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Critiques de Léon Tolstoï (1432)
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Anna Karénine, tome 1

"Anna Karénine", la célèbre oeuvre de Léon Tolstoi est un

chef-d'oeuvre de la littérature russe du XIX e Siècle .Ii s'agit

vraiment d 'une grandiose oeuvre romantique .On peut dire

à juste titre que l 'auteur a donné le meilleur de lui-même !

Pour rappel ce roman a été adapté au cinéma .

Ce livre je l 'ai lu dans un roman de la collection de poche en

deux tomes .

Tolstoi un grand écrivain , "Anna Karénine"une oeuvre

monumentale !
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Contes et fables

À lire si vous ne l'avez déjà fait.

Pourquoi ? Parce que Tolstoï écrivait bien, ensuite parce que tous ces petits textes sont amusants, surprenants, contiennent parfois une leçon mais ne sont jamais ennuyeux.
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Les Récits de Sébastopol

Lors de la guerre de Crimée, Léon Tolstoï était militaire, il fut envoyé à Sébastopol, ville assiégée.

C'est avant tout un témoignage sur la vie des civils, des militaires et les combats.

À son arrivée, tout semble normal, les gens vaquent à leurs occupations, si ce n'est le flot incessant des militaires tout semble normal. Ensuite, avant d'aller au front l'auteur s'arrête à l'hôpital où l'horreur de la guerre nous tombe dessus : soldats agonisants, soldats mutilés, civils touchés. Comment a-t-il pu trouver le courage d'aller se battre après toutes ces descriptions.

Dans "Les récits de Sébastopol", Tolstoï nous montre le peu de valeur que certains hauts gradés portent à la vie de leurs hommes, on y ressent la peur de ces soldats partis pour vaincre et qui se retrouvent face à leur mort prochaine. de plus ce ne sont plus des combats au corps à corps, l'armement a beaucoup changé , ils doivent faire face à des tirs de canons incessants. C'est presque une répétition pour les prochaines guerres à venir, l'industrialisation permet la fabrication massive des armes.

Ayant lu, il y a peu un essai de Tolstoï sur la non-violence, ce récit m'intéressait. Après sa lecture je comprends mieux pourquoi Tolstoï a quitté l'armée et a échangé sur la non-violence avec le tsar Nicolas II pendant quelques temps,puis avec Gandhi et bien d'autres... Et pour finir, la dernière phrase qui montre bien l'absurdité de la guerre,mais ce n'est que mon avis.

"Arrivé au bout du pont, chaque soldat, à peu d'exceptions près, ôtait son bonnet et se signait ; mais en dehors de ce sentiment, il en éprouvait un autre, plus cuisant, plus profond, un sentiment voisin du repentir, de la honte, de la haine, car c'est avec une inexprimable amertume au coeur que chacun d'eux soupirait, proférait des menaces contre l'ennemi et jetait, en atteignant le côté nord, un dernier regard sur Sébastopol abandonné."



Lu dans le cadre du Challenge Solidaire 2019

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Anna Karénine

Anna Karénine : tome 1. Difficile d'émettre un commentaire derrière autant de critiques plus élogieuses les unes que les autres mais je vais tenter d' apporter ma petite contribution.

A l'âge de quatorze ans, j'ai été transportée par le côté romanesque du livre. Mon imaginaire a été sollicité par l'amour passion, la transgression, la Russie aristocratique et ses salons, la description minutieuse des toilettes de toutes ces dames. Je me rappelle avoir été dans l'impossibilité de lâcher ma lecture. Quelques dizaines d'années plus tard, j'ai retrouvé, au cours de ma relecture, le même attachement à ce livre, que dis-je le même envoûtement. Ce roman a une âme. A travers tous les personnages, Tolstoï nous parle de l'âme slave, ses protagonistes passent du désespoir au délice et du délice au désespoir, inclination propre à nombre de russes. Il met ainsi en scène toute une société aristocratique de l'époque Alexandre II. Il nous conte une histoire de l'humanité avec ses faiblesses, ses bonheurs, ses contrastes, cette facilité qu'ont les slaves à céder au pessimisme pour mieux retrouver l'espoir à la suite d'un regard, d'une petite phrase. Tout au long de ce livre, on ressent cette affectivité à fleur de peau si excessive. A aucun moment, Tolstoï ne porte de jugements de valeur sur l'adultère d'Anna et de Vronski, ni sur les personnages chanceux ou abîmés qui les entourent mais ma préférence est allée à Lévine "Constantin Dmitriévitch Levine", rien que la poésie qui se dégage de son nom laisse supposer le très beau passage où il prend la faux pour accompagner les paysans. Tolstoï nous décrit cette scène avec tant de beauté que l'émotion saisie le lecteur. Lévine qui manque tellement de confiance en lui, est un être qui se pose beaucoup de questions sur la société, on ressent chez lui une très grande honnêteté. Non ce livre n'est pas qu'un livre sur l'adultère, il démontre bien que rien n'est simple, rien n'est acquis, que nous n'avons pas toujours la maîtrise de nos sentiments tout cela dans un style tellement fluide, tellement poétique, tellement harmonieux et abouti : je confirme c'est un chef-d'oeuvre
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La Guerre et la Paix, tome 2

Une petite crainte avant de commencer ce pavé paraît bien naturelle et pas seulement pour la tendinite au pouce qui pointe à cause du poids de la culture russe...

Tout comme un peu d'angoisse aux côtés du prince André ou du fougueux Nicolas Volkov, dans le brouillard du côté d'Austerlitz, attendant le déclenchement d'une immense bataille qui couvre 10 verstes (km) de front !

Et même en temps de paix, l'intérêt pour les personnages ne décroît pas tant que ça. Même si je reconnais avoir éprouvé un soupçon d'ennui pendant les amours de Natacha Volkov. Les envolées assassines du vieux prince Bolkonsky sur ses enfants et surtout sur sa pauvre fille Marie ou les états d'âme de son fils André ou de Pierre sur leurs mariages m'ont remis en selle. Ah Pierre, une mention spéciale pour ses gaffes en société!



Confortablement installé, ne voulant finalement plus lâché ces passages en temps de paix, j'ai découvert un Boris arriviste, un prince Basile intéressé uniquement par l'argent et son fils Anatole, par les femmes. Et enfin des personnages assez nombreux mais bien identifiés car Tolstoï rappelle systématiquement une particularité physique si bien que le lecteur perdu dans les prénoms et surnoms distinguera:

La princesse Lise à sa lèvre supérieure duveteuse, la princesse Hélène à son physique avantageux au contraire de la princesse Marie, fort laide et de Pierre, fort gros, etc.



