AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782707303561
281 pages
Editions de Minuit (01/09/1964)
3.63/5   30 notes
Résumé :
Mon Opoponax, c'est peut-être, c'est même à peu près sûrement le premier livre moderne qui ait été fait sur l'enfance. Mon Opoponax, c'est l'exécution capitale de quatre-vingt-dix pour cent des livres qui ont été faits sur l'enfance. C'est la fin d'une certaine littérature et j'en remercie le ciel. C'est un livre à la fois admirable et très important parce qu'il est régi par une règle de fer, jamais enfreinte ou presque jamais, celle de n'utiliser qu'un matériau des... >Voir plus
Que lire après L'OpoponaxVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Comment est-il possible que L'Opoponax de Monique Wittig, pourtant couronné du prix Médicis en 1964, soit ensuite passé totalement sous les radars de la littérature française ? Comment est-il possible qu'aucun extrait, aucune mention de ce titre n'ait jamais croisé mon chemin d'ex-étudiante de Lettres et future ex-prof de français, alors même que le nom de son auteure ne nous est, par ailleurs, et ce n'est que justice, pas inconnu – seulement depuis une période récente, certes –, alors que Marguerite Duras, l'idole de nos vingt ans, l'avait finement postfacé ? Lesbienne féministe, devancière et radicale, Wittig a subi l'anathème pour ses idées, et, par ricochet, ce magnifique récit, universel et poétique, connut le purgatoire (l'édition brochée est épuisée !).
Sortez ce texte de l'oubli aujourd'hui : gageons qu'il va vous ramener à votre enfance mieux qu'une madeleine, qu'il deviendra, pour certains, votre livre culte, votre livre de chevet. Pour peu que vous ayez passé la première page et compris le principe – on passe sans transition ni contextualisation d'une scène à une autre – vous deviendrez le corps-même de l'écriture, physiquement revenu à votre hauteur d'enfant, projeté derrière le pupitre à encrier que vous n'avez peut-être pourtant jamais connu. La magie de cette écriture de soi, écriture de l'intime qui ne dit jamais « je », c'est qu'elle restitue cette atemporalité de l'enfance, qu'elle fût vécue dans les années 40, 80 ou 2000, qu'elle se passât en Alsace, en Haute-Marne ou à Paris : la campagne, le village, sont ceux d'avant la ville, d'avant l'âge adulte. Peut-être ceux de votre mère, ou ceux de votre fils. On est Catherine Legrand. On est Catherine Legrand et Véronique Legrand, la petite soeur, qui elle aussi devient mythique. On est les enfants de l'école de campagne. Les filles de l'école de filles. Dans cet âge d'or de l'enfance, on est sauvage, comme les animaux qu'on recueille, on se bat avec la rage de tout son corps contre les garçons. On apprend la mort. On apprend aussi que les enfants d'aujourd'hui ne sont pas plus durs que ceux d'hier.
Le style de L'Opoponax nous habite. Cette déferlante d'évocations, aussi rudes que méticuleuses, sa mélodie vous reviendra le soir avant de dormir. Nous sommes les yeux de l'enfant qui ne sait pas tout nommer et utilise des périphrases objectives, nous sommes dans le pronom « on » de cette marmaille encore ni fille, ni garçon – à nous d'en échafauder notre interprétation. On se dit : Oui, c'est vrai, j'ai fait ça. Et puis, une description de ciels, une énumération de noms de fleurs des champs, décrochent le lecteur du temps révolu pour le transporter dans le monde poétique de la beauté. Cela pourrait sembler répétitif et circulaire, cependant le récit évolue. On est au collège, peut-être. La littérature apparaît. Elle est sondée, incantatoire. Et, ressort de ce récit sans schéma narratif, l'opoponax du titre surgit avant la fin, conviant le lyrisme sous les traits facétieux de l'élément perturbateur, pour éclore enfin dans la beauté de l'expression du sentiment amoureux des premières fois.
Commenter  J’apprécie          92
