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EAN : 9782262018481
576 pages
Perrin (24/08/2007)
4.2/5   81 notes
Résumé :

Georges Clemenceau fut l'homme aux quatre têtes : le Tigre qui déchire les ministères ; le dreyfusard qui mène pendant neuf ans le combat du droit et de la justice ; le premier flic de France qui dirige d'une main de fer pendant trois ans le ministère de l'Intérieur ; enfin le Père la Victoire qui, rappelé à 76 ans à la tête d'une France en guerre et au bord de l'abîme, conduit, indomptable, le p... >Voir plus
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Pour le centenaire de l'année 1917, les éditions Perrin ont publié en fin d'année dernière une magistrale biographie de Georges Clemenceau écrite par Michel Winock. Celle-ci était initialement parue en 2007. Elle a été revue, actualisée et augmentée pour cette édition de luxe, reliée et enrichie d'un cahier iconographique fort utile et très intéressant.



Michel Winock est professeur émérite à l'Institut d'études politiques de Paris. Il est l'auteur de nombreux ouvrages, parmi lesquels La Fièvre hexagonale, Les grandes crises politiques 1871-1968, le Siècle des intellectuels, ainsi que de plusieurs biographies remarquées : Pierre Mendès France, Mme de Staël, Flaubert et François Mitterrand. Winock, dans ce livre dense de 584 pages, revient sur le parcours de Clemenceau qui fut selon lui, le porte-drapeau de la gauche républicaine : « le nom de Georges Clemenceau doit aussi être associé à celui de la République, dont il a été l'un des soutiens les plus ardents. Charles de Gaulle fut un républicain de raison : parce que la République était le régime voulu par les Français. Georges Clemenceau fut un républicain de naissance et de conviction. » Winock délivre plusieurs anecdotes savoureuses sur Clemenceau et présente ses nombreux atouts. Toutefois, il ne tombe jamais dans l'hagiographie. Effectivement, Winock s'arrête sur les travers de son sujet d'étude : agressivité, brutalité, procédés tortueux voire despotisme, non pour l'accabler mais avec l'objectif de nous offrir une vision complète de Clemenceau. Nous pouvons écrire sans flagornerie aucune, qu'il a atteint son objectif.



Etudier la vie, le parcours, l'oeuvre politique et intellectuelle de Clemenceau, revient en réalité à se poser la question de savoir qui il fut réellement : « Clemenceau est l'homme aux quatre têtes, tour à tour ou tout à la fois le Tigre, le dreyfusard, le premier flic de France, le Père de la Victoire ». Revenons quelques instants sur cette appellation de Tigre : « le Tigre est le surnom que son ami Emile Buré lui donne en 1903 et qui fut repris par tout le monde : il s'applique rétrospectivement bien au tombeur de ministères, au député implacable dont les discours griffent ».



Il y a une formule, parmi d'autres, de Winock qui a retenu notre attention. Elle explique l'idée suivante : l'événement a créé Clemenceau. L'auteur écrit : « Georges est né le 28 septembre 1841 à Mouilleron-en-Pareds en Vendée, Clemenceau, à Paris en 1870, quand les Prussiens assiégeait la capitale. » Effectivement, sans cette guerre perdue par Napoléon III, puis le siège de Paris, la Commune, qu'aurait-il mené comme vie ? Sûrement une carrière de médecin, étant donné que ses idées politiques - principalement républicaine et anti-cléricale - ne lui auraient point permis d'émerger sous le règne du dernier napoléonide.



Prenons le temps de nous arrêter sur les origines sociales et politiques de Georges Clemenceau : « Ce n'était pas si fréquent dans la Vendée catholique et royale. A tout le moins dans la paysannerie et dans l'aristocratie, piétaille et chef des Blancs. Dans la bourgeoisie il en allait autrement : les Bleus y abondaient. Or les Clemenceau étaient des bourgeois, de l'espèce éclairée : une lignée de médecins. » L'auteur remonte l'arbre généalogique, et nous apprenons que « son arrière-grand-père, Pierre-Paul, fut nommé médecin des Armées de l'Ouest sous la Révolution, avant d'être sous-préfet de Montaigu, et enfin, en 1805, membre du Corps législatif ». Il est on ne peut plus clair que dans la famille Clemenceau, politique et médecine font bon ménage. Précisons aussi qu'un buste de Maximilien Robespierre trônait sur la cheminée. Cela a du le marquer profondément, lui qui plus tard écrira : « Tous ces empereurs, roi, archiducs et princes sont grands, sublimes, généreux et superbes. Leurs princesses sont tout ce qu'il vous plaira ; mais je les hais d'une haine sans merci comme on haïssait autrefois en 1793, alors qu'on appelait cet imbécile de Louis XVI l'exécrable tyran. Entre nous et ces gens-là, il y a une guerre à mort. »