Ma crainte s'est finalement rapidement dissipée, ce tome 1 imposant mérite bien un pouce levé. Bien portant malgré tout, même après avoir tenu ce livre pendant 15 jours.

Il m'en vient d'ailleurs des palpitations à l'idée de commencer le tome 2.
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La mort d'Ivan Ilitch

Après « Anna Karénine », je poursuis mon voyage dans l'immense oeuvre d'un des grands maîtres de la littérature russe, Léon Tolstoï.

Tous ses ouvrages sont habités par ses thèmes de prédilection, les fragilités humaines, l'angoisse de la mort et de l'agonie. Cette nouvelle raconte la douloureuse fin de vie d'un homme qui prend conscience tardivement qu'il a gâché sa vie en voulant se conformer aux attendus de la société.



Ce qui est étonnant, c'est l'idée que je me faisais des livres de cet auteur : je les imaginais inaccessible, lourds, pompeux, inintéressants, loin des préoccupations de notre monde, mais j'ai découvert un style simple, élégant, pertinent, et en définitive très moderne. Je l'ai également trouvé impressionnant de clarté et de justesse dans la brièveté du format court qu'est la nouvelle.

Car en effet, s'il n'est pas à démonter que l'auteur est un formidable romancier, il est également un talentueux nouvelliste.



*

C'est par le décès d'Ivan Ilitch que s'ouvre ce récit d'un peu moins de cent de pages. Ce qui d'emblée sidère et déconcerte, c'est le manque d'égard, de compassion, de chagrin ou d'empathie de ceux qui assistent au service religieux. On se dit que cet homme ne devait pas être quelqu'un de très attachant, ni de bien sympathique. Alors qu'elle n'est pas notre surprise lorsque Léon Tolstoï remonte le temps pour nous le présenter de son vivant.

Ivan Ilitch est un homme plutôt ordinaire, ni bon, ni mauvais. Certes, il est égoïste, indifférent aux autres, préoccupé par sa réussite professionnelle, son statut social et sa respectabilité mais il est plutôt honnête et droit. D'un naturel sympathique et agréable, il s'efface dans la sphère privée, ne cherchant pas les conflits avec sa femme pour laquelle il n'a plus d'amour.



*

La vie est un jeu auquel on doit commencer à jouer avant d'en connaître ses règles.

Lorsqu'Ivan Illitch réalise que sa douleur au flanc est en train de le tuer, c'est comme un choc. C'est comme s'il se réveillait brutalement après une vie faite d'illusions, d'inexistence et d'aveuglement. Devenu lucide, il prend conscience de la superficialité, de l'orgueil et de la pauvreté de son existence. Il a vécu dans une sorte de mensonge, ne pensant pas que la mort pourrait un jour s'appliquer à lui.



« Caïus est un homme, tous les hommes sont mortels, donc Caïus est mortel, lui avait paru juste dans sa vie passée seulement par rapport à Caïus, mais jamais par rapport à lui. »



En pensant qu'il lui suffisait d'avoir une vie honnête, une position sociale enviée, des amis influents, une belle femme bien née, des enfants et un travail qui lui apporte prestige et confort financier pour avoir une vie belle et accomplie, il réalise au seuil de la mort qu'il a été terriblement naïf.

Sa vie n'a été que vanité, superficialité.

Il a confondu le bonheur avec l'ambition et le pouvoir.

Il a oublié le véritable sens de la vie et est passé à côté de sa vie.



« … chose étrange, tous ces moments de sa vie agréable lui paraissaient à présent tout autres qu'ils ne lui avaient semblé alors. »



Il ne s'est entouré que de personnes arrivistes, fausses et égoïstes qui ne supportent pas sa maladie, ne le supportent plus, et n'attendent que sa disparition pour retrouver la paix ou gagner des privilèges. Il se sent impuissant, incompris, rejeté, ignoré, affreusement seul. Il les hait.



« La mort. Oui, la mort. Et eux, il n'y en a pas un qui sache, qui veuille savoir, qui ait pitié. Ils jouent. (Il entendait au loin, derrière la porte, des éclats de voix et des refrains.) Ça leur est égal, mais ils mourront aussi. Les imbéciles. Moi, un peu plus tôt, eux un peu plus tard, mais ils y passeront aussi. Et ils s'amusent. Des brutes ! »





*

Les personnages secondaires sont dessinés en seulement quelques mots mais quels mots ! La femme, la fille, les amis et collègues d'Ivan Illitch posent un regard insensible, impitoyable et distant sur les souffrances du moribond. Si eux attendent avec impatience le trépas de l'homme, le malade lui, n'a rien à attendre d'eux, aucune pitié, aucune écoute. Ils sont vils et méprisables.

Heureusement, le jeunes fils d'Ivan Illitch et Guérassime, un serviteur fidèle, amènent un peu de douceur, de sincérité, d'humanité et d'empathie dans ces pages si tristes et éprouvantes.



*

En survolant la biographie de Léon Tolstoï, on ne peut que trouver des ressemblances entre l'auteur et son personnage. Il paraît ne jamais séparer l'écriture de sa vie personnelle, cherchant à répondre à ses questionnements existentiels et philosophiques sur le sens de la vie et de la mort, l'amour et le couple, la fuite du temps, les regrets, l'espoir et l'angoisse de mourir.



« Je n'existerai plus, mais qu'est-ce qui existera ? Rien n'existera. Et moi, où serai-je, quand je n'existerai plus ? C'est cela, la mort ? Non, je n'en veux pas. »



Ainsi, la mort d'Ivan Illitch permet de développer des réflexions profondes sur la cruauté de la vie, la complexité de la psychologie humaine, sur notre rapport à la société qui nous oblige à un certain conformisme et nous éloigne par conséquent du bonheur.



L'enfance est évoquée, l'auteur semble en avoir une certaine nostalgie. Les seuls souvenirs heureux d'Ivan Illitch remontent à cette période de la vie où l'innocence, l'insouciance, la confiance dans l'avenir, loin des tracas du quotidien des adultes, permettent de savourer l'instant présent et d'éviter les écueils d'une vie superficielle.



