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EAN : 9782226436733
272 pages
Albin Michel (22/08/2018)
3.16/5   96 notes
Résumé :
« Le diable a bu du rhum. On a souillé les églises, déterré les cadavres. Saint-Pierre doit se repentir. Tandis que je crache de la boue et du feu, que je ravage les champs, les bêtes et les hommes, ils battent des mains comme des enfants à Carnaval. Ils oublient de redevenir des animaux sages, de faire confiance à leur instinct. Fuyez ! Je suis la montagne Pelée, dans trois heures, je vais raser la ville. Trente mille morts en quatre-vingt-dix secondes. »
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Critiques, Analyses et Avis (29) Voir plus Ajouter une critique
3,16

sur 96 notes
J'appartiens à une famille sur laquelle l'Histoire (avec une majuscule) visiblement s'acharne : chassée d'Espagne, comme bien d'autres, en 1492 par Isabelle la Catholique, et désormais apatride, errant pendant plusieurs siècles à la recherche d'un asile à peu près sûr, elle décida finalement de se scinder en deux. Et tandis qu'une partie de la famille faisait halte en Amérique latine (avant - riche idée ! - de décider de s'installer à Paris, une quarantaine d'années plus tard, précisément au moment de l'invasion des troupes nazies), l'autre, en 1902, se réfugia au pied de la Montagne Pelée une semaine très exactement avant son explosion. Et là… Rideau !

Quand la malchance prend des proportions aussi colossales, le mieux est encore probablement d'en rire… Pourtant, c'est le coeur serré que j'ai abordé le roman de Daniel Picouly qui relate, avec une précision quasiment horlogère, les "quatre-vingt-dix secondes" de terreur absolue au cours desquelles la Montagne Pelée, incontrôlable et déchaînée, vomit avec une fureur diabolique tous les feux de l'enfer de sa nuée ardente sur la terre de Martinique, le 8 mai 1902 à 7h52.

Retour à Saint-Pierre, trois heures avant la catastrophe, retour à la vie, aux activités banales - bientôt dérisoires - des hommes. Les ambitions politiques, les rivalités, les querelles ordinaires, un amour en forme de vaudeville, un duel d'honneur. Mais aussi l'attente, le sentiment d'urgence, d'alarme : “la rumeur se répand : le diable a bu du rhum”. Et la peur. Car “la ville commence à avoir peur”. Et celle qui la décrit, cette peur, celle qui s'en réjouit (“j'aime la peur des hommes. Je guette le moment où elle tranche l'assurance aux jarrets, tétanise les bras, aspire les traits du visage et tète les yeux de celui qui va mourir”), la narratrice improbable - et bientôt l'héroïne - de cette histoire, c'est la vieille sorcière de la Martinique, son vieux tas de pierres, de boue et de magma : la Montagne Pelée.

Figure mythologique, bestiale, concentré de haine pure et d'absolu mépris envers “l'engeance humaine”, le volcan omnipotent et omniscient, divinité altière, jalouse et malveillante, s'apprête à déverser avec jubilation sur les habitants De Saint-Pierre toute sa fureur à dimension biblique. 90 secondes. 30 000 morts.

"Quatre-vingt-dix secondes", qui esquisse en arrière-plan l'histoire coloniale de la Martinique, dresse sans complaisance le tableau des ambitions, des petites vanités et surtout des craintes de la Métropole qui empêchèrent l'évacuation des populations quand elle était encore possible et furent directement à l'origine de ce bilan humain : il était tout simplement hors de question, en pleine période électorale, de prendre le risque que le vote noir l'emporte sur le vote blanc. Or, en cas d'évacuation, seuls les Noirs seraient restés...

De cette tragédie qui marqua à jamais la mémoire de la Martinique, de ce désastre sans précédent, Daniel Picouly tire un roman au ton léger, ironique et drôle qui illustre avec beaucoup de talent cette capacité - et cette grandeur - qu'ont parfois les hommes face aux plus grands malheurs : celle de ne surtout pas s'appesantir, de ne pas s'attarder au désespoir, mais de rire face au destin et à la mort en attendant les jours meilleurs et les lendemains qui chantent.