George Clemenceau est le deuxième d'une famille de six enfants. Son père était aussi médecin et avait participé aux Trois Glorieuses en 1830, à peine débarqué à Paris après trois semaines de marche. Benjamin Clemenceau, son père, applaudit des deux mains à la révolution de 1848, mais déchante devant la tournure prise par les événements. Louis-Napoléon n'entendait pas continuer la République, et il restaura l'Empire. Benjamin Clemenceau fut emprisonné, suite au coup d'Etat manqué d'Orsini sur Napoléon III, en vertu de la loi de sûreté générale. Détail amusant et révélateur de l'état d'esprit familial, quand il rend visite à son père en prison et lui annonce fièrement : « Je te vengerai », ce à quoi le père répond : « Si tu veux me venger, travaille ». Effectivement, Georges Clemenceau travaillera dur et longtemps, mais ne mènera pas une longue et belle carrière médicale comme son père l'espérait alors…



Selon l'auteur : « Clemenceau est aussi la France. Parisien de Vendée, Vendéen de gauche, homme de gauche détesté par la gauche, athée communiant dans la religion de la République, politicien qui aime les livres et en écrit, frère et admirateur de Claude Monnet qu'il sait pousser jusqu'à la limite de son art ». Il poursuit son analyse : « il ne cesse d'étonner l'historien qui le suit dans les méandres de sa vie pleine, contradictoire, heurtée, traversée d'échecs et promise à la gloire ». L'auteur précise également les idées politiques de Clemenceau : « On ne peut nier qu'il fut un nationaliste. Son nationalisme, cependant, n'avait rien de commun avec celui qui, de son temps, enfiévrait ceux qui se délectaient de ce mot-là et faisaient de leur patrie un territoire interdit aux autres peuples. Purement républicain, son nationalisme ne s'est jamais conçu comme une fermeture aux autres, un rejet de l'étranger, une passion obsidionale d'une identité menacée. Sa haine du racisme, de l'antisémitisme, de la xénophobie, allait de pair avec cette fierté, illusoire ou non, d'appartenir à un grand peuple, celui qui avait allumé pour le monde entier la torche de la liberté ». Clemenceau était littéralement un enfant de 1789 et surtout un héritier de 1793.



Au cours de sa longue carrière, Clemenceau eut des amitiés particulières dont certaines peuvent surprendre : « On peut s'étonner de cette amitié et de cette admiration, car Blanqui illustra l'échec permanent de la politique insurrectionnel, opposée à la République démocratique du suffrage universel. » de même, toute sa vie il fut un anti-clérical et ne cessa jamais d'attaquer le catholicisme : « L'Eglise a constitué et constitue encore un parti politique ; elle ne peut se résigner à entrer dans la société civile au même titre que d'autres cultes et à y jouer simplement le rôle d'une association parmi d'autres associations ». Avant d'entamer sa grande carrière politique, il se cherche et ne désire pas vraiment devenir médecin comme son paternel. Il se brouille avec son père, au sujet de son avenir. Ce dernier, malgré tout continue de lui envoyer des subsides. Georges veut voir du pays. Il part en Angleterre, puis s'embarque pour les Etats-Unis d'Amérique qui vivent les dernières heures de la Guerre Civile (1). Il y fréquente plusieurs femmes, et l'une deviendra sienne. Cependant ce mariage ne sera pas heureux. Pour gagner sa vie outre-atlantique, il devient journaliste. Il donne également des cours de français et d'équitation. Son voyage au pays de Washington lui fait découvrir la démocratie américaine. Il est fasciné par la procédure d'impeachment (2). A la suite à ce séjour qui lui laisse une passion durable pour la philosophie et la littérature anglo-saxonnes, il maîtrise parfaitement l'anglais, chose rare pour un français de l'époque. D'une manière générale, nous sommes toujours étonnés de constater cette fascination qu'éprouvent les penseurs, les hommes politiques (souvent classés à gauche), les révolutionnaires et autres libéraux français pour les institutions anglo-saxonnes.