*

Le récit commence par la fin et pourtant Léon Tolstoï imprime une tension dramatique stupéfiante en même temps qu'une beauté douloureuse et troublante. Et plus le récit avance, et plus on lit dans le regard de cet homme, la douleur qui étreint son corps et son esprit, sa peur de mourir, son extrême solitude et c'est bouleversant.



« Une goutte d'espérance brille, puis déferle une mer de désespoir, et toujours la douleur, encore la douleur et l'angoisse, et tout est pareil. La solitude rend l'angoisse encore plus terrible, il voudrait appeler quelqu'un, mais il sait d'avance que devant les autres c'est encore pire. »



J'ai aimé l'écriture de Léon Tolstoï : elle est à la fois simple, sobre, sincère mais aussi d'une acuité particulière, d'une grande finesse psychologique, d'une sensibilité et d'une force telle que la mort d'Ivan Illitch nous renvoie à nos propres souvenirs et à l'inévitabilité de notre propre mort.



Des mots reviennent sans cesse et scande le texte : pensée, mort, vie, ELLE, cette douleur. La douleur torturante, intolérable, incurable est sa maîtresse, il ne voit qu'elle, ne pense qu'à elle, ne voit que par elle.



« Il passait dans son cabinet, se couchait, et se retrouvait seul avec ELLE. Les yeux dans les yeux, avec ELLE, sans rien d'autre à faire que de LA regarder, le coeur glacé. »



Ces mots sont comme une houle qui se soulève, s'enfle, s'agite, se creuse et meurt.

Ces mots sont comme un grondement, un bruit de marteau sur une enclume, ils insistent, ils frappent, ils martèlent.

Le lecteur ne peut résister à la force de ces mots qui nous obligent à regarder cette douleur en face, à ne pas lui tourner le dos. Derrière elle, tapie, la mort, inévitable, inéluctable attend son heure.



*

Au final, la mort d'Ivan Illitch m'a touchée par son caractère à la fois intime, intemporel, universel. Je me suis sentie projetée au chevet de cet homme qui agonisait et subissait l'épreuve de la maladie dans son corps et dans sa tête.



"Pourquoi moi ?"



Ce combat, cette souffrance, cette inquiétude ont été éprouvants pour la lectrice que je suis. Car inévitablement, cette lecture renvoie à des souvenirs douloureux qui ne pourront jamais s'effacer. Elle nous oblige aussi à nous confronter à nos propres peurs de la mort et à vivre pleinement en étant conscient qu'un jour, nous serons face à elle.

Mais ce texte est aussi une façon de nous faire réfléchir sur le sens de la vie, à profiter du présent, de plaisirs simples, loin de toute superficialité pour ne rien regretter.



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Nouvelle lue dans le cadre d'une lecture commune, je remercie tous mes compagnons de lecture dont les regards croisés ont été complémentaires.

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Anna Karénine

Superbe roman...de ceux qui vont sûrement me laisser une trace indélébile.

J'ai longtemps eu envie de le lire, mais sa longueur me décourageait et je renonçais : il y a tant de livres, plus à la mode, qui me tendent les bras, tant de beaux "classiques" que j'ai également envie de relire...

Mais cette fois, c'est fait, et je dois avouer que je me suis régalé de bout en bout.

Bien sûr, l'histoire tragique de cet amour m'a séduite, m'a embarquée, m'a bouleversée , mais j'ai beaucoup aimé également les descriptions de la vie aristocratique russe, les réflexions des uns et des autres sur le monde ouvrier, le monde agricole, le mérite, la vertu, l'honneur, le sens de la famille...

Tolstoï aborde beaucoup de sujets dans son roman et nous livre une peinture vraiment intéressante de Moscou et surtout de Pétersbourg, avant la révolution Russe, à l'époque où parler Français était l'élégance suprême et où l'on dansait sur les notes de Tchaïkovski...

Une lecture que je recommande chaudement, à savourer avec une tasse de thé Douchka .

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La Guerre et la Paix, tome 2

C'est un moment extraordinaire et un bonheur rare que d'ouvrir un livre et de percevoir, d'emblée, le monument de littérature, et de fait de pénétrer ce totem et d'être pénétré de sa force, de plus en plus intense au fil des pages, et de sentir et savoir que ce livre-là vous nourrira pour toujours.



Ainsi en a-t-il été pour moi à l'ouverture du 3ème livre de Guerre et Paix qui ouvre ce deuxième tome et se poursuit jusqu'à la fin de l'oeuvre en un long épilogue suivi d'une ‘préface' de l'auteur.

Maintenant que j'en ai achevé la lecture, je salue ce découpage éditorial en deux tomes qui a contribué à m'ouvrir la porte de cette magistrale pièce d'art que je n'aurais peut-être pas perçue avec autant de joie s'il m'avait été présenté d'un seul bloc : la lecture des Livres I et II (tome 1) m'a fait percevoir la grandeur de l'oeuvre, découverte sans laquelle la lecture des Livres III et IV présentée à part (tome 2) ne m'aurait peut-être pas autant subjuguée. A quoi cela tient, l'émoi littéraire…



Tout semble tourner mal à l'ouverture de cette troisième époque, dans laquelle les salons moscovites et les futilités urbaines de la noblesse s'éloignent pour laisser place au brutal terrain de la guerre menée par une armée française surnuméraire par rapport aux forces russes.



Jetés dans ces tourments de l'histoire, nos trois héros mâles (dans le tome 1 les femmes, dans leur éternelle préscience des tourments à venir, tenaient le devant de la scène, maintenant ce sont eux : André Bolkonski, Pierre Bekouzhov et Nicolas Rostov) se retrouvent chacun à jouer leur douloureuse mais lumineuse partition dans le courant déterminé de l'histoire des peuples, que l'histoire officielle, nous dit Tolstoi, ne saura jamais lire ni discriminer les vainqueurs des vaincus.



Réagissant à chaud, humblement dépassée par l'ampleur de la réflexion que Tosltoi conduit dans cette oeuvre sur le sens de l'histoire, sur l'humanité, sur le pouvoir, sur la liberté et son corollaire complémentaire le déterminisme, je n'en ai pas moins ressenti au fond de mon cerveau reptilien ma place infime dans le courant profond, tellurique des courants de fonds qui animent l'histoire des hommes.

Une joie aussi pure est rare dans une vie de lecteur.







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Enfance

Tolstoï nous raconte son enfance à travers l'histoire d'un garçon âgé de dix ans, Nikolengka. Enfance à la campagne, bercée de douceurs et d'amour. Entouré de sa famille, de sa gouvernante, de son précepteur, et de toute une troupe de serviteurs, il y coule des jours heureux, entre cours, parties de chasse et jeux d'enfants.