Un roman original, très documenté et bien écrit, que j'ai lu d'une traite et que j'ai beaucoup aimé.
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8 mai 1902, 7h 52: Jour funeste où la montagne Pelée explosa.
Le volcan ravagea Saint-Pierre de la Martinique en quatre- vingt dix secondes, exterminant par l'onde de choc et la nuée ardente près de 30 000 personnes.

Voici pour les faits historiques. du grain à moudre pour décorer de voiles noirs et de dramaturgie une fiction romanesque sur les jours précédant la catastrophe.

Mais Daniel Picouly est un facétieux.
D'accord pour faire devoir de mémoire mais pas d'accord pour faire un livre «catastrophe» et surtout ne pas tomber dans le piège du mélodrame. Il préfère choisir le mode tragi-comique et une écriture espiègle pour dérouler la fin annoncée. La matière dramatique est toute trouvée, reste plus qu' à lui associer quelques figures humaines et le tour est joué.

D'ailleurs il se cache derrière le récit. C'est la montagne qui parle, qui monologue en vieux Moloch grincheux en voyant ces humains vaquer à leurs minables petites affaires: gouverneur, journaliste, planteur, curé, amoureux interdits pour cause de race, et tout le petit monde de l'île, du plus noir au plus « mélangé ».

Il faut déguster l'écriture aux tournures poétiquement malicieuses, sourire des bons mots, des situations ubuesque ou incongrues. Cela n'empêche nullement de se projeter dans cet épouvantable drame humain, empli d'effroi devant cette éruption volcanique meurtrière qui rasa le Petit Paris de Antilles en ne laissant que 3 survivants.

Je conseille vivement.
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Pour moi qui mettais beaucoup d'espoirs dans ce livre de la rentrée littéraire précédente, cela a pourtant été une réelle déception. Pourquoi? Je m'explique en quelques mots…

Tout d'abord, le style d'écriture auquel je n'ai pas adhéré. J'ai trouvé l'écriture compliquée et pas vraiment fluide, contrairement à ce que je suis habituée. Par contre, j'ai apprécié le risque pris par l'auteur de faire « parler » la Montagne Pelée, comme il le fait dans certains chapitres et non, comme la quatrième de couverture le laisse penser, durant tout le récit.

Ensuite, je pensais voyager par la pensée dans ce département d'outre-mer qu'est la Martinique, lieu haut en couleurs et exotique pour moi. Or, je n'y ai pas retrouvé les parfums et les senteurs espérés par les descriptions. Même si de nombreux lieux sont mentionnés, mon imagination n'a pas eu l'opportunité de me transporter aussi loin.

Dernier point négatif pour moi : les personnages. Alors que ces derniers ne sont pas forcément nombreux, j'en ai vite perdu le fil, sans vouloir vraiment essayer de le retrouver. Je n'ai pas abandonné ma lecture mais je l'ai laissée de côté un certain temps, ce qui ne m'a pas chamboulée dans le reste de l'histoire.

Attention, tout ceci n'est que mon humble avis. Comme je vous l'ai déjà dit, je vous conseille de lire ce livre et de vous en faire votre propre opinion. Si vous souhaitez en débattre ensuite avec moi, n'hésitez pas à me laisser un message sous cet article, j'en serai honorée
Lien : https://www.musemaniasbooks...
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En 1902 à la Martinique, la montagne Pelée entre en éruption, faisant environ 30000 morts.
Voilà le sujet de ce roman dont l'originalité est de faire parler la montagne Pelée elle-même, en faisant un personnage à part entière.
S'y mêlent d'autres personnages humains : le maire, le consul, une lavandière, un jeune comédien noire, une jeune fille éprise du comédien............
que la montagne observe.
C'est amusant malgré le drame de la situation, la ville De Saint-Pierre ayant été anéantie.
Des faits historiques, une représentation de la société martiniquaise en 1900 , voilà ce que nous offre l'auteur.
L'écriture est vive, pleine d'humour et de poésie.
Indéniablement, l'auteur a du talent.
Pourtant j'ai eu quelques moments de lassitude au cours de cette lecture.
Daniel Picouly est un de ces écrivains que j'aime beaucoup tout en étant pas spécialement fan de ses écrits.
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8 mai 1902, 5 heures du matin au jardin botanique De Saint-Pierre. Alors que la Montagne Pelée fait des siennes, Othello est sur le point de perdre la vie en duel. Face à lui Georgien d'Outreville, un tueur professionnel engagé par le tuteur de Louise, la femme qui l'aime, afin qu'il se débarrasse de son rival.

