante et grouillante.
Charlemagne, mon grand-père est mort quelques mois plus tard à la suite d'un accident sur le port.
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La disparition de M'Umititi a été pour moi un passage, tout comme mon entrée au collège quelques semaines plus tard. Dans la religion vodou, ce sont des moments importants de la vie. Tout au long de notre existence nous prenons des couloirs qui nous font progresser.
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Quelques timides manifestations ont eu lieu, vite réprimées dans la violence par les Tontons Macoutes. Mais il suffirait d'allumer la mèche pour que tout explose. Il faut simplement être patient, continuer notre lutte souterraine. L'homme haïtien est réputé pour ne jamais se plaindre, il fait face à l'adversité climatique ou autre, comme une fatalité. Mais nous sentons poindre dans tous les quartiers, un vent de révolte...
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Toussaint est un "Tambouye", un joueur de "Tanbou Petwo". C'est mon grand-père Charlemagne qui l'a initié. Ensemble, ils ont choisi l'arbre dans le tronc duquel a été taillé son tambour. Une cérémonie avait été organisée pour avoir l'approbation de l'arbre avant de l'abattre. La nuit précédente, mon père avait passé une nuit sous l'arbre, fin d'entrer en communion avec celui qui après l'abattage deviendrait son compagnon.
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Dans la cité, on ne rêve pas trop. Tout le monde est préoccupé par le lendemain, et surtout savoir s'il aura assez de gourdes pour acheter de quoi nourrir sa famille. La peur de ne pas être embauché par le patron le matin et de rentrer à la maison sans rien dans ses poches. Chacun vit dans l'attente de la distribution de l'eau, pour la nourriture on arrive toujours à se débrouiller mais sans eau on ne peut pas survivre.
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