Puisqu'il fait partie de la noblesse russe, il devra quitter sa chère campagne pour Moscou, chez sa babouchka, afin de parfaire son éducation.

Jeune garçon sensible et attentif aux gestes et aux sentiments des autres, ce sera une première déchirure que ce grand départ, cette aventure dans un monde inconnu, aux valeurs ancestrales.



Dans cette autobiographie romancée, on ressent toute la sensibilité de Nikonlengka, cherchant à se construire, tiraillé entre ses devoirs et son éducation de noble, et son amour pour les gens simples, qui lui sont chers; sa servante Natalia Savichna et le précepteur Karl Ivanovitch.



Enfance faite de tendresse et d'apprentissages; l'amitié, l'amour. Il se trompe parfois, il en ressent des regrets, car, s'il n'est pas très beau, il est intelligent et bon.



Premiers pas dans la vie, premières interrogations, premiers chagrins. Enfant qui veut devenir grand, qui admire le monde adulte, mais qui comprend déjà que ce dernier n'est pas parfait.

La mort d'un être cher va clore cette enfance riche de tendresse et d'émotions, de découvertes et de déceptions.
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La mort d'Ivan Ilitch

"Dans le grand bâtiment du palais de justice, pendant une suspension d'audience du procès Melvinski, les magistrats du siège et le procureur se réunirent dans le cabinet d'Ivan Iégorovitch Chébek, et la conversation tomba sur la fameuse affaire Krassovski. Fiodor Vassiliévitch soutenait avec fougue l'incompétence ; Ivan Iégorovitch ne démordait pas de son opinion; Piotr Ivanovitch,  qui ne s'était pas mêlé à la discussion au début, s'en tenait à l'écart ; il parcourait la Gazette qu'on venait juste d'apporter.

" Messieurs ! dit-il, Ivan Ilitch est mort."



Ainsi commence la nouvelle de Tolstoï "La mort d'Ivan Ilitch"

Commencent aussi les supputations de ses collègues et amis qui voient avec cette mort la possibilité de faire progresser leur carrière ainsi que celle de leurs proches et le sentiment égoïste qu'eux sont bien vivants. Après ce sentiment de joie d'être vivant, les préoccupations quotidiennes, ici s'acquitter de ses devoirs envers la veuve, reprennent le dessus. Qu'à cela ne tienne, une fois la visite faite, rien n'empêchera les magistrats d'honorer l'ordre du jour : la partie de whist prévue pour le soir même.

Egoïsme, mensonges, hypocrisie, le décor est planté dès les premières pages. La mort d'Ivan Ilitch sera le prétexte pour Tolstoï pour critiquer la bonne société bourgeoise russe soucieuse avant tout des apparences et de se conformer au modèle social qu'elle pense être le seul à lui apporter le bonheur.



Après les obsèques, la veuve d'Ivan Ilitch, préoccupée par la façon d'obtenir de l'argent de l'Etat suite au décès de son mari, raconte les souffrances de ce dernier.



Ce préambule passé, Tolstoï nous présente la vie et la carrière d'Ivan Ilitch, et les pensées de celui-ci pendant sa longue agonie.



Jeune, il était déjà attiré par les gens haut placés auxquels il s'efforçait de ressembler. Avec son mariage avec Praskovia Fiodorovna, jeune personne de bonne noblesse, jolie et avec un peu de bien, il entre dans le monde qu'il rêvait mais qui s'avérera bien superficiel.



Puis vinrent les enfants, la jalousie et la mauvaise humeur de Praskovia. Ivan Ilitch s'investit de plus en plus dans son travail. Ambitieux et conscient "de son pouvoir, d'être en mesure d'anéantir n'importe qui pour peu qu'il le voulût", il pensait avoir la maîtrise de sa vie à ce moment là.



Jusqu'à une mauvaise chute. Alors qu'Ivan Ilitch, voulant tout faire "comme il faut", une obsession chez lui, décore sa nouvelle maison devant couronner son succès d'homme riche, emporté par la joie de son ascension sociale, il tombe en accrochant les rideaux...



C'est le début de ses douleurs, de l'inquiétude, de la conscience de l'hypocrisie du monde auquel il voulait tant ressembler, des désillusions devant sa famille qui ne se préoccupe que de ses toilettes ou du désagrément qu'Ivan Ilitch leur apporte en étant malade.



A l'indifférence et aux mensonges de sa famille, s'ajoute l'incompétence des médecins, qui n'est pas sans rappeler l'incompétence évoquée au début de la nouvelle.



Sans diagnostic précis, le malade oscille entre espoir et désespoir, ne sachant pas s'il va vivre ou mourir, ce n'est plus lui qui tient la vie entre ses mains.



Plus l'agonie d'Ivan Ilitch avance, plus celui-ci réfléchit à sa vie passée et se rend compte qu'il est complètement passé à côté de ce qui était important.



En pensant aux joies qui ont été les siennes et qu'il voudrait retrouver et non mourir, il s'aperçoit que ses seuls plaisirs sont liés à son enfance. Que tout ce qu'il a cherché depuis qu'il a commencé la Jurisprudence était vain, faux, et ne lui apportait pas le bonheur. Il prend conscience que plus sa vie passait, plus il se croyait heureux en ayant des postes de plus en plus élevés, alors qu'en fait il s'éloignait des vraies valeurs de simplicité. Plus il croyait réussir et moins il avait de joies. Ses relations professionnelles, amicales et familiales n'étaient que superficielles.



Entouré d'une famille égoïste, de collègues indifférents, Ivan Ilitch se retrouve dans une grande solitude au moment de mourir, à laquelle s'ajoute la colère et un sentiment d'injustice "Pourquoi lui ?"



Dans la famille, seul son fils cadet est touché par la douleur de son père et ressent de la tristesse, peut-être parce que sa jeunesse ne l'a pas encore perverti ? Peut-être que lui trouvera ses valeurs ailleurs, dans plus d'empathie envers ses semblables ?



Un autre personnage est attachant dans cette nouvelle et fait ce qu'il peut pour soulager Ivan Ilitch à la fin de sa vie, c'est son serviteur Guérassime.



Tolstoï était un propriétaire terrien, très proche des moujiks qui travaillaient pour lui, ce qui explique certainement qu'il présente Guérassime comme quelqu'un d'empathique, avec de vraies valeurs, valeurs auxquelles l'auteur est attaché.