Louise attend de l'autre côté du mur, dans une calèche, avec son tuteur et un prêtre censé les marier, une fois Othello tué. Louise n'a aucune intention de consentir à cette union et a prévu de se donner la mort avec le pistolet de poche contenu dans son sac qu'elle serre contre elle.

Louis Mouttet, le gouverneur De Saint-Pierre, depuis quelques mois en poste, a reçu l'ordre de ne pas évacuer la ville, malgré les menaces du volcan qui depuis quelques jours gronde sous leurs pieds. le professeur Landes a tout fait pour convaincre les autorités, sans résultat.

Marius Hurard, patron du journal Les colonies, est dans son bureau. Depuis que la montagne s'est réveillée, les tirages du journal s'envolent. A 7h52, ils mourront tous ou presque…

Quatre-vingt-dix secondes signe mes retrouvailles avec la verve de Daniel Picouly dont j'avais adoré L'enfant léopard pour lequel il avait reçu le Prix Renaudot, largement mérité.

Dans son nouveau roman, l'auteur donne la parole à la montagne Pelée, héroïne d'une épopée terrifiante, qui va donner la mort à près de trente mille personnes le 8 mai 1902 en seulement quatre-vingt-dix secondes, détruisant au passage la ville De Saint Pierre.

L'histoire totalement véridique de la catastrophe nous est contée par la Montagne Pelée en personne. Pour elle, Saint-Pierre est devenue une ville vénale, une catin, une Sodome tropicale, le berceau de toutes les dérives et paillardises de l'homme : les curés envoient leurs soutanes par dessus tête, les bordels font recette…

Le volcan s'énerve, les avertit par de réguliers grondements, de la fumée, de la lave, il a déjà fait des dizaines de morts chez les bêtes comme chez les hommes aux alentours De Saint Pierre mais personne ne comprend ses avertissements.

Alors, du haut de ses 1 351 mètres, la montagne Pelée décide de punir par sa colère ces humains arrogants et ambitieux. Seuls, quelques-uns, qu'elle a dument choisi, pourront survivre et témoigner qu'ils ont vécu le jour du Jugement dernier, comme Cyparis, au cachot au moment où la nuée ardente va s'abattre sur la ville.

Avec ce roman, Daniel Picouly s'attaque à un fait historique pour lequel je ne savais rien, de ce point de vue là c'était très intéressant d'autant plus que la catastrophe nous est racontée de façon très originale puisque c'est le volcan lui-même qui prend la plume.

Au-delà de la catastrophe en elle-même, l'auteur plante le décor de son récit, nous décrit la société martiniquaise de cette époque avec le pouvoir toujours aux mains des blancs, les noirs qui continuent de suer sang et eau pour un salaire de misère mais qui sont désormais libres de le faire puisque plus sous le joug de l'esclavage. Rares sont ceux qui ont pu s'élever comme Marius Hurard, patron du journal Les colonies, l'un des protagonistes du roman.

Entre les deux, les métisses, ne sont pas bien lotis. A l'instar d'Othello, il leur est difficile de faire des études et ils ne peuvent espérer contracter un mariage avec une personne venue de Métropole comme Louise.

Sur le papier ce sujet m'intéressait beaucoup : le fait historique, un narrateur volcan la satire sociale, l'ignorance sociale, la vie dans les colonies… et après un début de lecture enthousiaste, je vous avoue que je me suis un peu lassée.