J'ai lu Les Guérillères il y a plusieurs années déjà et j'avais trouvé L'opoponax en bouquinerie avec beaucoup de joie avant de le poser dans ma PAL où il s'est noyé depuis. Je me suis enfin décidée à me lancer dans cette lecture après avoir entendu la série radio consacrée à Monique Wittig sur France Culture cet été. le moins qu'on puisse dire c'est que j'ai moins accroché qu'avec Les Guérillères, et sans doute j'aurais eu encore plus de difficulté à entrer dans cette lecture si je n'avais pas eu en tête les analyses entendues tout récemment.
Comme souvent avec les partis pris expérimentaux, le principe me séduit mais l'oeuvre en elle-même a du mal à garder mon attention pendant plus d'une vingtaine de pages. C'est un texte écrit à hauteur d'enfant, dans une langue purement descriptive. On saute d'une scène à l'autre sans transition. C'est un peu comme écouter un enfant qu'on est venu·e chercher à l'école et qui nous raconte sa journée sur le chemin du retour - et oui, c'est charmant et doux. L'autre aspect qui a été abondamment commenté et qui reste troublant à la lecture c'est l'usage du pronom "on" dans lequel se mélangent la narratrice, ses camarades, dans un flou sans genre et sans nombre qui colle bien au monde de l'enfance.
Outre le côté expérimental ça reste un texte très beau. Les aventures des enfants dans la campagne, leurs bagarres et les noms de fleurs et d'arbres qui parsèment le récit m'ont beaucoup touchée. Sans avoir grandi exactement dans les mêmes conditions, c'est un roman qui m'a rendue nostalgique de l'enfance. Il m'a aussi fait penser à mes grands-parents, dont l'expérience est probablement plus proche de celle de l'autrice.
La reconnaissance attribuée à ce texte est totalement justifiée et j'aurais adoré travailler dessus pendant mes études. Je n'ai toutefois pas trop culpabilisé en sautant des passages entiers, dans la mesure où une fois que le concept est compris, une bonne part du roman m'a paru répétitive. Si je devais le relire autrement, je pense que je le lirais davantage comme je lis des poèmes que comme un roman : quelques pages avant de dormir, sans essayer de le lire d'une traite et d'y chercher du sens.
Commenter  J’apprécie          40
C'est un vrai roman moderne : un point de vue novateur sur des événements connus (l'enfance d'une française de la campagne), qui lui a valu un prix prestigieux. le style force à la réflexion. Néanmoins, la première moitié est vite ennuyeuse et la seconde, même si elle est bien meilleure, est intéressante, sans plus.
N'hésitez pas à sauter des pages, vous ne manquerez rien, ou aller plutôt lire "Les guérillères" car Wittig y applique les mêmes principes stylistiques mais avec un récit bien plus intéressant.
Commenter  J’apprécie          110
"L'Opoponax" est le premier roman de Monique Wittig, écrivaine et militante féministe qui a obtenu le prix Médicis en 1964. Mais c'est surtout pour la postface de Marguerite Duras ajouté à partir de l'édition de 1983 que j'ai voulu le lire. Duras considère ce livre comme un chef d'oeuvre et c'est une référence pour moi.
Et effectivement, je comprends pourquoi elle dit que «c'est le premier livre moderne qui ait été fait sur l'enfance».
Monique Wittig raconte l'histoire d'une petite fille au sein d'une école religieuse à la campagne. Catherine Legrand n'a pas vraiment d'aventure exceptionnelle, elle vit comme tous les enfants, entre ses maîtresses et ses camarades, au gré des préoccupations des jeux de récréation.
À l'instar de l'opoponax, une plante ombellifère, on se laisse envahir par l'écriture qui nous propulse dans le monde de l'enfance. Car ce nom bizarre sert de signature à de mystérieuses lettres anonymes indiquant « Je suis l'Opoponax » pour faire peur, comme le loup.
Parce que Monique Wittig se met à auteur des enfants appelés par leurs prénoms et leurs noms (par exemple Anne-Marie Losserand, nom très durassien), en décrivant tout ce qui se passe y compris la cruauté des jeux mais sans jamais juger ou commenter. Ce n'est que du factuel et c'est peut-être pour cela que c'est innovant mais malheureusement un peu trop long à mon goût.