Le premier événement historique auquel prend part Clemenceau est la Commune de Paris. Winock précise : « Pendant ces semaines tragiques, Clemenceau, dans sa mairie de Montmartre, mit toute son énergie à éviter la guerre civile. » Il n'était pas à proprement parler un communard, mais il regrettait amèrement l'emploi de la force armée, pour régler ce problème éminemment complexe et lourd de conséquences. Winock rappelle : « Il y a donc bien trois camps en présence : Versailles, les insurgés de Paris et le mouvement républicain de province auquel s'est jointe la Ligue républicaine des droits de Paris qu'on peut appeler le parti des conciliateurs. » Clemenceau est à ranger dans cette troisième catégorie, alors que par la suite il ne sera plus jamais considéré politiquement comme un conciliant ou un diplomate.



Nous le suivons pas à pas dans son ascension politique, qui le voit passer de maire à Montmartre à représentant (actuel député). Chose intéressante, d'autant plus si nous la mettons en perspective avec notre époque, il se positionne clairement contre le cumul des mandats. En effet, le 24 avril 1876 il écrit à Forest, vice-président du Conseil, pour démissionner du conseil de Paris où il représente le quartier de Clignancourt, afin de se consacrer à sa nouvelle mission. Son premier grand combat national, en tant que député, fut d'obtenir l'amnistie pour les communards, emprisonnés, exilés, déportés et sur le point d'être jugés. Il croise sur sa route dans cette défense des communards Victor Hugo. Hugo et Clemenceau sont les deux poumons de cette bataille pour l'amnistie. le premier combat au Sénat, la second à la Chambre des députés. Son premier discours remarqué, par ses amis et ennemis politiques, en tant que député date du 16 mai 1876. Il y défend bien évidemment l'amnistie. Hugo l'appuie, le soutien et il écrit même dans la presse : « Si mon nom signifie quelque chose : il signifie amnistie ». Touts les hommes politiques ne désirent pas accéder à ce désir : « Quand me débarrasserez-vous de ce haillon de guerre civile ? » répond Léon Gambetta dans son discours sur l'amnistie à la Chambre des Députés. Finalement, après de nombreuses péripéties, de combats dans la presse et aux Chambres, le gouvernement Frecynet propose une loi sur l'amnistie qui recueille 312 suffrages favorables contre 136. Belle victoire morale et politique pour Clemenceau et Hugo.



A la Chambre ou dans les salles municipales, la joute est verbale. Pas de caméra, pas de radio, tout passe par la posture et la voix. A cet exercice-là, Clemenceau est redoutable. Il est vif, concis et percutant. Les observateurs et acteurs politiques de son temps opposent souvent son style avec celui de Jaurès. Ce dernier se montre dans ses discours, plutôt long, use et abuse de digressions, de figures de styles et d'images. L'important est de convaincre. Clemenceau maîtrise l'art oratoire au point que ses adversaires le craignent dans le débat. Voici ce que Camille Pelletan écrit en 1883, au sujet des discours de Clemenceau : « Cette discussion serrée, concentrée, rapide, n'a pas besoin d'apprêt et dédaigne toute parure. La parole de Clemenceau est nue, trempée, aiguisée comme un fleuret : ses discours ressemblent à de l'escrime, ils criblent l'adversaire de coups droits. »



Homme de gauche, il n'en est pas pour autant collectiviste ou communiste. Il rétorque à ces derniers : « Quant à me prononcer pour votre appropriation collective, du sol, du sous-sol, je réponds catégoriquement : non ! Non ! Je suis pour la liberté intégrale et je ne consentirai jamais à entrer dans les couvents et casernes que vous entendez nous préparer. le citoyen qui me questionne a dit qu'il n'y avait pas que des jésuites noirs. Il a raison : il y aussi des jésuites rouges ». Clemenceau est ovationné par ses électeurs et ses partisans, mais comme l'écrit le Temps : « quelque avancé que l'on soit, on se trouve toujours être le réactionnaire de quelqu'un ». Profondément républicain mais impatient, il est pressé que la République devienne réellement… une République. Il déclare et déplore plusieurs fois dans les années 1870 : « le régime actuel consiste en une République nominale entourée d'institutions monarchiques ». Ces amis, qui considèrent pareillement que les choses avancent trop lentement, disent même : « Que la République était belle sous l'Empire ! ».