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critiques presse (1)
Lexpress
08 octobre 2018
Une tension sourde rampe dans les irritations de la volcanique oratrice, qui finit par entraîner dans son éruption un fatras de personnages dont on ne sait plus ni quoi ni qu'est-ce. Mais quelle audace dans le parti pris narratif, quelle luxuriance dans la prose et quelle clairvoyance sous la romance flamboyante.
Lire la critique sur le site : Lexpress
Citations et extraits (19) Voir plus Ajouter une citation
Mais qui accordera le moindre crédit à un petit professeur du lycée de Saint-Pierre ? « Réfugiez-vous sur les hauteurs ! » Personne n’a voulu entendre ce cri. Il résonne au plus profond. C’est un vieux cri. Un cri de chair et de crocs. Un cri de nègre marron bravant chiens et maître. Se réfugier sur les hauteurs, c’est redevenir marron. Renier une liberté conquise. Tu as tort, petit homme. Cours ! Cours vite, loin et haut ! Le morne est ton seul salut. Ton unique refuge. Morne Aileron, morne Coco, monte, nègre, monte ! Morne-Rouge, morne Fumé, morne Balisier, monte ! Le morne est ton frère. Il saura te cacher. Ne te retourne pas. Ne te laisse fléchir ni par le souffle putride dans ton dos, ni par les aboiements, les crocs de porcelaine, le fouet, le poids des fers ou le doute cotonneux aux jarrets. Cours ! Embrasse l’arbre à pain nourricier, dévore-le, découvre-toi libre dans l’eau des pierres, le souffle d’une aile, aspire au plus infime des parfums, garde en ajoupa sur ta tête crépue de vent un morceau de ciel étoilé… Que se passe-t-il ? Je vire au lyrisme et à l’éloge de la fuite. Qu’on ne se méprenne pas. Grâce au marronnage, je retrouve en moi le fauve qui se repaît plus encore de la fuite que de la proie. Cours, la vie ! Cours ! Tu es déjà à moi. Le regret recraché, je me sens plus forte. Assez pour exercer mon pouvoir d’épargner. Être généreuse. Choisir. Élire. Je mens. Si j’étais vraiment en générosité, je leur révélerais où ils seraient hors d’atteinte et aux premières loges pour voir à quoi ils ont échappé. Mais je ne suis pas en générosité. Ce n’est pas à moi de proposer un plan d’évacuation de Saint-Pierre. D’indiquer au maire et au gouverneur les mornes de repli, les itinéraires de dégagement, de lancer des appels au calme, d’imposer la discipline. Je ne suis pas une consigne de sécurité. Je suis la Pelée
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J’ai lu Le journal intime d’un arbre de Didier Van Cauvelaert dans lequel le narrateur est un poirier de 300 ans. J’avais beaucoup aimé. L’idée que cette fois ci le narrateur soit le volcan
Me plaisait Donc énormément. j’ai pourtant été très déçue. Le narrateur, majoritaire est le volcan, mais c’est parfois un oiseau, une rivière, La grand mère. J’ai trouvé ce roman alambiqué, j’ai eu du mal à entrer dans l’histoire, c’est trop lent.
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Après réflexion, la Garlaban décida d'être une "livreuse", une porteuse de livres. Elle se chargea d'almanachs, de dictionnaires, de recueils de recettes, de magie, de prières, de bibles, de romans... Bref, tout ce qui peut voyager sur une tête et à l'intérieur. La Garlaban devint une bibliothèque qui marche et raconte. Quand elle s'arrêtait, on s'attroupait, elle lisait et plus rien ne bougeait.
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On meurt dans une odeur de lys et de jasmin. Mais pas n’importe où. Pour leur faire office de Champs-Élysées, le jardin offre aux duellistes l’allée des Grands-Blancs. La plus large et la plus élégante de ses allées. Elle doit son nom aux troncs peints à la chaux des palmiers qui la bordent au garde-à-vous. Ils font penser à un alignement d’infirmiers en blouse blanche à l’affût du premier sang.
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Saint-Pierre est surtout une fille du port, les jambes ouvertes à tous les embruns.
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Vidéo de Daniel Picouly
Dans le cadre du concours de lecture « Si On Lisait A Voix Haute » organisé par France Télévisions et « La grande librairie », des écrivains et comédiens offrent leurs conseils aux collégiens et lycéens qu'ils rencontrent en classe.
Cette semaine, l'écrivain Daniel Picouly part à la rencontre des élèves de 5e d'du Collège Guynemer à Nancy.
« La lecture c'est une activité physique, vous lisez avec votre corps. Ne vous renfermez pas dans votre corps. C'est lui qui travaille. »
Une vidéo en partenariat avec le CNL.
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