Tolstoï, angoissé par la mort qu'il a souvent approchée de près avec le décès de ses parents, sa sœur et plusieurs de ses enfants relate bien cette inquiétude dans cette courte nouvelle.

En peu de pages, l'auteur aborde énormément de notions.



L'écriture fluide rend le texte intime et nous touche de façon réaliste.



La longue agonie, les souffrances physiques et psychologiques et l'extrême solitude du malade sont décrites avec une grande force et j'avoue avoir eu du mal, à la fin, à supporter ces descriptions, accueillant la mort d'Ivan Ilitch comme un soulagement.



Soulagement aussi pour le malade "Il chercha son ancienne peur, sa peur habituelle de la mort et ne la trouva pas. Où était-elle ? Quelle mort ? Il n'y avait pas de peur parce qu'il n'y avait pas de mort.

Au lieu de la mort, il y avait la lumière."



Je remercie Sandrine (HundredDreams) pour avoir proposé cette lecture commune ainsi que les lecteurs qui m'ont accompagnée. Notre ressenti était très proche sur cette lecture et les partages toujours sympathiques et enrichissants furent très agréables.

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Anna Karénine

C’est pendant mon adolescence que j’avais découvert Leon Tolstoï par le biais de son œuvre peut-être la plus connue : Guerre et Paix. J’avais beaucoup aimé, même si je trouvais à l’époque que certaines parties étaient un peu trop longues à mon gout. Evidemment, je m’étais complétement attachée aux personnages de Natacha Rostov et de Pierre Bezoukhov. Cependant, je ne m’étais jamais aventurée à lire Anna Karénine, la raison principale était que je connaissais (je ne sais plus par quel biais ) le destin tragique d’Anna et que cela me faisait un peu peur.

Finalement, c’est clairement grâce au challenge BBC de Gwen que je me suis lancée dans cette fresque qui ne compte pas moins de 1024 pages. J’ai mis à profit mes congés pour m’aventurer dans la lecture de ce pavé.

J’ai été happée par l’écriture et le style de Tolstoï dès le début de ma lecture. Quel talent ! Il avance tranquillement, nous permet de découvrir les moindres états d’âmes de ses personnages, et surtout, quels personnages !

Comment ne pas être marquée par les différents personnages (et personnalités) que l’on va croiser. Car même si Anna a donné son titre au roman, il y a eu bien d’autres personnages dont j’ai aimé suivre le destin. Pour n’en citer deux parmi toute la galerie: Kitty et Levine.

Ce roman est certes le roman d’un adultère et surtout d’un amour passionné, mais pas seulement. C’est aussi une superbe restitution sociale et psychologique d’une partie de l’aristocratie russe de l‘époque. Et il faut avouer que j’ai dévoré et savouré cette histoire, (ou si vous préférez ces histoires) emportée par l’écriture de Tolstoï, qui n’a pas usurpé sa réputation de monument de la littérature russe.







Challenge BBC

Challenge Pavés 2022

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La mort d'Ivan Ilitch

Il ne faut pas lire Tolstoï.

Ou alors, rarement, comme la gourmandise raffinée que l'on s'offre dans certains restaurants etoilés.

Son écriture, ses mots, ses constructions, sa galerie de portraits..Tout est délicieux !



Ce magistrat au fond de son lit, attend et refuse la mort.Toute sa vie n'a été que calcul.Il a programmé ses intérêts dans, son mariage, sa carrière, ses relations...Il se retrouve seul, vulnérable, rempli d'espoir de guérison et terrifié par sa fin prochaine. Il fait le bilan comptable de sa vie, qui semble déficitaire malgré toute l'énergie qu'il a déployée pour réussir.



C'est un excellent moment de lecture classé cinq étoiles.

Je vais chercher de bons petits restaurants où on se régale aussi.. en évitant les gargotes

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La Sonate à Kreutzer

Quoi de plus favorable à la conversation qu’un voyage en train pendant la nuit, où plusieurs voyageurs donnent leur avis sur un sujet d’actualité ? Et surtout si cette conversation animée porte sur la relation homme et femme. Cette conversation se trouve altérée et interrompue par l’intervention d’un homme mystérieux. Celui-ci a tué sa femme ! Ainsi les voyageurs quittent la conversation chacun à sa manière et seul le narrateur reste pour écouter l’histoire de cet homme ; et là commence notre court roman.



Cet assassin, fils d’une famille riche, raconte comment et pourquoi, surtout, il a tué sa femme, et dans sa narration des faits on assiste à un long monologue interrompu par de rares interventions du narrateur principal. Cet homme, au long des chapitres, présente ses idées et convictions sur le mariage, les enfants, les femmes, les célibataires, la société et même la musique. Pour lui, la société doit condamner les relations sexuelles hors du mariage et dénoncer la débauche ; l’infidélité et l’adultère sont des crimes graves ; la procréation est la seule justification des relations sexuelles au sein du mariage et les moyens scientifiques qui privent les parents de cela sont une abomination ; les enfants sont un fardeau lorsqu’on s’occupe tellement de leur santé, on doit plutôt laisser cela au bon Dieu ; la musique réchauffe les passions et vous fait vivre des sentiments artificiels ; les hommes qui veulent l’émancipation des femmes sont en vérité des loups qui veulent son esclavage… Ainsi, tant de points de vue où la logique acceptable et l’exagération maladive se côtoient et on s’attend, par moment à ce que le premier narrateur qui écoute, crie comme Finkielkraut en s’arrachant les cheveux : « Taisez-vous ! ».



Certes, les idées de ce monsieur sont réalistes voire religieuses mais le fait de les mener à l’extrême les altère et je crois que c’est là la cause de la perte de ce monsieur. Ses obsessions vont pourrir sa vie de couple et va le mener à nourrir des soupçons peut-être chimérique sur l’infidélité de sa femme avec un musicien qui entre dans sa maison grâce à sa sollicitation à lui, le mari jaloux ! Ce musicien qui va jouer cette Sonate à effet magique.
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Le royaume des cieux est en vous

Ma première Masse critique, mon premier Tolstoi, ma cinquantième critique sur Babelio : la pression devrait être maximale, mais la pandémie donne un goût tellement étrange à l'exercice...

Ce n'est pourtant pas un argument pour s'arrêter de lire, ni de réfléchir ou d'échanger. Je trouve même que l'événement enrichit le texte d'un sens supplémentaire.