Clemenceau eut de nombreux adversaires politiques. Nous en retenons principalement deux : Gambetta et Ferry. Leurs différends illustrent parfaitement les oppositions de l'époque. Clemenceau attaque son ancien compagnon de route Gambetta, parce qu'il le trouve lent dans la conduite des affaires, timide voire modéré. Gambetta et ses partisans sont taxés d'opportunisme. Voici la défense que présente Gambetta à ses détracteurs : « Cette politique, on l'a appelée d'un nom mal fait, d'un véritable barbarisme. Pour une chose mal conçue, il fallait un mot mal conçu : on l'a appelée opportunisme. Si ce barbarisme signifie politique avisée, ne laissant jamais passer l'heure propice, les circonstances favorables, mais ne sacrifiant rien, ni au hasard, ni à l'esprit de violence, on pourra tant qu'on voudra appliquer à cette politique une épithète mal sonnante, et même inintelligible, mais je dirai que je n'en connais pas d'autres, car c'est la politique de la raison, et j'ajouterai que c'est la politique du succès. » Et Winock insiste sur un point précis au sujet de Gambetta : « sa réussite est l'instauration et la consolidation de la République, qui a permis à la bourgeoisie de laisser de côté ses frayeurs, et de ne plus confondre le régime républicain avec barricades et incendies ». Une fois arrivé au pouvoir, Clemenceau, à l'instar de Gambetta, subira des critiques de la part de certains anciens amis et d'autres lui voueront même une haine féroce (3). Clemenceau comprendra, à ses dépends, la réalité de gouverner.



Pour Jules Ferry, Clemenceau est un homme dangereux, un exagéré comme on disait sous la Révolution en 1793. Selon Clemenceau, Ferry se présente comme un conservateur. Son jugement date du siège de Paris. L'un réclamait une solution pacifique, l'autre entendait la régler à coups de canon. Entre les deux, il ne pouvait y avoir d'entente. L'antagonisme était trop fort, d'un côté le radicalisme, de l'autre l'opportunisme, comprendre l'impatience de la révision constitutionnelle contre la prudence du républicanisme modéré. Pourtant les deux sont des laïcards, mais Clemenceau veut hâter la laïcisation du pays. Clemenceau et ses amis attaquent encore et toujours Ferry pour sa lenteur dans la conduite des affaires politiques. de plus, Clemenceau refuse toute forme d'impérialisme français, comprendre le colonialisme. Il réfute la thèse de Ferry qui expliquait que les races supérieures devaient éduquer et civiliser les races inférieures, en évoquant le bouddhisme, le confucianisme, la civilisation indienne et chinoise. Ferry finit par démissionner suite à l'affaire du Tonkin… Clemenceau avait encore réussi à faire tomber un adversaire politique.