Commenter  J’apprécie          50
L'auteure nous relate son enfance en Alsace à Damepierre.
On ne sait pas trop où ça va le style est assez fort, peu de ponctuation, beaucoup de descriptions.
Et en même temps elle arrive à retrouver un regard d'enfant ou plus ou moins.
Ca n'est pas passionnant mais on reste pris dans cette vie rurale, ces ballades à travers champs ces joies et ces souffrances à hauteur d'hommes.
Commenter  J’apprécie          41

Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
Le petit garçon qui s'appelle Robert Payen entre dans la classe le dernier en criant qui c'est qui veut voir ma quéquette, qui c'est qui veut voir ma quéquette. Il est en train de reboutonner sa culotte. Il a des chaussettes en laine beige. Ma soeur lui dit de se taire, et pourquoi tu arrives toujours le dernier. Ce petit garçon qui n'a que la route à traverser et qui arrive toujours le dernier.
Commenter  J’apprécie          50
Il n'y a pas d'inscriptions sur les tertres pas de noms. Il tombe de la neige fondue. On enfonce dans la boue. Les coquelicots sont mouillés. On est debout, on serre les mains des parents de mademoiselle Caylus, On dit, les soleils couchants revêtent les champs les canaux la ville entière d'hyacinthe et d'or le monde s'endort dans une chaude lumière. On dit, tant je l'aimais qu'en elle encore je vis.
Commenter  J’apprécie          30
Au bout d'un moment on s'arrête et on s'assied par terre. On ne parle pas. On écoute les bruits. Il y a des vols d'insectes saccadés tout près. Quand ils ont fini on entend du silence puis un bourdonnement continu et qu'on dirait lointain. On se rend compte que c'est le bruit fait par tous les insectes qui sont en train de voler à ce moment-là, que c'est un bruit très fort qui ne peut pas se confondre avec le bruit des gens qui sont dans les champs. On se rend compte avec ce bourdonnement qu'il y a là un monde différent duquel il n'est pas possible de faire partie. On se frotte les oreilles parce que le bourdonnement devient de plus en plus insistant de plus en plus continu on arrive à le percevoir comme une stridence unique et insupportable, on finit par se demander s'il ne vient pas de soi, on se bouche les oreilles même, mais quand on enlève les doigts il ne s'est pas relâché. De temps en temps une grosse mouche ou une abeille ou un frelon se posent tout près, ça fait alors un bruit mécanique un ronronnement particulier à l'origine précise, puis ça retourne à l'autre bruit, au grand bruit de fond, ça s'y perd.
Commenter  J’apprécie          00
On ne sait pas ce que c’est qu’un fantôme. On demande à mademoiselle ce que c’est qu’un fantôme. Elle dit que c’est un mort qui sort de sa tombe, qu’on sait que c’en est un parce qu’il y a son linceul par-dessus la tête, qu’il attend les gens pour leur sucer le sang à la gorge. On rit. Mais on n’est pas très sûr que Mademoiselle dise ça pour rire.
Commenter  J’apprécie          20
Mademoiselle veut qu’on chante parce que quand on chante on n’est pas fatigué. On chante, un kilomètre à pied ça use ça use un kilomètre à pied ça use les souliers, gauche gauche. Quand on dit gauche on doit être sur le pied gauche. Il faut rejeter l’autre en arrière en faisant un petit saut pour se mettre dans le bon ordre de marche. La meilleure façon de marcher qui doit être la nôtre.
Commenter  J’apprécie          10

Videos de Monique Wittig (13) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Monique Wittig
Marie Darrieussecq Fabriquer une femme - éditions P.O.L : où Marie Darrieussecq tente de dire comment et de quoi est composé son nouveau livre "Fabriquer une femme" et où il est question notamment de Solange et de Rose, de "Clèves "et de "Il faut beaucoup aimer les hommes", de la différence entre fabriquer et devenir, de l'hétérosexualité qui rate, et des boîtes gays de Bordeaux, de Jacques Lacan et de Monique Wittig, de Kate Moss et de David Bowie, de "La mer à l'envers" et de "Truismes, à l'occasion de la parution de "Fabriquer une femme" en janvier 2024 aux éditions P.O.L, à Paris le 19 décembre 2023.
+ Lire la suite
autres livres classés : nouveau romanVoir plus
Les plus populaires : Non-fiction Voir plus


Lecteurs (156) Voir plus



Quiz Voir plus

LNHI-44259

Qui chantait ceci en 1977? On a tous dans le coeur une petite fille oubliée Une jupe plissée, queue de cheval, à la sortie du lycée On a tous dans le cœur un morceau de ferraille usé Un vieux scooter de rêve pour faire le cirque dans le quartier Et la petite fille chantait (et la petite fille chantait) Et la petite fille chantait (et la petite fille chantait) Un truc qui me colle encore au cœur et au corps Everybody's doing a brand-new dance now Come on babe do the locomotion I know you gonna like it if you give it a chance now Come on babe do the locomotion

Alain Souchon
Laurent Voulzy
Eddie Mitchell

12 questions
85 lecteurs ont répondu
Thèmes : chanson française , années 60 , enterrement , animauxCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..