Commençons donc par les remerciements d'usage pour notre site préféré ainsi bien sûr que pour Le Passager clandestin, petit éditeur très engagé dont le catalogue est largement consacré aux thématiques de la décroissance et des ravages de la mondialisation libérale.

C'est la quatrième de couverture qui m'a attiré : « le texte qui mit Gandhi sur la voie de la résistance non-violente ». Reproduite en fin d'ouvrage, la correspondance entre Tolstoï le vieux et Gandhi le jeune atteste indubitablement de cette influence, ce que détaille aussi la préface très intéressante d'Alain Refalo.

L'auteur écrit ce livre dans la Russie des années 1890, alors qu'il est déjà immensément célèbre. Sa notoriété de romancier doit servir désormais une cause politique : la lutte contre l'État tsariste et le pouvoir exorbitant de l'Église russe. L'ouvrage n'est pas conçu comme un manuel de résistance à l'oppression, encore que l'auteur y esquisse certaines pistes, mais avant tout comme un essai dans lequel Tolstoï établit les motifs qui, selon lui, font de la non-violence la seule réponse réellement efficace face au pouvoir arbitraire. Sa démonstration est à la fois impressionnante et d'une extrême sévérité. Pour résumer très grossièrement, Tolstoï souligne que l'on ne peut parvenir au pouvoir sans l'avoir voulu, et donc sans avoir eu l'ambition de le posséder. Cette seule ambition pervertit à ses yeux tout ce que l'homme peut avoir de bon en lui, et ce qui suit n'est que la conséquence néfaste de cette perversion originelle. Ce qui suit, c'est bien sûr l'État, quel qu'il soit, État dont l'autorité n'est garantie que par sa capacité à contraindre ; c'est ensuite l'armée et l'Église, respectivement outil et légitimation morale de cette contrainte.

Aux yeux de Tolstoï, l'harmonie politique ne peut découler que d'un choix religieux radical, proposant d'en revenir au message initial d'amour et de non-violence délivré par le Christ, et rejetant de ce fait toutes les récupérations opérées par les églises successives pour établir la pérennité de leur pouvoir. En délivrant le portrait très attachant d'un Christ anarchiste et profondément subversif, Tolstoï s'inscrit dans une catégorie bien minoritaire à son époque : celle des croyants anticléricaux. Si je connaissais de loin la foi chrétienne de l'écrivain, je ne m'attendais pas en revanche à un réquisitoire aussi implacable ni à un tel pamphlet contre l'autorité, et je ne m'étonne pas que ce livre ait valu de nombreux déboires à son auteur.

Tolstoï ne parle évidemment que de la société russe, mais il serait difficile d'amoindrir la portée de son propos en prétendant que tout cela daterait d'un seul temps, et d'un lieu où la démocratie et la tolérance ne dispensaient que des lumières timides. Ce texte est au contraire toujours vivant aujourd'hui. Il parlera à tous ceux qui éprouvent un malaise devant les doctrines contemporaines de maintien de l'ordre, ou dont le poil se hérisse face à la soumission d'une société à des commandements religieux, quels qu'ils soient.

Dans un monde qui plus que jamais se délite, on peut même y voir le témoignage d'une espérance formidable. Nul doute en effet que nous sommes parvenus à un moment de basculement. Un modèle de civilisation atteint sous nos yeux ses limites extrêmes. Ceux qui vivent de ce modèle le croient sincèrement bénéfique et se pensent tout aussi sincèrement majoritaires. Ils n'entendent pas renoncer à leur pouvoir économique, politique, social, parfois religieux, pouvoir qu'ils jugent légitime quand il n'est bien souvent que légal. Or nous entrons aujourd'hui dans un inconnu qui se montre terrifiant par bien des aspects, et dans lequel beaucoup de choses seront à réinventer. Face à un ordre souvent brutal, Tolstoï nous rappelle que la résistance non-violente – la désobéissance civile, disait Thoreau avant lui – est le seul véritable moyen de lutte contre la tyrannie. C'est aussi le seul rempart contre la guerre civile.
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Anna Karénine

Greta Garbo, Vivian Leigh, Jacqueline Bisset, Sophie Marceau, Keira Knightley… quelques actrices parmi les plus belles et les plus « bankables » de l'histoire du cinéma ! Elles ont interprété Anna Karénine dans l'une des nombreuses adaptations du roman à l'écran. C'est dire la puissance mythique du personnage de femme imaginé par Léon Tolstoï dans son ouvrage éponyme, même pour celles et ceux qui ne l'ont pas lu, ce qui était mon cas jusqu'à ces derniers jours.



Pour tout un chacun, Anna Arcadievna Karénine, incarne, jusqu'à se perdre, la femme qui choisit délibérément l'amour d'un séducteur patenté, le comte Vronski, envers et contre tous usages, préjugés et obstacles...



Un coup de foudre réciproque. Une femme et un homme, disposant tous deux d'une force de séduction hors du commun, se regardent, se sourient et cèdent à l'attirance qu'ils exercent l'un sur l'autre. S'installe une relation passionnelle échappant à toute maîtrise par la raison. Vronski, célibataire, met sa carrière de côté ; pas grave pour un homme né riche, à la conscience légère. Anna, mère d‘un petit garçon, trompe ouvertement son mari Karénine, puis quitte le foyer familial pour s'installer avec son amant. Dans la société aristocratique russe de l'époque, c'est une faute dont le poids est insupportable. L'histoire d'amour devient histoire d'amour coupable, puis, dans la logique de la littérature classique, tourne à l'histoire d'amour tragique.



On connaît Phèdre et la malédiction de l'amour interdit… Dans Anna Karénine, l'aspect transgressif de sa relation pousse le couple à se replier sur soi, à s'isoler, à ne plus se nourrir à chaque instant que de l'exaltation de sa passion… Mais cela ne marche pas éternellement. Même si les sentiments restent vifs, les rituels de l'amour s'affadissent avec les années. L'ennui guette. Quand l'un cherche alors à s'en extraire, c'est la jalousie qui infiltre l'autre, un poison insidieux qui ronge l'âme jusqu'à la folie…



La jalousie ! Tolstoï en dissèque minutieusement – comme Proust quelques années plus tard – les mécanismes et les effets sur ses différents personnages. Car le roman dépasse la seule histoire du couple formé par Anna et Vronski. Structuré en épisodes comme un feuilleton ou une série se déployant sur plusieurs années, le livre, qui compte un millier de pages, trace aussi l'évolution des Oblonski et des Lévine, deux couples légitimes, sans que pour autant leur parcours soit un long fleuve tranquille. Trois femmes et trois hommes, parents pour certains, se croisent et se recroisent ainsi dans les milieux aristocratiques dont ils sont issus.