Clemenceau continue sa carrière, qui le voit devenir Ministre de l'Intérieur en 1906. Il dit à ce sujet non sans ironie : « Je suis le premier des flics ». La même année, le pays est frappé par des violentes grèves, dont certaines sont insurrectionnelles. Winock décrit parfaitement tous les procédés (arrestations, révocations et limogeages des fonctionnaires jugés
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Une biographie solide
Clemenceau a la cote. On consacre des expositions à son goût pour l'Asie, on édite ses bons mots. Et ils furent nombreux. Mais sa carrière ne se limite par à la "période Tigre", elle ne commence pas non plus avec le J'Accuse.
Voici donc une biographie classique et solide sans beaucoup d'anecdotes croustillantes, une biographie qui ne s'étend pas c'est le moins que l'on puisse dire sur sa vie privée...
En revanche, elle donne parfaitement à comprendre la trajectoire politique d'un homme, une trajectoire à la fois étonnante et logique et qui mit Clemenceau à plusieurs reprises à des postes de responsabilités cruciaux.
Winock est un spécialiste à la fois d'histoire politique et intellectuelle et également de cette période et c'est donc très clair, très solide.
Véritablement passionnant.
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C''est un livre magnifique, comme beaucoup de ceux de Winock.
On en est cependant à se demander, comme souvent pour la biographie d'un être aussi exceptionnel, si l'auteur n'a tout de même pas été pris, au fil du temps qu'il a passé avec son sujet, par une passion de ce dernier qui l'empêche de voir tout ce qui pourrait faire pencher la balance du jugement dans un sens un peu moins uniquement favorable.
Certes, les outrances d'une opposition systématique, dans l'action menée comme député, ne sont pas cachées pas au lecteur, même si elles trouvent tout de même, sous la plume élégante de Winock, bien des circonstances atténuantes, voire des justifications.
Et il est vrai aussi que l'on sent bien à quel point Clémenceau a dû être difficile à vivre, non seulement pour ses ennemis, mais aussi pour ses alliés et ses collaborateurs, mais l'auteur ne s'appesantit pas trop là dessus, pas plus que ce qui concerne le même aspect de sa vie privée. Rien n'est vraiment caché, mais l'auteur passe bien vite sur ce type de défauts.
Il est vrai que l'ampleur du personnage, son énergie, son courage politique, son énorme culture générale, tout cela l'emporte de très loin sur tout le reste.
On ne peut que regretter que des hommes de cette dimension soient l'exception plutôt que la règle, dans la haute politique. Et l'on se pose immanquablement la question de savoir si l'on pourrait imaginer un mode de sélection de nos dirigeants qui changerait cela (mode d'élection, rémunération et autres éléments du statut des élus, réorganisation de la structure administrative locale,...?)
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Comment fait Winock pour nous rendre cette 'brique' passionnante?
Premier chapitre, la capitulation de Paris devant Bismarck et ma découverte des communards, punis pour avoir été trop patriotes!
Ensuite découverte d'un Clémenceau sportif, provoquant avec enthousiasme de nombreux pairs en duel. Un Clémenceau précurseur, défendant l'enseignement obligatoire, laïque et gratuit, la journée de max 10 (8) heures, l'impot progressif sur les salaires, la suppression de la peine de mort...
La chute de l'homme politique reconverti en écrivain (pas super passionnant)
Un super épisode décrivant l'affaire Dreyfus, les fausse preuves fabriquées par les antisémites pour condamner cet officier juif.
Retour à la politique, sénateur,' justice' se transforme en 'liberté'. Il prône la séparation du culte et du pouvoir. Contrant le principe de la race supérieure et soucieux de ne pas diviser la force militaire de France, il combat le colonialisme.
puis ministre de l'intérieur au moment de mâter de terribles grèves. Alors que dans ma Belgique, les grévistes sont fusillés dans plusieurs villes, Clémenceau fait tout pour éviter la violence, ce qui lui ouvre à 65 ans le siège de président du conseil. Et alors que sa vie s'est déroulée dans l'opposition, il peut enfin montrer ce qu'il est capable de construire.
C'est la guerre, et de retour au journalisme, il exhorte au patriotisme à un point tel qu'en 1918 on le nomme ministre de la guerre et chef de gouvernement. Il fait le ménage, Joffre remplace le défaitiste Pétain, et laissant dans l'ombre le président Pointcarré, il coordonne les forces alliées vers la victoire et les intransigeantes concessions demandées à l'Allemagne.
Emouvante aventure amoureuse avec Marguerite à 82 ans. Quel homme!!!!






