Le titre est à lui seul l'oreille qui a écouté
Jean-Christophe Rufin répondre aux questions de
Fabrice Lardreau : des roches assimilées à tout ce qu'il y a de plus vivant et une humanité s'érigeant dans les hautes sphères de la bienveillance sur les parois de la liberté, de l'amitié, de la solidarité. Sans oublier celle de l'authenticité, la vraie, pas celle utilisée à des fins publicitaires, celle à l'image de ceux qui côtoient la montagne, l'affrontent, tentent de l'adopter ; franchise du geste, véracité de la conviction, sincérité des paroles.
Curieusement les relations entre l'écrivain et la montagne n'ont pas débuté sous les meilleurs auspices : enfant, il s'est retrouvé momentanément éloigné de sa famille, au coeur de la montagne suisse où Zeus avait lancé son foudre contre les parois des Alpes. Depuis la crainte de l'orage est restée – ça me parle énormément puisque pour votre serviteur c'est le contraire qui s'est produit. Mais le défi d'apprivoiser la bête rocheuse s'est ancré au plus profond de
Jean-Christophe Rufin dans un souci du respect des éléments et dans la satisfaction de se hisser sur les hauteurs de la liberté.
L'académicien raconte sa conception de l'alpinisme – ni militaire, ni hippie mais avec cette soif de faire corps avec la montagne, de sortir de sa zone de confort tout en étant conscient de ses dangers – et plus globalement sa vision sur la nature, l'écologie ; ô combien on ne peut séparer les éléments sur terre et surtout les opposer. Si l'homme est responsable des maux de la terre, c'est également ce même homme qui pourra apporter des solutions.
Si la montagne est évidemment le socle de ce livre, d'autres lieux sont évoqués, notamment le Berry et ses cieux qui imitent les sommets, et, diverses réflexions escaladent les paragraphes en fixant bien consciencieusement les pitons sur les falaises de la nuance ; Rufin abomine les idéologies extrêmes, les combats soi-disant pour le bien qui mènent paradoxalement à la violence. Celui qui met toujours en fiction des personnages solaires aime la réalité de la lumière, préfère avancer que reculer, construire que détruire, allumer toute source de vie plutôt que d'enfermer les âmes dans des couloirs crépusculaires.
Avec toute l'humilité qu'on lui connaît,
Jean-Christophe Rufin refuse de se considérer comme un grand alpiniste. Pourtant il ouvre des voies sur les versants de notre société, en réchauffant l'ubac et en apportant de la fraîcheur vers l'adret ; une façon de soigner par les mots ce qui engendre les maux.