L'occasion de s'immerger dans la Russie de l'empereur Alexandre II des années 1870. La philosophie des Lumières infuse lentement dans les esprits. Les premières théories socio-économiques aussi. Tolstoï pose les débats de son temps. Faut-il s'ouvrir à la modernité occidentale ou préserver la tradition russe ? Doit-on donner la priorité au peuple ou à l'individu ?... L'agriculture, l'industrie et le commerce sont confrontés aux mutations déclenchées par le progrès technique, une problématique qui dure de nos jours. Le servage vient d'être aboli, mais les paysans n'en vivent pas moins misérablement. A Saint-Pétersbourg, la haute société vit dans un faste et un luxe inouïs, à quelques centaines de mètres des immeubles lugubres où survivent avec peine les personnages de Crime et châtiment, publié une dizaine d'années plus tôt par Dostoïevski, l'autre géant du roman russe. Pas étonnant que ces contrastes détonnants mènent, quelques décennies plus tard, à la révolution d'octobre.



A l'instar d'un Zola, Tolstoï observe attentivement les détails de la vie quotidienne, en ville, dans les campagnes, dans les différents milieux sociaux. Mais ce qui est essentiel et passionnant dans Les Rougon-Macquart n'est qu'accessoire et parfois fastidieux dans Anna Karénine. La cérémonie religieuse du mariage de Lévine, par exemple, est très longuement développée ; la lecture donne l'impression d'y assister en temps réel : les mariés sont en retard, les invités bavardent… aussi ennuyeux qu'en vrai !... Même chose pour l'agonie interminable du frère de Lévine, dont la narration est oppressante.



Lévine par ci, Lévine par là ! Et si c'était lui le personnage principal du roman ? Un idéaliste en amour, un visionnaire social utopiste, un homme qui croit au progrès et aussi en Dieu ; un homme qui s'exprime sur tous les sujets abordés dans ce roman aux multiples facettes. Un personnage créé par Tolstoï à son image : un aristocrate qui se voudrait un homme du peuple, mais qui reste désespérément un aristocrate.


Lien : http://cavamieuxenlecrivant...
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Mikhaïl (Moujik Pkhom)

Un conte lumineux au départ écrit à l'intention des moudjiks et des pauvres; et distribué ou vendu à cet effet pour quelques kopecks.

Car le souci premier de Tolstoï est d'apporter la culture aux gens qui n'y ont pas accès habituellement. Il ne voulait pas d'une production littéraire exclusivement destinée aux seules classes aisées de la Russie.



Le message de ce conte renvoie au mysticisme de son auteur. Son but est tout de même d'apporter la parole divine et dans un final qu'il veut grandiose, il n'hésite pas à subjuguer le lecteur dans une atmosphère surnaturelle.



Tout y est affaire de contraste.

Au départ, c'est la misère de la population en plein hiver qui est décrite. Une femme recommande à son mari cordonnier (ou savetier dans le texte) d'aller demander des comptes à des clients mauvais payeurs. Sur le chemin de son infortune - il n'a pas récupéré son argent et il s'est saoulé avec le peu qu'il lui restait - il rencontre un homme nu adossé à une chapelle et résigné à mourir. Le recueillir est un véritable sacrifice pour cette famille sans le sou mais la récompense viendra plus tard.



Le prosélytisme de ce conte ne fait aucun doute. D'une situation précaire on passe d'épreuve en épreuve vers un dénouement heureux. Je n'ai pas reconnu l'auteur d'Anna Karenine, pétri de doute sur la religion. Mais ce n'est pas grave.



Même si je n'ai pas été sensible à son message, la construction de ce conte m'est cependant apparue parfaite.



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Anna Karénine, Tome 2

J’ai entendu quelques parts ("Le Patient anglais") que le cœur est un organe de feu. Je présume que cela voulait dire qu’à la fois il nous procure chaleur et quiétude mais aussi douleurs et peines. Anna Karenine est un livre sur deux voies, deux itinéraires de deux cœurs (et on découvre cela clairement à la fin de la lecture) celui d’Anna Arkadiévna et celui de Constantin Lévine. Un cœur qui a mené à la paix de l’âme et l’amour de tous, et un cœur qui a conduit à la haine et au désespoir.



Pour ce faire, il fallait tout un décor pour voir ce mouvement des deux cœurs (comme l’astuce des nuages derrière les avions dans l’un des films de Howard Hughes montrant le mouvement avec plus de réalité). Le mouvement du cœur d’Anna a commencé par un regard et un friselis ; un sentiment d’euphorie à la découverte de l’amour après une existence misérable sentimentalement. Cet émoi devient une passion coupable. Par ailleurs, le chemin du cœur de Lévine est tout le contraire. C’est à la fin du parcours qu’arrive ce coup de foudre (fortuit ? aucunement, il s’agit d’un résultat) qui lui apporte un éclaircissement pour comprendre le sens de sa vie et lui fait découvrir le but de son existence.



Ainsi Anna Arkadiévna dans le second tome essaie de rendre sa situation plus acceptable au vue de la société hypocrite qui l’entoure. Les femmes la condamnant non pas parce qu’elle mène une relation adultère mais parce qu’elles n’ont pu l’imiter et acceptent de vivre dans le chagrin et l’ennui de leur ménage. Son cœur cherche le confort et le bonheur dans cet amour coupable. Mais elle ne peut le faire ; elle perd ce qui a le plus compté pour elle au début. Elle a perdu la foi, sa conviction que Vronski l’aimait, que les sacrifices peuvent lui apporter le bonheur auquel elle aspirait, que tout pouvait aller comme elle le désirait. Elle n’en pouvait plus !



Du côté de chez Lévine c’était différent. Ses relations avec le monde était difficiles ; nébuleuses. Sa vie interne et ses opinions singulières ne pouvaient le rapprocher des communs. Il n’était pas le meilleur des hommes (il le sait et ne le nie pas) mais il était différent. Il a vécu ce tiraillement entre la tentation de se frotter à la société qui l’entourait et l’appel de la solitude. Il cherchait où réside le sens de son existence et la paix de l’âme qui en résulte. A la compagne, aux champs, à la ville, dans les bals, dans les discussions et la vie mondaine ; partout il a cherché. Et comme pour l’inspiration, cette illumination est venue au moment qu’il ne s’y attendait plus !