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Une biographie qui fait - à juste titre - autorité sur Clemenceau, dit "le tigre", un personnage incontournable de l'histoire de France de la fin du XIXème et du début du XXème siècle.
Un rude personnage, très controversé, bien que rendu presque intouchable par le rôle qu'il a assumé en prenant la direction du conseil des ministres à partir de 1917.
À la fois, on loue ses prises de position (son célèbre pamphlet anticolonialiste à l'assemblée nationale par exemple), son courage et sa détermination dans l'adversité (en tant que maire d'arrondissement sous la commune de Paris, ou en tant que premier ministre pendant la grande guerre, allant jusqu'à rendre visite aux poilus dans les tranchées, ou en tant que ministre de l'intérieur quand il créé les "brigades du Tigre"), on rit de ses bons mots (féroces) à l'égard de ses contemporains, mais à la fois aussi, on ne peut qu'être révolté par son attitude lamentable dans sa vie privée, par sa répression excessive des mouvements sociaux (crise du phylloxéra chez les vignerons en 1907), qui pose question pour un radical de gauche, et par son anti germanisme obsessionnel qui le pousse à figurer parmi les jusqu'au-boutistes du traité de Versailles qui nous précipitèrent tête la première dans un deuxième conflit mondial.
C'est peut-être dans ces derniers aspects que le livre de Michel Winock pèche un peu, à la lumière de tout ce que j'ai lu et vu d'autre sur Clemenceau. Non pas que son "Clemenceau" puisse être considéré comme une apologie du personnage, loin de là, mais je trouve quand même qu'il traite les zones d'ombre du tigre avec moins de rigueur que les zones de lumière.
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Il n'en reste pas moins une opposition doctrinale entre une gauche marxiste, marxisante, socialiste au sens collectiviste du mot, et une gauche républicaine, pour qui l'Etat est aussi un instrument de gouvernement économique et de protection sociale, mais philosophiquement individualiste et favorable à la propriété privée et au marché. Les débats entre Clemenceau et Jaurès ont porté à son plus haut niveau rhétorique la contradiction entre les deux gauches.
Un siècle plus tard, après le grand échec du "socialisme réel", la dislocation de l'URSS, et le retour en force du libéralisme contre l'économie administrée, la figure et les idées d'un Georges Clemenceau reprennent consistance. Face au danger des communautarismes et des fanatismes religieux, il nous rappelle l'idéal laïque qui rend possible, dans une même nation, mieux que la coexistence des religions : leur union dans une égale soumission à la loi commune. Son patriotisme rappelle à la gauche que les trois couleurs et la fierté nationale ne doivent pas être abandonnées à l'extrême droite et au nationalisme xénophobe. Enfin, l'échec dans le monde du socialisme collectiviste pourrait faire méditer les anciens révolutionnaires sur les vertus du réformisme.
Clémenceau aura donc incarné une certaine idée de la gauche, mieux accordée à l'héritage de la Révolution française qu'inspirée par le marxisme. Cette gauche-là, majoritaire dans l'opinion et au Parlement jusqu'à la Grande Guerre, s'est vue peu à peu concurrencée puis fossilisée par la gauche socialiste et communiste. Dans les faits, pourtant, c'est bien le réformisme de Clémenceau qui a triomphé, cette révolution par la loi comme certains disaient au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. La vieille ganache laïcarde, patriotarde et anticollectiviste peut encore servir.
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Le titre du recueil de Clemenceau ["Le Grand Pan"] s'éclaire: ce qu'il a voulu faire dans ses articles, ses essais, ses nouvelles, ses portraits, ses reportages, c'est chanter la vie, c'est magnifier l'action, c'est exalter la joie d'être, contre les philosophies et les religions de la misère et de la Chute.
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Le monde tel qu'il est n'est encore que promesse: il faut se battre contre la misère, l'iniquité, la laideur, l'exploitation de l'homme par l'homme, l'obscurantisme des religions.
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Il n'y a de véritable liberté que dans l'exercice de la démocratie, hors des pressions abusives, des violences minoritaires, du viol de la loi.
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Videos de Michel Winock (31) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Michel Winock
Par Annette WIEVIORKA, directrice de recherche émérite au CNRS
Tout historien, et même préhistorien, établit un lien avec "ses" morts dont il tente de restituer l'histoire, de la Lucy d'Yves Coppens aux morts qui sont ses contemporains. L'opération historiographique a souvent été décrite, de Jules Michelet à Michel de Certeau, comme opération de résurrection des morts et oeuvre de sépulture de ces morts qui hantent notre présent. Il y a aussi d'autres morts. Ceux des siens qui sont autant de dibbouk pour l'historien parce qu'ils ont orienté sa vie. Ce sont des morts fauchés avant d'avoir été au bout de leur vie, des morts scandaleuses. "Je suis le fils de la morte". Ce sont les premiers mots de l'essai d'égo-histoire de Pierre Chaunu. Ces morts nourrissent les récits familiaux, devenu un nouveau genre historique, de Jeanne et les siens de Michel Winock (2003)("La mort était chez nous comme chez elle") à mes Tombeaux (2023). Les morts de la Shoah occupent une place tout à la fois semblable et autre. C'est la tentative d'éradiquer un peuple, la disparition du monde yiddish dont ceux qui en furent victimes prirent conscience alors même que le génocide était mis en oeuvre. Ecrits des ghettos, archives des ghettos, rédaction de livres du souvenir, ces mémoriaux juifs de Pologne écrits collectivement pour décrire la vie d'avant, recherche des noms des morts, plaques, murs des noms, bases de données.... Toute une construction mémorielle. Vint ensuite le temps du "je"(qui n'est pas spécifique à cette histoire) , celui des descendants des victimes, deuxième, troisième génération, restituant l'histoire des leurs. Chaque année, plusieurs récits paraissent, oeuvres d'historiens ou d'écrivains, qui usent désormais des mêmes sources, témoignages et archives, causant un trouble dans les genres.
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