Tout au long du roman, Tolstoï expose les idées les plus singulières sur le mariage, l’éducation, les relations humaines, l’art contemporain, la politique, la religion, la guerre…variant les points de vue selon ses personnages, et menant les oppositions dans les dialogues et les pensées internes. Avec art, il a su amuser son lecteur avec les épisodes les plus divers (partie de chasse, visite chez le portraitiste, maladie du frère de Lévine, aveu d’amour manqué de l’autre frère, les scènes de ménage entre Vronski et Anna, la découverte de la foi de Karénine, la visite de Stiva chez ce dernier, l’accouchement de Kitty, les crises de jalousie de Lévine, sa visite chez Anna, le désespoir de cette dernière et sa visite de la gare, les pensées de Lévine à la fin et sa discussion avec son frère concernant la guerre…) introduisant à chaque fois un nouvel invité. Deleuze dit dans son Abécédaire qu’on apprécie les gens par leur sens de l’humour, celui de Tolstoï est d’une finesse sublime. Du reste, l’auteur russe ; en pleine possession de ses talents exprime et dépeint le tragique et le comique avec beaucoup de justesse et de profondeur, sans jamais exagérer ; ainsi la scène finale de la septième partie est un sommet du pathétique, alors que celle de Stiva qui s’endort devant les sermons de Lydie est hilarante.



Ce qui fait de ce roman une œuvre universelle, intemporelle et immortelle est le fait de présenter les événements et les conflits humains ainsi que les sentiments profonds d’une manière qui parle à tous et qui touche les lecteurs les plus différents.

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Quand les chevaux parlent aux hommes

Ce recueil, agrémenté de quelques photographies de Tolstoï avec des chevaux, regroupe trois nouvelles d'auteurs différents:

- Kholstomier de Leon Tolstoï (1885)

- Emeraude d'Alexandre Kouprine (1907)

- Libussa de Carl Sternheim (1920)



Tolstoï et Kouprine étaient passionnés par les chevaux, ils les ont beaucoup observés et cela se ressent dans leurs nouvelles. Je ne sais si Sternheim l'était aussi mais c'est moins perceptible dans sa nouvelle.



La première nouvelle de Tolstoï, Kholstomier (aussi intitulée le cheval dans d'autres éditions), a eu un immense succès à son époque, même si elle semble aujourd'hui dans l'ombre d'autres de ses grandes oeuvres. Kouprine et Sternheim ne s'y sont pas trompés puisque tous deux lui ont adressé un clin d'oeil dans leur propre nouvelle. Même si j'ai trouvé le passage à la parole du cheval (quand il s'adresse à ses congénères au chapitre V pour leur raconter sa vie) assez brutal, Tolstoï n'en demeure pas moins un formidable conteur. Il parvient à nous embarquer en distillant des réflexions philosophiques. J'ai eu cependant le sentiment qu'il cherchait à mettre en évidence ce qui unissait et différenciait l'homme du cheval à travers des thèmes comme la vieillesse (le parallèle entre la vieillesse de Kholstomier et celle de son ancien maître est superbe), la mort, l'instinct de propriété. La construction est très habile et le récit poignant.



La seconde nouvelle, Emeraude de Kouprine, est très courte (une trentaine de pages) mais dégage une aura magnifique. C'est sans doute elle qui a ma préférence. Sa force est de ne pas utiliser d'artifices destinés à donner la parole ou un sens critique au cheval. Non, elle se met à la place du cheval et tente de nous transmettre l'essence de ce qu'il est. le cheval, bien qu'humanisé pour les besoins de l'histoire, reste un cheval. C'est un récit superbe d'une grande sensibilité, tout en rythme, en gestes, en postures mais qui s'attache peut-être plus à la forme qu'au fond. Toutefois, je doute que l'on puisse comprendre toute la profondeur de ce récit sans les éclaircissements apportés dans la préface par Jean-Louis Gouraud sur le scandale des années 1900 dont a été victime l'étalon qui a inspiré cette nouvelle. Quand je les ai lus, je me suis prise une seconde gifle !



La dernière nouvelle, Libussa de Sternheim, est celle qui m'a le moins convaincue. le subterfuge utilisé pour amener la jument à la parole n'est pas très crédible. Libussa est bien trop humanisée, au point que l'on finit par ne plus faire la distinction entre l'homme et le cheval. En plus, elle est, selon moi, un peu trop prude et puritaine, surtout au début. Si l'objectif de l'auteur était de pointer du doigt les contraintes des juments/femmes, en ce qui me concerne, c'est un peu raté. En revanche, il a le mérite de d'aborder la grande Histoire sous un autre éclairage. Car Libussa a appartenu successivement, excusez du peu, à la tsarine Alexandra Féodorovna, Edouard VII et Guillaume II. Alors elle en a des choses à raconter sur les hommes… D'après moi, les passages les plus intéressants concernent les échanges de Libussa avec l'un de ses congénères prorévolutionnaires ainsi que ceux sur Guillaume II, qui apportent une dimension inattendue sur le monarque.



Mais chacun à leur manière, ces trois chevaux murmurent à l'oreille des hommes l'étendue de leur folie...

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Trois morts

Paru dans la revue des « deux Mondes » en 1859 ce récit nous conte l’histoire de trois morts. Trois morts bien différentes celle d’une dame aisée et acariâtre qui quitte ce monde pleine de rancœur envers son mari, celle du vieux cocher phtisique, mort plutôt paisible et celle de l’arbre, le bouleau qui lui va laisser la place à d’autres.

Tolstoï tourmenté avoue « Incessamment je pense à la mort. » Tôt il a été marqué par la mort de ses parents et surtout celle de ses frères dont il se console difficilement.

Ce qui frappe c’est d’abord la solitude devant la mort, une certaine indifférence et surtout les mensonges de l’entourage, de la vie même. Ce récit poétique, c’est aussi une tentative pour Tolstoï d’essayer de donner un sens à la vie d’en percer le mystère. Que suis-je ? fut question obsédante dans son œuvre.





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Le peu de terre qu'il faut à l'homme

Un court récit mais excellent, qui traite de l'homme et de son éternelle insatisfaction à se contenter de ce qu'il a.

Une histoire que tout le monde devrait lire.
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